Ce projet de budget apporte incontestablement certaines réponses aux besoins particuliers des territoires d’outre-mer, et je m’associe à mes collègues ultramarins qui ont eu l’occasion de vous en féliciter, madame la ministre, au cours des débats parlementaires.
Je retiendrai dans ce projet de budget trois priorités.
La première concerne la nécessité vitale pour nos collectivités de soutenir l’emploi et les entreprises, qui souffrent encore plus durement outre-mer qu’en métropole des effets du ralentissement économique mondial.
La deuxième priorité porte sur les mesures en faveur du développement et de la formation des jeunes, pour contribuer au redressement des économies ultramarines et les accompagner à l’aide de nouveaux outils de développement.
La troisième priorité, enfin, vise à répondre aux besoins massifs de logements dans les territoires ultramarins, à l’aide de mesures favorisant l’accès à une palette de logements élargie, du très social jusqu’au logement intermédiaire, en passant par l’habitat dispersé, qui reste un domaine à consolider.
S’agissant de l’emploi, la compensation des exonérations de charges sociales constitue une nécessité vitale pour les économies des territoires ultramarins. En 2014, ce dispositif a été recentré sur les bas salaires, pour une économie estimée à 90 millions d’euros, et à 108 millions d’euros en régime de croisière. Par ailleurs, 1, 13 milliard d’euros sera consacré en 2015 à la compensation des exonérations de charges.
Une question demeure toutefois, celle de la dette de l’État vis-à-vis des organismes de sécurité sociale, qui s’élevait, en 2013, à 75, 5 millions d’euros. La réforme de 2014 devrait s’accompagner de mesures visant à apurer la dette antérieure ; vos rapporteurs resteront cependant vigilants sur cette question.
S’agissant des aides spécifiques aux entreprises, l’article 57 rattaché à la présente mission prévoit la suppression de l’aide à la rénovation hôtelière.
Le bilan de cette mesure montre que, depuis sa création, cette aide a été globalement peu utilisée à l’échelle de l’outre-mer par les entreprises hôtelières. Je proposerai donc d’adopter cet article sans modification.
Pour ce qui concerne la formation des jeunes ultramarins, celle-ci repose essentiellement sur le service militaire adapté, le SMA, et la formation en mobilité.
Le SMA constitue un incontestable succès : 76, 3 % des volontaires quittent ce dispositif avec un stage qualifiant ou un contrat, et je me félicite que l’objectif de 6 000 volontaires ait de bonnes chances d’être atteint en 2016.
La formation en mobilité s’appuie principalement sur trois dispositifs : le passeport-mobilité formation professionnelle, ainsi que les programmes « Cadre avenir » et « Cadres pour Wallis-et-Futuna ». Ces initiatives, bien qu’elles soient utiles, semblent toutefois limitées au regard des enjeux et devront être confortées par des dispositifs à plus large portée.
C’est un euphémisme que de dire que la crise du logement revêt une dimension particulière dans les territoires ultramarins : quelque 7 612 logements sociaux neufs ont été financés en 2013, quand il en faudrait 12 000 pour satisfaire les besoins. La stabilité des crédits de paiement de la ligne budgétaire unique à 247, 7 millions d’euros est une mesure de sauvegarde qu’il faut saluer, même si elle est loin d’être suffisante.
Cependant, au-delà de ces mesures de sauvegarde, le projet de budget qui nous est présenté comporte de graves lacunes, qui ne me permettent pas de le soutenir.
De fait, comme l’a souligné l’intergroupe parlementaire auquel je ne peux, bien évidemment, que m’associer, la hausse globale des crédits consacrés au financement de contrats de plan État-régions ne doit pas masquer certaines disparités. La Polynésie française verra ainsi le montant des autorisations d’engagement dédiées au financement de ces contrats diminuer de plus de 6 millions d’euros en 2015.
L’article 57 bis rattaché à la présente mission prévoit, de plus, la fixation dans la loi du montant de la dotation globale d’autonomie, la DGA, versée à la Polynésie française. Il entérine ainsi, pour l’avenir, une baisse significative de cette dotation, ce qui est un bien mauvais sort réservé à la Polynésie française au sein d’un budget présenté comme équitable entre les collectivités. C’est pourquoi, à titre de refus symbolique, j’ai appelé à voter contre cet article pour rouvrir la discussion entamée à l’Assemblée nationale sur le sujet, tout en sachant que nos marges de manœuvre étaient étroites.
Les filets de la nasse étant bien serrés, puisqu’il nous faudrait encore amputer les crédits du SMA, j’aurai l’occasion, mes chers collègues, de vous demander de revenir sur cette position de principe lors de la discussion de cet article.
Cette position en rejoint une autre à propos de la continuité territoriale, qui est un autre sujet de déception, sur lequel je partage les attentes de notre collègue Didier Robert. Pourtant, si je ne puis être favorable à une nouvelle ponction de 10 millions d’euros sur le SMA pour abonder les crédits de la continuité territoriale, je me félicite que la délégation sénatoriale aux outre-mer envisage de se saisir du dossier en 2015 pour formuler des propositions de révision d’une politique publique tellement importante pour les relations avec les collectivités ultramarines.
Enfin, je rappellerai que la mission « Outre-mer » a vu ses crédits diminuer de 4, 2 millions d’euros à l’issue des travaux de l’Assemblée nationale sur des programmes présentés, là encore, comme prioritaires.
Pour toutes ces raisons, je suis défavorable au projet de budget qui nous est présenté aujourd’hui.