Intervention de Didier Robert

Réunion du 28 novembre 2014 à 15h00
Loi de finances pour 2015 — Outre-mer

Photo de Didier RobertDidier Robert, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales :

La commission des affaires sociales a émis un avis favorable sur les crédits de la mission « Outre-mer », ainsi que sur les articles 57 et 57 bis qui lui sont rattachés, principalement afin d’ouvrir le débat sur les crédits relatifs à la continuité territoriale.

Elle n’a pu en effet qu’émettre plusieurs réserves importantes face au manque d’ambition du budget qui nous est proposé et qui ne peut en aucun cas permettre de préparer l’avenir dans des territoires pourtant particulièrement défavorisés.

Vous nous dites, madame la ministre, qu’il s’agit d’un budget « préservé ». Pour ma part, j’y vois d’abord un effort financier minimal de l’État envers les outre-mer, certes dans un contexte budgétaire contraint, mais qui reste insuffisant à répondre aux besoins. Après la baisse de crédits introduite à l’Assemblée nationale, et cela de manière cavalière et sans aucune évaluation préalable, je crois que l’outre-mer joue en définitive le rôle de variable d’ajustement dans ce budget 2015. Nous avons au total une « variation » des crédits de + 0, 1 % : c’est en réalité, vous en conviendrez, à peine une stagnation, si l’on tient compte de l’inflation.

Je ne reviendrai cependant pas en détail sur la présentation des crédits, qui nous a été excellemment faite par nos collègues de la commission des finances, et je concentrerai mon propos sur les éléments qui ont justifié les réserves de la commission des affaires sociales. Ils sont de deux ordres.

S’agissant tout d’abord du logement, je dois dire, madame la ministre, que je peine à trouver dans ce budget la traduction concrète et financière de votre « ambition pour l’habitat outre-mer ». La question est pourtant primordiale, tant les besoins, notamment en matière de logement social – le problème est connu –, sont immenses. Toutefois, je voudrais aussi insister sur les insuffisances s’agissant de la réhabilitation du parc de logements, notamment de la résorption de l’habitat insalubre. Il faut bien avoir en tête que, à Mayotte, par exemple, plus de 50 000 personnes vivent encore dans des cases insalubres en « non dur ».

Face à cette situation, on nous indique que la mise en œuvre du plan pluriannuel pour le logement social pour les outre-mer ne mobilisera pas d’autres instruments budgétaires que ceux dont nous disposons déjà, à savoir la LBU, dont les crédits ne progressent pourtant pas cette année. On nous dit également que les opérations de réhabilitation du parc de logements anciens reposent en partie sur une éventuelle utilisation des « crédits restants » à la fin d’un exercice. Je pose donc la question de la réalité de la prise en compte des besoins dans les outre-mer.

J’en viens maintenant à la continuité territoriale, qui subit cette année une baisse de 20 % de ses crédits, soit 10 millions d’euros. Je voudrais tout d’abord rappeler l’importance de ce dispositif, qui constitue la traduction des principes d’égalité des droits, de solidarité nationale et d’unité de la République. Par nature, il devrait donc être considéré comme universel et pouvoir bénéficier le plus largement possible aux Ultramarins.

Compte tenu de ces principes, la réforme de l’aide à la continuité territoriale que vous nous proposez, madame la ministre, ne me paraît pas acceptable. Je passe sur la méthode employée, quoique je déplore le manque de concertation réelle et le flou artistique entourant encore ces modifications importantes. Je relève surtout que les crédits alloués aujourd’hui sont déjà insuffisants au regard des objectifs.

Je note également que, loin de constituer des voyages de confort, les déplacements effectués grâce à l’ACT répondent le plus souvent à des impératifs familiaux.

Je rappelle enfin que l’effort financier est largement partagé entre l’État et les collectivités territoriales. Ce sont d’ailleurs ces dernières, madame la ministre, qui prendraient en charge les déplacements effectués par des familles dont le quotient familial serait compris entre 11 000 euros et 26 000 euros, comme c’est le cas à La Réunion. Je regrette à ce stade la présentation caricaturale qui a pu être faite du dispositif. Le critère du quotient familial, vous le savez, a été justement retenu pour tenir compte de la situation particulière de chaque famille.

La DEGEOM, la délégation générale à l’outre-mer, nous indique qu’il est indispensable de contenir une dépense qui serait, selon les termes employés, « en explosion ». Or la réalité est bien celle d’une baisse continue des crédits, d’année en année, pour ce qui concerne la part de l’État : 55, 2 millions d’euros en 2013, quelque 51, 4 millions d’euros en 2014 et une proposition de 41, 1 millions d’euros pour 2015.

Et si je rapproche cette participation de l’État des 187 millions d’euros versés à la Corse chaque année au titre de la continuité territoriale, vous comprendrez aisément la colère légitime, nourrie par le sentiment d’une terrible injustice, des populations d’outre-mer sur cette question.

Pour tenir compte de ces observations, la commission des affaires sociales a adopté, sur ma proposition, un amendement visant à reconduire pour 2015 les crédits relatifs à la continuité territoriale à la hauteur de ceux qui étaient ouverts en 2014. C’est là une mesure aussi minimale qu’indispensable, qui ne peut qu’être temporaire, en attendant la mise en place d’une véritable politique de continuité territoriale pour l’ensemble des territoires d’outre-mer.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion