Monsieur le président, madame la ministre, madame, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, l’examen du budget du ministère des outre-mer, qui nous réunit aujourd’hui, est l’occasion pour nous, parlementaires ultramarins, d’évoquer avec solennité la situation de nos territoires.
Je voudrais à ce titre, madame la ministre, insister sur le contexte économique et social particulier de nos outre-mer, et notamment de La Réunion. Sur notre île, le taux de chômage est extrêmement préoccupant, puisqu’il est proche de 30 % et qu’il frappe près de 60 % des 15-24 ans, qui sont donc coupés du marché du travail. Ces chiffres sont les plus élevés d’Europe !
Créer des emplois durables, c’est-à-dire des emplois dans les entreprises, est plus que jamais indispensable, bien plus que ces emplois d’avenir, contrats aidés, précaires, et dont l’avenir est malheureusement incertain. Pourtant, dans un contexte général de faible compétitivité et d’accumulation des déficits, avec une économie qui tourne au ralenti, la confiance des acteurs économiques n’est pas là. Ils ne peuvent donc ni investir ni embaucher. C’est encore une fois le chômage qui gagne !
Aussi, face à ce tableau déjà sombre, la décision de l’exécutif de réduire les dotations de l’État aux collectivités locales va non seulement placer celles-ci face à des difficultés financières majeures, mais va aussi emporter des conséquences en termes d’investissements et donc d’emploi.
Aussi, j’aimerais vous alerter sur les conséquences de la décision de baisser la dotation générale de fonctionnement, la DGF, même si notre assemblée en a minoré l’ampleur. D’ailleurs, il n’est pas inutile de rappeler que la DGF n’est pas une obole, mais une juste et nécessaire compensation des compétences transférées, dont le nombre ne cesse d’augmenter.
Vous avez décidé que les collectivités devront fonctionner avec 3, 7 milliards d’euros en moins en 2015, alors qu’une baisse de 1, 5 milliard d’euros est déjà intervenue en 2014. C’est d’autant plus alarmant que leurs charges augmentent, comme cela a été rappelé cette semaine dans cet hémicycle.
Vous n’êtes pas sans savoir que nos collectivités sont très sensibles à tout désengagement financier de l’État. Toute mesure prise au niveau national a encore plus d’écho dans nos territoires et peut rapidement menacer un équilibre économique précaire. Les collectivités n’auront donc pas d’autre choix que de sacrifier leurs dépenses d’investissement face à cette réduction drastique et inédite de leurs ressources.
Or une baisse de l’investissement des collectivités parallèle à celle des dotations et des recettes sera particulièrement préjudiciable à l’activité économique et donc à l’emploi dans nos territoires, notamment dans le secteur du BTP, dont le chiffre d’affaires est alimenté à près de 80 % par la commande publique à La Réunion.
La diminution des budgets locaux de fonctionnement menacera également le monde associatif et les services à la population, exposant ainsi des populations déjà fragiles, et pèsera sur l’entretien des différents équipements. Attention à ne pas menacer notre cohésion sociale ! À La Réunion, je le rappelle, la pauvreté touche 46 % de la population.
Je me devais d’aborder ces points ici, aujourd’hui, car ce sujet est vraiment alarmant pour les collectivités de La Réunion. Celles-ci subissent une triple peine : la baisse des dotations de fonctionnement, l’impossibilité d’augmenter la fiscalité locale du fait de l’overdose fiscale et une situation économique et sociale plus dégradée qu’en métropole.
En second point, je souhaite évoquer la question du traitement des déchets et de la préservation de l’environnement à La Réunion.
Alors que le Gouvernement promeut la réduction et la valorisation des déchets, notre île a en effet atteint une étape charnière pour mener à bien ses projets en la matière. Le contexte est tout à fait singulier dans la mesure où 80 % des déchets produits sont enfouis, sur un territoire insulaire de 2 500 kilomètres carrés.
Grâce à leur forte volonté d’action dans ce domaine, les collectivités ont réagi en créant un syndicat mixte de traitement des déchets prenant en charge 60 % des déchets du territoire de La Réunion et devant proposer à la population les outils performants de traitement du XXIe siècle. Des interrogations apparaissent néanmoins quant aux modalités de l’accompagnement de l’État en l’espèce. Celles-ci sont capitales pour l’avenir de la politique de gestion des déchets à La Réunion.
Les autorisations d’enfouissement prenant fin en 2015, où allons-nous ? Il n’y a aucune visibilité ! Quels seront les sites et les modèles retenus ? Quelle est la volonté du Gouvernement ?
L’État doit s’engager fermement en proposant un accompagnement fort, et doit s’impliquer aux côtés des collectivités locales et de leurs établissements en tenant compte des disparités territoriales et des difficultés insulaires. Cette filière est créatrice d’emplois et il est primordial que des solutions pérennes soient mises en œuvre.
Pour en revenir au budget de votre ministère, madame la ministre, il est vrai qu’il est globalement préservé. Les dotations de cette mission sont presque stables, avec des crédits de paiement qui augmentent de façon presque symbolique de 0, 3 % par rapport à 2014. Toutefois, cette mission ne représente que 15 % de l’ensemble des crédits de l’État à destination de l’outre-mer.
Les contraintes budgétaires déjà évoquées et la nécessité de maîtriser la dépense publique ne doivent pas occulter les mesures qui doivent être prises pour renforcer la compétitivité de nos territoires, surtout du fait de leur environnement régional.
Enfin, je regrette avec mon collègue Didier Robert la diminution des crédits affectés à la continuité territoriale. Je souhaite qu’un effort significatif de l’État soit engagé, afin de préserver ce dispositif ainsi que les dotations allouées au RSMA.
L’essentiel, vous l’aurez compris, est de redonner à nos territoires cette confiance qui manque tant !