Madame la ministre, je tiens, tout d’abord, à saluer le pari que vous avez réussi en maintenant globalement le niveau des crédits mobilisés dans le cadre de la mission « Outre-mer », dans le contexte de contraction du budget de la nation. Cela permet à l’outre-mer, mais, surtout, à la Guadeloupe, d’obtenir des réponses à deux questions prioritaires : le chômage des jeunes, avec la création de 6 000 postes pour les volontaires du SMA, et la sanctuarisation de la LBU, la ligne budgétaire unique, pour la construction de logements sociaux.
Cependant, je m’interroge sur le devenir de projets phares pour la Guadeloupe, pour lesquels aucune budgétisation n’est actuellement prévue, et le statu quo perdure d’année en année.
Oui, l’outre-mer entend prendre sa juste part à l’exercice de solidarité nationale auquel on ne peut se soustraire. Mais, dans le même temps, l’audace commande de tenir compte des difficultés auxquelles sont confrontées les collectivités locales, minées par des transferts de compétences mal compensés par l’État.
Aussi, il convient d’aborder les difficultés que rencontre le conseil général de Guadeloupe pour financer ses principales obligations sociales que sont l’APA, l’allocation personnalisée d’autonomie, et le RSA, le revenu de solidarité active.
Cela implique aussi de comprendre la nécessité de créer, en Guadeloupe, un fonds d’investissement destiné au rattrapage du retard des DOM en matière d’équipements structurants ; je veux parler des 300 millions d’euros nécessaires aux équipements pour le traitement des déchets ménagers et aux 400 millions d’euros indispensables à la réfection des canalisations d’eau potable qui correspondent à un engagement du gouvernement auquel vous appartenez, madame la ministre. Cet engagement a d’ailleurs été pris en Guadeloupe par les ministres concernés.
Pour la santé de nos compatriotes, l’audace et l’ambition commandent également de sanctuariser, une fois pour toutes, les 590 millions d’euros nécessaires à la reconstruction du CHU de Pointe-à-Pitre.
Sur ce point, je veux rappeler que ces crédits n’ont fait l’objet d’aucune inscription budgétaire, ni dans le cadre de la loi de finances initiale, ni dans celui de la loi de finances rectificative du projet de loi de financement de la sécurité sociale. De surcroît, l’examen du projet inscrit à l’ordre du jour du COPERMO, le 25 novembre dernier, à la suite des engagements pris par la ministre de la santé, lors de son nouveau déplacement en Guadeloupe en juillet dernier, a été une fois de plus reporté. Madame la ministre, c’est insupportable ! Quelle grande déception pour nous de constater que les engagements pris sur des questions aussi importantes que la santé de nos populations ne sont pas suivis d’effets !
Nous attendons de votre part, en votre qualité de ministre des outre-mer – nous le savons, la santé ne relève pas de votre compétence –, un soutien sans faille et un engagement fort auprès du Gouvernement pour faire en sorte que ce projet de reconstruction, dont la nécessité et l’urgence ont été confirmées il y a quelques mois par la Haute Autorité de santé, fasse l’objet d’une traduction budgétaire, dès 2015, à hauteur de 590 millions d’euros. De même, nous attendons qu’un COPERMO extraordinaire statue sur la validation du projet.
L’audace exige aussi, madame la ministre, de mieux cibler le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le CICE, en faisant en sorte qu’il soit davantage adapté à notre tissu économique, composé de très petites entreprises avec une faible masse salariale. Nous pourrions ainsi améliorer les effets sur le secteur marchand, en vue de créer davantage d’emplois dans le privé.
L’audace et la compréhension de la réalité de nos territoires impliquent, madame la ministre, de prendre toute la mesure des conséquences désastreuses de l’instauration d’un système de licence pour la vente au détail de tabac dans les départements d’outre-mer.
Vous n’êtes pas sans savoir que nous attendons toujours la publication du décret d’application du système instauré par la loi de finances de 2011. D’ailleurs, c’est heureux, puisque les conseils généraux de la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique et La Réunion ont adopté chacun une motion demandant la révision de ce dispositif, et ce pour plusieurs raisons.
Ici, madame la ministre, l’audace consisterait à accepter de surseoir à la mise en œuvre de cette réforme, conformément aux motions adoptées, je le répète, par plusieurs collectivités ultramarines.
L’audace, c’est tout mettre en œuvre pour développer des secteurs porteurs tels que ceux de l’agro-nutrition, des énergies renouvelables et de la biodiversité.
Enfin, l’audace consisterait à permettre, demain, aux Guadeloupéens de jeter collectivement, sans carcan ni limite, les bases d’un nouveau contrat social, en créant les conditions de l’évolution institutionnelle qu’une immense majorité de Guadeloupéens appelle de ses vœux.
Madame la ministre, en attendant vos réponses, je voterai le budget des Outre-mer.