Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les crédits du programme « Sécurité civile » de la mission « Sécurités » ne couvrent qu’une partie des moyens dédiés à la sécurité civile. S’agissant des moyens de l’État, ils forment 48 % des crédits de paiement de la politique transversale de sécurité civile.
Par ailleurs, le budget total des services départementaux d’incendie et de secours, les SDIS, atteint 4, 36 milliards d’euros dans les budgets primitifs pour 2014, soit cinq fois les crédits inscrits aux missions du budget de l’État. La politique de sécurité civile relève donc bien d’une responsabilité partagée. À cet égard, s’agissant de l’avenir des SDIS, vous avez confirmé, monsieur le ministre, lors du 121e congrès national des sapeurs-pompiers de France, le 4 octobre dernier, le rôle de l’échelon départemental, garant de la proximité, comme niveau d’organisation de la réponse opérationnelle. Peut-être pourriez-vous nous en dire davantage sur l’organisation future des SDIS et leurs perspectives de financement par l’État.
S’agissant du programme « Sécurité civile », les crédits de paiement proposés, à hauteur de 439, 55 millions d’euros, sont en hausse de 0, 6 % par rapport à 2014, sous l’effet d’une hausse des dépenses de personnel.
Le schéma d’emploi du programme traduit une diminution de 24 postes ou emplois équivalent temps plein. Malgré cette baisse, le projet de loi de finances propose une hausse de plus de 2 % des dépenses de personnel. En réalité, cette progression traduit la correction – attendue – d’une sous-budgétisation chronique des dépenses de personnel de la mission par rapport à l’exécution.
Cette année est marquée par la refonte et la simplification du dispositif de performance : cinq objectifs et neuf indicateurs sont proposés, au lieu de neuf objectifs et onze indicateurs dans le projet de loi de finances initiale pour 2014. Cette évolution tend à accroître la lisibilité des moyens dédiés à la politique de sécurité civile. Cependant, le changement d’indicateur mesurant la disponibilité des hélicoptères ne permet plus d’établir des comparaisons d’une année sur l’autre, alors qu’apparaissaient les conséquences néfastes du vieillissement de la flotte sur la performance. Avoir modifié cet indicateur apparaît comme une façon de « casser le thermomètre ».
S’agissant de la flotte d’aéronefs, le renouvellement de la composante aérienne de la sécurité civile, trop longtemps différé, devient urgent. Le remplacement des neuf Tracker, dédiés à l’attaque des feux naissants, est toujours prévu à l’horizon de 2020.
Dans les réponses au questionnaire budgétaire, vos services, monsieur le ministre, ont seulement indiqué que « la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises, la DGSCGC, remettrait des propositions techniques pour le renouvellement de la composante Tracker, en étudiant différents modèles économiques – achat, location... ». Or, comme le reconnaît la DGSCGC, « la flotte d’avions d’investigation et de coordination Beechcraft 200 est vieillissante – âge moyen vingt-sept ans – et confrontée à des obsolescences », mais des réponses semblent en mesure d’être apportées à court et moyen terme puisque, toujours selon le ministère de l’intérieur, « dans le cadre du nouveau marché de maintien en condition opérationnelle, une rénovation avionique est prévue qui permettra de prolonger leur durée de vie. L’équipement de deux des trois avions de la flotte en moyens optroniques permettra de moderniser l’approche des missions d’investigation feux de forêt et de développer de nouvelles missions subsidiaires au profit du ministère de l’intérieur ».
Dans l’immédiat, ces choix engendrent des dépenses de maintenance accrues. Il serait donc utile d’effectuer des simulations sur les surcoûts liés au maintien de la flotte actuelle, en termes de maintenance et de révision des appareils, et le coût de l’acquisition de nouveaux appareils, au regard de l’obsolescence des appareils et de la nécessité d’assurer le plus haut niveau de sécurité des pilotes.
Il conviendrait aussi d’envisager de développer les mutualisations dans le recours aux appareils de la flotte des hélicoptères, au sein du même ministère, avec les forces de police et de gendarmerie, ou au niveau interministériel, par exemple avec les acteurs de la santé publique, en prenant bien sûr en compte les différences d’usage.
Il pourrait ainsi être envisagé une flotte nationale unique regroupant l’ensemble des hélicoptères actuels de la sécurité civile, de la gendarmerie et du SAMU, en définissant chaque année le crédit d’heures qui serait alloué pour chacune des missions, ainsi que de prédéfinir les règles de priorité d’emploi entre ces différents services. Cette disposition présenterait l’avantage d’une homogénéité du parc aérien et donc une économie du coût de sa maintenance, ainsi qu’une optimisation de l’emploi opérationnel des vecteurs aériens.
Je voudrais enfin dire un mot du développement du projet ANTARES – Adaptation nationale des transmissions aux risques et aux secours –, qui vise une meilleure interopérabilité des systèmes de communication des forces de sécurité. D’ici à 2018, le coût total d’investissement s’élèvera à 118, 85 millions d’euros pour l’État. Le financement de l’investissement est partagé entre l’État, s’agissant du financement des infrastructures, et les SDIS, en ce qui concerne les postes mobiles et l’adaptation technique des dispositifs radio.
Au regard des investissements que doivent continuer à consentir les SDIS, il est regrettable que, depuis la loi de finances initiale pour 2013, il ne soit plus inscrit de crédits budgétaires en autorisations d’engagement au titre du Fonds d’aide à l’investissement instauré par l’article 129 de la loi de finances pour 2003, pour soutenir les SDIS dans leurs efforts d’investissement en équipements et en matériels. En effet, une partie importante des crédits du FAI concourait spécifiquement, depuis 2007, au financement du programme ANTARES.
En 2015 et 2016, le Gouvernement concentrera ses investissements sur la couverture par ANTARES de l’ensemble du territoire national, alors que le taux de couverture national du territoire, qui s’établirait à 95 %, pose toujours le problème de « zones blanches » non couvertes. Ce taux de couverture de 95 % correspond vraisemblablement aux résultats issus d’une modélisation de la couverture radio réalisée par l’emploi de modèles informatiques. Les mesures de couverture radio effectuées sur le terrain par certains SDIS font apparaître un taux de couverture du territoire sensiblement inférieur.
Il convient d’envisager des solutions techniques pour améliorer la couverture du territoire, tout en veillant à ce que leur coût ne soit pas excessif au regard de l’objectif poursuivi. À cette fin, je propose que soit créé un nouvel objectif de performance « Couverture optimale du territoire national par le réseau ANTARES en vue de la protection des populations », auquel serait associé un indicateur mesurant le pourcentage de la population couverte par le réseau, renseigné notamment par les résultats de mesures de couverture qui seraient réalisées sur le terrain.
Au final, et sous le bénéfice de ces observations, la commission des finances a décidé de proposer au Sénat d’adopter sans modification les crédits de la mission « Sécurités », qui correspond à la mise en œuvre d’une politique régalienne, y compris en ce qui concerne la sécurité civile.