Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, dans notre démocratie parlementaire, le vote du budget est un acte avant tout politique. L'appartenance à la majorité ou à l'opposition se détermine lors de ce vote. J'affirme donc très clairement et sans ambiguïté que je voterai ce budget pour attester mon appartenance à la majorité. §
Mais s'il s'agissait seulement du budget, s'il s'agissait seulement d'approuver vos comptes, vos prévisions, votre politique financière et budgétaire, monsieur le ministre, j'aurais peut-être beaucoup plus de mal à le voter.
Le projet de loi de finances pour 2006 est en effet particulièrement peu convaincant. Vous affirmez que vos priorités sont l'emploi, la restauration de l'État régalien et la préparation de la France aux défis de l'avenir.
Concernant l'emploi, les politiques d'aides publiques mises en oeuvre depuis des décennies ne produisent que des résultats mitigés alors qu'elles pèsent sur les prélèvements obligatoires, que vous allez encore augmenter. La restauration de l'État régalien est invisible dans le domaine financier : on constate surtout l'absence de maîtrise de la dépense publique. Enfin, l'accroissement inacceptable de la dette est un danger pour la France face aux défis de l'avenir.
Votre projet de budget procède de bonnes intentions, telle la réforme de l'impôt sur le revenu... qui est remise à plus tard, à 2007. On est loin de l'engagement d'une baisse de 30 % durant la mandature. Cette diminution n'était pas seulement une promesse, c'était un moyen de créer durablement des emplois, c'était le signe fort d'un changement de politique.
Pendant des années, les gouvernements ont essayé de développer l'emploi soit par des politiques inspirées du collectivisme, soit par des politiques d'aides publiques inspirées du jacobinisme ou du colbertisme. Ces tentatives se sont soldées par des échecs. Notre pays connaît aujourd'hui l'un des taux de chômage les plus importants d'Europe. L'Espagne et l'Italie, partis d'une situation plus difficile, font mieux que nous. Seule parmi les grands pays européens, la Pologne est dans une situation plus pénible.
En nous orientant vers la baisse de la fiscalité, nous commencions seulement à nous convaincre que les emplois et la croissance ont un lien avec le taux des prélèvements obligatoires. Pourtant, les Français verront ces prélèvements obligatoires augmenter pour atteindre 44 % du PIB, faisant de notre fiscalité l'une des plus punitives dans les pays industrialisés.
Toujours pour ce qui concerne les prélèvements obligatoires, notre PIB accuse un différentiel de 5 % à 6 % avec nos principaux partenaires, soit près de deux fois notre déficit budgétaire. Le meilleur moyen d'augmenter le pouvoir d'achat des Français et d'améliorer la compétitivité de nos entreprises, monsieur le ministre, c'est de leur rendre ce différentiel, c'est de leur rendre ce pouvoir d'achat. Dans aucun pays au monde les collectivités territoriales n'ont été plus performantes pour créer des emplois que les entreprises et les travailleurs indépendants.
Monsieur le ministre, votre tâche était de réduire ce différentiel, ainsi - j'y viendrai - que le déficit budgétaire. On aurait pu espérer que vous réussiriez au moins l'un ou l'autre de ces deux objectifs, mais je crains que vous n'en ayez atteint aucun.
Vous ne pouvez pas y arriver sans maîtriser la dépense publique.
Je suis très étonné et attristé de constater que vous considérez comme une victoire le fait que, pour la quatrième année consécutive, les dépenses de l'État augmentent moins vite que l'inflation, alors qu'elles continuent néanmoins à croître en valeur.
En France, les dépenses publiques représentent 54 % du PIB, soit douze points de plus qu'en Grande-Bretagne, quatre points de plus qu'en Allemagne, cinq points de plus qu'en Italie.
Là encore, dans tous les cas de figure, le différentiel est supérieur à notre déficit budgétaire. Ce seul constat devrait nous démontrer que le chemin vers un budget vertueux est possible, qu'il a été emprunté résolument par de nombreux pays qui pratiquent une politique de prélèvements obligatoires aussi importante que la nôtre. Ainsi, en dix ans, la Suède a réduit de 10 % ses dépenses publiques, sans pour autant obérer les budgets de la santé et de l'éducation.