La séance, suspendue à treize heures cinq, est reprise à quinze heures vingt.
La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi de finances pour 2006.
J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :
Groupe Union pour un mouvement populaire, 106 minutes ;
Groupe socialiste, 68 minutes ;
Groupe Union centriste-UDF, 26 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 20 minutes ;
Groupe du Rassemblement démocratique et social européen, 15 minutes ;
Réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe, 10 minutes.
Mes chers collègues, je vous rappelle que, en application des décisions de la conférence des présidents, aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes. J'invite chacun à respecter cette recommandation ! Quoi qu'il en soit, je serai vigilant sur ce point !
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Jean-Jacques Jégou.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, au risque de paraître redondant par rapport à ce qui a été très bien dit ce matin, je tiens tout d'abord à me réjouir de la discussion, aujourd'hui, de la première loi de finances « lolfienne ». Nous attendons en effet beaucoup de cette nouvelle nomenclature budgétaire, notamment en termes de transparence et d'outil de contrôle d'une dépense qui sera peut-être, enfin, au service de l'efficacité.
Alors que je suis dans cet état d'esprit, monsieur le ministre, et que j'interviens au nom de mon groupe, à la suite du vote des députés UDF, je ne voudrais pas que vous ne vous posiez qu'une seule question, à savoir si nous sommes, oui ou non, toujours dans la majorité.
Ce serait faire peu de cas de l'implication des parlementaires UDF dans l'examen du projet de loi de finances pour 2006 et du débat de fond qu'ils ont souhaité lancer face à la situation catastrophique des finances publiques de la France et du peu d'espoir d'amélioration pour 2006.
En effet, mes chers collègues, la situation financière de notre pays est grave. Je ne citerai que quelques chiffres pour prendre la mesure de ce naufrage financier : une dette de l'État qui continue à se creuser, pour atteindre 1 162 milliards d'euros, soit 66 % de la richesse nationale ; un déficit des finances publiques s'élevant à 46, 8 milliards d'euros ; des prélèvements obligatoires qui ne cessent de progresser et qui représentent aujourd'hui 44 % du PIB ; une croissance des dépenses de l'État toujours supérieure à celle de la progression de la richesse nationale.
Ces indicateurs clés du projet de loi de finances pour 2006 me conduisent à nouveau à m'interroger sur le désormais triste privilège des parlementaires français de voter, année après année, des budgets déficitaires, qu'il s'agisse de celui de l'État ou de celui de la sécurité sociale, et d'être mis en demeure de reporter systématiquement les défauts de gestion sur les générations futures.
J'entrerai maintenant dans le vif du sujet. Le projet de loi de finances pour 2006 me paraît souffrir de deux défauts majeurs : il ne propose pas de vision politique à long terme et il est inefficace d'un point de vue économique.
Le manque d'ambition politique de ce texte se traduit par une présentation fallacieuse, qui vise à minimiser la croissance des dépenses et à surestimer les recettes.
Le déficit structurel est ainsi réduit de façon artificielle. M. le rapporteur général l'a dénoncé dans son rapport, la baisse du déficit structurel, qui permettrait d'anticiper à long terme la diminution de la dette publique, n'est qu'« un phénomène optique, résultant de l'élasticité prévisionnelle des recettes des administrations publiques au PIB particulièrement élevée en 2006 ». Après correction, la réduction du déficit structurel serait non pas de 0, 5 point de PIB, comme vous l'annoncez, monsieur le ministre, mais de 0, 1 point seulement, ce qui ne témoigne guère d'un volontarisme percutant, s'agissant de votre politique budgétaire, à moins que ce ne soit la marque d'un oubli intentionnel des règles de base d'une bonne gestion.
C'est ainsi que certains de vos allégements fiscaux ne seront pas financés par des diminutions de dépenses. Leur coût est de 4 milliards d'euros cette année, alors que les prévisions de recettes sont très optimistes et que le niveau de la dépense publique est très soutenu. Ce montant atteindra 6, 5 milliards d'euros en 2007, alors que la baisse des impôts n'est pas gagée. On peut donc déjà apprécier de quelles marges de manoeuvre vous disposerez lors de l'élaboration du projet de loi de finances pour 2007 !
Les objectifs de dépenses ne sont donc pas du tout contraignants. Le Gouvernement se contente de nouveau de stabiliser les dépenses en volume alors que les parlementaires réclament chaque année un effort supplémentaire afin qu'elles soient également stabilisées en valeur.
Le projet de suppression de 5 700 emplois dans la fonction publique est ridicule lorsqu'on sait que 65 000 fonctionnaires, sur un total de 2, 3 millions de personnes - excusez du peu ! -, partent chaque année à la retraite !
Cela nous promet un débat intéressant, au cours de la discussion thématique que nous allons entreprendre.
Qui plus est, l'objectif « zéro volume » n'est atteint que par une présentation en trompe-l'oeil, laquelle vise à dissimuler une croissance des dépenses de plus de 4 %. Les transferts d'allégements de charges sociales vers les organismes de sécurité sociale ou les prélèvements sur recettes - appellation pudique de ce qui constitue, en fait, des dépenses - au profit du budget européen ou des collectivités locales en sont, parmi bien d'autres, des exemples.
Enfin, monsieur le ministre, si la situation n'était pas aussi dramatique, on pourrait sourire, s'agissant du FFIPSA, le fonds de financement des prestations sociales des non-salariés agricoles, de la « danse du ventre » du Gouvernement, qui s'acharne à le financer sur ses marges de manoeuvre. Or nous savons très bien que ces dernières n'existent plus, même après l'examen du projet de loi de finances par l'Assemblée nationale, puisque le déficit a été augmenté.
En ce qui concerne les recettes, les prévisions sont bien optimistes, même si un redressement de la croissance semble se profiler, ce dont nous sommes heureux sur toutes les travées, quelles que soient nos convictions. Je ne souhaite pas polémiquer sur les hypothèses de croissance que vous avez retenues, monsieur le ministre. Chacun espère que le taux de 2, 25 % sera atteint, et si possible dépassé. Mais sachant combien les recettes sont élastiques à ce niveau de croissance, permettez-moi d'émettre tout de même quelques doutes sur un optimisme qui ne règle rien et qui, au contraire, fragilise la loi de finances.
Quand je parle de surestimation des recettes, voire d'insincérité, je pense aussi aux recettes non fiscales, qui sont d'autant plus dangereuses pour l'équilibre du budget qu'elles sont par définition non récurrentes ! C'est là l'expression d'un État qui est aux abois et se trouve réduit aux expédients. Il est à la fois dépensier avant d'être gestionnaire, prédateur avant d'être actionnaire et peu fiable avec ses principaux partenaires économiques.
Le budget n'est bouclé que par des hold-up successifs : augmentation des prélèvements sur les dividendes versés par les entreprises publiques - EDF, Banque de France, France Télécom -, prélèvement sur les fonds d'épargne versés par la Caisse des dépôts et consignations et véritable casse opéré sur le Fonds de garantie de l'accession sociale, le FGAS, et les sociétés autoroutières. Vous tirez même sur les ambulances en exigeant le reversement de plus-values de cession d'actifs de Réseau Ferré de France, RFF, société de « défaisance » de la SNCF déjà noyée sous sa propre dette !
Dans ces conditions, monsieur le ministre, comment interpréter la leçon de bonne gestion que vous entendez infliger aux collectivités locales par une réforme fiscale contestable, pour le moins inattendue, voire paradoxale ? On demande aux collectivités locales de gérer et de financer de plus en plus de politiques à la place de l'État et, dans le même temps, on essaie de récupérer de l'argent sur leur dos par tous les moyens.
Qui plus est, le Président de la République se paie une promesse personnelle que l'État n'a pas aujourd'hui les moyens de financer.
Il s'agit du foncier non bâti, mon cher collègue !
Le plafonnement à 3, 5 % de la taxe professionnelle est un bon principe en soi. Responsabilisant pour les collectivités locales, il est aussi un signe en faveur des entreprises. Tout cela est clair. Seulement, force est de constater qu'il prive les collectivités locales, à l'aveugle, de ressources importantes, qu'il diminue le peu d'autonomie qui leur restait et qu'il récompense les collectivités qui ont été les moins vertueuses depuis quelques années !
Je n'ai pas le temps d'aborder en cet instant la réforme de la dotation globale d'équipement, la DGE, à laquelle l'UDF s'oppose vivement.
Autant dire que les débats sur ces questions seront vifs et que nous attendons, monsieur le ministre, de vraies réponses à ces sujets.
Concernant l'autre volet de la réforme fiscale, la réforme de l'impôt sur le revenu me paraît injuste socialement, à moins que nous n'ayons une conception différente, monsieur le ministre, de la définition des classes moyennes. Par certains côtés, cette réforme est aussi inefficace économiquement. Et déjà, elle est payée à crédit.
L'intégration de l'abattement de 20 % dans l'assiette conduit à faire un cadeau à ceux qui n'en bénéficiaient pas auparavant, à savoir les contribuables les plus aisés.
Le bouclier fiscal esquive le débat que nous attendions tant sur l'impôt de solidarité sur la fortune, l'ISF, cet impôt anti-économique. Surtout, il ne résout en rien les injustices liées à la hausse des prix de l'immobilier. De plus, pour un coût total estimé à 400 millions d'euros, il ne touchera que 93 000 contribuables, dont 14 000 assujettis à l'ISF qui bénéficieront à eux seuls des deux tiers de cette somme.
Enfin, le plafonnement des niches fiscales est extrêmement discutable, non pas sur le fond, mais sur la forme. En effet, la plupart des niches échapperont à ce plafonnement qui ne devrait concerner que 10 000 contribuables.
À propos de plafonnement, pourquoi ne pas avoir mené une réflexion impôt par impôt et niche par niche ? En effet, à quoi sert finalement une niche fiscale ? Ce n'est rien d'autre qu'un dispositif dérogatoire incitatif, l'outil d'une politique particulière, dans un contexte particulier, à un moment particulier !
On a bien compris, de toute façon !
Toute la contradiction est là ! Aujourd'hui, la règle est non plus le dispositif législatif, mais son système dérogatoire.
Nul gain, donc, en termes d'efficacité ! S'il y a aujourd'hui un consensus sur le fait que la priorité des priorités est l'emploi, je regrette que le présent projet de loi de finances ne s'attaque pas au coût du travail.
Je termine, monsieur le président.
Enfin, je veux vous dire, monsieur le ministre, dans la plus grande sérénité, que ce qui nous éloigne, nous, membres du groupe UC-UDF du Gouvernement, c'est le choix qu'a fait ce dernier, depuis juin 2002, de ne pas considérer les Français comme des citoyens responsables. Ne pas exprimer la réalité des problèmes est un mauvais choix.
Pour l'UDF, c'est non seulement mentir à nos compatriotes, mais de surcroît accepter de plonger la France dans l'immobilisme en n'impulsant pas les réformes nécessaires, qui ont pourtant déjà été réalisées par la plupart de nos partenaires européens.
Cet attentisme hypothèque l'avenir de nos enfants, qui ne tarderont pas à reprocher à notre génération le poids de ses errements en matière budgétaire, en ce qui concerne tant le budget de l'Etat que celui de la sécurité sociale.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous examinons aujourd'hui pratiquement le même projet de budget que celui qui a été présenté à nos collègues députés voilà un mois. Comme si, en un mois, il ne s'était rien passé...
Et pourtant, les plus hautes autorités de l'Etat ont parlé de « crise grave » dans notre pays, d'« événements révélateurs d'un malaise profond » et ont souligné l'urgence de la situation.
On pouvait donc s'attendre à ce que le projet de budget pour 2006 tire les premières conséquences de ce malaise profond. Or, aucune mesure n'apporte une amorce de réponse, sinon quelques redéploiements de crédits, ici ou là, au sein d'une mission...
Ainsi, pour l'éducation nationale, 40 millions d'euros seulement sont redéployés, alors que l'éducation et la formation figurent, par définition, parmi les éléments les plus forts de l'égalité des chances dans notre pays !
Donc, de par votre volonté, on fait comme si rien ne s'était passé, et nous débattons par conséquent du même projet de loi de finances pour 2006
Dans quelle situation nous trouvons-nous ?
La croissance, qui n'a jamais retrouvé les niveaux atteints sous le dernier gouvernement de la gauche, stagne dans un environnement international pourtant favorable. Il paraît loin le temps où notre pays se situait à cet égard au-dessus de la moyenne des pays européens !
L'investissement des entreprises n'augmente pas.
L'inflation présente un risque évident de redémarrage, notamment à cause de la hausse du prix du pétrole ; mais le Gouvernement continue de refuser le rétablissement de la TIPP flottante, qui avait pourtant des vertus reconnues au regard tant des prix que de la consommation.
L'emploi salarié stagne également ; malgré les fanfaronnades, aucun emploi n'est créé dans le secteur privé.
Le pouvoir d'achat recule pour beaucoup de nos compatriotes. La consommation des ménages baisse - l'indice d'octobre affichait moins 0, 7 % -, hors périodes de solde.
Le taux de chômage ne diminue pas, sauf de façon optique, avec l'évolution démographique, les radiations effectuées « à la hussarde » sur les listes de l'Agence nationale pour l'emploi et la résurgence discrète des emplois aidés, que vous aviez d'ailleurs tant critiqués !
La France a renoué avec le déficit des transactions courantes en 2004, pour la première fois depuis 1991, et la tendance perdure.
En 2006, alors que la prévision de croissance est plus forte que celle de 2005 - tout en restant inférieure à la moyenne mondiale -, le déficit budgétaire devrait se creuser de plusieurs milliards d'euros et les prélèvements obligatoires devraient augmenter de près de 30 milliards d'euros, pour représenter plus de 44 % du PIB, et tout cela malgré de substantielles réductions d'impôts.
Le poids de la dette s'est fortement accru depuis 2002, pour atteindre 66 % du PIB, en dépit des taux d'intérêt très bas.
Enfin, n'étant pas maîtrisée, la dépense publique a augmenté par rapport au PIB, alors même que les besoins publics sont de moins en moins couverts et que les politiques publiques sont de plus en plus remises en cause. Quelle contradiction !
La triste réalité, c'est que ce budget est insincère
M. le ministre délégué rit
Vous voyez que je vous connais bien !
... injuste et inefficace.
Il est insincère, car il est construit sur des hypothèses économiques irréalistes et sur une norme de progression de la dépense artificiellement respectée.
Selon le Gouvernement, en 2006, la croissance devrait s'établir à 2, 25 % et le déficit public à 2, 9 % du PIB. Mais l'ensemble des économistes tablent sur une croissance de 1, 8 % seulement et sur un déficit public s'élevant à 3, 5 % du PIB. Cette appréciation est d'ailleurs partagée au sein même de votre majorité.
Je sais bien, monsieur le ministre, que les chiffres du troisième trimestre sont là, mais un trimestre ne fait pas le printemps !
Ce projet de loi de finances est peu conforme aux principes de vérité et de sincérité.
Il prévoit une débudgétisation massive de dépenses - cela a été rappelé, ce matin, par M. le président de la commission des finances et par M. le rapporteur général -, dont 19 milliards d'euros de dépenses liées à la compensation des allégements de cotisations sociales, pour faire croire au respect de la norme de progression de la dépense. Cette norme, dite « zéro volume », est en réalité un attrape-nigaud ! Sans les nombreuses mesures de débudgétisations contenues dans ce projet de loi de finances, la progression de la dépense serait très supérieure !
Je pense également à la transformation de dépenses budgétaires en dépenses fiscales. Les transformations de l'an dernier produisent leur effet budgétaire cette année, privant l'État de recettes fiscales et minorant d'autant les dépenses. La seule transformation du prêt à taux zéro en crédit d'impôt représente 500 millions d'euros !
Par ailleurs, la privatisation des autoroutes, refusée l'an dernier par l'Assemblée nationale, permet d'améliorer la présentation du budget cette année.
Les finances locales sont devenues des variables d'ajustement des finances de l'État ! Ce dernier ne respecte pas ses engagements à l'euro près à l'égard des départements. Les régions, elles, souffrent d'avoir « mal » voté en 2004 ! Et le bouclier fiscal aggravera cette dérive, notamment pour les communes.
Merci, monsieur Fourcade, d'approuver mon propos !
Les recettes exceptionnelles, dites recettes de poche, ont été multipliées dans ce budget. Les entreprises publiques ou celles dans lesquelles l'État détient une participation ont engendré un résultat net de 7, 6 milliards d'euros : le Gouvernement se sert dans la caisse, puisque les recettes liées aux participations de l'État augmentent de 1, 8 milliard d'euros, dont un prélèvement exceptionnel sur EDF de 688 millions d'euros !
D'autres prélèvements exceptionnels sont prévus, tels que, par exemple, ceux qui sont opérés sur le fonds de garantie à l'accession sociale, le FGAS, Réseau ferré de France et également, à hauteur de presque 1 milliard d'euros, sur les sociétés autoroutières. Ils totalisent près de 3, 35 milliards d'euros, c'est-à-dire près de la moitié du résultat total des entreprises publiques.
Lorsqu'ils touchent le FGAS, ces prélèvements menacent le financement du logement social et augurent de l'absence des moyens budgétaires que le Gouvernement prétend mettre en oeuvre pour mener sa politique du logement.
Lorsqu'ils concernent EDF ou les sociétés autoroutières, ces prélèvements témoignent de l'irresponsabilité de ce même gouvernement, qui s'apprête à privatiser - donc à démanteler - deux piliers du développement économique français fondés, l'un, sur une énergie indépendante, peu coûteuse et moins polluante, l'autre, sur des infrastructures routières de qualité, élément incontestable de l'attractivité de notre territoire. En privatisant à bas prix les autoroutes, le Gouvernement privera durablement l'État de recettes importantes, à seule fin d'améliorer la présentation du présent projet de loi de finances !
Par ailleurs, ce budget est injuste : les mesures fiscales prévues pour 2006 et, plus encore, pour 2007, dans le cadre de votre fameuse « réforme fiscale », sont particulièrement contraires à la justice.
La progressivité de l'impôt, emblème du pacte républicain, recule et, partant, contredit toute ambition de redistribution. Ce recul indique que le Gouvernement et sa majorité sont désormais ouvertement opposés à ce que l'on appelait encore, il n'y a pas si longtemps, le « partage des fruits de la croissance », qui faisait référence à une certaine notion d'équité !
Aujourd'hui, les plus favorisés se protègent des rigueurs du fisc par un bouclier fiscal, au bénéfice des fortunes les plus taxées au titre de l'ISF. Or, un bouclier fiscal digne de ce nom devrait avoir pour objet de défendre la cohésion de notre nation, menacée par les égoïsmes, la pauvreté et la misère qui délitent lentement, mais sûrement, le corps social de notre pays.
Pourtant, en ces temps de « vaches maigres », le flot des cadeaux aux plus aisés ne s'arrête pas : accélération du rythme des donations en franchise de droits, abaissement de l'âge du donateur pour le bénéfice de réductions de droits, instauration d'un abattement sur les donations au sein d'une fratrie - et maintenant au profit des neveux ou nièces -, création d'un allégement de taxe sur le foncier bâti, à la suite d'une mobilité professionnelle, allégement du foncier non bâti pour les exploitants agricoles, faux plafonnement des niches consistant en réalité à en sanctuariser certaines, prorogation des niches fiscales ciblées, crédit d'impôt pour l'acquisition d'un véhicule propre, majoration du crédit d'impôt pour les dépenses d'équipement.
Alors que, pour 90 % des foyers, la charge des prélèvements sociaux est supérieure à celle de l'impôt sur le revenu, le Gouvernement a décidé de baisser l'impôt sur le revenu et l'impôt de solidarité sur la fortune, et d'augmenter les prélèvements sociaux !
Les plus hauts revenus sont en réalité les gagnants de la réforme projetée. Et les réductions de quelques euros qui pourront concerner certains ménages modestes sont peu de chose par rapport aux milliers, voire aux dizaines de milliers d'euros que pourront percevoir en plus les contribuables qui relèvent des tranches supérieures de l'impôt sur le revenu et de l'impôt de solidarité sur la fortune !
Dans le même esprit, le Gouvernement tend à faire croire aux Français qu'ils seront nombreux à profiter du plafonnement appelé « bouclier fiscal » alors qu'en réalité, en dehors de cas exceptionnels, seuls quelques milliers de contribuables fortunés assujettis à l'ISF sont concernés, en fait les propriétaires d'une fortune supérieure à 5 millions d'euros ! Ce « bouclier fiscal » n'est en fait qu'un moyen détourné de toucher à l'ISF !
Le plafonnement de l'impôt à 60 % des revenus ne devrait profiter, semble-t-il, qu'à 93 000 contribuables. Et comment s'articuleront entre elles les mesures de plafonnement des niches fiscales et celles de plafonnement de l'impôt à 60 % ? Plafonnera-t-on d'abord les niches et ensuite l'impôt ? Ou le contraire ?
Dans le même temps, alors que le montant minimal de la prime pour l'emploi est de 25 euros, le Gouvernement propose de ne pas la verser à ses bénéficiaires si son montant est inférieur à 30 euros. Combien de personnes risquent de perdre cette aide bien modeste ?
Enfin, ce budget est inefficace.
En effet, avec ce projet de loi de finances, le Gouvernement prive le budget de l'État de recettes fiscales nécessaires au financement des politiques publiques. Ainsi, outre la diminution de l'impôt sur le revenu et de l'ISF, le Gouvernement va priver cette année l'État de plus de 20 milliards d'euros de recettes fiscales en les transférant à d'autres opérateurs tels que la sécurité sociale, l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, l'ADEME, le Conservatoire du littoral, les collectivités locales, etc. C'est à un véritable démantèlement de l'État que l'on assiste !
Par ailleurs, en ne cessant de procéder à des régulations budgétaires massives, qui portent sur les dépenses d'investissement, les derniers gouvernements, sous la présidence de Jacques Chirac, ont contribué à affaiblir la France. Doit-on dès lors s'étonner de la perte de compétitivité de notre économie ?
Enfin, alors que la consommation est le meilleur moteur de la croissance, peut-on croire qu'elle puisse être stimulée par les cadeaux fiscaux offerts aux plus aisés, dont la consommation, elle, n'a pas besoin d'être stimulée ; les cadeaux fiscaux ont plutôt tendance à favoriser l'épargne de ces personnes ! Doit-on s'étonner de notre perte d'attractivité ?
J'en viens à ma conclusion sans pouvoir parler de l'Europe, puisque mon temps de parole est épuisé : monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, notre jugement sur ce budget est tellement négatif que, sans prendre de risque, je pense pouvoir annoncer dès maintenant que nous ne le voterons pas ! §
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce matin, M. Thierry Breton en nous présentant son budget l'a qualifié de responsable, sincère et transparent.
À sa suite, le rapporteur général, Philippe Marini, a parlé de modestie, d'ambition et de courage.
Pour ce qui me concerne, et dans la même veine, je dirai que ce projet de budget pour 2006 est volontariste, cohérent et responsable.
Murmures sur les travées du groupe socialiste.
Il est volontariste par ses prévisions de croissance qui sont, il est vrai, supérieures au consensus des conjoncturistes.
Je voudrais, à cet égard, faire deux remarques.
Tout d'abord, les experts n'ont pas toujours raison, sinon ils ne seraient probablement pas experts.
Sourires
Ensuite, j'aimerais qu'on me cite un gouvernement qui, présentant un budget, n'a pas cherché à lui donner une ambition en lui fixant une prévision de croissance la plus volontariste possible. Je me souviens en particulier des prévisions de croissance pour le budget de 1993, seule année où la croissance a été négative, et pour celui de 2002.
Le projet de loi de finances pour 2006 est responsable, car il stabilise les dépenses de l'État en volume - cela a été dit ce matin - et il vise à faire repasser le déficit public sous la barre des 3 % du PIB.
J'ai bien entendu M. le ministre de l'économie et des finances ce matin : à propos du rappel effectué par la Commission européenne, il nous a confirmé la détermination du Gouvernement à tenir sur ce point ses engagements nationaux.
Ce budget poursuit également l'effort entamé depuis 2002 pour restaurer l'État régalien.
Il traduit aussi les efforts annoncés en faveur de la recherche, de l'innovation et des infrastructures.
Les collectivités locales bénéficieront pour leur part de la reconduction du contrat de croissance et de solidarité. Nous aurons d'ailleurs, le 29 novembre prochain, dans cet hémicycle, un débat certainement très intéressant sur les recettes des collectivités locales.
Enfin et surtout, ce budget est cohérent parce qu'il confirme la priorité donnée à l'emploi, parce qu'il constitue une nouvelle étape dans la revalorisation du travail et parce qu'il prétend renforcer la compétitivité de nos entreprises.
En matière fiscale et budgétaire, nous devons, mes chers collègues, avoir le courage de regarder la réalité en face et de mener une politique adaptée. Nous ne devons pas avoir peur d'afficher clairement les priorités qui sont les nôtres. Nous ne devons pas nous laisser intoxiquer par les obsédés de la dépense publique qui ronge notre pays et les admirateurs de la pression fiscale, qui fait fuir à l'étranger nombre de nos compatriotes.
Ils voudraient nous faire croire que la réforme fiscale privilégie les riches alors qu'elle est centrée en priorité sur les salariés des classes moyennes, ceux qui gagnent entre 1 000 euros et 3 500 euros par mois, ceux qui donnent beaucoup mais reçoivent peu, ceux que l'on a trop longtemps oubliés.
C'est en ce sens que la réforme fiscale proposée est une réforme juste, puisque aucun salarié aux revenus modestes ne sera perdant grâce à l'effet combiné de la baisse de l'impôt sur le revenu et de la hausse de la prime pour l'emploi
Ceux qui ont des rémunérations proches du SMIC bénéficieront à plein de l'augmentation massive de la prime pour l'emploi, qui atteindra 1 milliard d'euros en deux ans.
Plus de 70 % des 3, 5 milliards d'euros de baisse d'impôt sur le revenu iront aux foyers dont le revenu est compris entre 10 000 et 40 000 euros par an.
Au total, près de 80 % de l'effort global de baisse des impôts, prime pour l'emploi comprise, bénéficiera directement aux ménages modestes et aux revenus moyens.
De même, contrairement à ce que certains affirment, le plafonnement des impôts locaux et nationaux à 60 % du revenu n'est pas réservé aux contribuables les plus aisés.
Sur les 93 000 personnes qui bénéficieront de ce dispositif, 81 000, soit près de 90 %, sont dans le premier décile du revenu. Il s'agit de Français aux revenus modestes qui doivent acquitter les impôts locaux, mais aussi d'artisans, d'agriculteurs, de créateurs d'entreprise, d'un certain nombre de personnes ayant connu une année difficile, également de demandeurs d'emploi.
Sur ces 93 000 personnes, moins de 6 000 se trouvent parmi les 10 % de ménages aisés.
Sur les 330 000 personnes assujetties à l'ISF, seuls 16 800 contribuables bénéficieront du plafonnement. Environ un tiers d'entre eux se situe dans la plus basse tranche d'imposition.
Nous sommes donc bien loin de ce qu'on entend et de ce qu'on lit, bien loin des nantis que les nostalgiques de la lutte des classes continuent à montrer du doigt avec mépris !
Ce n'est pas tout à fait nous qui la faisons, et je vous invite à regarder qui cela concerne ! Voilà quelques jours, dans un quotidien national qui rencontre d'ailleurs quelques difficultés financières, ...
M. Henri de Raincourt. ... on montrait la photo de dix personnes qui seraient théoriquement concernées par les largesses du Gouvernement. Or, en regardant de plus près les choses, ces gens-là ne le sont pas, car ils ont quitté la France depuis longtemps !
Applaudissements sur les travées de l'UMP.
La réforme fiscale est juste parce qu'elle récompense les efforts que fournissent nos compatriotes. Avec cette réforme, nous faisons un vrai choix de société...
Le choix d'une société qui privilégie le travail par rapport à l'assistance, madame Luc !
L'augmentation massive de la prime pour l'emploi donnera aux Français une vraie raison de choisir le travail. Là est la véritable rupture, là est le véritable clivage.
Quand certains veulent diviser le travail, nous préférons le valoriser plutôt que de dépenser des milliards d'euros pour payer des gens à ne pas travailler.
Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.
Évoquez aussi les chômeurs et les stagiaires qui travaillent pour rien !
C'est un choix politique, un choix de société, que nous assumons et que nous revendiquons avec fierté.
L'autre choix que nous assumons et revendiquons est celui de la responsabilité budgétaire face aux enjeux auxquels est confronté notre pays.
Nous vivons dans le monde réel, dans une économie ouverte, à l'heure de la mondialisation, même si nous avons pu croire, lors des dernières Vingt-quatre heures du Mans §que nous étions revenus des décennies en arrière.
L'économie française doit faire face à une compétition mondiale féroce, et sa croissance est soumise à bien des aléas internationaux, comme l'a très bien souligné le rapporteur général, Philippe Marini.
Alors, nous soutenons la réforme de la fiscalité des personnes non seulement parce qu'elle est juste, mais aussi parce qu'elle renforce l'attractivité de notre pays, et la réforme de la taxe professionnelle participe de la même logique.
On ne peut à la fois déplorer les délocalisations et proposer des mesures qui les accélèrent comme, par exemple, la renaissance de la funeste loi improprement appelée « de modernisation sociale », ...
M. Henri de Raincourt. ...qui, en réalité, est une vraie loi de régression sociale.
Protestations sur les travées du groupe socialiste.
Si nous n'agissons pas, d'autres pays le font. La concurrence fiscale existe, qu'on le veuille ou non.
Nous avons besoin d'une économie compétitive, qui redonne aux particuliers et aux entreprises le goût du risque, l'envie d'investir, de créer des emplois et de l'activité dans notre pays.
Nous soutenons la politique du Gouvernement, nous soutenons sa volonté - nous voulons même aller plus loin - de réduire les déficits publics et la dette, mais aussi de réformer l'État, et ce sera l'un des mérites de la LOLF.
Je veux, à cette occasion, saluer l'engagement du président de la commission des finances et du rapporteur général à faire de la LOLF un outil performant au service de la gestion de l'État.
Cependant, si la LOLF peut constituer le levier de la réforme de l'État en plaçant la gestion publique dans une logique de performance, elle ne saurait remplacer la volonté politique.
C'est avec cette volonté que le groupe de l'UMP soutiendra ce budget qui nous apparaît, à bien des égards, comme un budget réaliste pour un pays réel, dans un monde réel, au service de la croissance et de l'emploi.
Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, voilà une semaine, la Commission européenne adressait un nouvel avertissement à notre gouvernement en matière de déficit public ; le risque de réactivation de la procédure pour déficit excessif est donc réel. Ce coup de semonce n'est pas une atteinte à notre orgueil national : il est un puissant rappel à la rigueur budgétaire, gage de notre crédibilité.
Cet avis extérieur confirme l'interrogation de deux Français sur trois : l'État gère-t-il son budget de façon responsable ? En 2005, il vivra à crédit du 28 octobre au 31 décembre. Cette présentation est frappante ! Notre pays a accumulé depuis vingt-cinq ans des déficits qui sont devenus structurels. Ayons présent à l'esprit que l'écart réel entre les recettes et les dépenses de l'État est de 22 %, plutôt que de mesurer le déficit à l'aune du PIB de la France par un pourcentage virtuel qui occulte l'inconfortable réalité et endort notre vigilance.
Martelons ce chiffre de 22 % : quel ménage pourrait se permettre un tel « trou » dans son budget sans mettre en danger ses biens propres et envisager des décisions drastiques ? Le déficit prévu dans le projet de budget pour 2006 est un abîme de 46, 8 milliards d'euros, soit plus de 300 milliards de francs. Nous ne pouvons qu'être effarés !
Peut-on commencer cette discussion budgétaire en étant résignés ? L'habitude du déficit nous conduit à la désinvolture et, comme l'a souligné Philippe Marini, nous sommes en état d'accoutumance.
Une prise de conscience et une réaction sont indispensables quand le déficit vient encore accroître une dette qui augmente de 100 000 euros par heure et que le niveau des taux d'intérêt, en passe d'augmenter de 0, 25 %, est peut-être sur le point d'en alourdir davantage encore la charge !
Mes chers collègues, je rappelle l'objectif ambitieux de retour à l'équilibre budgétaire qu'avait formulé le 6 mars 2003, en réponse à une question d'actualité au Gouvernement, notre collègue Alain Lambert, alors ministre délégué au budget : il estimait que, avec une croissance moyenne de 2, 5 %, cet équilibre serait atteint à la fin de la législature. Deux ans et demi plus tard, cet objectif n'est-il pas devenu totalement irréaliste ? Qu'avons-nous fait, ou plutôt qu'avons-nous omis de faire pour qu'il en soit ainsi ? Nous sommes collectivement responsables de cette situation : ceux qui n'ont pas pris les mesures difficiles, indispensables, pour ne pas dire vitales, comme ceux qui veulent que l'État dépense toujours plus.
Interrogeons-nous : le projet de loi de finances pour 2006 va-t-il convaincre les Français que l'État est mieux géré ? Présente-t-il les signes d'une amélioration crédible ?
Cette année doit apporter une réponse nouvelle puisque, forts d'une décision transpartisane, nous disposons avec la LOLF d'un outil révolutionnaire. Montrons aux Français que notre nouvelle constitution financière n'est pas seulement une incontestable réussite technique appréciée des seuls technocrates ; démontrons-leur son efficacité et reprécisons sa finalité.
Je citerai un exemple : techniquement, permettre la fongibilité asymétrique des crédits, c'est adapter au plus près les dépenses aux besoins réels, c'est responsabiliser ceux qui gèrent et leur marquer ainsi notre considération. Rationaliser au mieux les dépenses et redonner sa place au bon sens en refusant des situations figées constitue un vrai progrès.
Le vote du budget, nous le savons, est avant tout un acte politique majeur, porteur d'un choix de société. Que nous apprend l'examen de ce projet de budget ?
Pour ce qui est des recettes, nous savons qu'elles dépendent fortement de la croissance et que les taux très élevés de prélèvements obligatoires n'autorisent plus à envisager leur augmentation sous peine de délocalisation d'entreprises ou de personnes physiques. Aussi, réduire notre déficit signifie réduire les dépenses.
La charge de la dette et les dépenses de personnels ont un effet d'éviction massif, car elles compriment de plus en plus les autres postes de dépenses. Le paiement des seuls intérêts de la dette représente, avec près de 40 milliards d'euros, le deuxième poste budgétaire : si cet argent était disponible pour l'investissement, que d'emplois seraient créés ! Nous en sommes arrivés là par un cumul de petites lâchetés successives.
Ce projet de loi de finances a peut-être un double mérite. Techniquement, il intègre toutes les mesures fiscales prises dans l'année. Sur le fond, il fixe des principes, en particulier la priorité à l'emploi, et poursuit la réalisation des lois d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure et pour la justice.
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie a déclaré en juin que la France vivait au-dessus de ses moyens. S'il a réussi à provoquer une prise de conscience, les décisions indispensables ont-elles été prises ?
Il a affirmé à l'Assemblée nationale que, avec la LOLF et à qualité de service public accrue, nous disposons collectivement, Gouvernement et Parlement, des moyens d'amorcer un véritable reflux de la dépense publique, obtenu non par des économies arrachées à des budgets qui progressent inexorablement, mais grâce à un recentrage de l'État sur ses missions fondamentales, avec une qualité de service public accrue, et grâce à une recherche de la performance.
Mais, nous le constatons, le véritable reflux n'est pas amorcé, même si la maîtrise des dépenses est affichée pour la quatrième année consécutive. Je sais que cette stabilisation en euros courants des dépenses de l'État suppose un effort important de redéploiement. Je ne sous-estime pas ce qu'il est nécessaire de faire pour parvenir à ce résultat. Je précise seulement que la maîtrise des dépenses s'applique finalement sur une assiette assez réduite. Ainsi, les 65 milliards d'euros de prélèvements sur recettes pour les collectivités locales et le budget de l'Union européenne n'y sont pas soumis.
M. le rapporteur général démontrait tout récemment la difficulté de trouver des économies mission par mission. Il faut procéder autrement : en matière de dépenses publiques, atteindre le niveau moyen des pays de l'OCDE, c'est disposer de 100 milliards d'euros d'économie, soit plus de deux fois le montant de notre déficit ! Avec 53, 7 % du PIB, nous sommes bien au-dessus de la moyenne de l'ancienne Union à Quinze, qui est de 47, 6 %, et au-dessus de la moyenne de la zone euro, qui atteint 48, 6 %.
Pourquoi notre pays ne s'engage-t-il pas dans une telle réduction ? N'en a-t-il pas la volonté ni le courage ? Je suggérerai quatre pistes complémentaires.
Premièrement, il faudrait établir le budget non sur un taux de croissance évidemment aléatoire et toujours hypothétique, mais à croissance nulle. Ce serait le meilleur frein à la dépense et la meilleure façon d'éviter des rectifications économiquement préjudiciables et politiquement négatives.
Deuxièmement, il serait nécessaire de stabiliser, comme vous l'avez suggéré, monsieur le ministre, le budget en euros courants à compter de 2007, proposition que je défends sans relâche depuis trois ans.
Troisièmement, si les entreprises se fixent un objectif de 4 % de gain de productivité par an, pourquoi l'État ne pourrait-il en faire autant ? Cela suppose de systématiser la chasse aux coûts. Êtes-vous prêt, monsieur le ministre, à suivre les conclusions des audits que vous avez commandés pour chaque ministère ?
Quatrièmement, il faudrait prendre des décisions drastiques en matière de non-renouvellement des départs à la retraite. Nous savons que les charges en personnel sont le noeud de la solution quand la masse salariale augmente de 3, 4 milliards dans le budget pour 2006, sans même une revalorisation du point de la fonction publique, 1 point représentant, comme le rappelait à l'instant M. le rapporteur général, 830 millions d'euros.
Presque tout a déjà été dit, notamment dans le rapport Camdessus, qui préconise de limiter le recrutement à 40 000 fonctionnaires par an jusqu'en 2015. Jean-Pierre Raffarin avait évoqué avec énergie le remplacement d'un fonctionnaire sur deux ; il n'en a rien été. Le Premier ministre a déclaré que ce devait être un « repère » ; cela ne reflète pas une grande détermination. Dans les faits, le projet de loi de finances pour 2006 prévoit une réduction de 5 318 équivalents temps plein travaillé, ou ETPT, ce qui permet une diminution de 18 340 ETPT depuis 2003. C'est bien trop peu. Nous aurons mis trois ans à compenser l'augmentation d'ETPT réalisée par la précédente majorité en une seule année, à savoir 17 214 ! Nous payons très cher cette dérive.
Selon les simulations, le remplacement d'un fonctionnaire pour deux départs à la retraite permettrait déjà d'économiser plus de 10 milliards d'euros d'ici à 2015. Ce sont également autant de retraites du service public qui n'auront pas à être financées dans quarante ans. Gérons dès aujourd'hui la France de demain !
Où et comment économiser ? Il n'y a pas de schizophrénie chez les parlementaires, qui sont aussi des élus locaux. Une présence territoriale affirmée de l'État est nécessaire. La réduction du nombre de fonctionnaires dans les administrations centrales est possible, un certain nombre de tâches pouvant être réalisées en région grâce aux nouvelles technologies. L'administration centrale de l'éducation nationale doit être un gisement intéressant à prospecter.
Monsieur le président, vous me condamnez à raccourcir mon propos !
Comme vous, monsieur le ministre, nous voulons un État plus efficace, un État plus agile, un État stratège.
La majorité du groupe du RDSE appuie le Gouvernement, mais elle lui demande de montrer plus de détermination en présentant des objectifs clairs et en s'y tenant. Monsieur le ministre, certes il vous faut et il vous faudra du courage ; aussi, personne dans notre groupe ne vous ménagera son soutien.
Applaudissements sur les travées du RDSE et de l'UMP.
(Mme Marie-Thérèse Hermange applaudit.) C'est d'autant plus important pour moi, et significatif pour elle, que, ayant été élu sans son soutien, je suis libre de tout engagement.
Applaudissements sur les travées de l'UMP.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, dans notre démocratie parlementaire, le vote du budget est un acte avant tout politique. L'appartenance à la majorité ou à l'opposition se détermine lors de ce vote. J'affirme donc très clairement et sans ambiguïté que je voterai ce budget pour attester mon appartenance à la majorité. §
Mais s'il s'agissait seulement du budget, s'il s'agissait seulement d'approuver vos comptes, vos prévisions, votre politique financière et budgétaire, monsieur le ministre, j'aurais peut-être beaucoup plus de mal à le voter.
Le projet de loi de finances pour 2006 est en effet particulièrement peu convaincant. Vous affirmez que vos priorités sont l'emploi, la restauration de l'État régalien et la préparation de la France aux défis de l'avenir.
Concernant l'emploi, les politiques d'aides publiques mises en oeuvre depuis des décennies ne produisent que des résultats mitigés alors qu'elles pèsent sur les prélèvements obligatoires, que vous allez encore augmenter. La restauration de l'État régalien est invisible dans le domaine financier : on constate surtout l'absence de maîtrise de la dépense publique. Enfin, l'accroissement inacceptable de la dette est un danger pour la France face aux défis de l'avenir.
Votre projet de budget procède de bonnes intentions, telle la réforme de l'impôt sur le revenu... qui est remise à plus tard, à 2007. On est loin de l'engagement d'une baisse de 30 % durant la mandature. Cette diminution n'était pas seulement une promesse, c'était un moyen de créer durablement des emplois, c'était le signe fort d'un changement de politique.
Pendant des années, les gouvernements ont essayé de développer l'emploi soit par des politiques inspirées du collectivisme, soit par des politiques d'aides publiques inspirées du jacobinisme ou du colbertisme. Ces tentatives se sont soldées par des échecs. Notre pays connaît aujourd'hui l'un des taux de chômage les plus importants d'Europe. L'Espagne et l'Italie, partis d'une situation plus difficile, font mieux que nous. Seule parmi les grands pays européens, la Pologne est dans une situation plus pénible.
En nous orientant vers la baisse de la fiscalité, nous commencions seulement à nous convaincre que les emplois et la croissance ont un lien avec le taux des prélèvements obligatoires. Pourtant, les Français verront ces prélèvements obligatoires augmenter pour atteindre 44 % du PIB, faisant de notre fiscalité l'une des plus punitives dans les pays industrialisés.
Toujours pour ce qui concerne les prélèvements obligatoires, notre PIB accuse un différentiel de 5 % à 6 % avec nos principaux partenaires, soit près de deux fois notre déficit budgétaire. Le meilleur moyen d'augmenter le pouvoir d'achat des Français et d'améliorer la compétitivité de nos entreprises, monsieur le ministre, c'est de leur rendre ce différentiel, c'est de leur rendre ce pouvoir d'achat. Dans aucun pays au monde les collectivités territoriales n'ont été plus performantes pour créer des emplois que les entreprises et les travailleurs indépendants.
Monsieur le ministre, votre tâche était de réduire ce différentiel, ainsi - j'y viendrai - que le déficit budgétaire. On aurait pu espérer que vous réussiriez au moins l'un ou l'autre de ces deux objectifs, mais je crains que vous n'en ayez atteint aucun.
Vous ne pouvez pas y arriver sans maîtriser la dépense publique.
Je suis très étonné et attristé de constater que vous considérez comme une victoire le fait que, pour la quatrième année consécutive, les dépenses de l'État augmentent moins vite que l'inflation, alors qu'elles continuent néanmoins à croître en valeur.
En France, les dépenses publiques représentent 54 % du PIB, soit douze points de plus qu'en Grande-Bretagne, quatre points de plus qu'en Allemagne, cinq points de plus qu'en Italie.
Là encore, dans tous les cas de figure, le différentiel est supérieur à notre déficit budgétaire. Ce seul constat devrait nous démontrer que le chemin vers un budget vertueux est possible, qu'il a été emprunté résolument par de nombreux pays qui pratiquent une politique de prélèvements obligatoires aussi importante que la nôtre. Ainsi, en dix ans, la Suède a réduit de 10 % ses dépenses publiques, sans pour autant obérer les budgets de la santé et de l'éducation.
Nous savons tous ici que les dépenses de personnel et la charge de la dette représentent aujourd'hui près de 58 % du montant du budget, alors qu'elles en représentaient 45 % voilà douze ans. Comme les charges de la dette sont incompressibles, il n'y a pas d'autre solution que de remettre en cause la politique des effectifs au sein de la fonction publique.
Monsieur le ministre du budget, lorsque vous étiez dans l'opposition, vous aviez établi ce constat. En tant que porte-parole du Gouvernement, en 2002 et à plusieurs reprises par la suite, vous aviez confirmé cette intention. Mais, aujourd'hui, qu'en est-il de son application ? Régulièrement, nous sommes alertés par des déclarations qui sous-entendent que la France vit au-dessus de ses moyens, qu'il faut profiter des dix ans qui viennent, pendant lesquels 77 000 fonctionnaires partiront à la retraite, pour procéder à un rééquilibrage. Nombreuses, de toutes parts, sont les autorités ou les personnalités qui se sont exprimées sur ce sujet en estimant qu'il ne fallait remplacer qu'un poste sur deux.
Le rapport commandé par Bercy à Michel Camdessus, ancien directeur général du Fonds monétaire international, ancien gouverneur de la Banque de France nommé par le président Mitterrand, est assez explicite sur cette nécessité. Cet avis est partagé par Georges Tron, à l'Assemblée nationale, et défendu dans notre enceinte, depuis de nombreuses années, par le rapporteur général et le président de la commission des finances.
Je vous donnerai un autre exemple de mon incompréhension de la présentation de ce premier projet de budget du gouvernement de Dominique de Villepin.
Je rends hommage au Premier ministre d'avoir répondu à l'attente de nombreux Français en composant un gouvernement plus restreint. C'est la première fois depuis des décennies, et cela correspond au type de gestion d'un État moderne.
Mais la déclinaison automatique de cette courageuse mesure, aurait dû, ne serait-ce que pour la mettre en valeur, se traduire dans ce projet de budget. Or, où sont les économies ? On fait disparaître un quart d'une équipe gouvernementale et cela n'entraîne aucune restructuration dans les administrations, aucune modification dans les services ? C'est un signe très parlant. C'est comme si l'on assistait à un découplage : les ministres parlent, passent, l'administration continue, quels que soient les discours.
Mais le plus préoccupant et le plus grave, c'est de constater à quel point ces dépenses ne sont pas financées. Un cinquième d'entre elles seront léguées aux générations futures, sans doute pour les préparer aux défis de demain...
Le salaire de près d'un agent de l'État sur cinq sera payé par nos enfants ! Il est de votre devoir de le dire plus clairement et d'arrêter d'expliquer aux Français que notre dette n'est qu'un pourcentage du PIB. Il faut leur dire que, sans raison particulière liée à une guerre, à une catastrophe naturelle ou à la remise à niveau d'un territoire aussi grand que l'Allemagne de l'Est, notre pays a multiplié sa dette par douze en l'espace de vingt-cinq ans, pour atteindre un niveau qu'il n'a jamais connu.
D'ailleurs, à la somme astronomique d'environ 1 150 milliards d'euros, soit près de quatre années du budget, il faut ajouter les produits de la vente des principaux actifs de l'État, avec l'action consensuelle de tous les gouvernements.
C'est une très bonne chose, mais je répète que cela s'est fait de façon consensuelle parce qu'il n'y avait n'avait pas d'autre solution pour remplir les caisses de l'État.
D'ailleurs, vous-même, monsieur le rapporteur général, au cours de la précédente mandature, aviez déjà alerté l'opinion publique lors de la présentation de votre rapport intitulé Dette publique, une législature pour rien.
Aujourd'hui, toutes les projections de ce rapport pour l'horizon 2010 sont largement dépassées.
Vous nous proposez néanmoins, pour préparer l'avenir, un projet de budget dont le solde primaire accusera un déficit de l'ordre de 7 milliards d'euros.
Était-il prévu, dans le programme de cette législature, de cumuler en quatre ans autant de dettes que sous le gouvernement précédent ?
Aussi, à l'occasion de la mise en oeuvre de la LOLF, j'ai cherché vainement un indicateur pouvant attester de l'endettement réel de chaque foyer fiscal ou de chaque Français. Je ne l'ai pas trouvé, mais vous aurez sans doute l'occasion de nous en dire plus au cours de l'examen de ce projet de loi de finances, monsieur le ministre.
En définitive, peu importe aux Français de savoir si la dette de l'État résulte surtout d'un déficit structurel ou d'un déficit primaire. Ce qu'ils retiendront, c'est que notre pays est champion pour les prélèvements obligatoires, champion pour la part des dépenses publiques dans le PIB, champion pour la part de la population active travaillant dans le secteur public, et bientôt champion pour l'importance de la dette.
Et malgré tous ces titres, ou à cause d'eux, nous sommes parmi les derniers en ce qui concerne les créations d'emploi.
Vous l'avez compris, j'attends une autre politique. Il n'y a pas d'autre voie pour la France qu'une politique résolument libérale et européenne et, malheureusement, nous en sommes encore à des années-lumière.
Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées de l'UMP.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de budget dont nous commençons l'examen intervient alors que l'urgence sociale se manifeste de manière évidente et qu'elle a conduit, là où les inégalités sont les plus criantes, à des actes désespérés.
Cette colère, ce désespoir vont pourtant bien au-delà des frontières territoriales que vous avez désignées ce matin lors de votre intervention.
Vous le savez, cette colère touche particulièrement la jeunesse et les milieux populaires. La jeunesse, enfermée dans la précarité, les sous-emplois, les bas salaires, les stages, mais aussi toutes celles et tous ceux qui subissent les conséquences des délocalisations et souffrent dans un monde du travail, dont les règles sont abominables.
Notre tâche à tous est de « réhumaniser » ce monde-là, et nous pensons que vous faites le contraire.
Vos réponses à l'urgence ne sont donc pas à la hauteur. Nous ne voyons pas de solution dans votre politique, encore moins avec ce projet de loi de finances.
Bien au contraire, vos choix continuent sur une lancée dont l'échec est flagrant : échec, parce que vous refusez d'écouter la population et que vous persistez dans une politique budgétaire aussi injuste qu'inefficace.
Monsieur le ministre, ce projet de loi de finances le montre clairement, votre politique souffre d'autisme.
Vous êtes sourds quand les salariés, les retraités, les personnes en situation précaire, les jeunes, stagiaires ou étudiants, manifestent pour la défense du pouvoir d'achat, contre la précarité, pour le logement, l'emploi, les services publics.
Vous ne répondez pas quand ils pétitionnent, par exemple contre le prix élevé de l'essence. Et vous ne tirez aucune conséquence de l'expression du suffrage universel, ce qui, de notre point de vue, est bien sûr inacceptable.
Le vote du 29 mai dernier n'a en rien modifié vos choix.
Les citoyens ont pourtant largement débattu et réfléchi. Ils ont fait le bilan de ce que cette forme de construction européenne leur avait apporté jusqu'ici : des délocalisations honteuses, une pression toujours plus forte sur les salaires, des services publics en danger. Les citoyens ont évidemment dit « non ».
Le respect de la démocratie serait au moins d'infléchir les politiques nationales, tout en essayant d'ouvrir des négociations pour d'autres choix au niveau communautaire, en faveur d'une harmonisation par le haut.
Or vous faites absolument le contraire. L'Europe est, pour vous, non pas un lieu de coopération et de solidarité, mais un lieu de compétition. Ce projet de budget en est, bien sûr, la caricature. Il en devient antidémocratique.
Votre projet de budget ne jure en effet que par la concurrence. Elle est là, partout, dans vos discours : c'est votre religion. Et le dogme va un peu loin quand il prétend dominer là où les études les plus sérieuses ont tendance à le reléguer.
C'est particulièrement le cas en matière de concurrence fiscale : le Conseil des impôts et nombre d'économistes en relativisent l'importance. Nombreux, d'ailleurs, sont ceux qui soulignent le caractère bien plus déterminant des infrastructures, des services publics, mais aussi du niveau de qualification de la main-d'oeuvre, pour l'implantation des entreprises.
Cela, vous ne voulez pas l'entendre, et c'est pourquoi la croissance n'est pas là.
Les facteurs qui lui sont favorables - services publics de qualité, infrastructures, éducation, formation, recherche - sont relégués, démantelés, bradés à un marché de la finance, que vous alimentez également avec vos baisses d'impôts.
Vous donnez l'argent à ceux qui détruisent l'emploi, délocalisent et génèrent les bas salaires.
Pour justifier ces choix, vous vous réfugiez derrière une flopée d'indicateurs, sous couvert du programme de stabilité et, bien sûr, de la LOLF, avec la bénédiction de la technocratie bruxelloise.
Ces indicateurs sont, pour certains, vides de sens.
C'est particulièrement le cas de toute cette machinerie que vous mettez en oeuvre avec la LOLF. Nous n'y voyons aucune amélioration du débat budgétaire.
En tant que rapporteur de deux programmes concernant principalement les retraites, j'ai été stupéfait de constater que, avec les indicateurs retenus, il n'est à aucun moment question du niveau des pensions, encore moins de l'évolution du niveau de vie des retraités. Pour vous, ces questions sont hors sujet : elles sont pourtant essentielles.
Par ailleurs, vous refusez de mesurer les effets des exonérations que vous accordez prétendument pour « soutenir l'emploi, l'investissement, la recherche, le logement ».
Au contraire, vous privez délibérément l'État de moyens pour évaluer ses politiques publiques, en procédant à des suppressions d'emploi massives au sein du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.
Vous mettez ces cadeaux bien à l'abri. Le plafonnement des niches fiscales, par exemple, vise à éviter tout débat sur leur pertinence. Il est scandaleusement généreux - 4 000 euros -- et ne touche que 10 000 foyers fiscaux.
Pis, vous multipliez encore les niches fiscales, sans évaluation.
Quand on sait, par exemple, que chaque emploi créé en zone franche urbaine coûtait, selon une étude de 1997, 20 000 euros, il y a de quoi s'interroger sur la pertinence de ce dispositif ! Et là encore, c'est ce que vous proposez pour les quartiers en difficulté.
Dès lors, quand vous nous dites que l'efficacité de la dépense publique vous préoccupe, nous ne vous croyons pas un seul instant.
Une réforme reste à faire, devant associer les citoyens et les salariés, notamment les fonctionnaires.
Certaines comparaisons qui agrémentent votre discours sont, quant à elles, simplistes et terriblement réductrices : je veux parler de la mise en balance des taux des impôts sur les entreprises et sur les contribuables les plus fortunés, entre les différents pays de l'Union européenne.
Vous ne cessez de comparer des choses incomparables, afin d'éviter tout débat, notamment sur l'assiette des impôts.
S'agissant d'autres indicateurs, vos évaluations sont délibérément fausses. Ce projet de budget est mensonger, insincère. Monsieur le ministre, nous ne pouvons pas vous faire confiance.
J'ajoute que quelques précédents ont entamé votre crédit et celui du Gouvernement.
Nous nous rappelons l'épisode Total : obligé de réagir au vu de l'énormité des profits que le groupe pétrolier réalisait sur le dos des populations, vous avez annoncé une mesure qui était à nos yeux la plus juste et la plus évidente que vous pouviez prendre : taxer ses profits.
Si vous acceptez de reprendre votre copie, sachez que ces profits ont encore augmenté : le chiffre d'affaires de Total s'est accru de 19 % au troisième trimestre de 2005 et le bénéfice net par action a progressé de 36 %.
C'est pourquoi nous avons, cette année encore, déposé un amendement visant à taxer davantage ces profits. Cela accompagnerait une baisse de la TIPP, donc du prix de l'essence à la pompe. En effet, monsieur le ministre, l'accord que vous avez passé avec Total n'engage en rien l'entreprise, et il engage encore moins les autres compagnies pétrolières. Il n'a eu aucun effet significatif sur le quotidien des gens contraints de prendre leur voiture.
Nous n'oublions pas non plus l'épisode Hewlett Packard. Le Premier ministre avait affirmé haut et fort que le groupe devait rembourser les aides qu'il avait reçues de la part de la collectivité avant d'annoncer, peu de temps après, qu'il n'avait en fait rien perçu.
Le remboursement des aides est une très bonne idée. Il constitue l'un des outils indispensables d'un contrôle efficace de la dépense publique. Je vous invite donc à rétablir les commissions de contrôle des aides publiques aux entreprises, que votre majorité s'est empressée de supprimer en arrivant au pouvoir.
Le contrôle de la dépense publique, la mesure de son efficacité sociale permettent d'éviter de telles catastrophes et d'imposer de véritables objectifs aux entreprises en termes d'emploi et d'investissements productifs. C'est avec de tels outils que la croissance peut revenir.
Le dernier épisode, monsieur le ministre, est l'augmentation du prix du gaz. Vous avez cru bon de noyer le poisson. Vous croyez que la population ne s'en rend pas compte ? Mais les gens payent, monsieur le ministre ! Ils ont parfaitement conscience que vous avez accepté une majoration des tarifs de 14 %, après les augmentations de 4 % en juillet dernier et de 2, 6 % en septembre.
Le gaz va bel et bien augmenter, et voilà qui entame votre crédit !
Aujourd'hui, lorsque vous affirmez que c'est l'optimisme qui vous anime, lorsque vous affichez des prévisions de croissance qu'aucun économiste ne tient pour réalistes, on croit rêver !
La plupart des instituts prévoyaient une croissance inférieure à 2 %, proche de 1, 8 %, alors que vous vous fondez sur une croissance située entre 2 % et 2, 5 %.
Nous sommes très inquiets : la croissance n'est pas là, aucun indicateur n'est vraiment au beau fixe.
Vous affirmez que l'investissement va repartir. Or, voilà trois ans que la situation s'aggrave.
Qu'en est-il de l'emploi, qui constitue votre priorité et qui est celle du Président de la République depuis dix ans ?
La qualité des emplois se détériore sur tous les fronts : les salaires, l'insécurité liée à la précarité, les conditions de travail. Ceci expliquant cela, ce n'est absolument pas le sort des patrons du CAC 40 ! Leurs salaires bondissent, et il en est de même des revenus financiers.
L'optimisme qui vous anime aujourd'hui nous rappelle que, l'année dernière, le projet de loi de finances initial se fondait sur une prévision de croissance irréaliste de 2, 5 % Ce chiffre avait dû être revu à la baisse à plusieurs reprises, et il s'établit aujourd'hui aux environs de 1, 8 %.
« Ce n'est pas grave », nous dites-vous aujourd'hui. Pourtant, ce décalage entre la réalité et la prévision explique le bradage du patrimoine public national et, comme vous l'avez expliqué devant les députés, les annulations de crédits, lesquelles s'élevaient à 4 milliards d'euros l'année dernière : 4 milliards d'engagements non tenus, c'est, pour vous, une bonne gestion !
Sachez que, sur le terrain, ces annulations se traduisent par la paralysie de certains chantiers, par l'arrêt ou l'amputation d'actions en faveur de l'insertion, du logement, de l'emploi ou de l'éducation.
L'année 2005 a été particulièrement catastrophique pour les associations et pour les collectivités locales.
Et comment pourrait-il en être autrement ? Alors même que des voitures brûlaient dans les quartiers en difficulté, vous procédiez, le 3 novembre dernier, aux annulations de crédits suivantes : 205 millions d'euros pour l'emploi des jeunes, 55 millions d'euros pour la construction et la réhabilitation des logements sociaux, 45 millions d'euros pour les transports collectifs, 45 millions d'euros, après 17 millions d'euros en avril, pour les villes et quartiers dits sensibles, 50 millions d'euros pour le sport, la jeunesse et la vie associative.
Le Gouvernement n'est pas un partenaire fiable, comme tous les acteurs de terrain en font l'expérience. Ainsi, le président d'Emmaüs France a-t-il suspendu sa participation au Conseil national de lutte contre les exclusions afin de protester contre « le décalage entre les discours et les actes du Gouvernement ». Était en cause le non-versement d'une subvention de 500 000 euros à une association employant des salariés en insertion.
Une telle politique est une erreur d'autant plus grave que la croissance n'est pas encouragée par d'autres leviers : mon amie Marie France Beaufils en témoignera dans quelques instants en évoquant la politique fiscale du Gouvernement.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du groupe socialiste.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, à ce stade du débat, nombre d'orateurs se sont exprimés, et je ne peux donc que donner un coup de projecteur sur des sujets qui me paraissent essentiels. J'en ai retenu trois.
Le premier est le message que doit délivrer un budget, et nous avons eu l'occasion de nous en entretenir, monsieur le ministre. Le message que vous délivrez - et c'est la raison pour laquelle j'adhère à votre projet de budget - est celui de l'encouragement au travail.
Les questions budgétaires sont souvent si complexes et techniques que l'on finit par en perdre la ligne directrice. Nous devons rappeler à nos compatriotes quels objectifs nous recherchons avec ce projet de budget.
Je dirai les choses simplement et sans ambiguïté - mais je conçois que l'on n'adhère pas à mon propos -, notre objectif doit être que toute personne en bonne santé et en âge de travailler puisse accéder à un emploi marchand chaque fois que cela est possible ou, à défaut, à une formation ou à une activité pour lui permettre de s'insérer dans un milieu professionnel.
Le temps est venu, dans une société qui est, de mon point de vue, minée par l'assistanat, d'affirmer la préférence pour le travail comme moyen de réalisation de la personne, de dignité, de promotion et de progrès pour la société tout entière.
Les moyens que vous dédiez à l'encouragement au travail sont très importants, monsieur le ministre. Dans un souci de concision, je n'évoquerai que deux exemples.
Tout d'abord, vous consacrez 500 millions d'euros à la revalorisation de la prime pour l'emploi, qui vise à encourager tous ceux qui veulent reprendre un travail.
Je n'émettrai qu'un seul petit regret ; vous le connaissez d'ailleurs, monsieur le ministre, et je souhaite que les choses puissent évoluer à cet égard. Je regrette en effet que cette prime ne figure pas sur la feuille de paie. Le système informatique qui équipe la direction générale des impôts et les ASSEDIC n'est pas un argument suffisant pour renoncer à cet objectif.
Faire figurer cette prime sur la feuille de paie serait un symbole fort de reconnaissance de la valeur du travail, et, dans ce domaine, on n'en fait jamais assez !
Ensuite - c'est mon second exemple -, vous consacrez 1, 8 milliard d'euros à l'allégement des charges, qui est destiné à achever l'harmonisation des SMIC.
Monsieur le ministre, les propos que vous avez tenus à l'endroit de l'opposition m'ont paru très pertinents. Vous avez fait preuve d'une grande délicatesse à son égard en ne rappelant pas que le SMIC avait été désintégré par l'instauration des 35 heures. Il nous faut aujourd'hui corriger cette désintégration et en supporter le coût, qui est très élevé.
Exclamations sur les travées du groupe socialiste.
J'imagine que vous êtes fiers de la politique que vous avez menée, mes chers collègues, et je voulais vous aider à la promouvoir !
Le deuxième sujet essentiel sur lequel je souhaitais insister est plus grave. Peut-être ne partagerez-vous pas mon point de vue, monsieur le ministre, mais c'est un souci qui m'habite et que vous connaissez : la situation de nos finances publiques ne peut plus se résumer au seul budget de l'État.
En effet, ce dernier ne représente plus qu'un tiers des flux financiers de la sphère publique.
Au fil des années, ma conviction s'est forgée et elle est devenue absolue : le seul moyen de sortir de l'inexorable asphyxie et de la lente agonie de l'État est de consolider les comptes de toutes les administrations publiques. Je serais heureux que la commission des finances s'exprime avec force sur ce sujet.
La discussion distincte du projet de loi de finances et du projet de loi de financement de la sécurité sociale nous fait perdre tout repère sur la situation réelle des comptes publics. Or, l'interdépendance entre tous ces comptes est de plus en plus grande et elle s'accroît même chaque année.
Monsieur le ministre, permettez-moi d'insister sur un point. Nous sommes confrontés à la croissance inévitable, d'une part, des dépenses sociales, notamment des dépenses de santé, et, d'autre part, des dépenses des collectivités locales, puisque nous sommes dans un processus de décentralisation. Entre les deux, nous allons assister à une réduction de la part de l'État dans l'action publique. L'État risque alors de devenir une sorte de squelette qui n'aura plus les moyens d'agir. Et comme il voudra conserver jalousement ses effectifs, il produira de la réglementation, du contrôle, ...
...il ankylosera l'économie tout entière. C'est un processus économique mortel dans lequel il ne faut pas entrer.
C'est pourquoi je considère, monsieur le ministre, que la consolidation des comptes publics est une absolue nécessité, ...
...et je souhaite que vous me répondiez sur ce point.
Le dernier sujet essentiel que je souhaite évoquer tient aux promesses de la loi organique relative aux lois de finances. Certes, monsieur le président de la commission des finances, leur concrétisation suppose une réforme de la Constitution, laquelle prévoit la séparation des comptes de l'État et de ceux de la sécurité sociale, ainsi qu'une révision des lois organiques qui régissent ces comptes. Mais devons-nous y renoncer alors que nous voyons le danger se profiler ?
Ce n'est pas sans une certaine émotion que ceux qui travaillent sur la LOLF depuis maintenant cinq ans la voient devenir la matrice de la discussion budgétaire et de la nouvelle gestion publique.
Il m'arrive d'être surpris, voire agacé, que l'on attribue à la LOLF des effets qui sont sans rapport avec sa nature. On l'accuse parfois de produire soit un excès, soit une insuffisance des crédits. Or, tel n'est pas son objet. Son objet - dois-je le rappeler ? - est de veiller à ce que chaque euro employé améliore l'efficience des politiques adoptées par le Parlement.
Certes, la LOLF modifie nos habitudes. Mais si l'on observe la discussion du projet de loi de finances pour 1960, on constate que l'ordonnance de 1959 avait plus modifié les habitudes et beaucoup plus décontenancé les parlementaires de l'époque que ne le fait la LOLF aujourd'hui.
En revanche, dès l'ouverture de notre discussion, réaffirmons bien qu'il s'agit d'ouvrir des crédits aux gestionnaires publics pour qu'ils en fassent un emploi pertinent et aussi approprié que possible, et exprimons-leur notre confiance à cet égard.
Monsieur le ministre, comme l'a indiqué M. de Raincourt, le groupe UMP votera en faveur du présent projet de loi de finances, après qu'il aura été amélioré par les propositions de la commission des finances, qui a accompli un travail de grande qualité que je tiens à saluer.
Je voterai le projet de loi de finances, car il fait de l'encouragement au travail, auquel je suis très attaché, une de ses priorités. Ce point est peut-être ce qui nous différencie le plus de l'opposition. Nous n'avons pas de discours ambigu. Entre l'assistanat et le travail, notre choix est fait !
M. Alain Lambert. C'est un choix politique, et il est de nature à structurer le débat politique dans notre pays.
Exclamations sur les travées du groupe socialiste.
Monsieur le président, j'adore entendre le parti socialiste nous dire qu'il est favorable à l'assistanat. C'est au moins une façon très claire d'exprimer ses idées.
Je ne cherche pas la controverse ; j'exprime simplement mes idées. Qu'il me soit permis de le faire dans les dix minutes qui me sont imparties.
Je n'ai pas l'intention de me laisser diaboliser sur le caractère inéquitable de la fiscalité, et je vais vous dire pourquoi.
Monsieur le ministre, je n'ai pas connaissance - mais peut-être me contredirez-vous - que des milliardaires étrangers cherchent à entrer clandestinement sur notre territoire afin de gagner le paradis fiscal que vous auriez construit.
Sourires
Si vous connaissez quelques cas, dites-le-nous. J'ai plutôt le sentiment que ce sont, hélas ! des pauvres qui essaient d'entrer sur notre territoire, sans doute parce que notre pays est parmi les plus généreux, ...
...peut-être même plus généreux qu'il n'en a les moyens.
En revanche, et je tiens à le souligner, certains de nos compatriotes considèrent que, compte tenu de notre fiscalité, ils ne peuvent plus rester sur notre territoire.
Monsieur le ministre, je souhaite que le vote du Sénat, lorsqu'il interviendra, soit un message de confiance à tous les gestionnaires publics qui auront à appliquer la LOLF. Non, le secteur public n'est pas irrémédiablement fâché avec l'exigence de performance. La performance publique est non seulement possible, mais elle existe déjà, et elle va encore se développer grâce à toutes les mesures que vous avez prises. Les gestionnaires publics doivent avoir conscience du fait que cette nouvelle gestion publique sera plus gratifiante non seulement pour eux, qui sont au service des Français, mais aussi pour les citoyens, et qu'elle sera beaucoup plus protectrice pour les générations futures.
Applaudissements sur les travées de l'UMP. -M. Maurice Blin applaudit également.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, un budget doit être porteur d'avenir - s'il y a un mot sur lequel je serai d'accord avec vous, c'est celui-ci -, porteur d'espoir.
La demande qui monte des quartiers populaires tend bien à cela, et non à un simple replâtrage des politiques existantes. Les populations ne supportent plus la violence que notre société leur fait vivre.
Or, monsieur le ministre, rien dans votre projet de budget ne porte cet espoir, cette reconnaissance.
Votre politique fiscale s'appuie sur les principes du libéralisme...
... qui contribuent à aggraver les inégalités sociales. Les conséquences sont dramatiques : chute de la consommation, aggravation des déficits publics, régression de l'activité économique et de l'emploi.
Or, avec l'instauration du nouveau barème de l'impôt sur le revenu et du « bouclier fiscal », qui vous permet de vous attaquer à l'impôt de solidarité sur la fortune sans l'affirmer au grand jour, votre projet de loi va à nouveau favoriser les ménages les plus riches. Votre projet de loi encourage les entreprises à précariser les salaires en distribuant des allégements fiscaux et sociaux ; il réduit en miettes les fondements de la solidarité nationale.
Vous ne tenez compte ni de la volonté du plus grand nombre, ni des résultats électoraux, ni de l'opinion des salariés qui refusent la casse du système des retraites et de la sécurité sociale. Vous ne tenez pas plus compte des élus et des usagers qui ont rappelé leur attachement aux services publics. Ces différentes réactions traduisent l'exigence de plus de justice sociale, et votre réponse est aux antipodes. Et cette exigence suppose d'autres ressources pour le budget tant de l'Etat que des collectivités territoriales.
La précarité pour le plus grand nombre est érigée comme une règle économique. Mais cela ne vous suffit pas ! Vous avez engagé un remodelage profond de notre société et vous voulez l'effectuer le plus vite possible, car vous sentez bien que l'opposition est forte dans le pays.
Ce projet de société que vous êtes en train de construire est profondément inhumain et antisocial. Vous n'avez qu'un mot à la bouche : la compétitivité. Votre seul souci est de donner au capital les avantages qu'il vous réclame à cor et à cri. Vous distribuez cadeaux fiscaux et subventions, vous bradez le patrimoine public, vous « externalisez » les services rendus par le secteur public ; en fait, vous les abandonnez au secteur privé.
Votre politique fiscale s'inspire de cette conception. Depuis le second semestre 2002, la baisse de l'impôt sur le revenu a privé l'Etat de près de 14 milliards d'euros, c'est-à-dire l'équivalent soit des sommes qui ont abondé le fonds de réserve pour les retraites, soit du déficit du régime général de la sécurité sociale pour 2004. Ces baisses ont eu pour seuls effets une hausse des inégalités et des déficits publics. Malgré cela, le Gouvernement, sous prétexte de le simplifier et de le réduire, propose une refonte de l'impôt sur le revenu. À l'heure où l'on parle souvent d'évaluation et où vous mettez en place des indicateurs pour apprécier la performance des actions engagées, on ne peut être que consterné face à de telles décisions ! À moins que vous ne vous soyez fait un dogme de la baisse de l'impôt progressif. Mais dans ce cas-là, il faut l'assumer !
Vous prétendez vouloir relancer l'emploi et l'investissement productif ; ce serait votre priorité. Si tel était le cas, les habitants des quartiers populaires vivraient autrement !
Le constat est accablant. La seule chose que vous ayez réussi à relancer, c'est la misère. Avec vous, les bénéficiaires du revenu minimum d'insertion, le RMI, ont augmenté de près de 4 % en un an. Quant aux familles surendettées, leur nombre a augmenté de 14 % en 2004, et de 9 % cette année.
Votre politique de réduction d'impôt - 2 milliards d'euros depuis 2002, selon la Cour des comptes -, d'exonération de charges en faveur du patronat, et vos cadeaux fiscaux - 5, 8 milliards sur la même période, dont les foyers les plus aisés ont le plus bénéficié - devaient, selon vos dires, permettre de réduire le chômage. Bien au contraire, celui-ci a fait un bond, avec 230 000 demandeurs d'emplois supplémentaires depuis votre arrivée au Gouvernement.
Vous deviez réduire les inégalités, mais c'est le contraire que vous avez suscité.
Nous pensons, quant à nous, que l'on pourrait faire autrement. Au lieu de contribuer à l'augmentation des profits, il faut choisir de répondre à l'attente de la grande masse des habitants. La politique fiscale doit servir l'intérêt général et non des intérêts particuliers.
La remise en cause de la progressivité de l'impôt sur le revenu, qui ne représente que 17 % des recettes fiscales de l'Etat, en réduisant le nombre de tranches, en supprimant les 20 % d'abattement et en imposant le « bouclier fiscal », ne fait pas supporter le même taux d'effort à tous.
Rappelons qu'il y avait treize tranches en 1986 avec un taux marginal de 65 %. Vous proposez cinq tranches avec un taux de 40 % en 2007. Votre rêve serait de passer à quatre tranches et, pourquoi pas, d'instituer la flat tax, impôt à taux unique. Graduellement, vous voulez supprimer la progressivité.
Le résultat de ce choix sera le suivant : 40 % du gain ira aux 10 % des ménages les plus aisés.
Au contraire, nous pensons qu'il faut renforcer la progressivité de l'impôt, en fixant le taux marginal de prélèvement à 54, 8 % et le taux minimal à 6, 5 %, en remontant le seuil de la première tranche, en ajoutant deux nouvelles tranches et en fixant le taux de la huitième tranche à 50 % pour un revenu n'excédant pas 70 000 euros. Voilà des décisions qui iraient dans le bon sens et qui doivent être prises rapidement !
Pour les entreprises, vous ajoutez des allégements à hauteur de 3, 5 milliards d'euros. Vous exonérez de taxe professionnelle à tout va et vous supprimez la surtaxe dite « Juppé » pour ramener le taux de l'ISF à 33, 33 %, sous prétexte de libérer des capacités d'investissement.
Une réforme de l'impôt sur les sociétés efficace pour l'emploi devrait prendre en compte le besoin de soutien aux petites entreprises, à celles dont l'activité ne permet pas de dégager une forte valeur ajoutée, aux entreprises qui investissent dans le capital humain, en embauchant, en rémunérant correctement les salariés, en développant la formation. Un nouveau barème devrait avantager les entreprises qui réinvestissent leurs bénéfices, et non celles qui spéculent en Bourse.
Vous le voyez, monsieur le ministre, nous sommes favorables non pas simplement à une politique d'assistanat, mais bien à une véritable politique de création d'emplois.
La diminution comme peau de chagrin de la fiscalité sur le patrimoine va aussi dans ce sens : vous voulez supprimer, sans en avoir l'air, l'ISF, ...
... et garantissez un peu plus l'avenir des gros patrimoines dans le cadre des droits de succession. Vous allez favoriser ainsi l'accumulation de patrimoine au profit de ceux qui le peuvent : 10 % des ménages détiennent 45 % du patrimoine total dans notre pays et 59 % du patrimoine financier. En 2004, seules 25% des successions étaient taxables.
La mesure qui tend à ramener de dix à six ans le délai durant lequel l'abattement est plafonné à 50 000 euros va permettre de faire progresser plus rapidement le volume de patrimoine en franchise d'impôt. Une fois de plus, vous ne favorisez que les plus aisés !
Chaque année, la préparation de la discussion budgétaire donne lieu à un véritable lobbying de la part d'un certain nombre d'élus de la majorité pour encore réduire l'ISF. Vous revenez à la charge, en prétendant que cet impôt est confiscatoire, qu'il accable ses redevables.
Le Gouvernement n'a pas voulu paraître céder à cette pression d'une partie de la majorité. Il a donc inventé cette année la formule du « bouclier fiscal » : un cadeau de 400 millions d'euros pour 100 000 personnes, dont 200 millions réservés à moins de 15 000 d'entre eux !
Le plafonnement de l'impôt est une mesure dangereuse, car fondée sur l'idée que la propriété ne constitue pas réellement une ressource justifiant de participer au financement des dépenses publiques.
De fait, le plafonnement favorisera une économie de rente, fondée sur l'accumulation et la transmission d'une fortune productrice de faibles revenus monétaires. Cette réforme ne récompense ni le travail ni l'investissement productif. Rien de très dynamisant pour l'activité dans notre pays ! Les classes moyennes qui ne vivent que de leur travail apprécieront !
Comme si cela ne suffisait pas, un petit supplément a été accordé à ceux qui détiennent des actions depuis plus de six ans : une exonération de 75 % de leur valeur.
Mesdames, messieurs de la majorité, je vous invite vivement à détourner les yeux du CAC 40 et à aller voir ce qu'il en est pour les ménages surendettés. Leur situation en dit long sur ce qui grève les budgets des ménages les plus modestes. Ils sont asphyxiés par les dettes de la vie courante : dettes de loyers, de factures d'eau, d'électricité, de gaz, dettes de transport, de cantine scolaire, etc.
Ces dettes, ce ne sont pas les cinq euros supplémentaires par mois, en moyenne, de la prime pour l'emploi qui vont permettre d'y faire face. La prime pour l'emploi, qui d'ailleurs déresponsabilise un peu plus les entreprises, est d'ores et déjà engloutie.
Avec cette prime pour l'emploi, vous reconnaissez, en fait, la faiblesse du pouvoir d'achat des salariés, mais vous ne prenez pas la bonne mesure. Il est tout de même paradoxal que celui qui produit les richesses ne puisse pas vivre du seul revenu de son travail, et que la puissance publique doive compléter ses ressources.
Ce que demandent les salariés, c'est un salaire décent pour vivre, faire vivre leur famille.
De plus, cette prime pour l'emploi ne compense pas les augmentations d'impôts, notamment des impôts sur la consommation.
L'instauration d'une TVA dite « sociale » reporterait les cotisations sociales sur l'ensemble des consommateurs. Elle ne ferait qu'aggraver les conditions de vie de la masse de nos concitoyens, réduirait la consommation, aggraverait la situation économique de notre pays.
S'il y a des impôts à alléger, ce sont ceux qui pèsent sur le plus grand nombre, et singulièrement sur ceux qui ont les plus bas revenus. Cela concerne autant la TVA et la taxe intérieure sur les produits pétroliers que les impôts locaux ou la taxe d'enlèvement des ordures ménagères, la TEOM.
Ce dont ont besoin les salariés, ce sont des services de qualité. Pour cela, les collectivités territoriales doivent avoir des ressources plus stables.
Or, votre politique conduit, là encore, à des augmentations. Les transferts de charges sans compensation au niveau des exigences, le désengagement de l'Etat, la réforme de la taxe professionnelle sont autant de mesures qui, loin de « responsabiliser les élus » - comme s'ils n'étaient pas responsables ! - mettent ces derniers dans l'impossibilité d'assumer pleinement leur rôle auprès des habitants.
La réforme de la taxe professionnelle, nous étions nombreux à l'attendre et à avoir travaillé sur le sujet. Là où, en nombre, nous avons pointé du doigt le problème essentiel de l'assiette de cet impôt, où des solutions ont été proposées pour moderniser cette base, vous abdiquez, répondant aux appels des sirènes du Mouvement des entreprises de France, le MEDEF, sans contrepartie.
Nous avons déposé une proposition de loi qui vise à introduire la taxation des actifs financiers des entreprises, banques et assurances, grande distribution, qui représentaient 3 500 milliards d'euros en 2002 et qui pourraient être taxés à un taux de 0, 5 %.
Les collectivités territoriales bénéficieraient ainsi de ressources supplémentaires et nous pourrions dans le même temps dissuader les spéculations financières qui jouent contre l'emploi.
Votre projet montre bien vos choix politiques. Vous cassez tout ce qui pourrait contribuer à développer plus de solidarité !
Après la violence que nous venons de vivre dans quantité de villes qui accueillent en grand nombre ceux qui ont de très faibles revenus, vous avez déclaré vouloir répondre aux attentes de ces populations. Rien dans le projet de budget qui nous est proposé n'y répond, pas plus d'ailleurs que dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, le PLFSS, qui vient d'être voté.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, contrairement à l'orateur qui vient de me précéder, je voterai le budget.
Je le voterai pour plusieurs raisons.
Tout d'abord, j'en ai assez de ces problèmes franco-français alors que nous avons une monnaie unique, que nos entreprises sont agressées, mises en compétition par l'ensemble des entreprises mondiales ...
... et alors que, dans ce pays, tous les problèmes ont une dimension internationale.
Ensuite, comme l'ont dit très justement les deux orateurs de mon groupe qui m'ont précédé, MM. Henri de Raincourt et Alain Lambert, notre optique est de favoriser le travail, de cantonner l'assistance à ceux qui en ont vraiment besoin et de redresser nos finances publiques.
Je n'entrerai pas dans des querelles de chiffres. S'agissant du taux de croissance, par exemple, je ne dirai pas qu'il pourrait être plus faible. L'expérience m'a appris que les statisticiens et les conjoncturistes se trompent toujours. Quant au PIB, on a beaucoup parlé d'un taux de croissance de 0, 7 % au troisième trimestre. Attention, monsieur le ministre, l'INSEE va sûrement réviser ses prévisions. J'ai connu cela de très près. Si ce taux passe à 0, 8 %, vous serez heureux, mais s'il retombe à 0, 6 % ... Voilà pourquoi je n'entrerai pas dans des querelles de chiffres.
En revanche, trois éléments dans ce budget me paraissent marquer un tournant, indépendamment de la grande réforme que vient d'évoquer M. Alain Lambert, qui est l'un des pères de la nouvelle loi organique relative aux lois de finances.
Le premier élément est l'endettement, marqué par un début, timide certes mais un début quand même, de stabilisation. Le deuxième est le plafonnement d'un certain nombre de prélèvements fiscaux, ce qui est une très bonne idée. Enfin, le troisième, à mon avis le plus important, est l'appel à la responsabilité de tous les acteurs économiques et sociaux de notre pays.
Je commencerai par l'endettement.
Les chiffres que vous nous présentez sont en très légère progression, ce qui marque un début de stabilisation. C'est important, car cela permet de respecter le pacte de stabilité européen, à savoir un déficit public qui ne dépasse pas 3 % du PIB. Certes, il vous a été reproché tout à l'heure quelques mesures de débudgétisation. Mais, personnellement, je n'ai jamais connu, en quarante ans, un budget qui n'en contienne pas ! Par conséquent, vous n'êtes nullement responsable.
De plus, les chiffres que vous nous avez indiqués permettent également de penser que, grâce à la cession d'actifs, il sera possible de stabiliser notre endettement à 66 % du PIB, soit un taux qui n'est pas trop éloigné du taux de 60 %, qui est le critère absolu.
À cet égard, je me permets de faire trois propositions.
D'abord, il faut vraiment accélérer la cession des immeubles publics qui sont trop nombreux et qui représentent, avez-vous dit, 36 milliards d'euros. Une politique menée sur dix ans avec un montant des cessions qui serait non plus de 600 millions d'euros comme il devrait être cette année, mais de 3 milliards ou 4 milliards d'euros, permettrait d'accélérer le désendettement.
Ensuite, pourquoi ne pas utiliser la totalité, et non plus une partie, des cessions d'actifs, notamment des participations dans les entreprises, pour se désendetter ?
Enfin, voilà quelques années, j'avais dit ici que la gestion de la dette faite par le Trésor public était beaucoup moins efficace que celle qui était faite par nos collectivités territoriales, ces dernières ayant beaucoup développé les crédits de trésorerie, les swaps, bref, l'ensemble des opérations sur les marchés financiers.
L'État s'y est mis : vous nous avez parlé de France Trésor et du Service France domaine. C'est très bien, mais il faut faire encore mieux afin que l'équilibre que vous nous présentez ne soit pas mis en péril par une remise en cause du début de désendettement en raison du risque évident d'augmentation des taux d'intérêt.
Après l'endettement, le deuxième élément qui me paraît marquer un tournant important dans ce budget est le plafonnement, c'est-à-dire le bouclier fiscal et la réforme de la taxe professionnelle.
J'approuve totalement votre théorie du bouclier fiscal. En effet, nous devons donner à nos partenaires européens, à nos entreprises, à nos chefs d'entreprise, aux ménages, aux cadres qui vont venir travailler ici une indication chiffrée. Vous avez choisi de ne pas intégrer la CSG, afin de ne pas faire apparaître un taux de plafonnement des impôts trop important, taux qui, avec la CSG, aurait atteint 70 % ! En revanche, vous intégrez l'impôt sur le revenu, l'impôt de solidarité sur la fortune et les impôts locaux, ce qui, je crois, est une bonne chose.
Contrairement à ce qui a été dit par certains ici, je suis persuadé - les maires que nous sommes connaissent bien le « terrain » sur lequel nous travaillons - que le plafonnement à 60 % est important, car il permettra de régler la situation de petits contribuables, notamment les chefs de petite entreprise, les artisans, les petits commerçants, les cadres en difficulté parce qu'ils se sont brutalement retrouvés au chômage, et je vous félicite d'avoir recouru à cette opération.
Bien sûr se pose le problème de la récupération des sommes qui auront été remboursées. Vous connaissez ma thèse à l'égard des collectivités locales : sauf à monter une formidable usine à gaz, il est impossible de demander le remboursement à chaque collectivité du trop-perçu. Vous proposez une mesure globale par prélèvement sur la DGF. Le Gouvernement vient de le faire dans le cadre de la recentralisation d'un certain nombre de compétences, notamment sur la santé, la tuberculose, etc. Vous avez prélevé sur la DGF de cette année une somme de 41 millions d'euros.
Elle est ici de 40 millions à 43 millions d'euros sur une masse de 37 milliards d'euros, ce qui n'aura donc pas de conséquences trop graves. Encore faut-il que tout le monde soit responsable. Ce sera l'objet de mon dernier point.
La solution que vous avez adoptée pour la taxe professionnelle est bonne. J'ai participé, comme certains d'entre nous, à la commission Fouquet. Nous étions conscients des bouleversements qu'entraîne tout changement d'assiette.
Ayant vécu le premier, je n'envisageais pas d'en vivre un second ! Ceux qui y gagnent ne disent rien, ceux dont la situation est inchangée se demandent pourquoi ils n'ont pas constaté une baisse de leurs cotisations, et ceux qui voient leur note augmenter poussent des cris et mobilisent l'ensemble de l'opinion publique ! Vous avez donc eu raison de ne pas vous engager dans une telle opération.
Mais je crois qu'il faut insister sur deux points.
D'abord, le plafonnement à 3, 5 % de la valeur ajoutée va permettre aux entreprises qui sont compétitives et qui veulent se développer sur le marché mondial d'avoir la garantie qu'elles ne seront pas surtaxées.
Ensuite, le plafonnement répare l'une des erreurs graves commises par le gouvernement socialiste, notamment par M. Strauss-Kahn, ...
... qu'on dit être un excellent économiste ! Au lieu de supprimer la taxation des investissements, ce qu'il fallait faire pour préserver la compétitivité de nos entreprises et donner à ces derniers une bonne situation, il a cédé au chant des sirènes et a choisi de détaxer la part salaires de la taxe professionnelle, ce qui ne pouvait que se traduire par un recul de l'investissement productif et par la délocalisation d'un certain nombre d'entreprises. Il était donc important de décider un plafonnement.
Toutefois, il conviendrait de le réduire à 3 % ou à 2, 5 % les années prochaines pour garantir aux collectivités territoriales, notamment aux communautés d'agglomération et aux communautés urbaines dont c'est la ressource importante, une ressource pérenne. Dès lors, les entreprises pourront investir dans de bonnes conditions.
On a beaucoup parlé des 35 heures, mais la réduction en matière de taxe professionnelle et le refus de créer en France des fonds de pension sont des erreurs aux conséquences beaucoup plus graves à terme sur l'évolution de notre pays dans la compétition mondiale. C'est pourquoi je suis beaucoup plus sévère sur ces erreurs-là que sur la première.
Enfin, le dernier élément intéressant dans ce projet de budget est l'appel à la responsabilité des différents acteurs : les ministres dans le cadre des nouvelles organisations de la loi organique et donc de leurs administrations, les dirigeants des collectivités locales puisque, aussi bien pour le bouclier fiscal que pour la taxe professionnelle, s'ils décident des taux trop élevés, ils auront un certain nombre de choses à payer.
La responsabilité doit être étendue aux dirigeants des caisses de nos régimes sociaux et à l'ensemble des acteurs de la vie économique, car nous sommes dans un système trop opaque, dans lequel chacun se défile et tente de transférer les responsabilités sur d'autres.
Votre budget marque bien, surtout avec la réforme de la loi organique relative aux lois de finances, cet appel à la responsabilité. Nous ne pourrons redonner à notre pays sa place dans l'Europe et dans le monde qu'en faisant davantage appel à la responsabilité.
Cette responsabilisation aura de nombreuses conséquences : il faudra l'intégrer dans nos programmes scolaires, dans nos programmes de formation, dans l'avancement des fonctionnaires, etc. Mais c'est essentiel.
En conclusion, ce budget marque une pause dans l'endettement, crée des plafonnements aux prélèvements qui sont des indications données au monde entier et fait appel à la responsabilité de l'ensemble des acteurs économiques. C'est pour ces trois raisons que je tiens à le voter et que je vous soutiendrai dans cette partie difficile qui est la vôtre en 2006.
Applaudissements sur les travées de l'UMP.
M. le président souhaite que les orateurs ne dépassent pas un temps de parole de dix minutes : je vais donc vous demander d'être très attentifs, monsieur le ministre, mes chers collègues, car, les éléments que je tiens à vous communiquer étant nombreux, je les exprimerai très vite ! (Sourires.)
Mais ne vous inquiétez pas, monsieur le ministre, je ne dirai rien de désagréable, et cela finira bien !
Nouveaux sourires
Ce matin, le rapporteur général du budget, M. Philippe Marini, nous disait : « Soyons modestes, ambitieux et courageux. » Je vais m'efforcer de mettre à profit ces trois recommandations. Modeste, ce sera facile pour moi. Ambitieux, je vais essayer de l'être pour notre économie. Courageux, cela revient à vous dire ce que je pense et, en cela, vous pouvez compter sur moi.
J'ai le plaisir de vous dire que la présente loi de finances est révélatrice d'avancées intéressantes. Le critère qui caractérise désormais un bon budget n'est plus de démontrer qu'il a progressé d'une année sur l'autre. Notre discussion devrait donc échapper au travers qui consiste, selon que l'on se situe dans la majorité ou l'opposition, à voir le verre à moitié vide ou à moitié plein !
L'horizon s'éclaircit. Nous osons enfin aborder le débat budgétaire sous l'angle de l'efficacité et de la mesure du résultat. Le citoyen doit savoir si son investissement au travers de ses impôts et taxes a été bénéfique pour le pays.
Mardi, lors de son audition devant la commission des finances, le ministre d'État, ministre de l'intérieur, a démontré qu'il était possible d'optimiser les crédits votés et d'obtenir des résultats. Celui qui paye des impôts préfère que la police arrête des voyous, plutôt que d'observer ces derniers, et que les personnes en situation irrégulière soient reconduites dans leur pays, plutôt que d'être hébergées aux frais de l'État et des collectivités.
Il y a là des objectifs, des résultats et une politique.
Ce matin, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, Thierry Breton, a bien voulu nous rappeler qu'il fallait un État fort et régalien. Nous l'approuvons et il faut continuer dans cette direction.
Cette loi de finances nous permet de découvrir l'amorce de choix politiques intéressants : maîtrise et simplification du système fiscal, priorité à l'emploi, attractivité de la France, meilleure justice fiscale et sociale, préparation de l'avenir, travail mieux rémunéré que l'inactivité.
Je prends volontiers acte de ces éléments positifs et des orientations nouvelles affichées avec détermination. Mais l'on peut encore entrevoir, ici ou là, une certaine retenue ou timidité à briser les habitudes qui pèsent sur notre budget et notre économie.
Je vais essayer modestement d'avancer quelques réflexions, voire quelques propositions.
La création d'emplois marchands, ceux qui sont productifs de richesse nationale, ne peut se faire que dans un environnement favorable. Cette notion est très présente dans le corps de réflexion gouvernemental, mais il faut passer un peu plus aux actes.
Notre environnement franco-français a encore certains progrès à faire pour convaincre l'entreprise qu'elle est bien le coeur de cible de notre action économique et que nous avons intégré que c'est en elle que se trouve la création des richesses.
La complexité législative et la complexité réglementaire ne sont plus acceptables ni supportables dans un monde des échanges qui ne connaît plus les frontières et où celui qui produit peut voyager et déplacer les lieux de production au gré de ses intérêts.
Implanter en France relève d'un parcours initiatique qui, parfois, frôle le châtiment ! Ce n'est pas une clause de style, c'est la réalité du quotidien d'un exécutif départemental qui s'intéresse à l'économie et doit déployer des trésors d'ingéniosité pour retenir l'intérêt de l'entreprise candidate à l'implantation.
Je reprendrai l'image du steeple-chase que Philippe Marini nous a présentée ce matin.
Le premier obstacle est la Direction régionale des affaires culturelles, ou DRAC, qui va diagnostiquer et prescrire des fouilles pour des coûts représentant souvent plusieurs fois la valeur du terrain, sans aucun contrôle, alors que les services fiscaux ont pris plusieurs mois pour estimer le terrain et imposer un prix.
La Direction régionale de l'environnement, ou DIREN, qui a toujours des espèces rares à protéger, herbes rares ou scarabées dorés, est souvent le deuxième obstacle. Vous n'imaginez pas le nombre d'espèces rares que nous foulons chaque jour sans la moindre précaution !
Puis vient la Direction régionale de l'industrie, de la recherche et de l'environnement, ou DRIRE, qui va éplucher à juste titre l'autorisation d'exploiter.
Les pompiers vont ensuite être « missionnés » par le préfet pour vérifier le diamètre des canalisations.
La Direction du travail vérifie que chaque salarié voit bien la lumière du jour de son poste de travail, en oubliant bien souvent que ses propres fonctionnaires travaillent dans des bureaux aveugles !.)
En toute logique, la Direction départementale des affaires sanitaires et sociales, ou DDASS, aura son mot à dire sur les conditions sanitaires.
En dernier ressort, la Direction départementale de l'équipement, ou DDE, s'apercevra probablement que l'implantation choisie n'est finalement pas la bonne et qu'il faut tout reprendre à zéro !
Ainsi, les mois s'égrènent avec, en prime, l'application des lois sur l'eau, sur l'air, sur le bruit et, pour couronner le tout, les enquêtes publiques.
Bien souvent, le temps de se retourner, et l'entreprise est partie développer ses emplois dans un autre pays !
Bien sûr, nous sommes tous favorables à des implantations bien réfléchies et respectueuses des normes, mais attention au zèle français et veillons à ne pas créer des contraintes là où nos concurrents n'en ont pas.
Monsieur le ministre, cela ne coûte rien au budget d'organiser tout cela et de désigner un chef de file dont l'objectif pourrait être de mener ses dossiers dans un délai contraint et contractualisé. Selon le dicton, « Le temps, c'est de l'argent ! » Cela permettrait effectivement à l'État de faire des économies et, de plus, cela lui rapporterait, car plus il y a d'entreprises et plus tôt elles produisent, plus elles lui rapportent d'argent ! Faisons en sorte que le temps de l'entreprise soit celui de l'administration, et non l'inverse.
Mais il est une autre contrainte, après celle qui est liée au poids de la réglementation : celle des 35 heures.
Depuis cette loi malheureuse, certains veulent toujours faire croire que le partage du travail crée l'emploi.
Notre expérience de terrain nous démontre que c'est là une vue de l'esprit ou, plus exactement, un raisonnement simpliste et à courte vue.
Thierry Breton nous a bien redit ce matin et à juste titre que c'est l'emploi qui crée l'emploi.
Ne refusons plus de voir ce qui se passe chez nos voisins et même de plus en plus chez nous. En France, dans nombre d'entreprises, les syndicats acceptent de revoir les horaires à la hausse pour sauver des emplois, pour participer à la baisse des prix de revient et donc à la compétitivité.
Quant à la complexité de notre droit du travail, elle n'est plus à démontrer, et elle repousse certaines entreprises à venir s'installer chez nous.
Il en est de même de l'insécurité juridique et fiscale. J'approuve tout à fait votre objectif visant à rendre l'environnement fiscal de l'entreprise plus favorable, monsieur le ministre. L'allégement de la fiscalité sur les investissements nouveaux et le plafonnement de la taxe professionnelle vont certes dans le bon sens, mais il faut stabiliser et sécuriser la situation.
Contrairement à l'État, l'entreprise n'a pas une vision budgétaire annuelle. Lorsqu'elle investit, elle veut et doit avoir des perspectives à cinq ans, voire à dix ans. Le retour sur investissement est une notion d'entreprise bien légitime.
En rentrant ce matin, à une heure, après le débat relatif au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006, j'ai entendu qu'on avait décidé d'imposer une nouvelle taxe sur les billets d'avion. Je remets en cause non pas l'objectif, mais le moyen. Vous allez faire plaisir à nos concurrents, comme l'aéroport de Bruxelles ! C'est, à mon avis, un mauvais coup porté à notre économie.
De même, vous n'avez pas dit, monsieur le ministre, quel avenir vous réserviez à la TVA à 5, 5 %. Dans le secteur du bâtiment, nous savons que cette baisse de TVA a été positive pour les emplois, pour l'activité et pour les recettes de l'État ; il faut que celle-ci soit reconduite. De la même façon, tous les restaurateurs attendent que la promesse qui leur a été faite d'abaisser le taux de TVA à 5, 5 % soit tenue.
J'aborderai maintenant une autre question qui nous pénalise très fortement et qui est souvent considérée comme provocatrice - mais ce n'est que par idéologie -, je veux parler de l'impôt de solidarité sur la fortune.
Confisquer les revenus de ceux qui sont soumis à l'ISF n'enrichira pas ceux qui sont moins riches !
Au contraire, la France en subit tous les effets pervers. N'ayons pas honte d'être un pays dans lequel on peut s'épanouir et réussir, et je remercie le Gouvernement d'avoir fait quelques gestes en ce sens, même s'il peut encore mieux faire.
À l'occasion de l'ouverture du capital d'EDF, je ne peux pas ne pas évoquer rapidement le choix du Gouvernement d'ouvrir le capital de certaines entreprises d'État.
Près de cinq millions de particuliers ont acheté des actions EDF au prix de trente-deux euros. Jusqu'à présent, jamais une privatisation partielle n'avait connu un tel succès. France Télécom avait attiré 3, 8 millions de souscripteurs, tandis que Gaz de France en avait attiré 3, 1 millions.
Le succès sans précédent de l'opération EDF vient de bousculer un certain nombre de schémas beaucoup trop réducteurs. Les syndicats, campés dans leurs certitudes et leur conservatisme, voudraient faire croire que les Français ne s'intéressent qu'aux actions revendicatrices. La preuve est faite qu'ils s'intéressent aussi aux actions en capital.
L'afflux des demandes montre que EDF reste bien l'entreprise préférée des Français, ce que l'on savait depuis la tempête de décembre 1999. Mais le camouflet le plus sévère infligé aux syndicats est venu des salariés d'EDF eux-mêmes. En effet, sur un total de 161 310 salariés, 100 000 d'entre eux ont souscrit à l'offre de privatisation. Plus de 50 % des électriciens ont donc cédé à l'horrible tentation capitalistique. On ne peut s'empêcher de rapprocher ce pourcentage, supérieur à 50 %, de celui des grévistes - 8 % - qui avaient répondu à l'appel de la CGT, le 8 novembre dernier, pour dénoncer la privatisation d'EDF. Le Gouvernement a remporté là une victoire évidente ; il faut continuer en ce sens.
J'évoquerai maintenant diverses pistes devant concourir à améliorer la situation.
Peut-on parler des effectifs de la fonction publique ? Il faut promouvoir fortement la gestion prévisionnelle des effectifs. Ce n'est ni une hérésie ni une provocation ; ce n'est que réalisme. La pyramide des âges est là pour nous y aider.
Est-ce un acte d'irrespect que d'annoncer, comme l'a fait Georges Tron, que l'on pourrait aisément ne pas remplacer durant dix ans la moitié des fonctionnaires partant à la retraite ?
La fonction publique représente 42, 8 % du budget. En 2006, on avait prévu de réduire de 5 200 postes les effectifs de la fonction publique, qui s'élèvent à 2, 3 millions, soit 0, 0022%. À la suite des problèmes soulevés dans les banlieues, on a annoncé la création de 5 000 emplois. Nous sommes donc à « zéro volume ».
Monsieur le ministre, vous avez une opportunité dans le cadre de la décentralisation : négocier avec les collectivités afin que les transferts correspondent à des économies d'échelle et non pas à une inflation des effectifs résultant de la résistance des corporatismes.
La décentralisation concerne entre autres la DRAC, la DDE, la DDASS et l'éducation nationale. Compte tenu de la difficulté actuelle des négociations avec la DDE, je puis vous assurer que nous allons connaître une inflation des effectifs : l'État ne sait pas réduire la voilure, car ce n'est pas dans sa culture.
Monsieur le ministre, il est toujours difficile d'élaborer un budget ; néanmoins, vous avez la chance de vous trouver dans un environnement favorable, grâce, il est vrai, à l'action du Gouvernement.
En effet, comme vous l'avez indiqué, la croissance repart, les exportations s'améliorent, les enquêtes de conjoncture sont plutôt optimistes. Alors, pensez aux collectivités et notamment aux départements, qui ont eu à supporter hier le revenu minimum d'insertion, le RMI, l'allocation personnalisée d'autonomie, l'APA, les 35 heures et les services départementaux d'incendie et de secours, les SDIS ; ils supportent aujourd'hui la suppression de la vignette, la taxe professionnelle plafonnée, le bouclier fiscal et qui, demain, devront supporter le handicap et le transfert de nouvelles charges, sans compensation intégrale.
La formule « à l'euro près » est douce à entendre, mais elle n'est pas, à ce jour, une réalité. Je puis le démontrer, au travers de nombreux exemples, tels que, notamment, s'agissant des routes, le décroisement des financements, notion perverse, ou encore les contractuels de l'éducation nationale. En l'état actuel des choses, tous les départements calent leur budget sur une hausse de 5 % à 10 %. Cela ne peut satisfaire les exécutifs. Au cours de cette discussion budgétaire, il faudra que vous acceptiez de reconnaître, monsieur le ministre, que le compte n'y est pas.
Nous pouvons également réfléchir sur une réorganisation territoriale. En effet, l'apparition de nouveaux échelons et leur multiplication - pays, syndicats, intercommunalités - ont certes amélioré sur certains points l'efficacité locale, mais à quel prix.
Monsieur le ministre, je compte sur vous pour être, au cours de cette discussion, comme vous l'avez dit, une maison de verre. Il faut que vous soyez sincère et responsable et que vous reconnaissiez que vous pouvez améliorer les dispositifs susceptibles de favoriser le développement de l'entreprise et faire en sorte que les collectivités, notamment les départements, ne soient pas la soupape du trop-plein des charges de l'État.
Monsieur le ministre, vous constaterez que j'ai été modeste, ambitieux et courageux. J'irai au bout de mon courage en soutenant totalement ce projet de budget.
Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, bien que ce projet de budget ne fasse que stabiliser le déficit budgétaire, je le voterai moi aussi.
En effet, ce projet de budget porte en lui une politique courageuse et ambitieuse visant à restaurer la compétitivité de la France. À mon sens, c'est la seule façon de desserrer l'étreinte de l'endettement que nous connaissons et que la maîtrise des dépenses publiques seule ne parviendra pas à réduire. Il nous faut de la croissance.
Je me poserai quatre questions relatives à l'équilibre budgétaire en me référant, très modestement, à certains chiffres.
Tout d'abord, monsieur le ministre, votre marge de manoeuvre est-elle surévaluée ?
Les chiffres le prouvent, notre marge de manoeuvre est faible. L'évolution spontanée des recettes, hors indexation du barème de l'impôt sur le revenu, n'est que de 12, 5 milliards d'euros. On peut certes y ajouter quelques recettes non fiscales, mais le total n'est que de 14 milliards d'euros. C'est moins que la marge dont disposait M. Lambert, alors ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire, voilà deux ans, et ce n'est guère plus que celle de l'année dernière.
On peut donc se demander s'il s'agit d'une évaluation sincère. Considérant l'évolution de la conjoncture actuelle, je dirai « oui » et j'avancerai un argument supplémentaire : le Gouvernement a été prudent en matière de ce que l'on appelle techniquement « l'élasticité ». En effet, celle-ci est faible. La marge de manoeuvre n'est donc pas surévaluée.
Cependant, ce qui me paraît grave - permettez-moi de le dire -, c'est que, depuis quatre ans, notre croissance potentielle, c'est-à-dire le maximum que nous pouvons atteindre, est restée à un niveau très bas, très inférieur à celui qui était enregistré auparavant. Bien que notre consommation domestique soit satisfaisante, que les investissements en logements dépassent le nombre de 400 000 par an, il faut que cette croissance potentielle augmente.
L'évaluation dont nous disposons est donc correcte.
Ensuite, comment partager cette marge de manoeuvre entre l'État, les collectivités locales, la réduction d'impôts ? Je connais les choix que le Gouvernement a faits.
Le premier choix était contraint : vous avez proposé, monsieur le ministre, une réduction d'impôts de 3, 9 milliards d'euros. C'est bien sûr la conséquence de décisions passées. Mais n'était-il pas souhaitable de réduire la taxe professionnelle sur les investissements nouveaux ? N'était-il pas souhaitable de déduire les intérêts des prêts à la consommation du revenu imposable ? Je regrette la méthode choisie, mais je constate que ce fut un bon choix. Il n'empêche que ces réductions d'impôt représentent 28 % de la masse disponible.
Le deuxième choix a été de considérer comme logique que les collectivités locales qui investissent aient plus que la norme que se réservait l'État. Là aussi, en respectant le contrat de croissance et de solidarité, l'État a bien fait de favoriser légèrement - c'était une décision difficile à prendre - les collectivités locales. J'ai notamment constaté que les crédits octroyés au Fonds de compensation pour la TVA dépassent 4 milliards d'euros. De plus, le FCTVA progresse de 6 %, en raison de l'augmentation de l'investissement local ; ce dernier est donc porteur de croissance. Ce deuxième choix est par conséquent positif.
Que faire du solde ? Vous appliquez la norme de croissance de 1 %, règle d'argent - la règle d'or serait d'arriver en valeur au taux de 0 % -, ce qui vous permet de dégager une certaine marge.
Je constate que vous avez directement favorisé l'emploi des personnes les plus modestes, en prévoyant une augmentation de la prime pour l'emploi à hauteur de 500 millions d'euros et, indirectement, en consolidant les allégements de charges à hauteur de 1, 9 milliard d'euros qui seront transférés à la sécurité sociale.
Je le dis clairement, plutôt qu'un inventaire à la Prévert, j'aurais préféré que l'on crée, ou plutôt que l'on recrée, puisque cela existait dans les années 1977 et 1978, un prélèvement sur les recettes de l'État en faveur de la sécurité sociale, ...
... qui aurait permis d'apprécier globalement ce transfert de charges. Toutefois, je vous en donne acte, vous avez porté votre effort sur les salariés de condition modeste.
Enfin, ce projet de budget est-il cohérent avec les souhaits que la majorité a exprimés au cours de la législature ?
Je constate que vous avez respecté les lois d'orientation et de programmation pour la justice, pour la sécurité intérieure et, je puis vous l'assurer en tant que rapporteur spécial de la mission « Défense », la loi de programmation militaire. Nous allons consolider notre marine avec les contrats des frégates multi-missions et des sous-marins nucléaires d'attaque. Je ne l'oublie pas, les dépenses relatives aux équipements militaires représentent actuellement, dans le projet de budget, près de 75 % des dépenses d'équipement. Je le dis clairement, au-delà de la loi de programmation militaire, se posera la question de la poursuite de l'effort.
Cela étant, en tant que parlementaire de l'ouest de la France, je constate que cela va donner beaucoup de travail aux sièges de Lorient ou de Cherbourg, par exemple.
Par ailleurs, monsieur le ministre, ce budget est cohérent compte tenu de la volonté de réaliser des économies.
M. Marini, dans son excellent rapport, a fait état d'économies à hauteur de 900 millions d'euros. Même si je n'ai aucune raison de remettre en cause cette affirmation, j'aimerais que M. le ministre détaille ces économies, dont je me réjouis.
Enfin, ce budget est cohérent compte tenu de la priorité donnée à l'innovation et à la recherche. Ainsi, les crédits accordés aux nouvelles agences, l'Agence pour l'innovation industrielle et l'Agence nationale de la recherche ont été augmentés : 1 milliard d'euros cette année, 2 milliards, je l'espère, l'année prochaine, et 3 milliards dans deux ans, même si ce montant semble très important. Toutefois, n'allons pas trop vite. En effet, lorsqu'on engage une telle politique, rien n'est pire que d'avoir un jour à pratiquer une politique de stop and go. Faisons donc en sorte que cet effort, que j'approuve, soit correctement réparti dans le temps.
J'en arrive à ma dernière question. Ce budget est-il soutenable sur le long terme ?
Dans le « bleu » budgétaire - mais cette expression n'a plus lieu d'être -, on trouve une excellente présentation du budget, réalisée sur le modèle du budget d'une collectivité locale. On voit donc immédiatement apparaître la double charge de la dette.
L'addition de la dette viagère, à savoir les pensions des fonctionnaires, et de la dette financière, à savoir les emprunts que nous contractons régulièrement, représente aujourd'hui 30 % des dépenses de la France, et cet ensemble ne peut que croître car, même si l'on parvenait à limiter la dette financière en restreignant le recours à l'emprunt, nous serions néanmoins confrontés à l'explosion des pensions des fonctionnaires.
C'est pourquoi, monsieur le ministre, il faut avoir une politique claire à l'égard des autres composantes de la dépense publique, notamment des crédits d'intervention, qui représentent 60 milliards d'euros.
Vous avez engagé des audits sur les crédits d'intervention. S'il faut en effet y mettre bon ordre, il ne faut pas pour autant agir en considérant chaque individu ou chaque entreprise isolément, mais veiller à la cohérence de toutes ces interventions et s'assurer de leur évaluation.
Il faudra également engager un politique tendant à favoriser la productivité des fonctionnaires : si celle-ci augmentait de 0, 5 %, il serait alors possible de gagner 11 000 emplois par an.
Mes chers collègues, nous empruntons 130 milliards d'euros alors même que nos investissements ne se montent qu'à 18 milliards d'euros. La différence est consacrée soit au remboursement de la dette en capital, soit au paiement des intérêts. Je souhaite ne plus revoir cette situation au cours des prochaines années !
C'est pour y mettre fin qu'il faut faire croître la productivité de la France. Ce budget y contribuera, et c'est pourquoi je le voterai.
Applaudissements sur les travées de l'UMP ainsi que sur certaines travées de l'UC-UDF.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les événements qui ont ébranlé la métropole ces dernières semaines ainsi que les manifestations de violence qui se sont multipliées nous rappellent que notre politique en faveur d'une meilleure intégration des plus défavorisés afin de faire cohabiter des communautés d'origines et de cultures différentes est probablement insuffisante, tout comme le sont notre politique de lutte contre le chômage et celle que nous menons en direction d'une jeunesse en perte d'identité et en quête de repères.
Ce sont ces mêmes difficultés que nous vivons quotidiennement outre-mer, et ce depuis plusieurs années.
Prenons le cas du chômage. Il résulte notamment de l'inadéquation des demandes d'emploi aux besoins de l'économie, inadéquation qui est à l'origine d'une grande crispation sur le marché du travail.
C'est particulièrement un handicap dans nos collectivités d'outre-mer, où le tissu économique, encore très fragile, s'appuie sur une population moins nombreuse qu'en métropole et, par conséquent, sur un marché trop étroit et sur activités qui ne sont pas assez diversifiées.
Nos économies ultramarines sont encore très insuffisamment développées. Nous sommes donc contraints d'appliquer une politique interventionniste pour encourager leur modernisation et leur dynamisme. C'est pourquoi le soutien de la métropole est indispensable.
Or, depuis deux ou trois ans maintenant, lors de l'examen du projet de loi de finances, les commissions des finances de l'Assemblée nationale et du Sénat rappellent chaque année la nécessité absolue de réduire les dépenses publiques.
Bien entendu, cette volonté est tout à fait louable, et nous la partageons tous, à plus forte raison dans le contexte budgétaire actuel.
Ce qui est moins louable, a contrario, c'est de pointer du doigt dans le même temps - et de façon récurrente - ce qu'on appelle communément les « niches fiscales » et « privilèges » accordés à l'outre-mer.
D'aucuns pourraient, par un raccourci facile, laisser à penser que les populations ultramarines sont responsables du déficit budgétaire de l'État.
Mes chers collègues, je m'insurge contre cette vision simpliste, réductrice, voire extrêmement dévalorisante pour nos collectivités.
Je voudrais d'ailleurs emprunter à François Baroin, ministre de l'outre-mer, sa formule selon laquelle, « en outre-mer, on ne parle pas de niches fiscales mais de rattrapage économique ».
Je regrette vivement que certains de nos collègues persistent, de cette manière, à vouloir focaliser l'attention sur la notion d'évasion fiscale : cela occulte les véritables objectifs de toutes ces mesures, à savoir l'amélioration de la situation économique et sociale des populations ultramarines par une transformation profonde et durable de l'outil de production des collectivités concernées.
Prenons l'exemple très révélateur du taux de chômage : je rappelle qu'il s'établit encore en moyenne à 23 % dans les départements d'outre-mer et qu'il dépassait 30 % au cours de la dernière décennie, soit un taux trois fois supérieur à celui de la métropole.
De même, la part des moins de vingt-cinq ans dans l'ensemble des demandeurs d'emploi des DOM est passée, en dix ans, de 23 % à 15 % grâce au dispositif d'aide à l'emploi des jeunes.
Cela signifie que les mesures de soutien à l'emploi salarié ont d'ores et déjà porté leurs fruits.
Pour autant, aujourd'hui encore, le taux de chômage, dans les DOM est encore deux fois plus élevé qu'en métropole. Il dépasse en effet la barre des 20 %.
Je ne crois pas que l'on puisse nier, au vu de tels constats, la nécessité d'un rattrapage.
Selon plusieurs autres indicateurs, le rattrapage économique et social est bien en marche. En attestent le taux de création d'entreprises, qui a été supérieur en 2003 dans les DOM à ce qu'il a été dans l'ensemble des régions métropolitaines, ou encore l'importance de la croissance en valeur du produit intérieur brut de ces départements.
De plus, nombre d'entre vous dénoncent l'impact sur le budget de l'État de la défiscalisation des investissements réalisés dans les départements et collectivités d'outre-mer, en minimisant ses effets induits sur l'emploi.
Vous n'ignorez pas, pourtant, avec quelle rigueur les agréments de défiscalisation sont délivrés par Bercy, dont les décisions sont étroitement liées à l'engagement pris par les promoteurs de créer des emplois directs !
Cet important dispositif a notamment permis, de 1995 à 2003, le financement d'investissements qui se sont accompagnés de la création de 8 000 emplois dans les DOM.
Pour la seule année 2003, s'agissant des collectivités d'outre-mer, 843 emplois directs ont été créés, dont 513 en Polynésie française et 291 en Nouvelle-Calédonie.
Ne stigmatisons pas l'outre-mer ! Il n'y a pas d'opposition entre les intérêts des ultramarins et ceux des métropolitains.
Il nous est essentiel de bénéficier de la solidarité nationale dans notre entreprise de transformation et de modernisation de nos économies.
L'effort budgétaire et financier que l'État consacre, chaque année, à chaque département, à chaque région ou à chaque collectivité d'outre-mer est un outil efficace au service du développement économique de l'outre-mer, et donc de la France !
En outre, je demande solennellement à la Haute Assemblée de réfléchir au coût politique, économique et social que pourrait représenter, actuellement, un désengagement de l'État outre-mer.
Pourtant, cette année encore, l'outre-mer s'est retrouvé « sur la sellette » avec l'article 61 du projet de loi de finances pour 2006, relatif au plafonnement de certains avantages fiscaux au titre de l'impôt sur le revenu, et l'article 73, relatif à la réforme des exonérations spécifiques de cotisations employeurs applicables dans les départements d'outre-mer.
L'intergroupe parlementaire de l'outre-mer, que je préside, s'est mobilisé, au-delà de toutes les sensibilités politiques. En l'espèce, il s'agissait bien de défendre des intérêts communs !
Je saisis d'ailleurs cette occasion pour remercier l'ensemble de mes collègues de l'outre-mer de leur engagement et de leur détermination.
Nous avons été reçus à deux reprises par le Premier ministre, à qui je tiens à exprimer une nouvelle fois toute ma gratitude pour son sens de l'écoute et pour l'intérêt qu'il a témoigné à l'ensemble de ses compatriotes de l'outre-mer. Nous avons en effet pleinement conscience que sa décision intervient dans un contexte budgétaire extrêmement difficile.
Il s'est alors engagé, au nom du Gouvernement, à ce que soit modifié l'article 61 du projet de loi de finances et à ce qu'en soit supprimé l'article 73. C'est avec soulagement que j'ai constaté que nos collègues députés ont finalement adopté des amendements en ce sens.
Il a donc été admis que toute modification du cadre prévu par la loi « Girardin » du 21 juillet 2003 de programme pour l'outre-mer ne pouvait être envisagée en l'absence d'une véritable lisibilité de l'efficacité du dispositif, argument que les parlementaires de l'outre-mer ont fait valoir dans ce débat.
Nous sommes parfaitement conscients de l'effort de solidarité de la métropole à l'égard des collectivités que nous représentons, mais nous n'avons jamais été des adeptes de la main tendue : nous sommes tout autant soucieux de notre devoir de contribuer à la richesse nationale.
C'est pourquoi, au nom de mes collègues ultramarins, j'ai suggéré au Premier ministre, au cours de nos rencontres, que soit déposé un amendement tendant à constituer dans les meilleurs délais une commission d'évaluation en vue de la rédaction du rapport prévu à l'article 38 de la loi du 21 juillet 2003. Je me réjouis de l'adoption de cet amendement par l'Assemblée nationale.
Cette commission devra présenter à la fin du premier semestre de 2006 le rapport évaluant l'impact socioéconomique de l'ensemble des dispositifs mis en place par la loi de programme pour l'outre-mer.
Il s'agit, de la part des parlementaires de l'outre-mer, d'afficher leur volonté très claire de participer à la réflexion sur l'évaluation des mesures prises en faveur de leurs collectivités ainsi qu'à la recherche de solutions appropriées.
C'est la raison pour laquelle nous avons proposé une constitution tripartite de cette commission, en prévoyant qu'y seraient représentés le Gouvernement, les commissions des finances de l'Assemblée nationale et du Sénat et les parlementaires de l'outre-mer.
Au sein de l'intergroupe parlementaire de l'outre-mer, nous sommes persuadés que ce travail d'évaluation permettra de démontrer à la collectivité nationale l'efficacité de l'ensemble du dispositif de soutien au développement économique et social des collectivités ultramarines, en vigueur depuis 2003.
Cela n'exclut pas de suggérer, le cas échéant, des ajustements quant au champ et à l'intensité des mesures : nous ne contestons pas la légitimité d'une telle démarche. J'ai d'ailleurs moi-même proposé d'étendre la mission de cette commission à l'évaluation de l'impact de l'ensemble des dispositions spécifiques à l'outre-mer susceptibles de contribuer à son développement économique et social.
Quoi qu'il en soit, ce n'est pas la première fois que de telles études d'impact sont réalisées. Ainsi, de nombreux indicateurs ont déjà prouvé que l'effort contributif des populations ultramarines est d'autant plus important que nos outils de production sont modernes et efficaces.
Il a d'ores et déjà été démontré que le niveau de contribution aux recettes fiscales nationales des départements d'outre-mer croît de manière continue depuis plusieurs années grâce aux dispositifs de réduction ou d'exonération d'impôts de l'État sur place.
Personne parmi nous ne redoute les effets d'une telle évaluation du moment que ce travail global met en exergue le coût net de ces dispositions relativement à un ensemble d'effets induits, et du moment que les parlementaires de l'outre-mer sont associés à ces travaux.
Cependant, je tiens à souligner, mes chers collègues, que cet exercice ne saurait se limiter à une vision strictement budgétaire et nous faire oublier tous les atouts qu'offrent, en retour, les départements et les collectivités d'outre-mer à la nation.
Comme vous le savez, il n'existe pas un outre-mer uniforme, mais des départements et des collectivités qui sont tous situés à des carrefours stratégiques majeurs - dans les Caraïbes, dans l'océan Indien ou dans le Pacifique - et qui, par leur seule position géographique, donnent à la France une assise pour la mise en oeuvre de sa politique étrangère et de défense.
Je rappelle également qu'avec 2, 5 millions de nos compatriotes vivant dans nos collectivités d'outre-mer, ce qui correspond à seulement 4 % de la population française estimée en 2004, la présence de la France et de l'Europe est assurée sur les trois océans.
La Polynésie française, la Nouvelle-Calédonie, les îles Wallis et Futuna, Saint-Pierre-et-Miquelon, Mayotte et les Terres australes et antarctiques représentent 91, 2 % de la zone économique exclusive nationale, soit un potentiel extraordinaire en termes de ressources marines.
Des préoccupations budgétaires, au demeurant légitimes, ne sauraient nous conduire à minimiser l'extraordinaire rayonnement géographique, politique, économique et culturel de la France dans le monde grâce à ses collectivités d'outre-mer.
En raison de l'importance de leur jeunesse, les populations ultramarines se caractérisent toutes par un formidable dynamisme. Et j'insiste une fois de plus sur la richesse que représente la composition pluriethnique de nos sociétés, qui n'ont cessé d'évoluer par l'effet du métissage culturel.
Chacun d'entre nous peut aujourd'hui mesurer, dans le contexte de l'évolution de la société française, l'importance de la réussite de ce phénomène quand on le rapporte à l'ensemble de la nation.
Les économies ultramarines souffrent certes de nombreux handicaps, comme leur éloignement géographique de la métropole, l'étroitesse de leur marché qui compromet la rentabilité de l'activité économique, ou la concurrence d'autres économies situées à proximité, beaucoup plus compétitives.
Ce phénomène de concurrence est particulièrement pénalisant pour les productions agricoles des départements d'outre-mer, telles que le sucre et la banane, dont dépendent notamment la Guadeloupe, la Martinique et la Réunion.
Mais les populations d'outre-mer ont toujours eu la fierté et la détermination de relever le défi de leur développement économique, par l'utilisation de leurs ressources naturelles et par l'expérimentation de nouvelles filières.
Je pense notamment à la perliculture en Polynésie française ou à l'élevage de crevettes en Nouvelle-Calédonie, qui doivent leur essor à la détermination de petits promoteurs qui sont souvent partis de rien.
A titre d'exemple, la production de crevettes en Nouvelle-Calédonie était en augmentation de 30 % en 2004 par rapport à l'année 2003 et dépasse désormais les 2 200 tonnes.
D'importants efforts sont également réalisés dans l'ensemble de nos collectivités pour développer le tourisme, en termes tant d'investissements dans les infrastructures d'accueil que de promotion.
A cet égard, il faut souligner la place remarquable qu'occupe dans ce secteur d'activités la Polynésie française. Sa fréquentation la place à un très bon rang dans le Pacifique Sud, dans un environnement, rappelons-le, extrêmement concurrentiel.
Outre son importance, dans nos micromarchés, en termes de créations de revenus et d'emplois, vous savez combien l'activité touristique est un outil puissant au service de la promotion de la culture et du savoir-faire français dans le monde.
De toute évidence, mes chers collègues - et nous ne cesserons de vouloir vous en convaincre -, l'effort de la France à destination de ses plus lointains territoires est loin d'être vain. Les collectivités d'outre-mer dans leur ensemble ont toujours démontré leur réelle contribution à ce qui fait toute la richesse et toute la grandeur de la France !
Applaudissements sur les travées de l'UMP ainsi que sur certaines travées de l'UC-UDF.
M. Adrien Gouteyron remplace M. Christian Poncelet au fauteuil de la présidence.
Monsieur le ministre, permettez-moi de vous féliciter d'avoir su faire un bon budget dans des conditions très difficiles, conséquences de décisions irresponsables fort coûteuses prises par certains de vos prédécesseurs.
Bravo aussi pour les décisions que vous avez prises en matière fiscale : elles sont un encouragement à l'activité des entrepreneurs et elles permettront un renouveau économique. Aucun gouvernement précédent n'avait agi de la sorte !
Certes, vous n'avez pas encore pu réduire suffisamment les dépenses de l'Etat et diminuer le déficit budgétaire, mais vous n'avez pas été aidé pour cela, en particulier par ceux qui s'accrochent à leurs avantages acquis, refusant toute réforme et paralysant le pays par des grèves qui ne peuvent qu'aggraver le chômage.
Ceux qui veulent conserver le service public devraient commencer par assurer correctement ce service au public ! En empêchant les usagers d'aller travailler, ils compromettent leurs emplois et ceux des usagers. Le droit de grève est certes prévu dans la Constitution, mais le droit au travail l'est aussi, et nul ne devrait pouvoir empêcher un autre de travailler !
Il y a des dépenses utiles, celles qui favorisent l'investissement pour préparer l'avenir, mais il y a des dépenses moins utiles, qui ne produisent aucune richesse, et les aides incitatives à la réduction du temps de travail en sont un triste exemple : cette charge, due à la démagogie irresponsable de Mme Aubry, oblige l'État à dépenser près de 10 milliards d'euros par an pour permettre à certains de ne pas travailler. C'est un comble !
Mme Aubry n'avait évidemment pas calculé les conséquences coûteuses de ces 35 heures, pas plus d'ailleurs que ceux qui proposent aujourd'hui d'augmenter le SMIC à 1 500 euros sans se préoccuper de l'impact financier de cette mesure pour les entreprises et pour l'État !
Mme Nicole Bricq s'exclame.
Ainsi, l'État doit aujourd'hui emprunter 10 milliards d'euros pour permettre aux Français de travailler moins. Ce n'est pas une bonne gestion, et il faut que cela cesse ! Songez, monsieur le ministre, à ce que serait votre budget avec 10 milliards d'euros de dépenses en moins : vous seriez plus heureux ! Pourquoi, par exemple, ne pas supprimer toute limitation aux heures supplémentaires et en ne les payant qu'au-delà de 39 heures ? Vous pourriez ainsi réaliser des économies tout en supprimant des charges pour les entreprises, qui retrouveraient leur liberté de gestion.
Mais ce n'est pas tout ! Vous avez décidé de transférer à la sécurité sociale la somme énorme de 19 milliards d'euros, financée par l'article 41, au lieu de la conserver dans le budget de l'État, comme en 2005. Cette somme correspond aux 10 milliards d'euros des 35 heures et aux exonérations de charges sociales jusqu'à 1, 6 SMIC, qui augmentent de 2 milliards d'euros par an. Ainsi, vous réalisez cette opération pour ne pas faire apparaître une augmentation des charges budgétaires de 2 milliards d'euros par rapport au budget de 2005. Mais si vous aviez décidé de ramener ces exonérations de 1, 6 SMIC à 1, 5 SMIC, vous auriez économisé ces 2 milliards d'euros, et vous auriez pu ainsi ne pas augmenter les dépenses de votre budget !
De plus, si cette somme de 19 milliards d'euros est transférée au budget de la sécurité sociale, vous serez obligé de supporter cette charge éternellement, et votre budget continuera à être gravement déficitaire pour rien. Vous utiliserez pour le financer l'article 41, dont je souhaite le retrait.
Au contraire, en conservant cette somme de 19 milliards d'euros dans votre budget, vous pourriez diminuer chaque année l'allégement de cotisations sociales et supprimer peu à peu les aides aux 35 heures. Dans quelques années, vous diminueriez ainsi de 19 milliards d'euros les dépenses ! Ce n'est pas un rêve, mais, pour cela, il faut le vouloir car, quand on n'a pas les moyens de dépenser, on ne dépense pas, c'est un principe élémentaire de gestion.
Comme l'a préconisé M. Marini, soyons courageux !
Emprunter pour payer les charges des entreprises ne me paraît pas une utilisation efficace de nos recettes fiscales, que l'on devrait utiliser pour les investissements.
Je voudrais aussi rappeler qu'en 1997 toutes ces charges n'existaient pas, à l'exception d'une somme modeste de 197 millions d'euros due à l'exonération concernant le dispositif de Robien. Mais, pour 2006, ces 197 millions sont devenus 19 milliards d'euros ! Songez à ce qu'aurait été votre budget d'aujourd'hui si vous n'aviez eu que ces 197 millions d'euros à dépenser !
Il faut arrêter cette spirale mortelle, et cela ne dépend que de vous !
Dans le domaine de l'emploi, vous avez maintes fois annoncé, monsieur le ministre, que la lutte contre le chômage était votre priorité, et vous avez eu raison. Pour cela, vous proposez de dépenser 13, 6 milliards d'euros, dont 7 milliards d'euros pour l'accès et le retour à l'emploi et 4, 39 milliards d'euros pour l'accompagnement de mutations économiques, sociales et démographiques. Ce sont des sommes considérables, et j'aimerais savoir combien d'emplois auront été créés grâce à ces sommes à la fin de l'année.
En revanche, je ne vois rien dans votre budget qui permettrait aux entreprises de développer leur activité en leur accordant des crédits. Car on oublie trop souvent que ce sont les entreprises qui embauchent : il ne sert à rien de créer des aides à l'emploi, de mettre en place un plan d'aide au retour à l'emploi, des emplois aidés, bref d'inciter les chômeurs à travailler si aucune entreprise ne leur offre du travail !
Mais les entreprises n'embaucheront pas si elles ne peuvent pas bénéficier de la flexibilité de l'emploi. La garantie de l'emploi n'existe pas, et la rigidité de l'emploi n'aboutit qu'à la garantie du chômage. Ce sont les pays où la flexibilité de l'emploi est assurée qui connaissent le plus faible taux de chômage : 5 % au Danemark, en Angleterre, au Canada, contre 10 % chez nous et en Allemagne. Et, autre avantage non négligeable, la flexibilité ne coûte rien !
Vous pourriez ainsi consacrer une partie de ces 13, 6 milliards d'euros du budget de l'emploi à des crédits en faveur des entreprises, pour la formation des chômeurs à des emplois disponibles.
En particulier, l'apprentissage à partir de quatorze ans, récemment décidé par M. le Premier ministre, est une excellente initiative pour former les jeunes à des emplois sûrs.
En diminuant peu à peu ces 19 milliards d'euros, en employant différemment les 14 milliards d'euros du budget de l'emploi et en appliquant la flexibilité, vous pourriez ramener peu à peu votre déficit à 27 milliards d'euros - peut-être même moins - au lieu de 46 milliards d'euros. Vous pourriez ainsi bénéficier d'une grande souplesse et vous n'auriez plus de souci s'agissant des critères de Maastricht.
Ce sont d'autres choix, mais ils seraient plus efficaces et moins coûteux.
Le contrat « nouvelles embauches » décidé par M. de Villepin est un pas vers la flexibilité et il aura, j'en suis sûr, un grand succès.
Quand je vois que le nouveau projet socialiste prévoit la suppression immédiate de ce contrat et le SMIC à 1 500 euros, sans se préoccuper des conséquences économiques et financières de ces mesures, je me demande dans quel monde vivent ces personnes et quand elles vont enfin comprendre la réalité de la vie économique et de la concurrence internationale à laquelle nous somme soumis, qu'on le veuille ou non !
Ce programme ne fera que précipiter encore plus la France vers le déclin et le chômage généralisé. Les Chinois, ex-communistes, l'ont bien compris, ainsi que la plupart des pays socialistes européens, qui, eux, n'ont plus ce comportement agressif de ne vouloir rien faire, d'être contre tout, de ne vouloir aucune réforme, de dépenser plus et de travailler moins !
M. Marc Massion s'exclame.
Enfin, monsieur le ministre, permettez-moi une dernière suggestion.
Je vous ai déjà présenté un nouveau système de répartition des charges sur les salaires dans les entreprises en ne faisant supporter à ces dernières que celles qui ont trait aux salariés, c'est-à-dire celles qui touchent le chômage et les retraites. Le reste, comme les allocations familiales et la sécurité sociale, ne concerne pas les entreprises : ces dépenses doivent être financées autrement, par exemple par un coefficient associé au chiffre d'affaires de l'entreprise, une fois déduite la masse salariale.
Cela permettrait de réduire le coût de production d'au moins 35 %, faciliterait les embauches et les augmentations de salaires. Cela permettrait aussi d'équilibrer les comptes de la sécurité sociale en adaptant ce coefficient aux besoins de son déficit, ce qui est impossible aujourd'hui, les dépenses et les recettes de la sécurité sociale étant totalement indépendantes.
Les entreprises de main-d'oeuvre paieraient moins et les entreprises de service paieraient plus, ainsi que les importateurs. Cela favoriserait l'emploi ! Je souhaiterais, monsieur le ministre, que vos services étudient ce système pour en mesurer les avantages et, peut-être, les inconvénients.
Voilà, monsieur le ministre, ce que je voulais vous dire. Vous avez tous les atouts pour réussir, et nous ferons tout pour vous aider.
Applaudissements sur les travées de l'UMP ainsi que sur certaines travées de l'UC-UDF.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j'ai estimé utile d'apporter la contribution des élus d'outre-mer à la réflexion de la nation sur son budget. Le budget, ce n'est pas seulement, en effet, une affaire d'expert, et je ne suis pas moi-même un expert, ...
... mais un petit élu de base qui, à l'examen de ce projet de loi de finances, se dit que ce gouvernement a du courage.
Le Gouvernement a en effet la volonté de redresser la situation dans un contexte national et international difficile : en dépit de ce contexte, des améliorations importantes sont prévues telles que la réduction de l'impôt sur le revenu grâce à la modification des tranches d'imposition, la création d'un « bouclier fiscal », la réforme de la taxe professionnelle, ou encore l'amélioration de la prime pour l'emploi.
Par ailleurs, les élus d'outre-mer ont lancé un appel unanime pour que soient modifiés les articles 61 et 73 du projet de loi de finances pour 2006, de sorte que la loi de programme pour l'outre-mer soit respectée et que la commission d'évaluation ait le temps de faire son travail. Ils ont été entendus !
Mais, une fois ce budget voté, monsieur le ministre, aurons-nous la maîtrise des principaux outils qui fondent l'économie de ce pays ? Là est la vraie question !
Je vous dirai bien modestement, mais avec beaucoup de conviction, qu'à mon avis le contexte de 2005, et donc celui de 2006, n'est plus celui que j'ai connu lorsque j'étais plus jeune : aujourd'hui, l'influence nationale est moins importante que l'influence européenne.
C'est pourquoi je vais essayer de me livrer à une petite démonstration avant de conclure en vous proposant deux orientations.
Tout d'abord, nous ne maîtrisons pas les paramètres qui forment l'armature d'une loi de finances. Nous espérons que le taux de croissance atteindra entre 2 % et 2, 5 %, mais qui peut l'assurer aujourd'hui, monsieur le ministre ? Personne, puisqu'un coup de Trafalgar en Asie ou aux Etats-Unis, par exemple, peut réduire à néant les efforts de nos entreprises, auxquelles il faut d'ailleurs rendre hommage car ce sont elles qui créent la richesse, et donc l'emploi.
Dans le même temps, le taux d'intérêt, qui est un facteur clé de notre économie, ne dépend ni de la représentation nationale ni du Gouvernement : il relève des gouverneurs des banques centrales et de la Banque européenne d'investissement, qui, il faut le dire, continuent à lutter contre une inflation qui n'existe plus, avec un taux d'intérêt à 2 %.
Même la politique salariale est influencée par les pays à faible coût de main-d'oeuvre : dans une économie comme la nôtre, qui a un taux d'ouverture de 30 %, nous devons nécessairement tenir compte de la concurrence des pays à faible coût de main-d'oeuvre ! Ainsi, selon les chiffres des dernières années, l'augmentation des salaires hors inflation s'élève à 0, 5 %.
Puisque nous ne maîtrisons pas les bases de notre économie, maîtrisons-nous le cadre concurrentiel dans lequel elle évolue ? La réponse est encore pire, parce qu'un cadre concurrentiel fonctionne d'abord sur l'illusion grandissante que la division du travail est possible : aux pays d'Asie et d'Amérique latine les produits à faible valeur ajoutée, à nous les Airbus !
Nous constatons ainsi aujourd'hui que des pays comme la Chine, l'Inde, et demain le Brésil, forment chacun plus d'ingénieurs et d'informaticiens de très haute valeur que toute l'Europe réunie : on en compte 700 000 de plus rien que pour la Chine ou l'Inde !
Cette illusion d'une certaine élite - à eux les « fringues » et à nous les produits à forte valeur ajoutée - est un leurre, ...
... et vous l'avez démontré, cher Jean Arthuis, dans un excellent rapport qui est un pour moi devenu une bible : la division du travail n'est pas aujourd'hui un axe majeur de l'évolution des échanges internationaux, et nous mentons à l'opinion publique en lui faisant croire que, demain, nous demeurerons les producteurs à forte valeur ajoutée.
La délocalisation par la non-division du travail et la faible localisation chez nous, c'est une triste réalité dont nous souffrons aujourd'hui et que nous continuerons d'endurer demain si nous n'agissons pas.
Peut-être sommes-nous meilleurs sur la monnaie ?
De fait, il existe actuellement trois ensembles économiques forts : l'Europe - mais nous avons démontré que le taux d'intérêt de la monnaie européenne était fixé par la banque centrale -, les États-Unis - pays soi-disant libéral et libre-échangiste mais qui est l'un des ensembles les plus protégés de la planète, je le démontrerai tout à l'heure - et enfin la Chine, dont la monnaie est largement sous-évaluée puisqu'il faut 8 yuans pour un dollar. En étant contraints d'acheter 600 milliards de dollars pour éviter son effondrement, les chinois ont d'ailleurs faussé les échanges internationaux...
Vous me direz que le Brésil, l'Inde et la Chine respectent les normes édictées en faveurs de l'environnement. En réalité, ce n'est pas le cas, parce que la prise en compte de ces règles est très onéreuse dans les coûts de production. Ainsi, les résultats sont totalement différents si vous exploitez une usine qui respecte les normes environnementales - traduites dans la Constitution grâce à la volonté du Président de la République -, ou si vous tirez profit d'une usine qui pollue gravement une région entière, comme c'est le cas, l'actualité récente nous le montre, en Chine.
Ces pays ne respectent pas la parité monétaire, ils s'en servent pour protéger et doper leur économie. Ils ne respectent pas plus l'environnement, et je ne ferai pas ici la démonstration que ces États ne respectent pas non plus une certaine charte sociale et qu'ils ne tiennent aucun compte de la dignité humaine dans bien des cas.
Alors, on veut nous persuader que le protectionnisme a disparu partout. Mais, je vous l'ai dit, les Etats-Unis se protègent et leur influence au sein de l'OMC, organisme opaque, y est plus importante que celle de la France, qui n'y siège pas directement puisque l'Europe parle en son nom. Ainsi, dans quelques jours, nous allons assister à Hong Kong à un tête-à-tête que, pour ma part, je trouve plutôt inquiétant entre M. Blair et M. Mandelson. Peut-être partagez-vous mon point de vue ? Quoi qu'il en soit, nous ne serons pas présents, ce qui est très ennuyeux.
Et, quand M. Lamy nous dit que les États-Unis font un effort pour ouvrir leur économie et qu'ils pensent que la PAC doit évoluer, je lui réponds que, rien que pour le coton, les États-Unis aident aujourd'hui leurs producteurs à hauteur de 4, 5 milliards de dollars, soit exactement la valeur de la production américaine de coton. N'est-ce pas là du protectionnisme, de l'interventionnisme ? Nous sommes en présence d'un cas d'école !
Alors, mes chers collègues, cessons d'être les bons apôtres d'un libre échange aveugle qui pollue la politique dans ce pays, qui salit nos quartiers - l'insurrection des banlieues en est la preuve -, qui détruit les fondements de la République, qui met l'Europe en situation de crise !
Quel que soit le budget - et celui-ci est un bon budget que je voterai, monsieur le ministre, pour soutenir le Gouvernement - nous devons appliquer les thèmes centraux développés par le Premier ministre lors du débat de politique générale, il nous faut mettre en oeuvre une Europe politique conduisant à une préférence européenne dans un échange international, c'est-à-dire une mondialisation.
Je ne viens pas plaider ici une économie administrée : cela n'existe plus, ou c'est en voie de disparition quand cela existe. Non ! Je suis pour la liberté de la production et des échanges, je suis pour la mondialisation, mais une mondialisation qui respecte l'homme, qui respecte l'environnement, qui respecte l'équité.
C'est dans ce contexte que je soutiens l'action du Gouvernement, en souhaitant que, dans les mois qui viennent, nous mettions en oeuvre une politique fondée sur la préférence européenne et sur la mondialisation loyale.
Applaudissements sur les travées de l'UMP ainsi que sur certaines travées de l'UC-UDF.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme le précisait l'un des intervenants précédents, tout a déjà été dit sur l'expertise de ce budget. Permettez-moi cependant, en ma qualité de dernier orateur inscrit, de retenir quelques minutes encore votre bienveillante attention.
Voilà un an, nous avions organisé ici même un débat sur les prélèvements obligatoires, sur la base de deux rapports excellents de nos collègues MM. Marini et Vasselle.
N'étant pas un homme de renoncement, je reprendrai donc aujourd'hui mes propositions.
Ma première observation portera sur la dépense publique, qui relève en fait de la réforme de l'État, véritable serpent de mer ou vraie Arlésienne...
Pensez-vous qu'il faille encore initier des colloques, envoyer des questionnaires aux 36 000 maires de France, lancer des appels à initiatives pour savoir quelles mesures il nous faut désormais prendre afin de désengorger notre administration territoriale ?
Chacun de nous connaît ce mille-feuille des compétences locales et le délire kafkaïen de nos finances locales. Nous devons donc faire preuve d'un certain courage, comme cela a été dit dans cet hémicycle.
Le courage politique auquel s'est référé notre éminent rapporteur général, mes chers collègues, c'est aussi examiner sans a priori la structure même de nos dépenses, notamment de celles dont on ne mesure pas suffisamment l'origine et les effets.
Je citerai un exemple parmi d'autres. N'étant ni un expert ni un philosophe de la fiscalité et des dépenses publiques, je me suis livré à une étude intéressante avec quelques étudiants. Celle-ci risque d'interpeller un certain nombre d'entre nous.
Savez-vous que de nombreux cantons dans nos départements comptent moins de mille habitants ? Savez-vous que, au-delà de la question électorale - qui pourrait paraître bassement politicienne -, et du seuil de 9 000 habitants fixé pour établir les comptes de campagne, cette situation entraîne une inégalité manifeste, que personne ne peut nier, entre les candidats ?
Ainsi, notre pays compte 3 714 cantons. Or 15 % d'entre eux comptent moins de 4 000 habitants, et je ne parle pas de ce canton des Hautes-Alpes qui n'en compte que 270 !
Sur cette base, j'ai cherché à établir une nouvelle carte de France avec une régulation des cantons représentant environ 4 000 habitants, seuil de viabilité que l'on exige d'ailleurs lors de la constitution des communautés de communes.
Il s'agirait là d'une simple mise en cohérence rendue d'autant plus nécessaire que, sur le fond, le rôle accru des communautés de communes réduit en proportion celui des conseillers généraux si ces derniers ne les président pas eux-mêmes.
Cette restructuration conduirait inéluctablement à une diminution du nombre d'élus, et donc à une économie très importante qui, calculée sur la durée du mandat de six ans et sur la base des indemnités mensuelles actuelles, représente 106, 288 millions d'euros.
Monsieur le ministre, je tiens à votre disposition cette étude qui a été initiée, je le répète, par un groupe d'étudiants tout à fait convaincant.
Je lirai cette étude avec beaucoup d'intérêt !
A cette somme viendrait s'ajouter la réduction des frais de fonctionnement, qui diminueraient à due concurrence.
Le report des élections cantonales en 2008 devrait nous donner le temps de réfléchir à une réforme de fond ! Nous adresserions ainsi un signe fort qui témoignerait d'une volonté politique exemplaire mais non partisane, de la part des élus qui sont chargés d'initier les économies et qui ne donnent pas l'exemple.
Ce serait une simple mesure de bon sens, de bonne gestion en quelque sorte. A tout le moins, mes chers collègues, pourrions-nous former un groupe de travail pour réaliser une étude d'impact sur cette proposition. Ce serait un signe fort, je le répète, à l'adresse de nos compatriotes, qui s'éloignent chaque jour davantage de leurs élus et de la classe politique.
J'avais fait part de cette observation à M. Sarkozy, lors de son premier passage au ministère de l'intérieur. Il m'avait alors répondu, en des termes que je considère comme inappropriés, qu'il s'agissait d'un « charcutage électoral ». A Bercy, je lui ai reposé la question, mais elle est restée sans réponse cette fois. Il ne s'agissait pourtant que d'aller dans votre sens, monsieur le ministre, lorsque vous dites que la France vit au-dessus de ses moyens.
Je reviens donc à la charge avec un ministre qui a l'immense avantage de ne pas être un élu local et de ne pas afficher d'ambition nationale, du moins pour 2007. §Je fais donc confiance à sa logique économique et à l'absence de conflit d'intérêts lorsqu'il étudiera, j'en suis certain, l'étude que j'ai réalisée et que je tiens à sa disposition.
Ma démarche n'a rien à voir avec un quelconque charcutage, et je ne suis en aucune manière concerné. Il s'agit tout simplement de rechercher, comme le ministre d'État de l'époque nous y avait invités, à prendre des mesures cohérentes afin de réaliser des économies. Car il s'agit bien, pour la représentation nationale, de ne pas créer seulement des dépenses mais aussi de rechercher des économies.
Il s'agit surtout d'un très bon exemple de réforme courageuse - ce mot a été utilisé ici, à bon escient je l'espère - et nécessaire de cette bonne gouvernance dont on nous rebat les oreilles tout au long de colloques dispendieux et longs comme des jours sans pain !
Par ailleurs, il faut réintroduire sans crainte des mécanismes de contrôle, de sanction, et donner plus de pouvoirs aux chambres régionales des comptes.
L'émission télévisée « Combien ça coûte », pour anecdotique qu'elle soit, devrait nous inciter à réfléchir : elle décrédibilise chaque fois davantage des responsables manifestement incapables de bien gérer les deniers publics. Ces carences rejaillissent sur nous tous et nous font beaucoup plus de mal que de bien !
Ma deuxième série d'observations concerne les dépenses effectuées dans le secteur de la diplomatie et des affaires étrangères.
Arrêtons-nous quelques instants sur l'Assemblée de l'Union de l'Europe occidentale, l'UEO. Cette assemblée chargée des questions de défense a vu la totalité de ses missions, les missions Petersberg - son objet social en quelque sorte -, transférées au Parlement européen voilà plus de cinq ans maintenant.
Cette assemblée quasi fantôme se réunit, depuis lors, quelques jours par an pour justifier l'existence de ces quelques centaines de fonctionnaires internationaux - pour lesquels la France contribue largement - siégeant dans des locaux du Conseil économique et social pour un budget annuel de 7, 367 millions d'euros : 4, 209 millions de charges de personnel et plus de 1 million de charges de pensions. Les autres frais sont à cette image : ainsi, des transformations et restaurations de locaux qui défient toute concurrence sont actuellement envisagées.
Certes, la création de l'UEO résulte d'une convention internationale. Mais ne pourrait-on faire réfléchir un peu l'un des nombreux fonctionnaires du Quai d'Orsay pour qu'il nous donne les voies et les moyens susceptibles de mettre un terme à cet inutile acharnement thérapeutique et diplomatique ? Si nous devons réfléchir à une défense européenne, 7 millions d'euros me semblent suffisants pour nourrir un brain trust de prix Nobel de la paix, par exemple !
Savez-vous, monsieur le ministre, que nous disposons d'une ambassade de France à Strasbourg pour assurer les relations avec le Conseil de l'Europe, dont les travaux sont, par ailleurs, totalement ignorés de la représentation nationale du Sénat et de l'Assemblée nationale ? Je le sais, hélas, pour y siéger !
Nous pourrions peut-être y déléguer un fonctionnaire du Quai d'Orsay, qui assisterait aux réunions, plutôt que d'entretenir une ambassade entière, avec tout ce que cela implique ! Puisque nous n'avons pas assez d'argent pour les autres ambassades qui nous représentent dans le monde entier, il faut donc faire des choix !
En outre, notre haute administration diplomatique n'est pas, que je sache, une agence de placement ou de réinsertion. En disant cela, je ne vise personne et je ne vous en fait pas grief, monsieur le ministre. Je constate simplement que l'ascenseur social y est bloqué au sommet et s'apparente plutôt, pour notre budget, à un monte-charge !
Quid de ce poste d'ambassadeur pour les relations euro-méditerranée, de cet autre chargé de la parité, de ce troisième chargé de la prévention des conflits et dont on ignore d'ailleurs où il était au moment des problèmes des banlieues ? Ces trois postes cumulés nous coûtent plus de 600 000 euros pas an ! Et vous cherchez des économies, monsieur le ministre ? Ne croyez-vous pas que cela fait beaucoup de contrats pour des postes d'encadrement ou de travailleurs sociaux ? Et il y a encore sans doute beaucoup d'autres postes dont il faudrait évaluer les mérites, mais je m'arrête là...
À quand donc une évaluation plus globale, à l'image de celles que vous avez si bien engagées - je tiens à vous en remercier et à vous en féliciter - sur un certain nombre de sujets ?
Dans les pays du Golfe, que je connais depuis quelques décennies, si l'ambassade de Doha nous donne quelques satisfactions, celle du pays voisin, les Émirats arabes unis, fonctionne apparemment beaucoup moins bien : ces deux dernières années, nous avons en effet perdu un certain nombre de contrats au profit de la concurrence, qu'il s'agisse de Thales, d'Airbus, du TGV, ou des contrats d'armement.
Nous aurions donc besoin de réfléchir de temps en temps sur le meilleur placement de nos ambassades. Ainsi, monsieur le ministre, puis-je vous suggérer d'engager, avec votre collègue chargé du commerce extérieur, un audit de ces postes en vue de rationaliser nos dépenses ? Il est temps d'en faire réellement des éléments moteurs pour notre balance des paiements, car, pour le moment, tout cela est bien souvent théorique !
Je présenterai en tout cas quelques amendements afin d'annuler certains crédits, même si je ne rêve pas et que je n'ai pas beaucoup d'espoirs sur leur sort : je sais bien, en effet, qu'ils ont été simplement formulés pour donner quelques signes forts d'attention et inciter à l'action préventive.
Quoi qu'il en soit, monsieur le ministre, mes chers collègues, je résumerai mon intervention en reprenant les paroles prononcées par Henri VIII à son sixième mariage : « C'est une victoire de l'optimisme sur l'expérience ! »
Applaudissements sur les travées de l'UMP ainsi que sur certaines travées de l'UC-UDF.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, au moment où s'achève cette discussion générale extrêmement intéressante, je voudrais rendre hommage à votre assemblée : je n'ai évidemment pas à me mêler du fonctionnement de l'Assemblée nationale et du Sénat, cela ne me regarde pas et je me tiens évidemment à la disposition du Parlement ; pour autant, j'ai trouvé extrêmement fructueuse la manière dont vos travaux ont été organisés. Ainsi, en une après-midi, nous avons en réalité évoqué beaucoup de sujets et chacun des orateurs, de la majorité comme de l'opposition, a grandement contribué, me semble-t-il, à enrichir le débat sur ce projet de loi de finances que j'ai l'honneur de vous présenter avec Thierry Breton.
Monsieur le rapporteur général, vous avez avec talent donné votre sentiment sur ce projet de budget, avec ce raisonnement construit en trois points qui a d'ailleurs beaucoup inspiré d'autres orateurs : « Restons modestes, soyons ambitieux, soyons courageux ». En vous répondant, je ne résiste pas au plaisir de reprendre chacun de ces points !
Premièrement, restons modestes : monsieur le rapporteur général, vous m'en demandez beaucoup !
Sourires sur les travées de l'UMP.
Sur ce sujet, Thierry Breton et moi-même l'avons souvent souligné, il nous faut en permanence être réactifs. Rappelez-vous : vous vous étiez vous-même interrogé au mois de juin sur la situation de nos recettes fiscales. Je m'étais alors déclaré moins inquiet que vous, et j'ai bien fait ! S'il y a effectivement eu un petit « trou d'air » en début d'année pour le produit de l'impôt sur les sociétés, tout se remet en ordre et le niveau des moins-values fiscales que nous redoutions, vous et moi, semble plus proche des prévisions que j'avais formulées alors que des vôtres. Nous ne pouvons naturellement qu'être tous les deux rassurés et nous réjouir d'une telle évolution.
Deuxièmement : soyons ambitieux. Là, vous me voyez tout de suite très enthousiaste !
Dans ce projet de budget, nous proposons une réforme fiscale ambitieuse. Pour certains, c'est un premier pas, et je souhaite que ceux qui suivront soient aussi sveltes et importants. Après tout, voilà des sujets dont nous parlions beaucoup les uns et les autres depuis des années, sans avoir jusqu'à présent eu le courage de les assumer : je pense, par exemple, au plafonnement fiscal à 60 % des revenus. C'est désormais chose faite, ce qui est une grande première pour notre système fiscal !
Nous souhaitons une réforme complète de l'impôt sur le revenu pour aboutir à une véritable réduction des taux, en mettant tout particulièrement l'accent sur les revenus modestes. Nous souhaitons aussi une réforme de l'imposition des entreprises, via les mesures préconisées sur la taxe professionnelle, sur l'actionnariat, ainsi qu'un aménagement de l'ISF. Ce sont autant de sujets qui viendront s'ajouter à la réforme des plus-values qui sera évoquée dans le collectif de fin d'année.
Tous ces éléments contribuent à faire largement « bouger les lignes » de notre système fiscal. Ils ont cette vertu de favoriser l'attractivité fiscale de la France, dont nous avons tant besoin pour apaiser les craintes des délocalisations, qui ont été évoquées par Jean-Paul Virapoullé.
Troisièmement : soyons courageux. Bien sûr ! Le courage, en politique, c'est ce qui nous donne envie d'avancer pour marquer des points, pour ne pas nous satisfaire d'une progression à l'ancienneté.
De ce point de vue, le Gouvernement fait preuve de courage sur la réforme fiscale lorsqu'il s'engage à financer les 3, 5 milliards d'euros de pertes de recettes en 2007 par des économies sur les dépenses.
Mesdames, messieurs les sénateurs, vous avez évoqué les uns et les autres l'évolution de la maîtrise de la dépense, le passage du « zéro volume » au « zéro valeur ». Sachez que je suis sur ce point très engagé à vos côtés. Nous sommes d'ores et déjà mobilisés sur la préparation du projet de budget pour 2007, au travers de la réforme de l'État que le Gouvernement a engagée en lançant une vague d'audits sans précédent, en vue de mettre en place un contrôle de gestion au niveau de l'État.
Vous l'aurez compris, c'est vers une amélioration majeure que nous nous dirigeons ensemble.
Monsieur le président de la commission des finances, je vous félicite pour la qualité de votre analyse et de votre argumentation, même si j'ai bien senti, derrière votre style oratoire légendaire, quelques débuts de critique, ici ou là. Je suis au reste bien conscient tout l'intérêt de notre discussion est d'entendre des opinions différentes.
Je vous le confirme, toutes les mesures contenues dans ce projet de budget sont totalement assumées. J'aurai l'occasion de vous le montrer tout au long du débat.
Je voudrais, en cet instant, évoquer la décision de transférer certaines recettes de l'État à la sécurité sociale pour financer les allégements de charges liés notamment à la convergence des SMIC, qui est désormais achevée.
La montée en puissance de ces allégements étant arrivée à son terme, il était important de les rendre lisibles pour les entreprises et de les pérenniser. Dans cet esprit, il nous paraissait cohérent de sortir ces allégements de charges du budget de l'État, tout en excluant bien évidemment la création d'un nouveau FOREC. A cet égard, Alain Lambert avait d'ailleurs fait oeuvre très utile à l'époque ! Il fallait donc assumer que de tels allégements représentaient, non pas des dépenses, mais des moins-values de recettes qui devaient être transférées, avec un « panier » de recettes de même ampleur, au budget de la sécurité sociale.
Nous pouvons discuter longuement sur tous ces sujets, car personne n'a la vérité révélée. Cependant, en l'espèce, notre démarche est motivée par un souci de cohérence et de lisibilité.
Pour aller tout à fait jusqu'au bout de ma logique, je considère que le débat suivant sera celui de la « barémisation ». Cela nous permettra de savoir clairement jusqu'où il est possible de pousser notre souci de lisibilité, pour éclairer la situation de l'entrepreneur face aux charges sociales.
Nous assumons également notre décision de créer, conformément à la demande du Parlement, des instruments nouveaux pour financer les projets d'avenir, notamment l'AFITF, l'Agence de financement des infrastructures de transport de France, l'ANR, l'Agence nationale de la recherche et l'AII, l'Agence de l'innovation industrielle.
Monsieur Arthuis, ce projet de budget est aussi l'expression de la réforme de l'État. Vous l'avez abondamment évoquée, et je veux redire ici que cette réforme transparaît dans l'expérimentation des loyers budgétaires et dans la très importante vague d'audits prévue, qui va nous permettre de « soulever le capot », d'évaluer chaque procédure et chaque service, afin de dégager, pour l'État, les marges de manoeuvre disponibles et les gains de productivité potentiels, tant en effectifs qu'en matériels.
Mesdames, messieurs les sénateurs, si nous n'avons désormais plus de tabou sur la question des effectifs, je vous demande de comprendre ma démarche. Je ne suis pas de ceux qui pensent que la bonne formule pour faire évoluer les effectifs dans la fonction publique consiste à imposer leur « rabotage » systématique, à annoncer le non-remplacement d'un fonctionnaire partant à la retraite sur deux, sur trois, voire sur quatre.
La raison en est très simple : une telle attitude a un effet très anxiogène vis-à-vis de la fonction publique, chacun se demandant s'il appartient à la catégorie des fonctionnaires utiles ou à celle des inutiles. En outre, cela n'apporte aucune réponse concrète sur les moyens d'améliorer le service public.
En revanche, avec un audit fortement documenté, examinant précisément le mode de fonctionnement adopté pour telle ou telle procédure, nous serons en mesure d'en déduire les possibilités en termes de réductions et de redéploiement d'effectifs pour chaque service, sur la base des gains de productivité réalisés, par exemple grâce aux équipements informatiques. Dans ces conditions, la décision prise aura du sens !
Je peux déjà vous citer quelques très bons exemples. Pour ne parler que du ministère dont j'ai la charge, je mentionnerai la réforme de la redevance audiovisuelle et la télédéclaration, pour lesquelles la mise en place d'un audit a permis de tirer d'utiles conséquences.
A contrario, selon la même logique, si nous constatons dans certains domaines audités un sous-effectif patent, nous en tirerons également les conséquences, mais évidemment dans l'autre sens.
J'ai l'intuition que, au final, lorsque nous ferons le total des ajustements nécessaires, nous parviendrons à réduire le nombre de fonctionnaires. Au reste, avec cette méthode, chacun aura compris les raisons invoquées et la démarche entreprise. Notre fonction publique prendra alors la voie de la bonne gestion et, partant, de la considération.
Enfin, monsieur Arthuis, ce projet de budget est totalement orienté vers le soutien de la croissance, qu'il s'agisse de l'emploi, avec la prime pour l'emploi et les allégements de charges, ou de la compétitivité, avec la réforme de la taxe professionnelle ou les aménagements de l'ISF. Nous aurons d'ailleurs l'occasion de revenir longuement sur tous ces sujets avec vous.
Monsieur Jégou, j'espère que nous saurons au cours des débats trouver des points d'entente, même si j'ai noté avec regret la tonalité très sévère de votre discours.
Je vous rejoins sur la nécessité d'être plus exigeant dans la maîtrise des dépenses ; d'ailleurs, comment pourrais-je penser autrement dans les fonctions qui sont les miennes ? Ainsi que nous l'avons indiqué très clairement, la réforme fiscale sera financée en 2007 en franchissant une étape nouvelle en direction du « zéro valeur », car c'est bien à cela que nous voulons finalement aboutir.
J'ai déjà répondu sur les effectifs. Je précise que, pour la première fois depuis trente ans, un gouvernement réduit les effectifs sur quatre années consécutives. Vous souhaitez aller plus loin, et vous avez sans nul doute raison. L'ambiance de ce débat ne le justifiant vraiment pas, je n'avais pas prévu de répondre à la sévérité par la sévérité : je ne vous ferai donc pas l'injure de vous rappeler quel était le niveau des effectifs du ministère de l'éducation nationale il y a environ... douze ans !
Pour le reste, dans un tel contexte, il est évidemment beaucoup plus facile de dire ce qu'il faut faire que de le faire. Ne prenez pas cela pour vous, bien sûr, mais comprenez que, sur tous ces sujets, il me faut gérer, en tant que ministre du budget, énormément de contraintes différentes.
Pour illustrer la situation dans laquelle je me trouve, je ferai une comparaison avec les campagnes électorales. Vous le savez aussi bien que moi, dans ces périodes, le responsable politique organise des réunions publiques où il y a très souvent 99 % de personnes qui le soutiennent, quand ce n'est pas 100 %. Il promet alors, en cas de victoire, de baisser les impôts. Généralement les gens applaudissent toujours, même sans trop y croire. Fort de ce soutien, tout en proclamant son hostilité à l'aggravation du déficit, il s'engage à baisser les dépenses publiques... ou plutôt à les maîtriser, ce verbe étant moins anxiogène. Une nouvelle fois, pour exprimer son soutien et son amitié, le public applaudit, mais néanmoins un peu moins fort, inquiet qu'il est de connaître dans le détail les décisions qui seront prises.
C'est alors que le responsable politique se décide à parler des secteurs visés par les éventuelles réductions d'effectifs, la santé ou l'éducation nationale par exemple. Alors, pour prendre l'éducation nationale, secteur que vous connaissez bien, monsieur Jégou, s'il a l'idée d'évoquer l'arrêt, à titre expérimental, de la diminution du nombre d'élèves par classe, il y aura toujours une main qui se lèvera et une personne qui dira : « Monsieur, faites ce que vous voulez, mais pas dans l'école de mon fils ! »
Sourires sur les travées de l'UMP.
Oui, mesdames, messieurs les sénateurs, voilà ce qui se passe en France ! Et, en tant que responsables politiques, notre métier, c'est à chaque fois d'expliquer, d'argumenter et de démontrer.
Dans ce contexte, tout le monde comprend qu'il nous faut agir avec beaucoup de pédagogie.
Oui, bien sûr, madame Luc : nous devons tous rechercher l'intérêt général !
Monsieur Jégou, vous avez qualifiée la réforme fiscale d'injuste. Laissez-moi vous dire combien je regrette cet adjectif, et ce pour de multiples raisons.
Je le regrette d'abord parce que je n'ai pas entendu un seul mot d'encouragement ou de satisfecit sur des valeurs que nous partageons pourtant, à l'UDF comme à l'UMP. Je peux comprendre que la gauche critique cette réforme fiscale et qu'elle annonce urbi et orbi qu'elle l'anéantira si jamais elle revient au pouvoir !
C'est plutôt d'ailleurs pour nous un assez bon argument de campagne : le moment venu, nous ne manquerons pas d'expliquer aux Français que nous continuerons de baisser les impôts si nous sommes réélus, tandis que la gauche les augmentera de nouveau en cas de victoire. Et, dans ce domaine, croyez-le bien, je ne serai pas en arrière de la main et je saisirai toutes les occasions pour être entendu.
Cela étant, monsieur Jégou, vous appartenez à une famille politique qui partage nombre de points communs avec la nôtre, sur tous les sujets que nous évoquons : nous baissons les impôts ; nous réformons notre système fiscal ; comme l'a si justement fait remarquer M. Alain Lambert, nous encourageons et valorisons le travail...
... les entreprises, la création d'emploi.
De surcroît, nous avons décidé de réduire le nombre de tranches de l'impôt sur le revenu. Nous prévoyons un barème simplifié en instaurant quatre taux, s'élevant respectivement à 5, 5 %, 14 %, 30 % et 40 %.
Et 0 %, naturellement.
Or ce barème simplifié a déjà été proposé par quelqu'un qui m'a inspiré - tout au moins sur ce sujet - et qui était candidat aux élections présidentielles de 2002 : il s'appellait François Bayrou ! Cette proposition figurait en toutes lettres dans son programme, et voilà que vous trouvez également cette mesure injuste ? Parfois, la politique ne laisse pas de surprendre !
Applaudissements sur les travées de l'UMP.
Monsieur Massion, j'avais bien anticipé la teneur de vos propos. Sans nous surprendre, vous nous avez dit que vous trouviez le projet de budget insincère. En vous écoutant, j'ai même pensé que j'aurais pu écrire à l'avance votre discours !
Je suis contraint de vous dire que je ne partage pas votre point de vue, et vous n'en serez pas surpris. Vous aussi, vous auriez pu écrire mon discours !
En effet, nous avons retenu - choix que nous assumons - une hypothèse de croissance qui correspond à la fois aux indications consensuelles des économistes et à la politique économique que nous voulons conduire.
De ce point de vue, la croissance de 0, 7 % du troisième trimestre nous conforte plutôt dans nos choix, même s'il convient de rester prudent.
Il en est de même des recettes fiscales, qui sont solides en 2005, comme je l'ai indiqué tout à l'heure en répondant à M. Marini.
Enfin, pour ce qui concerne la réforme fiscale, vous comprendrez, monsieur le sénateur, que je ne puisse pas suivre votre raisonnement. Cette réforme est juste, puisque ses effets sont concentrés à 75 % sur les ménages modestes. De surcroît, elle renforce l'attractivité de notre pays. Nous donnons également un grand coup de pouce à la prime pour l'emploi, marquant ainsi la différence entre l'assistance et le retour à l'emploi. C'est un sujet majeur !
J'ai beaucoup de mal à comprendre qu'au moins sur ce point vous ne trouviez pas quelques raisons de nous approuver. Mais peut-être en sera-t-il différemment au cours de notre débat ?
Monsieur de Raincourt, j'ai évidemment écouté avec beaucoup d'attention vos propos et j'ai été très sensible aux encouragements que vous avez bien voulu m'adresser au nom du groupe UMP.
Ce budget est porteur d'ambitions. Comme vous l'avez rappelé, la réforme fiscale que nous mettons en oeuvre est un véritable choix de société. Elle tend à récompenser le travail et la prise de risques des entrepreneurs, à valoriser l'activité au lieu d'inciter à l'assistance.
Cessons de nous lamenter parce que les jeunes partent à l'étranger ou parce que les entreprises sont délocalisées ! Il faut simplement répondre par l'action et par la décision. C'est d'ailleurs tout l'esprit de notre réforme de l'impôt sur le revenu, du plafonnement des impôts directs à 60 %, de l'aménagement de l'ISF pour les actionnaires.
Comme vous l'avez rappelé, nous avons aussi fait le choix de la responsabilité en assurant la maîtrise de la dépense de l'État.
Nous aurions bien évidemment aimé faire beaucoup plus et bien mieux. Je ne vous dirai pas le contraire étant donné les fonctions que j'exerce ! Quoi qu'il en soit, pour la quatrième année consécutive, l'accroissement de la dépense en volume est maintenu à zéro, et nous visons le même taux zéro pour ce qui concerne sa valeur.
Monsieur le sénateur, je vous le dis en conscience : nombre des mesures que nous présentons dans ce projet de budget correspondent à nos convictions communes.
Pour ma part, je suis très heureux de pouvoir défendre des idées, des propositions auxquelles nous croyons profondément tous les deux. Ce projet de budget est en effet porteur d'un message pour la France qui s'engage, qui prend des risques, qui travaille, pour la France qui a envie de redonner le meilleur d'elle-même après avoir connu un certain nombre d'épreuves, auxquelles nous pensons tous les uns et les autres.
Si l'on veut vraiment renouer avec l'esprit de conquête, auquel nous sommes profondément attachés, les gouvernants doivent envoyer des messages clairs. De ce point de vue, Thierry Breton et moi-même faisons oeuvre utile en proposant aux Français un message autre que la sempiternelle langue de bois, dont les tenants ne regardent que d'un côté en oubliant que chaque Français a de la valeur et que nous avons besoin de tous pour réussir ensemble.
Monsieur de Montesquiou, je partage votre constat : pour ce qui concerne la dépense publique, la différence entre la France et les pays de la zone euro est de six points de PIB. Nos marges de progression sont considérables !
S'agissant des hypothèses de croissance, vous avez évoqué la pratique des Pays-Bas consistant à retenir des hypothèses économiques conservatoires. Ce choix conduit à constater des recettes fiscales supérieures chaque année aux prévisions initiales, mais le paradoxe est que ce principe de prudence n'est pas forcément compatible avec le principe de sincérité inscrit dans la LOLF. Il n'en reste pas moins que nous pouvons continuer à travailler ensemble dans cette voie.
Monsieur Dominati, je vous remercie de vos encouragements et de votre décision de voter en faveur de ce projet de loi de finances.
Je rejoins votre analyse. Comment, là encore, pourrais-je faire autrement ? La maîtrise des prélèvements obligatoires est un enjeu crucial de notre politique économique afin de conserver notre rang au sein des grandes nations productrices. De ce point de vue, un message très clair est adressé à l'ensemble des contribuables français ainsi qu'aux investisseurs étrangers quant à notre volonté d'inscrire notre système fiscal dans les standards internationaux.
C'est la raison pour laquelle il faut maîtriser la dépense, parce qu'on ne financera pas cette réforme fiscale à crédit. C'est toute la démarche du « zéro volume », qui, selon vous, semble rencontrer un succès limité. Mais je peux vous assurer que maintenir la dépense en volume à taux zéro relève d'un exploit quotidien ! La situation évolue en effet très rapidement, et les épreuves que traverse notre pays appellent des solutions qui doivent être apportées dans l'urgence et qui supposent que le financement nécessaire soit prévu : nous l'avons encore constaté lors de l'adoption du plan banlieues ! Ainsi, lors de l'examen de la deuxième partie du projet de loi de finances, je vous présenterai le dispositif du financement de ce plan, qui sera assuré par redéploiement à hauteur de 300 millions d'euros.
Sur ce point, j'attends beaucoup de la Haute Assemblée, en particulier de la commission des finances et de M. le rapporteur général, pour nous aider à essayer de trouver à chaque fois les meilleures solutions.
Monsieur Foucaud, le propre du débat budgétaire est d'exprimer des choix de société, c'est-à-dire des choix politiques. Et, à cet égard, force est de reconnaître que nous ne sommes pas tombés d'accord sur le fond.
M. Jean-François Copé, ministre délégué. J'ai ainsi très attentivement écouté votre propos et je suis obligé de constater que nous ne sommes pas d'accord sur grand-chose.
M. Alain Lambert sourit.
Contrairement à ce que vous indiquez, le Gouvernement n'oublie pas du tout les ménages les plus modestes. Et ce n'est pas simplement parce que vous êtes dans l'opposition et que vous l'affirmez que c'est vrai !
Mais ce n'est pas parce que vous êtes membre de la majorité que vous avez raison !
La revalorisation du SMIC de 10 % n'est pas une mesure anodine : elle représente quasiment l'équivalent d'un treizième mois ! Et il ne faut pas oublier le doublement de la prime pour l'emploi à temps partiel, l'augmentation de 50 % au niveau du SMIC ! De plus, avec la mise en place du plafonnement des impôts directs à 60 % des revenus, 90 % des bénéficiaires se situent dans le premier décile de l'impôt sur le revenu !
Cela étant, nous ne sommes pas non plus d'accord sur les valeurs. D'ailleurs, lorsque M. Alain Lambert s'est exprimé sur ce sujet, j'ai constaté que les membres du groupe auquel vous appartenez se sont manifestés, sans nul doute pour marquer une différence.
Il est vrai qu'il existe une différence : pour notre part, nous pensons qu'une société peut se développer à travers le travail, ...
... à travers la croissance, à travers la création d'emplois, la création d'entreprises.
Il faut sans cesse avoir à l'esprit qu'il faut tendre une main fraternelle et solidaire à celui qui poursuit une logique d'assistance, afin qu'il retourne vers l'emploi. Par conséquent, il faut aussi assumer de lui avouer la vérité, de lui dire que les choses ne sont jamais totalement pérennes, qu'une société n'a pas toujours les moyens de tout financer en toute circonstance. Il faut aussi créer des parcours de retour à l'emploi !
Ainsi, monsieur Lambert - et ce sera une excellente transition après la réponse que je viens de faire à l'orateur précédent -, je partage totalement, vous n'en serez pas surpris, les valeurs que vous avez décrites, et le choix que fait le Gouvernement d'encourager le travail est dans la droite ligne de l'action que vous avez vous-même menée lorsque vous occupiez les fonctions que j'ai l'honneur d'exercer aujourd'hui.
S'agissant de la prime pour l'emploi, nous avons « affiché la couleur » et montré clairement qu'en incitant au retour à l'emploi, en donnant plus de moyens par une augmentation de cette prime, nous apportons un début de réponse par rapport aux revenus d'assistance.
Dans le cadre du débat budgétaire, nous aurons l'occasion de revenir sur cette question, qui est absolument fondamentale à mes yeux et qui touche aussi à la réforme du système de distribution des minima sociaux.
Vous souhaitez que cette prime figure sur la feuille de paie ? J'en rêve aussi ! Vous connaissez le sujet aussi bien que moi §: l'intérêt de cette démarche est qu'ainsi la PPE n'apparaîtra plus aux yeux des employeurs comme une sorte de substitut, de salaire bis donné par d'autres. C'est très important ! Mais il faudra également surmonter des problèmes techniques...
Vivement demain, madame Bricq ! Depuis tout à l'heure, vous ne cessez de répéter « vous allez voir ce que vous allez voir ». Je meurs d'impatience !
Certes, nous avons tous de tels rendez-vous de temps en temps, et personnellement je ne m'en lasse jamais.
Quoi qu'il en soit, monsieur Lambert, comme vous l'avez noté, j'ai donné des instructions à la comptabilité publique pour que la prime soit versée mensuellement à partir du mois de janvier. C'est déjà un progrès !
Pour ce qui concerne la LOLF, je suis totalement d'accord avec vous sur la nécessité de ne pas être ambigu à l'égard de sa portée et de ses mérites. Vous avez d'ailleurs beaucoup travaillé avec moi sur ce sujet.
Notre rôle est de rendre la dépense publique efficace et de la promouvoir. De ce point de vue, nous avons beaucoup de travail à faire ensemble, chacun étant bien d'accord pour dire que la LOLF n'est pas un choix politique, ...
... mais un cadre qui permet les choix politiques. Nous pourrons ainsi montrer aux Français les résultats menés par chaque politique, qu'elle soit de gauche ou de droite. C'est un élément très utile pour la suite.
Permettez-moi un dernier mot s'agissant des finances publiques en « mode LOLF » : nous devons progresser vers un pilotage plus global de l'ensemble des administrations publiques. Vous le dites souvent, monsieur Lambert, et je dis la même chose que vous.
Par ailleurs, il faut que la LOLF - sécurité sociale progresse, soit encore précisée. Dans ce domaine, des efforts louables ont été fournis mais ils doivent être poursuivis. C'est pourquoi j'ai eu à coeur de lancer la conférence des finances publiques.
La méthode commence à être précisée, et M. le Premier ministre a d'ailleurs évoqué ce sujet voilà quelques jours au congrès de l'Association des maires de France.
C'est un chantier ambitieux, crucial, qui consiste à mettre sur la table les grands enjeux des politiques publiques et des finances publiques pour ce qui concerne l'État, la sécurité sociale et les collectivités locales.
Monsieur Lambert, vous êtes le bienvenu pour travailler sur ce sujet avec nous. Mais je sais que nombre de vos collègues sont également engagés sur ce point, à commencer par M. le président de la commission des finances.
Madame Beaufils, nous partageons une même passion pour notre pays, nous avons le même souhait d'oeuvrer concrètement pour améliorer le sort de nos concitoyens, mais nos points de vue divergent quant aux moyens.
Le problème de notre pays est non pas d'étendre encore l'État providence, mais de développer les incitations à l'activité. Il ne faut pas diviser le travail, mais augmenter l'offre de travail.
Il faut créer la richesse avant de la redistribuer. Il faut encourager les entreprises à investir sur notre sol plutôt que désespérer les entrepreneurs et les inciter à partir à l'étranger.
Bref, madame Beaufils, il faut cesser d'agiter ces chiffons rouges, qui consistent à opposer sans cesse les Français les uns aux autres. Combien de fois les orateurs de votre groupe ont-ils cité le « MEDEF » ?
Tant qu'un orateur de gauche n'a pas prononcé le mot « MEDEF » ou le mot « ultralibéralisme », il n'est pas satisfait !
Croyez-moi, tout cela n'a aucun sens. Le problème est de savoir non pas comment agiter les chiffons rouges pour opposer les gens, mais comment construire ensemble une croissance équilibrée, qui ne laisse personne sur le bord du chemin...
... et qui donne à chacun sa chance de réussir.
Au conseil général du Val-de-Marne, on travaille avec le MEDEF pour créer des entreprises !
Il s'agit de mettre en haut du podium celui qui prend des risques, qui entreprend et qui s'engage. Voilà ce qui fait la différence entre vos convictions et les nôtres !
Monsieur Fourcade, je vous remercie d'avoir souligné les trois tournants majeurs de ce projet de budget.
Vous avez d'abord évoqué la stabilisation de l'endettement, qui n'est pas une mince affaire.
Vous avez ensuite cité la réforme fiscale, sur laquelle nous avons beaucoup travaillé, avec votre concours. Qu'il s'agisse du plafonnement à 60 % ou de la question de la récupération, nous sommes parvenus à un système équilibré qui permettra d'aboutir à un dispositif simple. En tant que ministre de la réforme de l'État, je suis acquis à cette exigence.
Vous avez enfin évoqué la taxe professionnelle, sujet que vous connaissez particulièrement bien. Notre réforme est fondée sur deux piliers, à savoir la compétitivité de notre économie et la responsabilisation de l'ensemble des acteurs, État et collectivités locales. Nous aurons l'occasion d'en reparler tout au long de ce débat.
Monsieur Doligé, vous aviez annoncé un discours bref, mais ce fut un discours passionné et passionnant. En vous écoutant, j'ai retrouvé des contraintes que je connais bien en tant qu'élu local.
Vous nous avez rappelé le parcours d'obstacles auquel est confronté un chef d'entreprise qui veut investir dans notre pays. Vous avez ainsi rappelé que nous devons créer les conditions du développement des investissements et de l'emploi tout en respectant des règles qui simplifient la vie.
Un effort important a été réalisé ces dernières années dans ce domaine. Je pense en particulier à la loi Dutreil. Mais il faut aller plus loin : il faut libérer les initiatives, desserrer le carcan fiscal. C'est ce que nous faisons, par exemple avec la réforme de la taxe professionnelle, la pérennisation du dégrèvement pour investissements nouveaux - ce sera évidemment un encouragement - sans oublier le plafonnement à 60 % des revenus du montant de l'impôt sur le revenu, qui est un message de compétitivité et d'attractivité fiscale.
Je suis bien d'accord avec vous : il faut simplifier les formalités.
Je crois beaucoup au rapprochement entre le budget et la réforme de l'État, qui va nous permettre de développer des synergies très fructueuses dans les domaines économique et fiscal.
Je vous invite bien volontiers à nous rejoindre dans ce combat, vous sachant très engagé en matière de finances des conseils généraux. Je le suis également, ...
... ainsi que M. de Raincourt, qui est chef de file dans ce domaine.
Au cours de nos débats, j'espère que nous pourrons évoquer en détails tous ces sujets, sur lesquels l'État a des choses à dire.
M. Jean-François Copé, ministre délégué. Je l'avais bien compris, monsieur de Raincourt !
Sourires
Monsieur Fréville, je vous remercie de vos mots d'encouragement et du soutien que vous nous apportez.
Je vous remercie d'avoir relevé qu'il y avait dans ce budget, au-delà de l'hypothèse d'évolution du PIB, une « élasticité des recettes sur PIB » très modérée, et d'avoir noté les décisions que nous avons prises en faveur des collectivités sur le contrat de croissance et le FCTVA.
En tant que rapporteur des crédits de la défense, vous avez relevé l'importance de l'effort du Gouvernement, au point de vous interroger sur sa soutenabilité à terme. J'estime, comme vous, que cet effort méritait d'être souligné, et je souhaite que vos propos portent jusqu'à la rue Saint-Dominique.
M. Alain Lambert sourit.
Vous avez eu raison, monsieur Loueckhote, de rappeler l'importance de l'évaluation des dispositifs en faveur de l'outre-mer.
Telle a bien été la démarche du Gouvernement à l'Assemblée nationale : évaluer, conformément à ce qui était prévu dans la loi de programmation pour l'outre-mer, le bilan « coût-avantages » des dispositifs de défiscalisation.
Vous avez été en première ligne sur ce sujet et, lors de notre rencontre chez le Premier ministre, voilà quelques jours, à l'Hôtel Matignon, j'ai pu mesurer le travail considérable que vous avez accompli. Mme Michaux-Chevry participait d'ailleurs à cette réunion, et je suis heureux de la saluer aujourd'hui dans cet hémicycle.
Je dois souligner que cette évaluation sera prise en compte l'an prochain : le rendez-vous d'évaluation de la loi Girardin, au mois de juin, sera l'occasion de constater ce qu'il en est des dispositifs par rapport à la question du plafonnement. Mon collègue François Baroin et moi-même travaillerons ensemble sur ce dossier le moment venu.
Monsieur Dassault, vous nous avez suggéré de revenir sur les allégements de charges dont profitent les entreprises. Votre propos était frappé au coin du bon sens !
En évoquant la possibilité de récupérer 19 milliards d'euros, vous vous êtes montré très tentateur pour le ministre du budget que je suis !
M. Jean-François Copé, ministre délégué. Je constate, monsieur le rapporteur général, que vous ne perdez pas une occasion de me rappeler ce point, auquel vous êtes très profondément attaché !
M. le rapporteur général sourit.
Ne vous inquiétez pas, monsieur Arthuis : nous aurons ce débat. Vous l'avez voulu, vous m'entendrez donc !
Néanmoins, je persiste à penser que les allégements de charges sont quand même utiles, notamment pour absorber la convergence des SMIC et, surtout, le désastre des 35 heures.
Au-delà de cette question, monsieur Dassault, il y a une réalité que je tiens à évoquer avec vous, car elle donne lieu à un débat passionnant.
Nous avons pris un engagement vis-à-vis des entreprises, en essayant d'assumer le coût des 35 heures. Il est impossible de dire aux entreprises que le temps de travail hebdomadaire va passer de 39 heures à 35 heures au même tarif et qu'elles paieront la différence, sauf à considérer que le coût du travail peut être alourdi, auquel cas nous n'aurons plus que nos yeux pour pleurer lorsque nous ferons une étude comparée du coût du travail en France et dans les autres pays !
Ce fut, d'ailleurs, l'une des grandes ambiguïtés de la loi Aubry, au-delà du contresens économique et historique majeur qui consistait à faire croire aux Français que travailler moins créerait de l'emploi, alors qu'en réalité cela a conduit à répartir la pénurie. Mais n'y revenons pas ! C'est du passé, il nous appartient juste d'en gérer l'héritage.
En réalité, monsieur Dassault, c'est une réflexion plus globale sur le pouvoir d'achat et sur le coût du travail que nous devons mener. Le point que vous soulevez mérite d'être examiné plus avant, et non à la simple occasion de la discussion d'un amendement ou du budget dont vous êtes le rapporteur.
Je ne verrais que des avantages à travailler avec vous durant l'année 2006 sur cette question afin d'imaginer différentes formules de transfert d'une partie des charges sociales au bénéfice des salariés, notamment, et d'examiner comment tout cela peut se traduire pour les entreprises.
Il me paraît en tout cas utile d'approfondir ces questions : c'est un sujet sur lequel j'ai déjà eu l'occasion de m'entretenir avec vous ainsi qu'avec un certain nombre de députés, en particulier M. Novelli.
Monsieur Virapoullé, vous avez exposé vos convictions avec un brio remarquable et je tiens avant tout à vous dire combien j'admire vos qualités d'orateur. Je ne crois d'ailleurs pas être le seul ici.
M. Henri de Raincourt acquiesce.
Vous avez raison de dire que nous ne sommes pas seuls au monde. Il est de tradition bien française de se comparer avec le voisin immédiat, puis, ensuite, de reprendre sa petite vie tranquille. Malheureusement, le monde est vaste, même si, du fait des grands progrès de la technologie, il n'est plus qu'un village. C'est cela, la globalisation, la mondialisation !
Nos enfants, qu'ils aient cinq ans, huit ans ou dix ans, « chattent » sur leur ordinateur avec des interlocuteurs qu'ils ne connaissent pas, qui vivent à l'autre bout du monde. Et beaucoup d'entre eux le font non seulement en français, mais aussi en anglais ! Nous ne devons pas perdre de vue que nous travaillons pour l'avenir de nos enfants et que, si nous nous intéressons à ce qu'ils font, nous pouvons nous rendre compte qu'ils ont beaucoup mieux intégré que nous la mondialisation.
Il y a, derrière ce débat, quelques exigences fortes.
Nous devons, tout d'abord, préserver notre identité nationale au sein d'une identité européenne. Vous avez tout à fait raison : le message du référendum du 29 mai est très ambigu sur beaucoup de sujets et le « non » comme le « oui » sont riches de nombreuses significations. Mais une chose est sûre : nos compatriotes attendent ardemment une réponse politique claire en ce qui concerne les grands enjeux de demain dans le monde.
Vous l'avez dit, il faut renforcer l'attractivité de la France, d'où la réforme de la taxe professionnelle, d'où le plafonnement à 60 %, d'où un certain nombre de mesures fiscales pour les entreprises comme pour les ménages.
Il est évidemment très important de mener une telle politique, qui seule peut nous permettre d'aller de l'avant, et prendre les mesures pour organiser le commerce mondial afin de protéger les produits européens comme le font d'autres grands blocs - vous avez cité à juste titre le bloc américain, en particulier les Etats-Unis - pour leurs propres produits.
Ce débat dépasse donc le cadre du budget, mais les interactions sont nombreuses entre l'un et l'autre.
Enfin, monsieur Goulet, vous n'êtes pas un homme de renoncement, vous êtes, au contraire, un homme de conviction.
Sur les sujets que vous avez évoqués, il y a beaucoup de choses à dire ! En tout cas, l'étude dont vous avez fait état me semble très intéressante et je la lirai avec beaucoup de plaisir, car je distingue derrière tout cela bien des enjeux.
Pour conclure, mesdames, messieurs les sénateurs, sachez que je serai très heureux de pouvoir vous répondre plus en détail sur l'ensemble des points que vous avez évoqués et que je serai très attentif, tout au long de cette discussion, à vos propositions, à vos amendements et à vos critiques. En effet, concernant un budget de cette importance, compte tenu des réformes que nous proposons, nul d'entre nous ne peut considérer qu'il détient la vérité révélée.
Je suis non seulement ouvert à toute proposition d'amélioration ou de correction de ce budget, mais je suis demandeur ! Nous travaillerons ensemble et je ne ferai preuve d'aucun préjugé, je n'aurai aucune arrière-pensée. Les uns et les autres nous exprimerons nos convictions, et nous débattrons avec un seul souci : l'intérêt général, le service de la France.
Applaudissements sur les travées de l'UMP ainsi que sur certaines travées de l'UC-UDF.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Je suis saisi, par Mme Borvo Cohen-Seat, M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, d'une motion n° I-61, tendant à opposer la question préalable.
Cette motion est ainsi rédigée :
« En application de l'article 44, alinéa 3, du règlement, le Sénat décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi de finances pour 2006, adopté par l'Assemblée nationale (n° 98, 2005-2006). »
Je rappelle que, en application de l'article 44, alinéa 8, du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l'auteur de l'initiative ou son représentant, pour quinze minutes, un orateur d'opinion contraire, pour quinze minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.
En outre, la parole peut être accordée pour explication de vote, pour une durée n'excédant pas cinq minutes, à un représentant de chaque groupe.
La parole est à M. Bernard Vera, auteur de la motion.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les grandes lignes de ce projet de loi de finances pour 2006 se trouvent traduites dans les orientations générales du texte, ainsi déclinées : soutenir la croissance, développer l'emploi et consolider le redressement de nos finances publiques.
Si l'on devait résumer en quelques mots ce que signifie cette triple orientation, on pourrait le traduire ainsi : alléger l'impôt sur les sociétés et l'impôt de solidarité sur la fortune, remplacer les emplois publics et les emplois industriels supprimés par des emplois précaires, réduire la dépense publique tout en transférant une partie du déficit à la sécurité sociale.
Ce sont là quelques-uns des moyens utilisés par le Gouvernement pour atteindre les objectifs affichés.
Nous avons eu l'occasion, lors de la discussion générale, de pointer nombre des aspects critiquables de ce projet de loi, d'autant que tout montre, à l'examen des paramètres retenus, qu'il est insincère et qu'il permettra, le moment venu, tous les ajustements et tous les arrangements possibles.
Nous connaîtrons donc dès le mois de janvier le gel de crédits pourtant à peine votés, et nous aurons droit au fil des mois aux habituels décrets d'annulation de crédits, aux opérations de virement et de répartition.
Tout se passe, d'ailleurs, comme si la discussion de la loi de finances, année après année, et malgré - ou à cause - de la loi organique sur les lois de finances, s'apparentait de plus en plus à un théâtre d'ombres dont le scénario ne serait pas communiqué aux acteurs et dont seuls les auteurs connaîtraient le déroulement final.
Ce n'est évidemment pas là notre conception du débat parlementaire et du débat démocratique.
Je me permettrai simplement de rappeler ce qui faisait la une de l'actualité au moment du débat budgétaire, au début de l'automne.
Nous étions alors informés, chaque jour ou presque, des difficultés traversées par quelques propriétaires de l'île de Ré confrontés à l'imposition au titre de l'impôt de solidarité sur la fortune. Il est vrai qu'avec une hausse des valeurs immobilières de 100 % en cinq ans et un CAC 40 grimpant de 17 % depuis le début de l'année on ne pouvait que constater cette croissance de la valeur des patrimoines imposables. Nombreux sont d'ailleurs les salariés qui auraient sans doute aimé connaître, eux aussi, cette situation durant la même période.
En tout cas, fin septembre, la priorité des priorités, dans le débat budgétaire, c'était la baisse de l'impôt de solidarité sur la fortune. Pas moins de dix propositions de lois sur l'ISF ont été déposées pendant cette période par des parlementaires de la majorité.
Le problème, c'est que la réalité sociale a rattrapé d'un seul coup les intentions affichées. L'explosion de violence dans les banlieues que nous venons de vivre est soudain venue rappeler qu'il y avait à l'évidence d'autres priorités. Ces violences sont bien sûr inacceptables, mais elles sont révélatrices d'une crise profonde qui confirme un besoin urgent de solutions alternatives, porteuses de progrès social et de justice.
Les souffrances qui minent nos quartiers populaires appellent à un engagement résolu et durable en faveur des populations les plus démunies.
Le malaise des banlieues, où vivent près d'un Français sur trois, illustre qu'il est largement temps que les choix budgétaires et politiques de notre pays fassent enfin place à la satisfaction des besoins.
Quel intérêt de voir les déficits publics tenus dans des limites acceptables lorsque l'emploi précaire et le logement surpeuplé demeurent le quotidien de millions d'habitants de notre pays ? Quel intérêt de maîtriser la dépense publique quand l'école ne peut plus répondre à l'attente des jeunes et des parents, quand on ne construit plus assez de logements sociaux, quand le droit à la santé n'est pas une réalité pour les plus démunis ?
Ce budget ne correspond pas aux nécessités du moment, à l'état d'urgence sociale dans lequel nous nous trouvons avec la confirmation de l'ampleur des inégalités et des problèmes sociaux vécus au quotidien par nos compatriotes.
C'est d'un tout autre budget qu'ont besoin les habitants de notre pays, qui vous ont d'ailleurs, à plusieurs reprises depuis 2002, signifié à quel point les choix que vous opérez ne sont pas les bons, à quel point la politique que vous menez ne correspond nullement à leurs attentes.
J'aimerais évoquer certains propos entendus lors du débat budgétaire à l'Assemblée nationale.
« Premièrement, ce projet de budget pour 2006 n'est pas sincère quant aux prévisions de croissance, au taux de croissance des dépenses publiques et à l'aggravation de la pression fiscale. Vous renoncez à dire l'extrême gravité de la situation de nos finances publiques et à en tirer les conséquences.
« Deuxièmement, ce texte représente une menace pour l'avenir de nos finances publiques.
« Troisièmement, ce texte comporte des mesures fiscales injustes. Au lieu de soulager la pression fiscale pesant sur les classes moyennes, vous concentrez les cadeaux fiscaux sur les plus gros contribuables : les deux tiers du coût du bouclier fiscal profiteront à 14 000 contribuables imposables à l'ISF, pour 250 millions d'euros. »
L'auteur de ce véritable réquisitoire contre le projet de loi de finances pour 2006 est notre collègue Charles-Amédée de Courson, député UDF de la Marne, qui expliquait ainsi la position de son groupe lors du vote de la première partie.
Comme nul ne l'ignore ici, seul le groupe UMP de l'Assemblée nationale a estimé utile de voter en faveur du projet de loi de finances qui nous est aujourd'hui proposé. Tous les autres groupes, qu'il s'agisse du groupe des députés communistes et républicains, du groupe des socialistes et apparentés ou encore du groupe UDF, ont voté contre ce projet de budget pour 2006, exprimant ainsi la nécessité d'un autre budget.
Par cette motion tendant à opposer la question préalable, nous entendons donc prolonger cette exigence.
Outre les raisons et les motifs que je viens d'évoquer, j'aborderai rapidement quatre raisons principales qui justifient, à notre sens, cette motion.
Tout d'abord, ce projet de loi de finances qui nous est présenté pour 2006 constitue un véritable déni de l'expression démocratique de nos concitoyens. C'est le respect du suffrage universel tel qu'il s'est exprimé le 29 mai 2005 qui est en cause.
La deuxième raison tient au manque de sincérité des hypothèses économiques retenues, qui a pour effet de faire débattre la représentation nationale sur un faux budget. Votre prévision de croissance, monsieur le ministre, que vous établissez à 2, 25 %, est infirmée par l'ensemble des conjoncturistes, qui l'évaluent en moyenne à 1, 8 %. Vos prévisions sont irréalistes et l'erreur potentielle contenue dans ce budget est de 20 %. Il s'agit donc d'un budget d'affichage, qui vous permet d'évaluer le déficit public de la France à 2, 9 % du produit intérieur brut en 2006, soit à un niveau inférieur aux 3 % exigés par les critères de Maastricht.
La troisième raison de réfuter ce projet de budget est que celui-ci continue à réduire l'autonomie fiscale et financière des collectivités locales. La réforme engagée de la taxe professionnelle, c'est-à-dire son plafonnement à 3, 5 % de la valeur ajoutée, aura des conséquences négatives sur les services locaux rendus aux populations.
Le congrès de l'Association des maires de France se fait l'écho des inquiétudes des élus locaux s'agissant des conséquences de ce projet de budget sur les finances locales. L'impôt local ne doit pas servir de variable d'ajustement à la politique fiscale de l'État, et l'autonomie financière des communes doit être préservée.
La quatrième raison qui justifie cette question préalable tient au non-respect de l'article 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, qui dispose : « Pour l'entretien de la force publique, et pour les dépenses d'administration, une contribution commune est indispensable : elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés ».
Cet article affirme le principe du respect de la faculté contributive. Le principe de la progressivité de l'impôt est également affirmé par la décision du Conseil constitutionnel du 30 décembre 1981 relative à l'ISF.
Or vous vous attachez à limiter cette progressivité, voire à l'éliminer. Ce faisant, vous favorisez les plus fortunés et vous augmentez le poids des impôts les plus injustes que sont la TVA et la TIPP.
Prenons l'exemple de la baisse de l'impôt sur le revenu. On peut tourner la question dans tous les sens, mais rien n'y fait : pour les 15 millions à 20 millions de contribuables qui sont, de toute manière, empêchés par la modicité de leurs revenus d'acquitter la moindre cotisation, cette réforme ne change rien.
Chacun sait pertinemment que les principaux gagnants de la réforme seront les catégories les plus aisées de la population, notamment celles dont les revenus non salariaux vont largement bénéficier de l'intégration de l'abattement des 20 % dans le barème.
Cet abattement, accordé aux salariés mais également étendu à d'autres contribuables, est un formidable jackpot fiscal pour les plus aisés, pour les plus fortunés.
Et que dire de cette accumulation de cadeaux, qui font suite à la réforme de l'imposition du patrimoine, à l'allégement de l'ISF, à la multiplication et à la persistance de multiples niches fiscales dont on sait parfaitement qu'elles n'ont aucune influence réelle sur la situation de l'emploi et de la croissance et qu'elles ne recouvrent qu'une seule réalité tangible : l'économie d'impôt qu'elles permettent aux initiés !
Les 3, 5 milliards d'euros que coûtera la réforme de l'impôt sur le revenu ainsi que les milliards d'euros de dégrèvements accordés au titre de la taxe professionnelle vont manquer à l'appel pour répondre aux urgences sociales en matière d'emploi, de santé, de logement, de politique de la ville, de soutien à la vie associative, à la création artistique, à la préservation du patrimoine culturel et des espaces naturels.
Dans ces conditions, monsieur le ministre, mes chers collègues, vous comprendrez que le groupe communiste républicain et citoyen appelle le Sénat, en adoptant cette question préalable, à faire valoir enfin d'autres choix que ceux qui nous sont proposés pour l'heure dans ce projet de loi de finances pour 2006.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j'avoue être très surpris de cette initiative. En effet, notre collègue Bernard Vera et son groupe développent toute une analyse de ce projet de budget avant même de l'avoir examiné. Or le rapporteur général que je suis aimerait avoir l'occasion, au cours de la discussion des articles, de les convaincre que leur approche n'est pas la bonne.
Si nous voulons qu'un débat pluraliste et démocratique se déroule dans cet hémicycle, il faut confronter nos argumentaires !
La majorité du Sénat considère ainsi, par exemple, que toute mesure tendant à éviter l'évasion des capitaux et à améliorer l'attractivité de notre territoire est bonne pour la confiance et pour l'emploi, et que l'on ne pourra pas améliorer la situation des salariés et de l'emploi si l'on désespère ceux qui sont porteurs de projets d'entreprise.
Selon vous, dès lors qu'il y a - hélas ! - des malheureux sur le sol de notre pays, nous ne devons plus prendre en considération l'état d'esprit des détenteurs de capitaux et des entrepreneurs.
Exclamations sur les travées du groupe CRC.
Je ne crois pas avoir trop travesti votre pensée en disant que vous opposez les situations de misère, qui existent et auxquelles nous devons bien entendu nous attaquer, et notre prétendue sollicitude vis-à-vis des détenteurs de capitaux et des hommes d'entreprise.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Mes chers collègues, nous aimerions vous convaincre au cours de ce débat que cette position est factice et dépassée, et vous amener à aborder le marxisme à la façon de Deng Xiao Ping, qui disait : « Qu'importe que le chat soit noir ou blanc pourvu qu'il attrape des souris. »
Sourires
C'est avec cet espoir que nous souhaitons poursuivre et amplifier la discussion de ce projet de loi de finances.
La commission des finances ne peut donc qu'être très défavorable à votre motion tendant à opposer la question préalable.
Applaudissements sur les travées de l'UMP.
J'invite votre assemblée à rejeter cette motion. En effet, les propos de M. Vera m'incitent à penser qu'il est grand temps d'entrer dans le vif du sujet. Plus vite nous débattrons du fond, mieux ce sera, car nous pourrons enfin connaître les positions des uns et des autres.
Pour reprendre un proverbe chinois que Philippe Marini connaît bien : « C'est au pied du mur qu'on voit le mieux le mur. »
M. le rapporteur général sourit.
Retrouvons-nous donc vite au pied du mur !
Applaudissements sur les travées de l'UMP.
Vous avez tort de faire de l'humour sur ce sujet, monsieur le ministre. C'est très sérieux !
Je mets aux voix la motion n° I-61, tendant à opposer la question préalable.
Je rappelle que l'adoption de cette motion entraînerait le rejet du projet de loi de finances.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin a lieu.
Il est procédé au comptage des votes.
Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 24 :
Le Sénat n'a pas adopté.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à dix-neuf heures quinze, est reprise à vingt-et-une heures trente-cinq.