Intervention de Claire-Lise Campion

Réunion du 29 novembre 2014 à 14h45
Loi de finances pour 2015 — Solidarité insertion et égalité des chances

Photo de Claire-Lise CampionClaire-Lise Campion :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, madame la présidente de la commission des finances, monsieur le rapporteur pour avis, mes chers collègues, dans un environnement économique difficile, il est du devoir d’un gouvernement de faire preuve de responsabilité en matière budgétaire, ce que le nôtre fait en œuvrant en faveur du redressement des comptes de la Nation dans une proportion qui ne souffre aucune comparaison avec les ébauches d’efforts des dix dernières années.

Gardons toutefois à l’esprit que c’est dans les cycles où l’économie titube que la solidarité nationale doit jouer un rôle de premier ordre. Ainsi, notre devoir est d’épauler ceux de nos concitoyens les plus vulnérables.

Le programme 157 « Handicap et dépendance » se fond dans le cadre de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », que nous étudions aujourd’hui. Ce programme concentre à lui seul plus de 73 % des crédits et fait partie de ces pans du budget qui incarnent l’effort de solidarité.

Il a en effet vocation à soutenir nos compatriotes porteurs de handicap, que ce soit en matière de ressources, d’insertion professionnelle ou de service rendu, avec l’appui porté aux maisons départementales des personnes handicapées, les MDPH. On ne peut, par conséquent, eu égard au contexte qui vient d’être évoqué, se permettre de mettre à mal un tel programme. Ce sentiment est partagé par l’exécutif, qui fait le choix d’en pérenniser les moyens.

Parmi les actions de ce programme, quatre concernent les dépenses d’intervention auprès des personnes en situation de handicap.

La première action permet l’évaluation et l’orientation personnalisées des personnes handicapées ; plus de 66 millions d’euros seront dédiés en 2015 à sa réalisation. Ce montant est en augmentation de près de 3 % par rapport aux crédits de 2014. Presque 2 millions d’euros proviennent des missions « Travail et emploi » et du programme « Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative » pour alimenter le financement des MDPH.

La dix-huitième semaine pour l’emploi des personnes handicapées s’achève tout juste. Il s’agit d’une manifestation autour de l’insertion professionnelle et du maintien dans l’emploi des personnes handicapées. Dans cet esprit, l’action n° 2 du programme 157 concerne l’incitation à la vie professionnelle. Cette composante jouant un rôle charnière en matière d’inclusion ; nous devons y être particulièrement attachés, compte tenu du fait que les travailleurs handicapés figurent parmi les citoyens les plus touchés par la dégradation de la situation de l’emploi depuis 2007.

Les crédits pour l’incitation à l’activité professionnelle affichent une augmentation de plus de 41 millions d’euros pour un montant total de 2, 7 milliards d’euros, soit une hausse de 1, 52 %. La répartition en est la suivante : 1, 4 milliard d’euros abonderont la dotation globale de fonctionnement des établissements et services d’aide par le travail, les ESAT ; 1, 27 milliard d’euros seront dédiés à la garantie de rémunération des travailleurs handicapés.

On ne peut que se féliciter de l’engagement du Gouvernement, qui, en révisant à la hausse les montants dédiés, maintient et consolide les dispositifs d’aide à l’entrée dans l’emploi des plus fragiles.

Les crédits alloués aux ressources d’existence, à savoir l’action n° 3, s’élèvent à 8, 7 milliards d’euros, dont 8, 5 milliards financeront l’allocation aux adultes handicapés, l’AAH, soit une augmentation de plus de 126 millions d’euros par rapport à 2014. Rappelons qu’au 1er septembre 2014 l’AAH a été revalorisée de 1, 3 %.

Les crédits affectés au programme 157 au titre du projet de loi de finances 2015 s’élèvent donc à 11, 6 milliards d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement. Ce montant est en hausse de 1, 4 % par rapport à celui de la loi de finances initiale pour 2014. Cette hausse découle principalement de l’augmentation de l’AAH, qui, rappelons-le, est versée sous conditions de ressources aux adultes déclarés handicapés afin de leur assurer un revenu minimum.

La quasi-totalité des crédits sont concentrés sur les actions n° 2 et n° 3, qui connaissent une légère augmentation par rapport à l’année dernière.

L’effort financier consenti doit être salué en ces temps budgétaires contraints. L’évolution des crédits dédiés aux ESAT et à l’AAH, la revalorisation récente de cette dernière, tout comme la préservation de l’allocation supplémentaire d’invalidité vont dans le bon sens.

Le Gouvernement démontre une fois de plus que le cap de la justice sociale guide son action. Son volontarisme en matière de handicap s’est manifesté très tôt, avec la décision d’intégrer un volet dédié dans chaque projet de loi, l’élaboration du troisième plan autisme 2013-2017, ou encore la première réunion par le Premier ministre du comité interministériel du handicap, alors que ce dernier avait été créé en 2009.

Si ce volontarisme ne peut être contesté, permettez-moi malgré tout de formuler quelques observations.

L’effort en faveur du financement des ESAT est à souligner, mais le moratoire sur la création de places dans ces établissements est toujours d’actualité. J’entends le choix fait par le Gouvernement de renforcer l’existant pour une meilleure qualité de prise en charge. Pour autant, les besoins sont réels en la matière et la question de la suspension du moratoire devra être reposée dès que les marges budgétaires le permettront.

À propos du fonctionnement des MDPH, je souhaite attirer de nouveau l’attention sur un sujet que ma collègue Isabelle Debré et moi-même avions mis en lumière dans le rapport d’information du 4 juillet 2012 remis au nom de la commission pour le contrôle de l’application des lois.

Véritables innovations institutionnelles, les MDPH jouent le rôle d’interlocuteurs uniques, porteurs de simplification et de proximité. J’en veux pour preuve l’inflation d’activité qu’elles enregistrent depuis leur création. Revers de la médaille : comme elles sont de plus en plus sollicitées, les délais de traitement se sont allongés et la qualité du service rendu a pu parfois s’en ressentir. Au moment où la simplification s’érige en garante de l’efficacité de l’action publique, il nous faut créer les conditions de son application.

Aussi, à mes yeux, il conviendrait de remédier aux problèmes que suscitent doublons et démarches inutiles. Le réexamen, tous les deux ans, par les MDPH, de la situation des bénéficiaires de l’AAH dont le taux d’incapacité se situe entre 50 % et 79 % en est une illustration parfaite. Un travail de rationalisation devra, me semble-t-il, être entrepris afin que les MDPH conservent toutes leurs possibilités d’agir efficacement.

Enfin, chacun sait combien la mobilité est facteur d’intégration. Aussi, j’aimerais de nouveau attirer l’attention du Gouvernement sur la fraude aux cartes européennes de stationnement. Ces dernières font, de manière croissante, l’objet d’usages abusifs, de falsifications ou de contrefaçons, au détriment de leurs détenteurs légitimes.

L’article L. 241-3-2 du code de l’action sociale dispose que le préfet délivre la carte européenne de stationnement. Or, dans l’immense majorité des départements, ce sont les MDPH qui assument leur mise en circulation et, comme je le soulignais à l’instant, elles doivent faire face à un afflux de demandes qui ne leur permet pas de traiter la question des fraudes.

Des travaux sont réalisés depuis un an par l’Imprimerie nationale, en coordination avec le ministère des affaires sociales, de manière à sécuriser les cartes européennes de stationnement. Certaines associations réclament la création d’un fichier permettant aux agents de l’État de contrôler en temps réel la validité de la carte. Le Gouvernement peut-il, madame la secrétaire d’État, nous faire part de l’état d’avancement des réflexions concernant la réduction des possibilités de fraude ?

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