Séance en hémicycle du 29 novembre 2014 à 14h45

Résumé de la séance

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La séance

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La séance, suspendue à douze heures quarante-cinq, est reprise à quatorze heures quarante-cinq, sous la présidence de M. Hervé Marseille.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Nous reprenons l’examen des crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » (et article 60).

Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Aline Archimbaud.

Debut de section - PermalienPhoto de Aline Archimbaud

Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur pour avis, mes chers collègues, la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » est un pilier de la politique sociale de l’État, à l’heure où la précarité est le quotidien d’un trop grand nombre de personnes dans notre pays et où la pauvreté s’intensifie.

Cette mission doit être examinée avec soin, car elle est un outil fondamental de la lutte contre les inégalités sociales. Je rappelle que, en France, neuf millions de personnes vivent en dessous du seuil de pauvreté, évalué à environ 900 euros par mois, deux millions de nos concitoyens étant dans une situation de très grande pauvreté, avec un revenu mensuel inférieur à 650 euros.

Les crédits alloués à chaque programme sont globalement en très légère augmentation. Comme cela a été souligné, l’augmentation très importante du budget alloué au RSA activité est liée au changement de son mode de financement. Le RSA activité mis à part, les crédits de la mission enregistrent une hausse légère – 1, 5 % – mais réelle.

Même si le contexte budgétaire est serré, l’engagement de l’État doit être proportionnel aux difficultés que nous connaissons.

La crise sociale et économique frappe terriblement les territoires. Je ne prendrai qu’un seul exemple : en Seine-Saint-Denis, on compte aujourd'hui 90 000 bénéficiaires du RSA socle, alors que le reversement avait été calculé sur la base de 40 000 bénéficiaires. Le contexte général est donc lourd. Cela justifie que l’État continue à s’engager de manière importante.

Faute de pouvoir tout passer en revue en six minutes, je m’arrêterai sur quelques points, en commençant par le RSA activité, qui représente une grande partie du programme 304.

Je veux souligner à mon tour l’importance du non-recours à ce dispositif, qui relativise les prévisions budgétaires pour cette année. D’après les chiffres publiés par le comité national d’évaluation du RSA en 2011, on compte 50 % de non-recours en moyenne pour les trois types de RSA et 68% pour le RSA activité. Cette situation est tout à fait préoccupante ; cela fait plusieurs années que nous le soulignons avec nos collègues députés.

L’annonce de la création d’une prime d’activité nous intéresse. Nous attendons d’avoir davantage de précisions ; madame la secrétaire d'État, peut-être pourrez-vous nous donner des détails. Il ne faut pas créer un nouveau dispositif sans régler le problème du non-recours.

Nous espérons que la prime d’activité sera un dispositif simple d’accès n’impliquant pas une multiplicité de démarches et correspondant aux demandes.

Il faut éviter de surcroît toute stigmatisation, car le non-recours pose un véritable problème. Il peut paraître intéressant à certains dans la mesure il permet de faire des économies à court terme, mais on sait bien qu’il est extrêmement dangereux pour notre pays.

Le programme « Handicap et dépendance » représente environ 75 % des crédits de la mission. Les dépenses d’intervention sont en légère augmentation, et les dépenses de fonctionnement sont maintenues à leur niveau de 2014. Comme cela a été souligné lors de l’examen du projet de loi relatif à l’accessibilité, ce programme est fondamental. Nous aurons l’occasion d’en reparler au moment de l’examen du projet de loi sur l’autonomie et le vieillissement.

L’accessibilité universelle et l’accès à l’emploi des personnes handicapées ou en perte d’autonomie sont deux points centraux. Je veux dire combien il est important de développer l’incitation à l’activité professionnelle, qui constitue l’action n° 2 du programme « Handicap et dépendance ». Les crédits de cette action sont légèrement en hausse ; c’est une bonne chose. En revanche, je suis, comme d’autres, très préoccupée par le maintien du gel du nombre de places en établissements et services d’aide par le travail, qui n’est pas satisfaisant, car il met un certain nombre d’associations gestionnaires d’ESAT devant de très graves difficultés. On ne pourra pas prolonger longtemps ce moratoire.

Je voudrais également dire un mot du budget alloué à l’économie sociale et solidaire. Il est en baisse de 5 % par rapport à 2014, même si certaines dotations sont en hausse. Cela ne nous paraît pas une bonne chose. Ce n’est pas un bon signal envoyé à l’économie sociale et solidaire, qui est un secteur économique à part entière – cela a été souligné lors de l’examen du projet de loi relatif à l’économie sociale et solidaire –, et un secteur en croissance, créateur d’emplois non délocalisables. Nous regrettons la baisse des crédits qui y sont consacrés, car on a là une possibilité d’encourager des entreprises économiquement viables tout en mettant en œuvre des valeurs de solidarité et de fonctionnement démocratique.

Mes chers collègues, même si nous avons un certain nombre de regrets, nous voterons les crédits de cette mission si fondamentale pour notre société, dans la mesure où ils sont en hausse – une hausse légère, certes – dans un contexte difficile.

Applaudissements sur les travées du groupe écologiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, les crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » sont en légère hausse par rapport à l’an dernier, avec un budget global de 15, 75 milliards d'euros pour les quatre programmes qui la composent. Cette hausse est une bonne nouvelle.

Examinons tout d'abord le programme « Inclusion sociale, protection des personnes et économie sociale et solidaire ». Si ses crédits sont en hausse, c’est essentiellement en raison de l’augmentation du nombre d’allocataires du RSA et de la revalorisation du RSA et de l’allocation aux adultes handicapés, l’AAH.

Les effets de la crise économique continuent d’être durement ressentis par nos concitoyens, comme en témoigne le nombre historique de demandeurs d’emploi.

L’État a la responsabilité d’assurer une solidarité renforcée en cette période. Or nous avons des inquiétudes sur le financement des prestations de solidarité, notamment sur le mode de financement du RSA activité, qui souffre d’une insuffisance de dotations depuis plusieurs années et a été réformé dans le cadre du pacte de responsabilité.

Cette année, la Cour des comptes a estimé que l’insuffisance des dotations du Fonds national des solidarités actives, le FNSA, qui finance le RSA, était de l’ordre de 300 à 500 millions d’euros. Le pacte de responsabilité a entraîné le glissement du financement du FNSA vers la sécurité sociale, alors même que celle-ci subit une perte de 20 milliards d’euros du fait des exonérations de cotisations patronales. Dès lors, madame la secrétaire d'État, nous nous demandons comment le Gouvernement compte assurer le financement du RSA, notamment la dotation d’1, 7 milliard d’euros du FNSA, en 2015.

Venons-en maintenant aux crédits du programme « Handicap et dépendance », qui sont en hausse de 3, 4 %. La lutte contre l’exclusion des personnes les plus vulnérables étant censée être une priorité du Gouvernement, nous accueillons positivement cette hausse. Cependant, la progression des crédits ne saurait cacher la réalité des économies budgétaires réalisées sur ce programme. En effet, le Gouvernement opère des prélèvements sur les crédits de l’Association de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées, l’AGEFIPH, et diminue en réalité de 8 millions d'euros la dotation de fonctionnement des maisons départementales des personnes handicapées, les MDPH.

Nous assistons une nouvelle fois au détournement des fonds de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, la CNSA, pour compenser le désengagement de l’État. À cela s’ajoute la décision de faire porter la charge des aménagements en faveur de l’accessibilité des établissements publics aux collectivités territoriales. Or la diminution des dotations financières est déjà particulièrement injuste tant pour les communes que pour les personnes concernées.

Nous sommes donc confrontés à un grand écart entre les discours volontaristes du comité interministériel du handicap et les moyens financiers prévus par le projet de loi de finances pour 2015.

Les crédits du programme « Égalité entre les femmes et les hommes » restent stables à 25, 2 millions d’euros, mais nous nous interrogeons sur les moyens de financement du volet d’accompagnement social de la proposition de loi renforçant la lutte contre le système prostitutionnel. Si le texte n’a pas encore été inscrit à l’ordre du jour de notre assemblée, il n’en demeure pas moins que, en l’absence de budgétisation, il constitue une coquille vide pour l’accompagnement social.

Par ailleurs, nous constatons avec regret que le programme ne prévoit pas de revalorisation du montant du complément de libre choix d’activité versé pendant le congé parental. La seule solution pour inciter les pères à prendre ce congé consisterait à revaloriser le montant du complément ; les couples pourraient ainsi choisir librement.

Je souhaiterais dire quelques mots sur les personnes handicapées vieillissantes.

En commission, le manque de dispositifs adaptés à l’accompagnement des personnes vieillissantes a été souligné ; je partage les remarques qui ont été faites. Nous constatons en effet des carences dans la formation des professionnels concernés et un manque d’implication des pouvoirs publics. Tout cela contraint les maisons d’accueil spécialisées et les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, les EHPAD, à se débrouiller avec leurs moyens pour faire face à des besoins croissants. Le projet de loi relatif à l’adaptation de la société au vieillissement ne semble pas apporter de réponse à cette situation. Madame la secrétaire d'État, pourriez-vous nous en donner les raisons ?

Enfin, le programme « Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative », qui regroupe essentiellement les crédits de fonctionnement des ministères sociaux et des agences régionales de santé nous interpelle. En effet, les ARS subissent une baisse d’effectifs : leur plafond d’emplois diminue de 253 équivalents temps plein en 2015.

Si nous continuons à penser que l’organisation du système de santé et certaines des prérogatives des ARS ne correspondent pas à notre projet de service public de la santé, nous ne sommes pas pour autant favorables à la diminution des effectifs des ARS. Notons que, malgré la suppression de 253 équivalents temps plein, le projet de loi de financement de la sécurité sociale, tel qu’il a été voté par le Sénat ce jeudi, prévoit d’élargir les compétences des ARS au contrôle de la qualité et de la sécurité des établissements publics. Comme l’ensemble du groupe CRC, je suis particulièrement dubitative face à cette nouvelle formule – elle n’est d'ailleurs pas si nouvelle, hélas – consistant à vouloir toujours faire plus et mieux avec moins !

En conclusion, nous pensons que d’autres ambitions sont nécessaires : arrêter les diminutions d’effectifs, mettre l’humain au cœur des politiques et instaurer une nouvelle répartition des richesses pour que, dans la période de crise actuelle, la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » dispose réellement des moyens dont elle a besoin.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur pour avis, mes chers collègues, doté de 15, 7 milliards d’euros, le budget de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » augmente d’environ 500 millions d’euros en deux ans. Cette hausse résulte principalement de l’évolution de deux dépenses dans le cadre du dernier plan pauvreté : l’AAH, qui coûtera 8, 5 milliards d’euros en 2015, et la partie « activité » du RSA, qui représente plus de 1, 9 milliard d’euros.

Cependant, les besoins de la mission dépasseront manifestement ce qui est prévu.

En effet, la revalorisation de 2 % par an du RSA absorbe à elle seule la moitié de la hausse de 500 millions d’euros. Dès lors, si l’on ajoute la hausse de l’AAH, les mesures de protection juridique des majeurs, ainsi que d’autres prestations obligatoires prévues par la mission, il est clair que le compte n’y est pas.

Non seulement les crédits proposés ne sont pas en adéquation avec les besoins réels, mais, en outre, certains sont fixés au prix de la mise en place d’une regrettable tuyauterie budgétaire, comme certains orateurs qui m’ont précédé l’ont dit.

Je pense notamment à la contribution exceptionnelle de solidarité des fonctionnaires de 200 millions d’euros, qui viendra compléter le financement du FNSA, ou aux 10 millions d’euros provenant de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, qui contribueront au financement des MDPH.

La sous-évaluation des dépenses et ces ponctions, dont on ne sait si elles auront un caractère pérenne, sont les principales raisons de l’avis défavorable donné à la fois par la commission des finances et la commission des affaires sociales sur les crédits de cette mission.

Notre groupe partage bien entendu cette position.

Je dirai quelques mots sur le RSA activité, dont le taux de non-recours est estimé à environ 68 %, et qui va être réformé, tout comme la prime pour l’emploi. Ce taux est quand même particulièrement significatif, la moyenne du taux de non-recours des prestations sociales étant de 20 % à 30 %.

Cette annonce de modification, notamment de la prime pour l’emploi, fait suite au rapport de Christophe Sirugue, qui a souligné la complexité du dispositif du RSA, en particulier des modalités de calcul des ressources, le manque d’informations des éventuels bénéficiaires, et son caractère peu incitatif. Ces faiblesses sont principalement dues au saupoudrage et à l’absence d’effet de levier de la prime pour l’emploi, expérience dont nous devons tirer la leçon.

Je pense qu’il faut s’interroger sur le coût que peut avoir cette réforme, pourtant indispensable. Le rapport de la commission des finances situe entre 400 millions d’euros et 750 millions d’euros supplémentaires la charge d’une réduction de moitié du non-recours au RSA activité, ce qui, en période de disette budgétaire, peut légitimement nous interpeller.

Le coût ne doit pas nous empêcher pour autant de réformer le dispositif, mais encore faudra-t-il nous détacher de la logique de minima sociaux pour retrouver l’objectif initial : le RSA visait avant tout la reprise d’un travail, la recherche d’un emploi, ce qui est beaucoup plus valorisant que tout.

Cet objectif de lutte contre le chômage doit guider la réforme à venir pour que nous ne pas retombions dans les mêmes ornières. Pour cela, il faut une véritable volonté politique et une prise de responsabilité du Gouvernement, qui ne peut demander aux collectivités d’assumer plus longtemps et davantage une politique de solidarité qui lui incombe.

Je rappelle que la répartition du financement entre l’État et les départements ne va pas de soi, non plus que l’évolution du RSA jeunes.

Le Gouvernement tarde à livrer le contenu exact d’une réforme annoncée depuis longtemps. Pouvez-vous nous donner, madame la secrétaire d’État, quelques engagements sur un calendrier ?

Pour en revenir à l’examen des crédits de la mission, je rappelle que, sous l’effet de la contrainte budgétaire, la mission se réduit à ses seuls dispositifs de guichet et supprime les interventions plus ciblées telles que l’APRE, l’aide personnalisée au retour à l’emploi, ou les subventions aux associations qui animent sur le terrain la politique de solidarité.

Concernant l’APRE, sans doute le dispositif était-il perfectible, puisqu’il était peu utilisé, car trop complexe, mais il s’agissait vraiment d’une aide concrète, qui parle à chacun d’entre nous. Le retour à l’emploi pouvant entraîner des frais représentant un véritable blocage, il s’agissait de les supprimer : ainsi, un permis de conduire à passer, une garde d’enfant à trouver, un équipement professionnel onéreux pouvaient cesser d’être des obstacles. J’y insiste, le RSA a été créé avant tout pour que les personnes bénéficiant des minima sociaux soient poussées à retrouver un travail, ce qui implique qu’elles n’y perdent pas financièrement. Voilà pour l’aspect incitatif.

L’APRE était souvent utilisée lorsque les personnes n’étaient éligibles à aucun autre dispositif ; elle avait donc son utilité. Le Gouvernement devrait partager cette préoccupation, mais j’ai le sentiment qu’il supprime toute initiative de la majorité précédente, choisissant ainsi la facilité : il est bien plus aisé de supprimer que de simplifier !

Concernant le volet « handicap », je suis, je l’avoue, surpris par certains chiffres.

Tout d’abord, je partage l’inquiétude des rapporteurs sur la sous-dotation de la ligne budgétaire relative à l’allocation aux adultes handicapés. M. Philippe Mouiller l’a fort bien expliqué.

La stabilité du financement consacré aux MDPH n’est assurée que par un abondement exceptionnel de 10 millions d’euros, qui provient de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie. La raréfaction des ressources de l’État provoque décidément la mise en œuvre d’une tuyauterie budgétaire contraire à la simplification des comptes. On est en donc en droit de s’interroger sur la sincérité de ces derniers. Ainsi, il y aura plus de 200 millions d’euros « oubliés », ce qui risque de nécessiter un abondement en cours de gestion, comme je l’ai déjà expliqué.

L’ambition du Gouvernement en direction des personnes handicapées est limitée, comme le montre la faiblesse des crédits consacrés aux ESAT, avec seulement 2 millions d’euros d’aide à la modernisation et, surtout, aucune nouvelle place construite malgré les besoins existants. Est-ce vraiment le poste où il faut réaliser des économies, madame la secrétaire d’État ?

J’ajouterai, car le sujet me tient à cœur, que le Gouvernement, qui ne cesse de revendiquer un maintien des postes dans le secteur de la santé publique, supprime, certes fort discrètement, mais supprime tout de même 100 équivalents temps plein dans les agences régionales pour la santé. Souhaitons que cette logique réponde à une volonté de clarification entre le sanitaire et le médico-social, ce que nous verrons peut-être lors de l’examen de la loi NOTRe, mais je n’en suis pas intimement convaincu.

Cette mission vouée à la solidarité se réduit finalement à des dépenses de guichet – c’est la reconduction des crédits de fonctionnement –, les autres dépenses sur lesquelles le Gouvernement peut agir étant supprimées, comme l’APRE, ou gelées, tels les investissements dans les ESAT.

Dans ces conditions, vous comprendrez que le groupe UMP rejette les crédits de cette mission. Les différents orateurs, que j’ai bien écoutés, sont unanimes, quelles que soient les travées sur lesquelles ils siègent, pour alerter le Gouvernement sur le coût du RSA socle, qui devient insupportable pour les départements. À cet égard, la discussion de la loi NOTRe doit être l’occasion de trouver une solution à ce problème.

S’agissant des personnes handicapées, notamment âgées, il faut tenir compte de l’expérience pour voir comment on peut adapter la position des ARS.

Enfin, concernant les crédits aux associations, nous devons craindre que ne se pose demain un véritable problème pour le monde associatif, puisque les départements et les communes n’ont plus les moyens de les soutenir.

C’est notre rôle de vous alerter, madame la secrétaire d’État !

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Claire-Lise Campion

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, madame la présidente de la commission des finances, monsieur le rapporteur pour avis, mes chers collègues, dans un environnement économique difficile, il est du devoir d’un gouvernement de faire preuve de responsabilité en matière budgétaire, ce que le nôtre fait en œuvrant en faveur du redressement des comptes de la Nation dans une proportion qui ne souffre aucune comparaison avec les ébauches d’efforts des dix dernières années.

Gardons toutefois à l’esprit que c’est dans les cycles où l’économie titube que la solidarité nationale doit jouer un rôle de premier ordre. Ainsi, notre devoir est d’épauler ceux de nos concitoyens les plus vulnérables.

Le programme 157 « Handicap et dépendance » se fond dans le cadre de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », que nous étudions aujourd’hui. Ce programme concentre à lui seul plus de 73 % des crédits et fait partie de ces pans du budget qui incarnent l’effort de solidarité.

Il a en effet vocation à soutenir nos compatriotes porteurs de handicap, que ce soit en matière de ressources, d’insertion professionnelle ou de service rendu, avec l’appui porté aux maisons départementales des personnes handicapées, les MDPH. On ne peut, par conséquent, eu égard au contexte qui vient d’être évoqué, se permettre de mettre à mal un tel programme. Ce sentiment est partagé par l’exécutif, qui fait le choix d’en pérenniser les moyens.

Parmi les actions de ce programme, quatre concernent les dépenses d’intervention auprès des personnes en situation de handicap.

La première action permet l’évaluation et l’orientation personnalisées des personnes handicapées ; plus de 66 millions d’euros seront dédiés en 2015 à sa réalisation. Ce montant est en augmentation de près de 3 % par rapport aux crédits de 2014. Presque 2 millions d’euros proviennent des missions « Travail et emploi » et du programme « Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative » pour alimenter le financement des MDPH.

La dix-huitième semaine pour l’emploi des personnes handicapées s’achève tout juste. Il s’agit d’une manifestation autour de l’insertion professionnelle et du maintien dans l’emploi des personnes handicapées. Dans cet esprit, l’action n° 2 du programme 157 concerne l’incitation à la vie professionnelle. Cette composante jouant un rôle charnière en matière d’inclusion ; nous devons y être particulièrement attachés, compte tenu du fait que les travailleurs handicapés figurent parmi les citoyens les plus touchés par la dégradation de la situation de l’emploi depuis 2007.

Les crédits pour l’incitation à l’activité professionnelle affichent une augmentation de plus de 41 millions d’euros pour un montant total de 2, 7 milliards d’euros, soit une hausse de 1, 52 %. La répartition en est la suivante : 1, 4 milliard d’euros abonderont la dotation globale de fonctionnement des établissements et services d’aide par le travail, les ESAT ; 1, 27 milliard d’euros seront dédiés à la garantie de rémunération des travailleurs handicapés.

On ne peut que se féliciter de l’engagement du Gouvernement, qui, en révisant à la hausse les montants dédiés, maintient et consolide les dispositifs d’aide à l’entrée dans l’emploi des plus fragiles.

Les crédits alloués aux ressources d’existence, à savoir l’action n° 3, s’élèvent à 8, 7 milliards d’euros, dont 8, 5 milliards financeront l’allocation aux adultes handicapés, l’AAH, soit une augmentation de plus de 126 millions d’euros par rapport à 2014. Rappelons qu’au 1er septembre 2014 l’AAH a été revalorisée de 1, 3 %.

Les crédits affectés au programme 157 au titre du projet de loi de finances 2015 s’élèvent donc à 11, 6 milliards d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement. Ce montant est en hausse de 1, 4 % par rapport à celui de la loi de finances initiale pour 2014. Cette hausse découle principalement de l’augmentation de l’AAH, qui, rappelons-le, est versée sous conditions de ressources aux adultes déclarés handicapés afin de leur assurer un revenu minimum.

La quasi-totalité des crédits sont concentrés sur les actions n° 2 et n° 3, qui connaissent une légère augmentation par rapport à l’année dernière.

L’effort financier consenti doit être salué en ces temps budgétaires contraints. L’évolution des crédits dédiés aux ESAT et à l’AAH, la revalorisation récente de cette dernière, tout comme la préservation de l’allocation supplémentaire d’invalidité vont dans le bon sens.

Le Gouvernement démontre une fois de plus que le cap de la justice sociale guide son action. Son volontarisme en matière de handicap s’est manifesté très tôt, avec la décision d’intégrer un volet dédié dans chaque projet de loi, l’élaboration du troisième plan autisme 2013-2017, ou encore la première réunion par le Premier ministre du comité interministériel du handicap, alors que ce dernier avait été créé en 2009.

Si ce volontarisme ne peut être contesté, permettez-moi malgré tout de formuler quelques observations.

L’effort en faveur du financement des ESAT est à souligner, mais le moratoire sur la création de places dans ces établissements est toujours d’actualité. J’entends le choix fait par le Gouvernement de renforcer l’existant pour une meilleure qualité de prise en charge. Pour autant, les besoins sont réels en la matière et la question de la suspension du moratoire devra être reposée dès que les marges budgétaires le permettront.

À propos du fonctionnement des MDPH, je souhaite attirer de nouveau l’attention sur un sujet que ma collègue Isabelle Debré et moi-même avions mis en lumière dans le rapport d’information du 4 juillet 2012 remis au nom de la commission pour le contrôle de l’application des lois.

Véritables innovations institutionnelles, les MDPH jouent le rôle d’interlocuteurs uniques, porteurs de simplification et de proximité. J’en veux pour preuve l’inflation d’activité qu’elles enregistrent depuis leur création. Revers de la médaille : comme elles sont de plus en plus sollicitées, les délais de traitement se sont allongés et la qualité du service rendu a pu parfois s’en ressentir. Au moment où la simplification s’érige en garante de l’efficacité de l’action publique, il nous faut créer les conditions de son application.

Aussi, à mes yeux, il conviendrait de remédier aux problèmes que suscitent doublons et démarches inutiles. Le réexamen, tous les deux ans, par les MDPH, de la situation des bénéficiaires de l’AAH dont le taux d’incapacité se situe entre 50 % et 79 % en est une illustration parfaite. Un travail de rationalisation devra, me semble-t-il, être entrepris afin que les MDPH conservent toutes leurs possibilités d’agir efficacement.

Enfin, chacun sait combien la mobilité est facteur d’intégration. Aussi, j’aimerais de nouveau attirer l’attention du Gouvernement sur la fraude aux cartes européennes de stationnement. Ces dernières font, de manière croissante, l’objet d’usages abusifs, de falsifications ou de contrefaçons, au détriment de leurs détenteurs légitimes.

L’article L. 241-3-2 du code de l’action sociale dispose que le préfet délivre la carte européenne de stationnement. Or, dans l’immense majorité des départements, ce sont les MDPH qui assument leur mise en circulation et, comme je le soulignais à l’instant, elles doivent faire face à un afflux de demandes qui ne leur permet pas de traiter la question des fraudes.

Des travaux sont réalisés depuis un an par l’Imprimerie nationale, en coordination avec le ministère des affaires sociales, de manière à sécuriser les cartes européennes de stationnement. Certaines associations réclament la création d’un fichier permettant aux agents de l’État de contrôler en temps réel la validité de la carte. Le Gouvernement peut-il, madame la secrétaire d’État, nous faire part de l’état d’avancement des réflexions concernant la réduction des possibilités de fraude ?

Debut de section - Permalien
Pascale Boistard

Monsieur le président, madame la présidente de la commission des finances, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » du projet de loi de finances pour 2015 reflète à la fois le sérieux budgétaire voulu par le Gouvernement et son souci de renforcer la justice sociale et la solidarité.

Le Gouvernement fait de la solidarité une priorité. Aussi les crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » sont-ils globalement préservés afin de répondre aux besoins d’accompagnement des publics vulnérables et de tenir les engagements du Gouvernement en matière de lutte contre la pauvreté.

Le programme 304 comporte les crédits correspondant, pour 2015, au financement du RSA activité qui revient à l’État. La hausse des crédits affectés au RSA en 2015 correspond en réalité à une opération de simplification des règles d’abondement du Fonds national des solidarités actives, le FNSA, dans le cadre du transfert de la recette des prélèvements de solidarité de l’État vers la sécurité sociale. Cette perte de recettes a été compensée par l’apport de crédits budgétaires à hauteur de 1 735, 9 millions d’euros, correspondant à la fraction des prélèvements sociaux sur les revenus du capital affectée au FNSA antérieurement, et par le transfert d’une fraction du « 1 % solidarité », aujourd’hui affecté au Fonds de solidarité, à hauteur de 200 millions d’euros.

La rebudgétisation de ces dépenses est une bonne nouvelle : nous maîtriserons mieux leur évolution. En effet, si nous constatons des impasses de financement au regard des besoins, nous ouvrirons des crédits complémentaires en fin de gestion. L’État ne manquera pas à ses obligations envers les bénéficiaires du RSA, bien évidemment !

Les crédits affectés au RSA incluent par ailleurs la revalorisation exceptionnelle du revenu de solidarité active qui est prévue dans le plan de lutte contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale, afin de combler l’écart qui s’est creusé entre le RSA et le SMIC et ramener le RSA à environ 50 % du SMIC d’ici à la fin du quinquennat, avec une augmentation de 2 % chaque année, soit une augmentation de 10 % au total.

Le programme 304 comporte néanmoins une mesure d’économie : aucun abondement du FNSA n’est en effet prévu en 2015 au titre de l’aide personnalisée de retour à l’emploi, l’APRE. Créée en 2009, cette aide a souffert de son éparpillement lié à la diversité des opérateurs chargés de la prescrire – jusqu’à cent intervenants sont susceptibles d’intervenir sur certains territoires ! – et à une complexité de gestion qui a entraîné une sous-consommation chronique conduisant à une diminution régulière du montant des crédits affectés à l’APRE depuis 2010.

Le choix a donc été fait par le Gouvernement de privilégier une simplification des aides autour de l’opérateur principal, Pôle emploi, qui délivre des aides à la mobilité et à la garde d’enfant destinées prioritairement aux publics les plus en difficulté depuis leur refonte intervenue au début de 2014. Pôle emploi s’est vu en effet assigner, dans sa convention tripartite 2015-2017, l’objectif d’élargir son action en direction des publics fragiles : il doit développer à ce titre l’accompagnement global des personnes, en lien avec les acteurs de l’insertion au plan local et en s’appuyant sur 1 000 conseillers dédiés à cet accompagnement global.

Concernant l’aide alimentaire, le budget pour 2015 est en hausse de 3, 5 %. Afin de répondre à une demande croissante, cette augmentation, qui concerne l’ensemble des lignes budgétaires consacrées à l’aide alimentaire, permet de préserver, à la fois, le volume des denrées distribuées – elles bénéficient par ailleurs d’un financement européen sécurisé pour sept ans à hauteur de 588 millions d’euros –, les montants des subventions aux associations et les épiceries sociales, qui sont désormais financées de façon spécifique.

En réponse aux questions posées par MM. Savary et Labazée sur le RSA, je tiens à vous confirmer la volonté du Gouvernement de fusionner le RSA et la prime pour l’emploi, la PPE.

Le Premier ministre a annoncé les grandes lignes du dispositif qui résultera de cette fusion : une aide pour les actifs aux revenus modestes et moyens, dont la rémunération est proche du SMIC, qui comportera une part individuelle pour encourager l’activité et une part « familialisée » pour tenir compte des charges du ménage. Cette aide sera ouverte aux jeunes dès l’âge de dix-huit ans.

Nous travaillons particulièrement à la simplification du dispositif issu de cette fusion : la base ressource, sur laquelle les droits seront calculés, devra être la plus simple possible et une logique de droits figés s’appliquera – la prestation sera acquise pour trois mois et les bénéficiaires seront donc soulagés des démarches déclaratives pendant cette période, même si leur situation s’améliore.

Pour ce qui est du calendrier, le dispositif fera l’objet d’une annonce à la fin du premier trimestre de 2015, à l’occasion des deux ans du plan de lutte pauvreté ; il entrera en vigueur le 1er janvier 2016 au plus tard.

Les crédits du programme 157 sont destinés, aux trois quarts, au financement des minima sociaux destinés spécifiquement aux personnes porteuses de handicaps : l’allocation aux adultes handicapés et l’allocation supplémentaire d’invalidité. Cette dépense restera dynamique dans les années à venir – nous parlerons là de « dépenses de guichet ». Les prestations seront donc versées aux personnes qui en ont le droit et, si nos lignes budgétaires se révèlent insuffisantes, nous les abonderons en ouvrant des crédits supplémentaires, comme nous avons déjà été amenés à le faire.

Nous n’avons pas prévu de créations de places dans les établissements et services d’aide par le travail, les ESAT. Je voudrais indiquer, tout d’abord, que nous faisons des efforts budgétaires pour les ESAT, en revalorisant notamment le tarif plafond, qui était stable depuis plusieurs années. Cela dit, nous privilégions actuellement des projets de modernisation de l’outil productif à même de positionner les ESAT sur des marchés porteurs.

C’est dans cette perspective que nous avons ouvert un atelier sur l’emploi et la formation professionnelle des personnes en situation de handicap dans le cadre de la conférence nationale du handicap. Un rapport a par ailleurs été confié par le Premier ministre à Mme Le Houérou sur l’accompagnement des personnes handicapées et il a été remis à Mme Ségolène Neuville, secrétaire État chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion.

À la suite de ce rapport, une conférence nationale du handicap est en cours, regroupant les principaux acteurs du handicap. Quatre forums sont animés par Mmes Ségolène Neuville, Axelle Lemaire, Marisol Touraine et Najat Vallaud-Belkacem, recouvrent les domaines de l’accessibilité et de l’accessibilité numérique, de l’accompagnement, de l’accès aux soins et de l’éducation. François Rebsamen, pour sa part, interviendra sur les questions liées à l’emploi. À l’issue de cette conférence nationale et de ces forums, le Président de la République effectuera des annonces à la mi-décembre.

Avec le programme 137, le Gouvernement s’attelle à une tâche essentielle : faire progresser l’égalité entre les femmes et les hommes dans la vie professionnelle, économique, politique et sociale, mais également promouvoir les droits des femmes et lutter contre les violences sexistes et contre la prostitution. Depuis 2012, les crédits consacrés à ces sujets ont augmenté de 25 %, afin de financer les mesures du quatrième plan triennal de prévention et de lutte contre les violences faites aux femmes.

Parmi ces mesures figurent les accueils de jour pour les femmes victimes de violences, permettant aux femmes d’être écoutées et accompagnées dans un processus de séparation, ou encore le numéro d’accueil téléphonique et d’orientation des femmes victimes de toute forme de violences, qui prend appui sur la permanence du 3919 et sur la mise en réseau des autres numéros existants. Depuis le 1er janvier 2014, ce service est gratuit depuis un poste fixe ou mobile, accessible sept jours sur sept. Le nombre d’appels traitables est passé de 4 000 par mois en 2013 à 7 000 en 2014, avec un taux de réponse de 80 %.

Le programme 137 consacre 10 % de ses crédits à la lutte contre les traites humaines. Il serait irréaliste que ce seul programme finance les dispositifs mis en place pour lutter contre les réseaux de traite et accompagner les victimes. Plusieurs ministères sont sollicités, et je puis vous assurer de ma détermination à trouver les moyens complémentaires pour mettre en place une politique efficace de lutte contre les traites humaines et pour permettre aux associations d’être aux côtés des victimes.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », figurant à l’état B.

en euros

Mission

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Solidarité, insertion et égalité des chances

Inclusion sociale, protection des personnes et économie sociale et solidaire

Handicap et dépendance

Égalité entre les femmes et les hommes

Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative

Dont titre 2

727 381 038

727 381 038

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe UMP.

Je rappelle que l’avis de la commission des finances est défavorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

Il est procédé au dépouillement du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Voici le résultat du scrutin n° 50 :

Le Sénat n’a pas adopté.

J’appelle en discussion l’article 60, rattaché pour son examen aux crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ».

Solidarité, insertion et égalité des chances

Pour l’année 2015, par exception au I de l’article L. 262-24 du code de l’action sociale et des familles, le Fonds national des solidarités actives mentionné au II du même article finance la totalité des sommes payées au titre de l’allocation de revenu de solidarité active versée aux personnes mentionnées à l’article L. 262-7-1 du même code.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

Je souhaite en quelque sorte nous préparer à la discussion du projet de loi relatif à l’organisation territoriale de la République, dit « NOTRe », sous l’angle spécifique du RSA. J’y ajouterai quelques remarques concernant le handicap, car il y a tout de même bien un rapport avec cette mission.

Vous avez raison, madame la secrétaire d’État, il faut trouver une solution. Ni le RSA activité ni même le RSA socle n’ont atteint leurs objectifs initiaux - lutter contre la pauvreté et inciter à reprendre le travail –, mais, de surcroît, le taux de non-recours constaté est de 68 %.

Pour avoir participé, au titre de l’Assemblée des départements de France, à l’analyse avec le comité d’évaluation, je pense que, si autant de personnes renoncent à bénéficier du RSA activité, c’est notamment parce que le montant perçu est relativement faible et qu’il nécessite des démarches lourdes.

Gardons-nous cependant de la tentation du saupoudrage, qui serait coûteuse en moyens sans garantie de résultats.

Je veux surtout vous alerter sur le RSA socle. Profitons de la future loi NOTRe pour essayer de clarifier les choses, car nous ne pourrons pas tenir de cette façon ! Si nos concitoyens sont désemparés devant le millefeuille administratif et s’ils ne comprennent pas la structuration de notre organisation territoriale, c’est précisément parce qu’il n’y a pas assez de lisibilité et de transparence. Personne ne sait plus qui fait quoi ! Il faut saisir l’occasion du projet de loi NOTRe pour remédier à cette confusion.

Une allocation individuelle de solidarité telle que le RSA relève d’une politique nationale et doit donc être financée par l’État. Le décideur est le payeur. Pour être compris de la population, il faut revenir à des principes de base simples.

En revanche, la mission d’insertion a véritablement été acquise au fil des années par les départements. C’est une belle spécialité que l’insertion ! Alors, l’insertion, notamment sociale, ne doit pas être centralisée. Au contraire, il faut l’attribuer à un échelon de collectivités qui restera à définir par la loi à venir.

La rémunération des bénéficiaires du RSA relève de l’État, lequel doit la reprendre à sa charge, trouver les moyens de financement et faire en sorte de restituer aux collectivités – notamment les départements – les marges de manœuvre nécessaires pour qu’ils puissent accomplir leur mission.

La future loi NOTRe nous donne l’occasion de le faire. Nous devons dépasser la simple répartition des compétences relatives aux routes ou aux collèges entre les uns et les autres ! Si l’on ne veut pas reconstituer des départements à l’image de ce qu’ils étaient avec les conseils généraux, il faut infléchir cette politique sociale et lui faire suivre des évolutions pour le bien-être de nos concitoyens, mais aussi pour une plus grande lisibilité de l’action administrative.

J’en viens à l’aide personnalisée pour le retour à l’emploi, l’APRE. Quel dommage de l’avoir réservée à Pôle Emploi ! Elle pouvait être également du ressort des conseils généraux qui, dans le cadre de leur mission d’insertion sociale, savent s’en servir pour aider les bénéficiaires du RSA à retrouver un l’emploi. Sur ce sujet, je suis sûr que des solutions seront trouvées.

Je voudrais également attirer votre attention sur les MDPH. Laissons aux départements qui le souhaitent la possibilité d’intégrer les MDPH au sein des services qu’ils ont créés, ne serait-ce que pour partager les fonctions support. Il faut toutefois maintenir les MDA, les maisons départementales de l’autonomie, structures désormais incontournables dans lesquelles tout le monde se retrouve, notamment le milieu associatif, et qui doivent être pérennisées.

J’en viens à un autre sujet qui méritera d’évoluer à l’occasion de la discussion du projet de loi NOTRe et des amendements relatifs à la répartition des compétences. Si la recherche de solutions pour les mineurs étrangers isolés dépasse notre débat de ce jour, la politique en faveur des handicapés concerne directement notre mission.

Je voudrais que le mode de versement de la PCH, la prestation de compensation du handicap, soit différent selon que le handicap résulte ou non d’un accident. Quand la perte d’autonomie est consécutive à un accident mettant en jeu une garantie couverte par une assurance, c’est à l’assurance et non pas aux départements de payer. Je suggère au Gouvernement de prendre en compte ma proposition. Mon approche est logique, il s’agit de soulager la solidarité nationale de prestations qui pourraient être transférées au système assurantiel.

Je souhaitais vous livrer ces messages pour faire avancer la réflexion, dans un esprit constructif. Il faut profiter de la future loi NOTRe pour véritablement clarifier un certain nombre de dispositions qui ne sont plus guère d’actualité et qui méritent d’être revisitées.

L'article 60 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ».

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite » (et article 65), ainsi que du compte d’affectation spéciale : « Pensions ».

La parole est à M. le rapporteur spécial.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Boulard

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, madame la présidente de la commission, mes chers collègues, la mission « Régimes spéciaux et de retraite » recouvre deux sujets : les régimes spéciaux, d’un côté, le régime général des pensions civiles et militaires, de l’autre.

Je commencerai par les régimes spéciaux, ce qui me donne l’occasion de faire une brève incursion dans le monde du corporatisme, doté d’une si longue histoire. En effet, les Invalides de la marine ont été instaurés par Colbert, dont je salue la statue.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Boulard

Vous connaissez le principe : ces régimes sont nés dans un cadre économique et technique qui justifiait leur spécificité, ce monde de la vapeur et de la voile aujourd’hui disparu. Mais, bien que les conditions aient changé, le régime, lui, est longtemps resté inchangé, au nom des droits acquis. Les gouvernements qui ont essayé de modifier ces régimes ont rencontré de très grandes difficultés.

Trois constats se dégagent de cette observation.

D’abord, après avoir connu une croissance très forte, le besoin de financement se stabilise autour de 6, 4 milliards d'euros et connaît même une légère baisse entre 2014 et 2015, de 1, 5 %. Les raisons de cette stabilisation, ce sont la désindexation, l’augmentation des cotisations et l’aménagement des délais de cotisation.

Ensuite, le déficit de ces régimes a toujours deux sources : la première, c’est la démographie, donnée évidente pour l’Établissement national des invalides de la marine ; la seconde, ce sont les données spécifiques de ces régimes, notamment les âges de retraite.

Enfin, troisième constat, important, les perspectives révèlent plutôt une stabilisation des besoins de financement de ces régimes spéciaux.

J’en arrive aux pensions civiles et militaires, dotées de 56, 8 milliards d'euros. Je formulerai trois constats et une observation.

Premier constat, ces crédits ont connu une progression extrêmement forte entre 1990 et aujourd'hui, passant de 18 milliards d'euros à 56 milliards d'euros.

Deuxième constat, les besoins de financement se stabilisent, là aussi. La progression des crédits entre 2014 et 2015 n’est que de 0, 6 %, cette stabilisation étant due à la fois aux réformes entreprises sur les durées de cotisations, à la large désindexation et à l’augmentation des cotisations.

Troisième constat, des perspectives s’ouvrent de stabilisation des besoins de financement et même, à partir de 2040, d’excédent de ce régime général.

Enfin, une observation mérite peut-être l’attention du Gouvernement : ces crédits comportent un fonds de roulement qui, constitué, en 2006, à hauteur de 1 milliard d'euros pour ce qui est du compte d’affectation spéciale, atteint aujourd'hui de 2, 2 milliards d'euros.

Il est admis que ce fonds de roulement, cette épargne accumulée au fil des années est très largement excédentaire et supérieure aux besoins de traiter des aléas qui pourraient survenir au cours de l’année 2015 en matière de pensions. Peut-être y a-t-il là un élément d’excédent éventuellement exploitable par l’État, qui pourrait l’affecter à d’autres budgets.

Mes chers collègues, la sincérité des écritures, leur stabilité expliquent probablement que la commission des finances a émis un vote unanimement favorable sur les crédits de cette mission.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Agnès Canayer

Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, la mission « Régimes sociaux et de retraite » regroupe les subventions d’équilibre que l’État verse, au nom de la solidarité nationale, à onze régimes spéciaux de retraite, pour la plupart anciens et antérieurs à la création de la sécurité sociale, et qui se caractérisent par un fort déséquilibre entre le nombre de cotisants et le nombre de pensionnés.

Alors que les crédits de la mission n’avaient cessé d’augmenter depuis le début des années deux mille, ils ont légèrement diminué depuis deux ans, notamment en raison du ralentissement de l’inflation et du décalage de six mois de la date de revalorisation des pensions, pour atteindre aujourd'hui la somme de 6, 4 milliards d’euros.

Le contexte de la mission « Régimes sociaux et de retraite » posé, j’en viens à présent à l’analyse des principaux régimes qui bénéficient des crédits de la mission, ceux de la SNCF, de la RATP, de l’ENIM et des Mines.

La Caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SNCF recevra cette année une subvention de 3, 2 milliards d’euros, qui couvre 60 % du montant des prestations versées par le régime et représente la moitié des crédits de la mission. La subvention que recevra le régime de la RATP, dont le ratio démographique est nettement moins défavorable que celui de la SNCF, sera, pour sa part, de 643 millions d’euros. Elle couvre 58 % des prestations versées par ce régime.

Comme vous le savez, mes chers collègues, les régimes de retraite de la SNCF et de la RATP sont avantageux par rapport au droit commun de la fonction publique. L’âge moyen de départ à la retraite des nouveaux pensionnés de la SNCF était ainsi de cinquante-six ans et un mois en 2013 ; celui des agents de la RATP était de cinquante-cinq ans et trois mois. Ces âges de départ effectif à la retraite s’élèvent progressivement d’année en année, mais restent très inférieurs à ceux qui sont constatés en moyenne pour le reste de la population.

Certes, la réforme des régimes spéciaux entrée en vigueur au 1er juillet 2008 aligne progressivement la durée d’assurance requise pour le bénéfice d’une pension à taux plein sur celle qui est en vigueur pour les fonctionnaires de l’État.

La réforme des retraites de 2010 a relevé de deux ans l’âge d’ouverture du droit à une pension de retraite et la durée de service requise pour l’obtention d’une pension. Toutefois, la montée en charge de ces réformes est très progressive et, surtout, le relèvement des bornes d’âge ne débutera qu’à compter du 1er janvier 2017.

Dès lors, solliciter tous les ans la solidarité nationale pour financer près de 60 % des prestations versées par ces régimes de retraite n’est pas sans poser quelques problèmes d’équité. Une accélération du relèvement des bornes d’âge pour les agents de la SNCF et de la RATP me paraît de nature à rendre plus légitime la subvention que verse l’État chaque année à ces régimes de retraite.

Les situations respectives des régimes de l’ENIM et des mines appellent moins de commentaires de ma part.

La subvention d’équilibre que versera l’État à l’ENIM en 2015 s’élèvera à 853 millions d’euros. Elle couvre 78 % des prestations versées par le régime.

Eu égard aux difficultés du métier de marin, en particulier la pénibilité et la dangerosité, le régime de retraite géré par l’ENIM prévoit que l’âge normal d’ouverture des droits est de cinquante-cinq ans lorsque la carrière maritime accomplie représente au moins quinze ans de service.

Enfin, le régime des mines, en extinction, verra l’État lui verser en 2015 1, 36 milliard d’euros, une somme qui couvre 99 % des prestations versées par le régime.

En raison du caractère très pénible du métier de mineur, l’âge légal d’ouverture du droit à la retraite dans ce régime est fixé à cinquante-cinq ans.

Au total, les difficultés financières de ces deux régimes apparaissent entièrement imputables à leurs ratios démographiques très dégradés et non à des règles trop favorables.

Mes chers collègues, les crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite » étant indispensables au financement des régimes de retraite concernés, la commission des affaires sociales a décidé de donner un avis favorable à leur adoption pour 2015, assorti d’une réserve concernant les règles de départ à la retraite des régimes de la SNCF et de la RATP, encore trop éloignées du droit commun de la fonction publique. (

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

J’indique au Sénat que la conférence des présidents a fixé pour cette discussion à cinq minutes le temps de parole dont chaque groupe dispose et à trois minutes celui dont dispose la réunion des sénateurs n’appartenant à aucun groupe.

Je vous rappelle également que l’intervention générale vaut explication de vote pour ces missions.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de dix minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Laurence Cohen.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, tout d’abord, je souhaiterais rappeler que la mission « Régimes sociaux et de retraite » recouvre des régimes en déséquilibre démographique, du fait de l’écart entre le nombre de cotisants et de pensionnés. À ce titre, l’État est sollicité non pas pour « subventionner » les régimes, mais pour « contribuer » à l’équilibre des régimes sociaux et de retraite des transports terrestres, des marins, des mines et de la SEITA notamment.

Ces régimes subissent dans leur ensemble une diminution de 1, 5 % des crédits par rapport à 2014. La réduction du nombre de bénéficiaires des régimes fermés, comme les retraités de la SEITA ou de l’ORTF, est utilisée par le Gouvernement pour réduire le montant de la subvention de l’État dans le financement des régimes spéciaux.

Depuis 2012, la part de la subvention de l’État dans le total des produits des caisses de retraite de la SNCF et de la RATP tend, par exemple, à se stabiliser, mais les régimes connaissant un déséquilibre démographique important nécessitent l’intervention de l’État.

La fixation d’un plafond d’ici à 2017 pour le niveau de l’intervention étatique revient, de notre point de vue, à se lier les mains sans pouvoir se libérer en cas de nécessité de rééquilibrage financier.

Aussi, je voudrais insister durant mon intervention sur la situation du régime des mines, qui illustre parfaitement ce que je vais dire.

Le régime minier, mon collègue Dominique Watrin l’a souvent souligné dans cet hémicycle, est un régime spécial de sécurité sociale créé en 1946 pour remplir deux missions principales : gérer l’assurance maladie et la retraite des mineurs, assurer une prise en charge globale des prestations de santé accessible à tous.

L’arrêt de l’exploitation des mines dans les années quatre-vingt-dix a conduit inexorablement à une réduction du nombre de cotisants et à un déséquilibre financier.

Le déséquilibre démographique du régime minier, régime social dit « fermé », est maximal. Ainsi actuellement, seulement 6 222 mineurs en activité cotisent pour 330 000 mineurs retraités.

Il est bien évidemment hors de question de supprimer le bénéfice de la retraite à ces travailleurs, mais il apparaît essentiel de rappeler la responsabilité de l’État dans ces évolutions, d’autant que le régime minier a fait l’objet d’une importante réforme en 2011, justifiée, à l’époque, par la volonté des pouvoirs publics de prévenir le déséquilibre futur de ce régime spécifique.

Aussi, lorsque je lis que le montant de la compensation généralisée perçue par le régime des mines en 2015 sera en diminution de 2, 02 %, je suis profondément inquiète.

Depuis la loi du 24 décembre 1974 relative à la protection sociale commune à tous les Français et instituant une compensation entre régimes de base de sécurité sociale obligatoire, la compensation démographique généralisée entre tous les régimes de retraite entraîne normalement la contribution des régimes aux comptes financiers excédentaires ou en équilibre à ceux dont les comptes sont « dans le rouge ».

La baisse tendancielle du nombre de pensionnés devrait permettre non pas de réaliser des économies sur le dos des miniers, mais de rétablir une certaine justice sociale en revalorisant le montant des retraites, surtout lorsque l’on tient compte de deux aspects : tout d’abord, la rupture d’égalité, pouvant atteindre 20 %, dans le montant des pensions, suivant la date de départ à la retraite ; ensuite – nous en avons déjà parlé ici –, les besoins de financement des centres de santé ouverts aujourd’hui à toute la population.

Cette analyse, je la porte également sur le compte d’affectation spéciale des pensions.

Alors que les pensions civiles et militaires ainsi que les allocations temporaires d’activité bénéficient à moins de pensionnés, que les ouvriers des établissements industriels de l’État disparaissent, que les bénéficiaires de pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre sont de moins en moins nombreux, cette réduction du nombre total de bénéficiaires pourrait être perçue non comme un potentiel d’économies, mais comme une possibilité de réduction des inégalités sociales des retraités.

Pour l’ensemble de ces raisons, brossées très – peut-être trop – rapidement, et devant la baisse des crédits affectés à la mission « Régimes sociaux et de retraite », le groupe CRC votera contre ce budget.

Debut de section - Permalien
Pascale Boistard

Monsieur le président, monsieur le rapporteur spécial, madame la rapporteur pour avis, mesdames, messieurs les sénateurs, le compte d’affectation spéciale relatif aux pensions des agents de l’État porte sur près de 57 milliards d’euros de crédits. Il retrace les opérations relatives aux pensions des personnels civils et militaires de l’État.

Les dépenses des derniers exercices et les prévisions pour 2015 sont affectées à plusieurs phénomènes.

Sur la période récente, les départs en retraite ont été moins nombreux que prévu : 50 000 seulement en 2014 et 2015.

L’âge moyen de départ des agents continue, quant à lui, de s’élever, et atteindra ainsi soixante et un ans en 2015 pour les personnels civils. Cette progression s’observe en dépit des dispositions prises en 2012 pour permettre un départ anticipé au titre des carrières longues, qui bénéficient à environ 1 500 fonctionnaires en 2014.

Il convient de rappeler que la réforme des retraites de 2014 s’applique aux agents fonctionnaires comme à l’ensemble des salariés : le décalage de la revalorisation des pensions en octobre et la poursuite de l’augmentation de la durée d’assurance, mais aussi la hausse des cotisations salariales, qui représente 0, 3 point de cotisations sur quatre ans et permettra un gain de 145 millions d’euros en 2017. Cette hausse s’ajoute à celle liée au financement des départs en retraite pour carrières longues et à celle des cotisations réalisée à la suite de la réforme des retraites de 2010.

La contribution de l’État au financement des pensions restera, quant à elle, stable en 2015, et le niveau de fonds de roulement du compte sera supérieur à 1 milliard d’euros, c’est-à-dire un niveau proche de sa moyenne depuis 2006 et conforme aux recommandations de la Cour des comptes et du Parlement.

L’optimisation des coûts de gestion des pensions fait l’objet de mesures au sein des services de la Direction générale des finances publiques, la DGFIP, tout comme des ministères employeurs. Les objectifs de coûts de gestion ont été fixés récemment et sont désormais retracés dans les documents budgétaires. En 2014, le coût de gestion est maîtrisé à 14, 7 euros par agent, un niveau inférieur à celui qui était prévu en loi de finances initiale. Un objectif de coût de gestion global est fixé pour la première fois pour 2015.

S’agissant, par ailleurs, de la mission « Régimes sociaux et de retraite », il est utile de rappeler qu’elle comprend des versements liés par l’État au bénéfice de onze régimes de retraite. Il s’agit de régimes faisant appel pour leur financement à la solidarité nationale, car ils se caractérisent notamment par un fort déséquilibre entre cotisants et pensionnés, lié à leur évolution démographique.

En raison de l’arrivée à la retraite de générations nombreuses, les crédits de la mission n’avaient cessé d’augmenter ces dernières années. La croissance avait été de 46 % entre 2006 et 2013. Ils ont légèrement diminué depuis deux ans, et une baisse de 1, 5 % est de nouveau prévue en 2015 : le montant des crédits atteindra donc la somme de 6, 4 milliards d’euros.

La gestion des régimes est confiée à des opérateurs qui sont des organismes de sécurité sociale et, pour le régime des marins, à l’Établissement national des invalides de la marine, l’ENIM. S’agissant de ce dernier, l’année 2015, qui sera la dernière de sa convention d’objectifs et de gestion triennale, marquera une étape importante dans la réalisation de réels efforts de gestion, qui concernent ces organismes comme l’ensemble de la sphère de la gestion publique.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite », figurant à l’état B.

en euros

Mission

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Régimes sociaux et de retraite

Régimes sociaux et de retraite des transports terrestres

Régimes de retraite et de sécurité sociale des marins

Régimes de retraite des mines, de la SEITA et divers

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits.

Ces crédits sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Nous allons procéder au vote des crédits du compte d’affectation spéciale « Pensions », figurant à l’état D.

en euros

Mission

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Pensions

Pensions civiles et militaires de retraite et allocations temporaires d’invalidité

Dont titre 2

52 788 900 000

52 788 900 000

Ouvriers des établissements industriels de l’État

Dont titre 2

1 916 210 000

1 916 210 000

Pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre et autres pensions

Dont titre 2

16 000 000

16 000 000

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix les crédits du compte d’affectation spéciale « Pensions ».

Ces crédits sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

J’appelle en discussion l’article 65, qui est rattaché pour son examen aux crédits du compte d’affectation spéciale « Pensions ».

Pensions

I. – L’article 30 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l’organisation du service public de la poste et des télécommunications est ainsi modifié :

1° À la fin de la seconde phrase du quatrième alinéa, les mots : « Trésor public s’agissant de France Télécom et à l’établissement public national de financement des retraites de La Poste s’agissant de La Poste » sont remplacés par les mots : « compte d’affectation spéciale “Pensions” prévu à l’article 51 de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006 pour les pensions des fonctionnaires de l’État » ;

2° À la dernière phrase du 1° du b, les mots : « établissement public national de financement des retraites de La Poste » sont remplacés par le mot : « État ».

II. – L’article 150 de la loi n° 2006-1771 du 30 décembre 2006 de finances rectificative pour 2006 est abrogé. –

Adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite » et du compte d’affectation spéciale « Pensions ».

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Santé » (et article 59 sexies).

La parole est à M. le rapporteur spécial.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la mission « Santé » du budget de l’État est relativement modeste, puisqu’elle représente 1, 2 milliard d’euros pour l’année 2015, l’essentiel des dépenses de santé figurant dans le budget de la sécurité sociale.

Or 1, 2 milliard d’euros, rapporté aux 200 milliards d’euros de l’assurance maladie, cela donne une idée de la différence d’ordre de grandeur !

Cette mission comprend deux volets : tout d’abord, les agences sanitaires et la politique de prévention des agences régionales de santé, au travers du programme 204 « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins », ensuite, l’aide médicale d’État, l’AME, et l’indemnisation des victimes de l’amiante, pour une somme assez modeste, de l’ordre de 10 millions d’euros.

Si l’on neutralise les mesures affectant le périmètre de la mission en 2015, notamment les transferts vers l’assurance maladie, les crédits augmentent d’environ 3 % par rapport à 2014. En outre, le projet de loi de programmation des finances publiques prévoit une augmentation d’environ 2 % des crédits de la mission sur la période 2015-2017, alors même que l’État s’impose une évolution « zéro valeur ».

Cette progression globale masque une évolution très contrastée des deux programmes de la mission : le projet de loi de finances pour 2015 prévoit une baisse de 4, 4 % des subventions pour charges de service public versées aux opérateurs sanitaires, tandis que les crédits destinés à l’AME augmentent de 12 % par rapport à 2014.

Avec 678 millions d’euros de crédits ouverts pour l’année 2015, l’AME constitue la principale dépense de la mission. C’est l’assurance maladie qui gère ces sommes pour le compte de l’État.

Cette dépense ne cesse d’augmenter, en particulier pour l’AME dite de « droit commun », qui constitue le dispositif central financé par l’État pour soigner les étrangers en situation irrégulière présents sur notre territoire.

Les dépenses d’AME de droit commun ont augmenté de 90 % depuis 2002, et de 50 % depuis 2008, se rapprochant ainsi chaque année du milliard d’euros, en sus des dépenses qu’assure directement l’assurance maladie au titre des soins urgents.

Les surexécutions massives deviennent récurrentes : l’autorisation votée en 2013 a été dépassée de 26 % et le projet de loi de finances rectificative pour 2014 prévoit l’ouverture de 155 millions d’euros supplémentaires, ce qui portera le montant des crédits alloués à l’AME à environ 760 millions d’euros.

Le 28 octobre dernier, j’ai adressé un courrier à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, afin de l’alerter sur la sincérité de la budgétisation et de l’interroger sur les mesures envisagées par le Gouvernement pour contenir la dépense d’AME. Je n’ai reçu à ce jour ni réponse, ni une quelconque indication, ni même le moindre signe...

Exclamations sur certaines travées de l'UMP et de l'UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

La question de l’accès aux soins des étrangers en situation irrégulière est complexe. Elle est aussi la conséquence de notre absence de politique migratoire. Elle mérite certainement qu’un travail approfondi soit conduit afin d’identifier les pistes permettant d’infléchir son coût, tout en garantissant une prise en charge des urgences et des mesures sanitaires collectives éventuelles.

Dans l’immédiat, la commission des finances vous propose d’adopter un amendement visant à réduire les crédits alloués à l’AME de droit commun de 156 millions d’euros, ce qui les ramènerait à leur niveau constaté en 2008, soit environ 475 millions d’euros.

Ce point a beaucoup été débattu, mais il s’agit d’une option préférable au rejet pur et simple des crédits de la mission, qui pourrait être interprété comme un rejet global de l’aide médicale d’État, alors qu’elle est utile et même indispensable en partie. Un accès aux soins urgents doit en effet être maintenu pour les étrangers en grande vulnérabilité qui se trouvent sur le sol français, certes en situation irrégulière, mais qui ont de manière patente un besoin urgent de soins. Il ne saurait cependant être conçu comme un accès normal à un guichet et comme l’exercice d’un droit.

Par cet amendement, la commission des finances du Sénat souhaite affirmer sa volonté d’inciter à la rénovation en profondeur de l’AME afin de ramener cette dépense à un niveau soutenable. Il serait utile, à l’instar des pays européens qui nous entourent, de redéfinir des critères d’accessibilité et d’instaurer des contrôles.

Enfin, l’article 59 sexies introduit par l’Assemblée nationale en première lecture ne pose aucune difficulté, puisqu’il vise à réduire le délai de facturation des séjours hospitaliers des patients bénéficiaires de l’AME en le faisant passer de deux ans à un an. Les délais de demande de paiement seront ainsi alignés sur ceux de droit commun, ce qui constitue une mesure de saine gestion.

Mes chers collègues, vous l’aurez compris, sur les crédits de la mission, la commission des finances vous propose d’adopter un amendement d’appel, un amendement fort, dont l’objet est de nous inciter tous ici à la réflexion sur une redéfinition des critères. L’AME est en effet l’objet de discussions récurrentes chez nos concitoyens, le plus souvent mal informés. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle nous proposerons la mise en place d’un groupe de travail sur cette question en vue du prochain exercice budgétaire. À ce titre, l’aide de Mme la secrétaire d’État serait la bienvenue !

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, autant annoncer la couleur : la commission des affaires sociales a émis un avis défavorable sur les orientations budgétaires définies par le Gouvernement pour la mission « Santé ».

Les contraintes croissantes qui pèsent sur les agences sanitaires à un moment où celles-ci doivent assurer des missions toujours plus denses et la progression non maîtrisée des crédits de l’AME lui paraissent, en effet, appeler une position plus que réservée.

S’agissant du programme 204, les opérateurs sanitaires de l’État sont invités à approfondir les efforts d’efficience et de productivité auxquels ils s’astreignent depuis maintenant plusieurs exercices. Le projet de loi de finances pour 2015 prévoit de diminuer de 4, 4 % le montant total des subventions qui leur sont allouées et de réduire leurs plafonds d’autorisations d’emplois d’environ 2 %.

Il semble tout à fait légitime à la commission des affaires sociales que les agences sanitaires prennent leur part dans les mesures de redressement des finances publiques. La poursuite de la démarche de rationalisation suscite cependant aujourd’hui des inquiétudes d’autant plus fortes qu’elles s’ajoutent à l’attribution de missions nouvelles et aux incertitudes liées au projet de loi relatif à la santé dont nous débattrons prochainement.

Je ne prendrai qu’un seul exemple : l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, l’ANSM. Malgré une subvention en baisse de plus de 3 % et une diminution de vingt équivalents temps plein par rapport à 2014, l’Agence devra non seulement organiser la montée en puissance de son département de pharmaco-épidémiologie, mais également s’assurer de la mise en œuvre du nouveau règlement européen relatif aux essais cliniques de médicaments. Elle devra, en outre, garantir l’application des mesures de la prochaine loi de santé, concernant notamment la sécurisation de la chaîne d’approvisionnement en médicaments ou encore la création d’un accès ouvert aux données de santé.

Toutes les agences du programme 204 ont souligné la nécessité de garder une taille critique suffisante pour maintenir une expertise de qualité. De ce point de vue, notre assemblée devra être attentive à l’article 42 du projet de loi relatif à la santé qui entend habiliter le Gouvernement à agir par ordonnances pour réformer le système d’agences sanitaires. L’étude d’impact reste en effet relativement sibylline sur la façon dont sont envisagés l’articulation des missions des différents opérateurs et les moyens qui leur seront attribués. Pouvez-vous d’ores et déjà, madame la secrétaire d’État, nous donner quelques éclairages à ce sujet ?

En ce qui concerne le programme 183, la commission des affaires sociales relève que les dépenses liées à l’AME se caractérisent par une augmentation très soutenue : leur rythme de croissance - plus de 12 % - est bien supérieur à celui des dépenses d’assurance maladie. Néanmoins, ces dépenses souffrent surtout d’une absence totale de fiabilité des prévisions budgétaires.

Pour 2015, les crédits ouverts au titre de l’AME de droit commun s’élèveraient à 633 millions d’euros, alors que la dépense tendancielle est de 717 millions d’euros. Comme chaque année, le Gouvernement est ainsi conduit à ouvrir des crédits supplémentaires dans le collectif budgétaire de fin d’exercice. Parallèlement, les restes à charge de l’État à l’égard de l’assurance maladie se maintiennent ; la dette s’élevait à 52 millions d’euros à la fin de 2013.

La Cour des comptes a considéré que cette situation faisait peser un risque d’insoutenabilité sur le programme 183. Dans ces conditions, la commission des affaires sociales estime que des mesures complémentaires aux ajustements en cours sont nécessaires.

Elle a adopté, sur ma proposition, un amendement venant compléter celui de la commission des finances et visant à instituer pour les bénéficiaires de l’AME une contribution forfaitaire annuelle comparable à la participation plafonnée de droit commun à laquelle sont soumis les assurés lorsqu’ils recourent à des soins médicaux, soit un forfait de 50 euros.

Tout en envoyant un signal responsable, cette mesure ne remet en cause ni la nécessité de protéger les personnes concernées ni la capacité à éviter que des affections non soignées ne s’étendent. Elle nous permet donc de rester fidèles au double objectif sanitaire du dispositif.

La commission des affaires sociales a donc émis un avis défavorable sur le programme 204, car le Gouvernement prévoit d’agir par ordonnances. Elle est également défavorable au programme 193, en raison de l’insoutenabilité des propositions budgétaires le concernant.

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.

Je vous rappelle également que, en application des décisions de la conférence des présidents, aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de quinze minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Vincent Delahaye.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, madame la présidente de la commission des finances, messieurs les rapporteurs, chers collègues, je ne suis pas un spécialiste des questions de santé. Toutefois, en tant que vice-président de la commission des finances, je peux certifier que la mission « Santé » est devenue un symbole de tous les défauts de notre droit budgétaire contemporain.

Non pas que, s’agissant de la mission « Santé », un recours à des ordonnances m’étonne - il me semblerait plutôt naturel, monsieur le rapporteur pour avis

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Dotée de 1, 2 milliard d’euros de crédits, la mission « Santé » progresse en volume de 3, 3 % cette année. Autant le dire tout de suite, elle ne participe pas du tout à l’effort d’économie affiché par le Gouvernement. Avec 3, 3 % de hausse de crédits, il n’y a pas d’économies « sur la tendance », dont on parle assez souvent, et il y en a encore moins sur le volume. Bref, il n’y a pas d’économies du tout, ce qui visiblement ne pose de problème à personne !

Ce qui est vrai de la dépense budgétaire l’est aussi de la dépense fiscale. Notre excellent rapporteur spécial dénombre dix niches fiscales associées à cette mission. Seules cinq d’entre elles ont été jugées efficaces par l’Inspection générale des finances. Je rappelle que le rapport Guillaume sur les niches fiscales date du mois d’aout 2011. C’était il y a plus de trois ans et, depuis, rien n’a été fait. C’est tout le problème : rien n’est fait et, finalement, personne ne veut vraiment faire grand-chose !

Nous sommes sur un bateau qui avance du fait de sa propre inertie. Il n’y a plus de capitaine à la barre pour rectifier la trajectoire. D’un côté, nous avons le programme 204, dont les crédits diminuent de 5, 8 % par rapport à cette année. Il y a manifestement un effort des opérateurs sanitaires pour améliorer leur gestion, en dépit des difficultés inhérentes à l’administration d’un établissement hospitalier. En revanche, et c’est le principal point d’achoppement de cette mission, les crédits du programme 183, qui financent l’aide médicale d’État, explosent : ils augmentent de 14 % en un an !

Qui plus est, notre rapporteur spécial estime que cette enveloppe est sous-budgétisée et mal documentée ! Là encore, le Parlement fait face aux défauts non corrigés par la loi organique relative aux lois de finances : nous n’avons aucune prise sur les dépenses de guichet et, dès que le guichet est ouvert librement à tous, la dépense explose.

Derrière le problème financier de la sous-budgétisation de l’AME se cache en réalité la question du fonctionnement même de ce dispositif.

Créée en 2000 sous le gouvernement de Lionel Jospin, l’AME permet aux étrangers en situation irrégulière, mais aussi aux personnes placées en rétention administrative ou en garde à vue lorsque leur état de santé le justifie, de bénéficier d’un accès aux soins. Ce droit d’accès est accordé également aux ayants droit de ces personnes.

La France s’honore de sa propre générosité. Malheureusement, pour reprendre cette phrase bien connue de l’ancien Premier ministre Michel Rocard, « La France n’a pas vocation à accueillir toute la misère du monde, mais elle doit savoir en prendre sa juste part ».

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Quelle est cette « juste part » ? L’AME était conditionnée au paiement d’un droit de timbre de 30 euros depuis l’adoption des dispositions proposées par le gouvernement Fillon, en 2011. L’objectif était de freiner la dynamique de la dépense tout en gardant un accès ouvert aux soins.

Ce droit de timbre a été supprimé lors du projet de loi de finances rectificative de l’été 2012 par le gouvernement de Jean-Marc Ayrault.

Quel est le bilan ? Créditée de 233, 5 millions d’euros en 2005, l’AME dépasserait aujourd’hui les 700 millions d’euros, d’après le rapport de Francis Delattre, rapporteur spécial. D’autres, comme moi, estiment que nous serions proches du milliard d’euros…

La suppression du droit de timbre a sans doute trop largement ouvert l’accès à un dispositif accusé de favoriser le tourisme médical et la fraude. Mais un problème d’équité se pose également, car l’AME est plus favorable que la CMU ! Où est l’équité dans l’accès au soin entre les étrangers en situation irrégulière et les personnes en situation régulière ?

Bien évidemment, nous ne pouvons pas nous passer d’un tel dispositif pour des raisons à la fois sanitaires, mais aussi morales. Toutefois, la France tend à prendre à sa charge une part de la misère du monde plus grande que celle qui devrait justement lui revenir.

Il n’y a pas de solution simple au problème de l’AME. Couper dans des crédits sous-budgétisés aurait le mérite d’envoyer un signal, mais ne résoudra pas le problème.

Idem pour le droit de timbre. Faire payer une fois 30 euros ne permettra pas pour autant de financer le dispositif et ne dissuadera pas spécialement d’y avoir recours. Pour autant, cela ne m’a pas empêché de déposer par deux fois un amendement visant à rétablir cette mesure. Au-delà de la question financière, il nous faut lutter contre les filières qui font la promotion du tourisme médical en France en profitant des failles administratives du système de fonctionnement de l’AME.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Pour ma part, je crois que l’instauration d’un ticket modérateur – c'est-à-dire le paiement d’une somme réduite, mais à chaque prestation, pour accéder à un panier de soins défini limitativement – serait une voie intéressante à suivre.

Toutefois, n’étant pas un spécialiste des questions de santé, j’appelle le Sénat à prendre ce sujet à bras-le-corps et à créer une mission d’information ou un groupe de travail afin que nous puissions, au-delà des signaux politiques envoyés au Gouvernement, trouver de véritables solutions. Avec notre rapporteur spécial, Francis Delattre, et de nombreux autres collègues qui partagent cette position nous sommes prêts à aider le Gouvernement à agir. Je peux en témoigner, il y a au moins deux ans – je ne siégeais pas au Sénat auparavant - que nous abordons cette question lors des débats budgétaires. À chaque fois, le Gouvernement s’engage à prendre des dispositions pour limiter la dérive du dispositif, mais nous ne voyons toujours rien venir !

Aussi les sénateurs du groupe UDI-UC ne feront-ils pas obstacle à l’adoption des crédits de cette mission, en dépit de tous les défauts dont elle est accablée, à condition que le Sénat suive les positions de son rapporteur spécial. Il importe en effet, au travers de l’amendement que la commission des finances va nous proposer, d’interpeller le Gouvernement, de l’appeler à mener une action énergique afin de mettre un terme à la dérive des crédits de l’AME, qui, nous le savons, sont aujourd'hui sous-budgétisés. Il faut vraiment prendre le sujet à bras-le-corps et nous espérons que ce sera fait dans les semaines à venir.

Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Daudigny

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, madame la présidente de la commission des finances, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, deux impératifs me semblent devoir guider l’examen de la mission « Santé » de ce projet de loi de finances pour 2015.

En premier lieu, cette mission nécessite, pour être appréhendée dans sa réalité, un effort de recul particulier, puisqu’elle ne constitue qu’une part des financements de notre protection sociale. Cet effort d’appréhension globale est d’autant plus nécessaire que la santé ne doit plus se décliner de manière cloisonnée par secteur, mais doit être analysée de manière transversale autour des trois piliers définis par la stratégie nationale de santé, en matière de prévention, d’organisation des soins et de démocratie sanitaire.

Il nous faut donc tenir compte des mesures de restructuration et de clarification des financements déjà engagées et de celles qui sont à venir, dans le cadre du projet de loi de santé publique.

Ce budget constitue, dans cette perspective, une étape de transition.

Il s’inscrit, en second lieu, dans l’effort collectif de redressement des comptes publics et de maîtrise des dépenses.

Ces deux considérations préalables nous permettent d’apprécier à sa juste valeur le montant global des crédits de la mission, portés à 1, 2 milliard d’euros en 2015, soit, à périmètre constant par rapport aux crédits inscrits en loi de finances initiale pour 2014, une progression de 3 %.

Cependant, les deux programmes concernés par ces crédits recouvrent des réalités différentes. L’un s’inscrit dans le moyen et le long terme ; l’autre répond, pour l’essentiel, à un impératif immédiat de santé publique. Ils ne sont donc absolument pas comparables.

Le programme 204, relatif à la prévention, à la sécurité sanitaire et à l’offre de soins, connaît, pour l’ensemble de ses huit actions, une augmentation de crédits de 0, 87 %, avec, toutefois, une certaine disparité, en raison des modifications de périmètres réalisées ou à venir et l’engagement d’une première étape de rationalisation pour 2015, conformément aux recommandations de la Cour des comptes.

Par exemple, la réunion des centres d’information, de dépistage et de diagnostic des infections sexuellement transmissibles – les CIDDIST – avec les centres de dépistage anonyme et gratuit du virus de l’immunodéficience humaine et des hépatites – CDAG – permet leur intégration dans les structures financées par l’assurance maladie et la création d’un service unique. Cette mesure figurait à l’article 33 du projet de loi de financement de la sécurité sociale et nous l’avons largement approuvée, de même qu’elle a recueilli l’accord des associations.

Le Gouvernement a également entendu marquer prioritairement son soutien à la politique de prévention. Celui-ci se traduit par une dotation aux projets régionaux de santé dans le cadre du Fonds d’intervention régional, le FIR, par une dotation de plus de 130 millions d’euros, auxquels s’ajoutent 247 millions d’euros de l’assurance maladie.

Par ailleurs, la nouvelle convention d’objectifs et de gestion de la Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés, la CNAMTS, assure au fonds de prévention une progression de 7, 3 % de ses crédits entre 2013 et 2017, soit 455, 4 millions d’euros.

Le réseau d’opérateurs sanitaires, en partie financé sur le programme 204, dont la réorganisation est nécessaire, comme le relève à juste titre le rapporteur pour avis de notre commission des affaires sociales, fait l’objet d’une restructuration et participe à la maîtrise des coûts.

L’article 42 du projet de loi de santé, outre des mesures de simplification de certaines procédures, prévoit à cet égard la création d’un nouvel établissement public, l’institut national de prévention de veille et d’intervention publique, qui fusionnera l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé, l’INPES, l’Institut de veille sanitaire, l’INVS et l’établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires, l’EPRUS. La voie de l’ordonnance s’impose-t-elle ? Nous aurons l’occasion d’en débattre.

Globalement, les charges de service public pour les agences se réduisent de plus de 4 % en 2015, notamment grâce à des efforts de gestion, qui ont permis à l’EPRUS des économies sur le programme de renouvellement des produits et le dispositif de stockage, ainsi que sur ses dépenses de fonctionnement.

L’action n° 19, Modernisation de l’offre de soins, connaît également un changement de périmètre. Deux opérateurs de l’État, le Centre national de gestion des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière, le CNG, et l’Agence technique de l’information sur l’hospitalisation, l’ATIH, pour partie financés par l’action n° 19 sur la part de subventions pour charges de service public, seront financés par l’assurance maladie à partir de 2015.

De la même manière, le financement de la formation médicale initiale est transféré de la part des dépenses d’intervention à l’assurance maladie.

Les autres dépenses d’intervention de l’offre de soins restent stables pour les subventions allouées à l’Agence des systèmes d’information partagés de santé, ASIP Santé, et augmentent de près de 2, 5 millions d'euros pour l’agence de santé de Wallis-et-Futuna.

Nous ne pouvons donc nous en tenir à la seule lecture comparée du montant global de subvention par action sans décomposer les crédits et examiner les raisons de certains écarts.

J’en viens au second programme de la mission, dédié à l’accès aux soins des personnes les plus défavorisées.

Est prévue pour 2015 une dotation de 632, 6 millions d’euros pour l’aide médicale d’État dite « de droit commun », de 40 millions d’euros pour l’AME pour soins urgents, de 4, 9 millions d’euros pour l’AME « humanitaire », accordée sur décision individuelle.

Sont également couvertes les évacuations sanitaires vers d’autres hôpitaux de personnes étrangères résidant à Mayotte, ainsi que les frais pharmaceutiques et les soins infirmiers des personnes gardées à vue.

Une ouverture de 155, 1 millions d’euros complémentaires est également prévue en loi de finances rectificative pour 2014, mais la dette de l’État envers l’assurance maladie n’est pas totalement couverte.

Le Gouvernement a par ailleurs rétabli, ce qui est une excellente décision, sa participation au Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante, à hauteur de 10 millions d’euros.

Chers collègues, nous allons, dans quelques instants, sur l’amendement n° II-1 adopté par la nouvelle majorité de la commission des affaires sociales, rouvrir un débat récurrent, et un débat, je me dois de le dire, nécessairement malsain.

En effet, quelle que soit l’intention des signataires de cet amendement, qui a pour objet de restreindre l’accès aux soins pour les personnes les plus défavorisées, quitte à mettre la population en danger et quitte à ce que retards ou renoncements à se soigner coûtent au final bien plus cher à la collectivité, cette proposition ne peut être dissociée de la surenchère médiatique à laquelle se livrent aujourd’hui certains candidats à la candidature, jusqu’à proposer la suppression pure et simple de l’aide médicale d’état.

Je le dis d’une façon solennelle, il est donc des femmes et des hommes politiques qui se disent responsables et qui sont prêts à laisser sans soins les étrangers irréguliers qu’il faudra bien pourtant hospitaliser lorsqu’ils seront au plus mal. C’est une absurdité, et c’est une honte.

Tel était d'ailleurs le système suédois, avant le déplacement en 2006 du rapporteur spécial des Nations unies pour le droit à la santé. Choqué par les méthodes discriminatoires d’un pays se targuant par ailleurs de sa tradition d’accueil, Paul Hunt a, par son rapport, permis, avec l’appui notamment de la Croix-Rouge, de changer la législation.

Vous avez certes simplement souhaité, monsieur le rapporteur pour avis – je vous cite –, « envoyer un signe ». Mais à qui ?

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Daudigny

Aux demandeurs d’asile ou simples clandestins poussés par les guerres, les traitements inhumains, la crise ? Pensez-vous réellement qu’ils percevront ce signe et resteront là où ils sont ? S’il s’agit de filières qui monnayent les passages, croyez-vous que 30, 50 ou même 100 euros les arrêteront ?

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Daudigny

Ce signe auquel vous semblez tant tenir, puisque vous y revenez, est bien reçu, mais par d’autres, ici, pour nourrir des fantasmes et des haines qui risquent de vous dépasser.

Nous reviendrons, sur l’article, aux raisons de fond, c’est-à-dire de santé publique, qui s’opposent absolument à une telle mesure, mais aussi aux coûts qu’elle engendrerait.

Vous vous placez malheureusement de nouveau, avec cet amendement, sur le terrain de l’exclusion, alors que nous aurions pu nous retrouver sur le terrain de la rationalisation, pour améliorer, si besoin et si possible, les nombreuses mesures d’ores et déjà prises.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Aline Archimbaud

Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, madame la présidente de la commission des finances, messieurs les rapporteurs, chers collègues, je ferai deux séries de remarques sur les deux programmes contenus dans cette mission « Santé ».

Concernant le programme 183, « Protection maladie », en hausse de 13, 7 %, madame la secrétaire d'État, tout d’abord, nous saluons la prise en compte de la réalité des besoins concernant l’aide médicale d’État et l’augmentation de ce budget, car il ne sert à rien, mais nous en reparlerons, de fermer les yeux et d’ignorer cette réalité.

Nous nous félicitons également que l’amélioration des délais de traitement des dossiers du Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante, le FIVA, dont la durée était préoccupante, voilà peu encore, ait été prise en compte par une contribution spécifique de 10 millions d’euros de l’État.

Cet effort est à saluer, mais nous restons vigilants, car, à la suite des travaux que j’ai pu mener sur le sujet avec mes collègues du Sénat au sein du comité de suivi sur l’amiante, je crains que nous n’ayons bientôt à prendre en compte une nouvelle génération de victimes de l’amiante, liée, cette fois, aux conditions dans lesquelles s’organisent trop souvent les activités de désamiantage, si des mesures énergiques ne sont pas prises rapidement.

Le budget prévisionnel du programme 183 nous convient donc tout à fait, et nous voterons contre les amendements qui prévoient de limiter l’accès à l’aide médicale d’État tel qu’il est actuellement réglementé. Je rappelle en effet que l’AME est attribuée sous condition de ressources. Les personnes dont les revenus sont inférieurs à 780 euros par mois doivent, par ailleurs, répondre à un certain nombre d’autres conditions et contrôles.

Aux collègues qui comptent soutenir ces amendements, je voudrais rappeler, au nom de notre groupe, ce que plusieurs rapports soulignent.

L’instauration d’un droit de timbre de 30 euros dû par les bénéficiaires de l’AME a certes contribué au ralentissement de l’augmentation de la dépense liée au dispositif en 2011. Mais c’est une économie en trompe-l’œil : les personnes concernées ont en effet reporté leurs soins, et leur état de santé s’est dégradé. In fine, elles ont dû se tourner vers des soins hospitaliers beaucoup plus lourds et donc beaucoup plus coûteux, ce que soulignent d’ailleurs très bien deux rapports rendus à ce sujet par l’Inspection générale des affaires sociales, l’IGAS, et par l’Inspection générale des finances, l’IGF.

Ces amendements renvoient à une conception des économies en santé publique totalement court-termiste et contre-productive. Certaines études récentes, telles que l’étude du secrétariat général pour la modernisation de l’action publique de 2013, montrent, à l’inverse, que l’ouverture de droits et d’accès à la santé pour des populations précaires permet, assez rapidement, de réduire les maladies et donc les dépenses publiques.

Derrière ces amendements s’exprime une position qui ne nous paraît pas responsable pour ce qui est de la sécurité sanitaire. Des épidémies comme la tuberculose, par exemple, épidémie liée à la misère, n’ont malheureusement pas disparu de notre pays.

Sur un plan plus politique, nous décelons également des considérations électorales. Cette volonté de stigmatiser des personnes particulièrement fragiles est une façon de diviser le pays, en faisant croire à certains de nos concitoyens en difficulté que les étrangers sont responsables de tous les maux.

Nous pensons, nous aussi, que ces propositions ne procèdent pas d’une attitude responsable. Attention à ne pas alimenter des fantasmes, des haines qui, là encore, pourraient nous dépasser !

Le second programme de la mission, le programme 204, « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins », accuse une baisse de 25 % de ses crédits, ce qui nous inquiète.

Apparemment, d’autres actions seront menées sur d’autres budgets, mais je n’ai pas bien compris lesquels. La situation me semble particulièrement inquiétante, car les baisses concernent essentiellement des budgets consacrés aux structures et à des actions de prévention.

Il semble que, dans la prochaine loi relative à la santé, il devrait être mis davantage l’accent sur la prévention, ce qui est une bonne chose, et sur le rééquilibrage de la politique de santé entre actions curatives et actions préventives.

Baisser ces budgets nous paraît donc être en contradiction totale avec la nécessité de développer la prévention. Encore une fois, quand on regarde dans le détail, il s’agit d’actions portant sur la santé des populations en difficulté, du programme contraception et des actions de lutte contre les violences faites aux femmes, contre les mutilations sexuelles, contre les risques infectieux – VIH, tuberculose et autres –, contre les maladies chroniques, contre les risques liés à l’environnement, ainsi que du financement du plan national santé environnement, qui vient d’être adopté. Ces arbitrages nous paraissent dommageables.

Nous déterminerons la position de notre groupe après l’examen des amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le budget de la mission « Santé » n’échappe pas, hélas, aux politiques de restriction budgétaire.

En effet, les crédits du programme « Prévention, sécurité sanitaire et offres de soins » diminueront de 25 % en 2015.

Cette réduction des moyens consacrés à la prévention nous paraît extrêmement préjudiciable pour la population, alors même que les associations et les organismes de prévention rencontrent des difficultés pour organiser leurs missions.

Ainsi, en diminuant les crédits consacrés à la prévention des maladies chroniques de 5, 6 %, le risque est grand de voir se développer certaines d’entre elles. Cette baisse est d’autant plus étonnante que ces maladies chroniques représentent les deux tiers des dépenses de l’assurance maladie.

Madame la secrétaire d'État, quand à La Réunion, par exemple, le diabète touche près de 10 % de la population, ne croyez-vous pas que le rôle joué par la prévention est primordial pour mener une politique efficace contre cette maladie ? Quand les crédits consacrés à la prévention des risques liés à l’environnement, au travail et à l’alimentation diminuent de 1, 4 %, ne croyez-vous pas que les travailleurs peuvent légitimement s’inquiéter, alors même que les maladies liées au travail représentent un cinquième des dépenses de santé ? En diminuant les crédits consacrés à l’éducation à la santé de 4, 2 %, ce sont des missions aussi essentielles que les actions de prévention bucco-dentaire en milieu scolaire que l’on fait disparaître, ce qui entraîne un risque sanitaire pour les jeunes.

Cette baisse concerne également les actions menées pour lutter contre les pratiques addictives et à risques. Là aussi, je suis inquiète de la réduction des crédits, alors même que le tabac, l’alcool, les drogues continuent à faire des ravages parmi toutes les catégories de la population. Je ne manquerai pas de développer plus avant mon propos lors de l’examen des crédits dédiés à la mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives, la MILDECA.

On nous renvoie souvent à la future loi relative à la santé, mais, au vu de la baisse des crédits, cela ne suffit pas à apaiser nos fortes inquiétudes quant à l’engagement du Gouvernement dans la prévention des maladies.

Puisqu’une ligne budgétaire est consacrée à la santé mentale, notamment pour soutenir les acteurs associatifs, j’en profite pour dire ici que ce volet est très insuffisamment traité dans le projet de loi relatif à la santé. Vous le savez, madame la secrétaire d'État, certains professionnels demandent d’ailleurs une loi spécifique, avec des moyens à la hauteur des problèmes.

En résumé, nous considérons que les politiques de prévention sont un investissement pour l’avenir, car elles permettent de réduire les risques avant la survenue des maladies. Or, pour être efficaces, les politiques de prévention des maladies et de promotion de la santé doivent être considérées de manière globale, en agissant sur les facteurs de risques sanitaires, sociaux, économiques. Cela est d’autant plus vrai que la pauvreté a encore explosé avec l’approfondissement de la crise.

J’en termine avec ce programme en exprimant toute mon inquiétude au regard des efforts également demandés à l’ANSM, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, qui, en 2015, dans un contexte de rationalisation des effectifs, est « appelée à contribuer aux efforts d’efficience et de productivité demandés aux opérateurs de l’État ». Cette recherche d’efficience se traduit par la perte de vingt emplois équivalents temps plein. Membre du conseil d’administration de cette agence et convaincue de l’importance de son rôle pour éviter de nouveaux scandales sanitaires, je ne peux qu’être perplexe à la lecture de ces lignes.

Venons-en au programme 183.

L’effort de la solidarité nationale en faveur de l’accès aux soins et de l’indemnisation des publics les plus défavorisés complète l’intervention de la sécurité sociale. À ce titre, l’État intervient pour garantir l’accès aux soins pour les étrangers en situation irrégulière et procède à la juste indemnisation des victimes de l’amiante.

Or les crédits affectés au Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante demeurent inchangés par rapport à 2014, alors que le nombre de demandes d’indemnisation a progressé de 18 %. Cet écart entre le nombre de demandeurs et le montant versé par le fonds d’indemnisation doit nous amener à raccourcir les délais de traitement des demandes et à renforcer les moyens des caisses d’assurance retraite et de la santé au travail, les CARSAT, notamment celle de Nord-Picardie, qui connaît des difficultés pour répondre rapidement aux demandeurs.

Enfin, permettez-moi d’aborder le sujet de l’aide médicale d’État, l’AME, dont nous aurons l’occasion de débattre lors de la discussion des amendements déposés par des sénateurs de droite.

En effet, je voudrais rappeler les raisons qui ont poussé l’État à intervenir en complément de l’assurance maladie pour les personnes vivant sur notre territoire. Historiquement, la politique d’accueil et d’asile en France a conduit à la création d’une aide médicale gratuite pour financer les dépenses liées aux soins des personnes non affiliées à l’assurance maladie, sans distinguer si leur situation était régulière ou non.

La droite et son extrême n’ont jamais cessé de s’attaquer à ce dispositif, en stigmatisant les étrangers qui bénéficieraient de prestations indues. Je souhaiterais rappeler certaines vérités au sujet du coût de l’AME et des risques qu’entraînerait la réduction du niveau de couverture des étrangers sans papiers, car en période de crise, la politique du « bouc émissaire » rencontre, hélas, un écho favorable !

Selon le rapport de 2010 de l’Inspection générale des affaires sociales sur l’aide médicale d’État, l’augmentation des dépenses de l’AME ne s’explique pas par une croissance massive du nombre de bénéficiaires, puisque celui-ci n’a pas connu de progression notable. Ainsi, près de 50 % des bénéficiaires de l’AME ne recourent pas aux prestations dont ils pourraient bénéficier. Il n’y a donc pas, contrairement à ce que répète Nicolas Sarkozy, une augmentation du nombre des étrangers qui viennent en France pour profiter de notre générosité.

Par ailleurs, si le coût global de l’AME augmente, il faut rappeler que le bénéficiaire de l’AME consomme en moyenne 1 741 euros de soins, tandis que le bénéficiaire de la CMU-C, la CMU complémentaire, consomme 2 606 euros. Les prestations servies aux bénéficiaires de l’AME sont ainsi inférieures à celles dont bénéficient les assurés au titre de la CMU-C, alors même que ces derniers ont droit au bénéfice d’un panier de soins.

Réduire le périmètre de couverture des étrangers sans papiers est une proposition populiste, dont la mise en œuvre conduirait à des risques sanitaires certains.

Enfin, la proposition tendant à instaurer un droit d’entrée pour l’AME conduirait, selon le rapport de l’IGAS, au retardement de la prise en charge médicale, et donc à un recours tardif à l’hôpital, nettement plus coûteux. Quand on fait une proposition, il faut bien en mesurer le coût !

Le groupe communiste républicain et citoyen votera contre les crédits de l’ensemble de la mission « Santé », qui entérinent malheureusement la diminution des moyens attribués à la santé en termes de prévention et d’éducation à la santé, ne sont pas suffisamment ambitieux et ne répondent pas aux besoins de notre pays.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Laborde

Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, les crédits de la mission « Santé » pour 2015 s’élèvent à près de 1, 2 milliard d’euros et contribuent à l’effort de redressement des comptes publics. Ce budget appelle quelques observations.

La première porte sur le programme « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins », qui financera huit opérateurs de l’État participant à la mise en œuvre des politiques nationales de prévention et de sécurité sanitaire. Comme l’a parfaitement expliqué mon collègue Gilbert Barbier en commission des affaires sociales, « nous assistons à un empilement de structures qui empêche de distinguer exactement qui fait quoi ».

En effet, la multiplicité des agences sanitaires, progressivement mises en place pour répondre à des crises sanitaires spécifiques, a contribué à rendre l’architecture de notre système de sécurité sanitaire complexe. Plusieurs rapports ont dénoncé les chevauchements de compétences, le manque de transparence, de lisibilité et l’absence de coordination entre les agences, qui ont progressivement perdu en crédibilité.

C’est la raison pour laquelle nous sommes favorables à une baisse du budget de fonctionnement de ces agences, qui s’inscrit dans le cadre de la réforme structurelle de notre système d’agences sanitaires ; nous aborderons cette question lors de l’examen du projet de loi relatif à la santé. Vous envisagez notamment de créer un Institut national de prévention, de veille et d’intervention en santé publique, qui reprendra les missions exercées par l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé, l’Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires et l’Institut de veille sanitaire. Vous l’avez rappelé, cette réforme permettra « d’améliorer l’efficacité de la réponse aux risques sanitaires, de créer une agence disposant d’une approche intégrée de la santé publique et de réaliser des économies sur les dotations à ces opérateurs ».

Je note ensuite avec satisfaction que le projet de loi de finances pour 2015 prévoit à nouveau d’abonder le FIVA à hauteur de 10 millions d’euros. Cette mesure emblématique vise à reconnaître la responsabilité de l’État dans l’indemnisation des victimes de l’amiante. C’est une très bonne chose.

J’en viens enfin au dernier point : l’aide médicale d’État. Je suis surprise d’entendre depuis quelque temps une partie de l’opposition réclamer la suppression de ce dispositif. Pourtant, il n’y a pas si longtemps – c’était en mars 2012, pendant la campagne de l’élection présidentielle –, Nicolas Sarkozy refusait que l’on remette en cause « cette générosité française » et y voyait même « notre honneur ». Il promettait alors qu’il n’y toucherait pas. Le discours a bien changé !

J’estime que ce dispositif est indispensable. Il répond à la fois à une nécessité de santé publique et à une exigence morale de respect des valeurs humanistes qui sont au cœur de notre pacte républicain. Les rapporteurs de la commission des finances et de la commission des affaires sociales nous proposeront tout à l’heure d’instaurer à nouveau une franchise, non plus de 30 euros comme avant 2012, mais de 50 euros, et de recentrer l’AME sur les soins urgents et de prévention, ainsi que sur les publics fragiles, décision nécessaire selon eux pour en maîtriser le coût.

Je rappellerai simplement qu’un rapport des inspections générales des affaires sociales et des finances avait jugé la franchise « financièrement inadaptée, administrativement complexe et porteuse de risques sanitaires » ; ce rapport écartait en outre la possibilité de « limiter la prise en charge aux seuls soins urgents ».

De telles mesures risquent en effet de susciter des prises en charge tardives et de favoriser le développement de maladies graves ou contagieuses. Les médecins eux-mêmes estiment qu’il est préférable que les personnes malades puissent accéder aux soins rapidement pour éviter toute propagation des maladies.

Certes, nous savons qu’il y a des abus, des dérives. Le budget consacré à l’AME a explosé en 2013, passant de 588 millions à 744 millions d’euros en l’espace d’un an, et 73 451 bénéficiaires supplémentaires ont été recensés entre 2011 et 2013. Cette hausse s’explique en partie par l’existence de filières permettant à des personnes étrangères de venir se faire soigner dans certains hôpitaux français.

En juin dernier, devant la commission des finances du Sénat, la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes s’est engagée à lutter contre les abus, notamment en renforçant les contrôles dans les différentes caisses primaires d’assurance maladie. Elle a également reconnu la nécessité d’enclencher très rapidement un travail diplomatique de coopération internationale avec les pays d’origine. Je ne peux que souscrire à cette démarche.

En conclusion, le groupe du RDSE, dans sa très grande majorité, votera en faveur de l’adoption des crédits de la mission « Santé ».

Debut de section - Permalien
Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée des droits des femmes

Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, la mission « Santé » du projet de loi de finances pour 2015 s’inscrit dans un contexte d’effort de redressement des comptes publics d’une ampleur inédite. En matière de santé, la majeure partie des économies qui seront réalisées concernent l’assurance maladie, donc le projet de loi de financement de la sécurité sociale, le PLFSS. Marisol Touraine a eu l’occasion de présenter ces économies, que nous allons chercher dans la modernisation de notre système de santé, en améliorant l’efficience de la dépense hospitalière, en agissant sur le prix des médicaments ou encore en engageant le nécessaire virage vers l’ambulatoire. Pour autant, dans ce contexte, nous finançons les priorités essentielles.

Ainsi, l’évolution des crédits du programme 204 traduit le choix de la prévention qui est le nôtre dans le cadre du projet de loi relatif à la santé, présenté en conseil des ministres le 15 octobre dernier. Avec ce projet de loi, nous voulons promouvoir les conditions de vie favorables à la santé, comme le font d’autres pays avec succès.

Dans le projet de loi de finances pour 2015, les crédits en faveur de la prévention, de la sécurité sanitaire et de l’offre de soins sont préservés. Dans un contexte où des efforts de réduction importants sont demandés sur plusieurs programmes, la préservation des crédits de prévention constitue un choix politique fort.

La comparaison entre les crédits du programme 204 du PLF pour 2014 et ceux du PLF pour 2015 ne donne pas une image exacte de l’évolution des moyens affectés à la prévention. En effet, dans le cadre du PLF et du PLFSS pour 2015, nous avons rationalisé les champs d’intervention respectifs de l’État et de la sécurité sociale. Cette démarche se traduit par le transfert à l’assurance maladie d’un certain nombre d’interventions, comme les formations médicales effectuées en ville ou encore le fonctionnement des centres d’information, de dépistage et de diagnostic des infections sexuellement transmissibles, les CIDDIST.

Je le précise d’emblée : il s’agit non pas de débudgétisations comptables, mais de clarifications qui visent à plus d’efficacité. Le transfert du financement des formations médicales en ville peut permettre d’en améliorer et d’en simplifier la gestion. Celui des CIDDIST permet la fusion avec les structures financées par l’assurance maladie et, au-delà, de poser les bases d’un dispositif unique de dépistage, plus performant et plus accessible aux publics qui en ont le plus besoin. Cette réforme du dépistage a été saluée par l’association AIDES comme « une petite révolution […] dans la façon d’appréhender le dépistage des hépatites et du VIH en France ».

Si l’on tient compte de ces transferts et si l’on compare les moyens consacrés au programme 204 en 2014 et en 2015, à périmètre constant, on constate une progression de 0, 87 %, ce qui, je le répète, traduit, dans un contexte de réduction des dépenses de l’État, un choix politique fort.

Le soutien budgétaire de l’État à la politique de prévention passe principalement par la dotation du programme 204 aux projets régionaux de santé, dans le cadre du fonds d’intervention régional, le FIR. Ces crédits resteront, sur toute la durée du budget triennal 2015-2017, au niveau qui était le leur dans la loi de finances initiale pour 2014, soit plus de 130 millions d’euros. Je rappelle que le financement des actions de prévention du FIR bénéficie des ressources de l’assurance maladie, pour un total de 247 millions d’euros en 2014. Par ailleurs, les financements du fonds de prévention de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés, la CNAMTS, auront progressé de 7, 3 % entre 2013 et 2017, dans le cadre de la nouvelle convention d’objectifs et de gestion, puisqu’ils seront passés de 424, 6 millions d’euros à 455, 4 millions d’euros.

Au-delà du financement des actions de prévention, les opérateurs de sécurité sanitaire et de prévention contribuent, sur la durée du budget triennal, aux efforts d’économies. Toutefois, ces dernières reposent non sur des mesures de « rabot », mais sur une réforme structurelle de notre système d’agences sanitaires. En effet, la future loi relative à la santé créera un Institut national de prévention, de veille et d’intervention en santé publique reprenant les missions exercées aujourd’hui par l’Institut national de prévention et d'éducation pour la santé, l’INPES, l’Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires, l’EPRUS, et l’Institut de veille sanitaire, l’InVS. Cette réforme doit permettre d’améliorer l’efficacité de la réponse aux risques sanitaires, de créer une agence disposant d’une approche intégrée de la santé publique et de réaliser des économies sur les dotations allouées à ces opérateurs.

À ce sujet, monsieur Savary, le projet de loi relatif à la santé vise effectivement à permettre la rationalisation de l’organisation des agences sanitaires nationales. Les débats sur ce texte permettront au Gouvernement de détailler ses intentions. Nous avons d'ores et déjà indiqué que nous ambitionnions de créer une grande agence de la veille sanitaire, de la prévention et de la gestion des crises sanitaires, qui regroupera progressivement les compétences des trois organismes que je viens de citer. Nos objectifs de rationalisation sont donc motivés, à titre principal, non pas par la recherche d’économies, mais par le souci de donner plus de force et de cohérence à notre politique de santé.

Contribuer aux efforts d’économies tout en finançant les priorités, c’est également le sens de l’action que nous mènerons au travers du programme 183.

Je souhaite souligner que, dans le cadre du PLF pour 2015, l’État rétablit sa contribution au FIVA, qui avait été réduite à zéro en 2013 et en 2014. Cette contribution sera de 10 millions d’euros. Il y a là non seulement un symbole – la reconnaissance de la responsabilité de l’État dans l’indemnisation des victimes de l’amiante –, mais aussi l’accompagnement de l’action que nous menons pour améliorer l’efficacité du FIVA, en réduisant les délais de présentation et de paiement des offres d’indemnisation.

J’en viens à l’aide médicale d’État. Je souhaiterais, tout d’abord, rappeler la vérité des chiffres : en 2015, nous prévoyons 678 millions d’euros de crédits pour l’AME.

Debut de section - Permalien
Pascale Boistard, secrétaire d'État

Nous sommes donc très loin des chiffres que certains font claquer dans les médias !

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Parce que vos chiffres sont faux ! On rajoute des crédits en fin d’année !

Debut de section - Permalien
Pascale Boistard, secrétaire d'État

Je comprends que les compétitions internes à certains partis politiques conduisent à une surenchère, …

Debut de section - Permalien
Pascale Boistard, secrétaire d'État

… mais il m’a semblé nécessaire, dans ce débat, d’en rester aux faits.

L’aide médicale d’État garantit un accès aux soins aux étrangers en situation irrégulière, c’est-à-dire à des personnes qui ne sont pas des assurés sociaux, parce que cela correspond à nos valeurs, mais aussi parce que c’est dans l’intérêt de la santé publique, dans l’intérêt de toutes et de tous.

Debut de section - Permalien
Pascale Boistard, secrétaire d'État

Cela ne signifie pas que l’AME doive être exemptée de l’effort d’économies. Ainsi, nous devons spécifiquement travailler sur la question des filières organisées facilitant le séjour d’étrangers uniquement motivés par le souhait de bénéficier de la prise en charge des soins, filières dont les agissements ont effectivement pu être détectés dans certaines de nos villes.

C’est une chose de prendre en charge les soins donnés à des personnes déjà présentes sur notre territoire : c’est la reconnaissance d’un état de fait, et c’est du pragmatisme. C’en est une autre de laisser entrer sur le territoire des personnes qui n’ont d’autre but que de bénéficier de la prise en charge des soins. La lutte contre ce phénomène, qui se développe, s’inscrit dans la lutte plus générale contre les réseaux mafieux de l’immigration illégale. Toutefois, elle peut également passer par une action de coopération avec les pays d’origine.

En tout état de cause, je vous rappelle que, dans notre pays, les personnes qui contribuent à financer la sécurité sociale sont, bien évidemment, les Français, les étrangers en situation régulière, …

Debut de section - Permalien
Pascale Boistard, secrétaire d'État

Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État. … mais aussi des étrangers en situation irrégulière, mais employés de façon régulière ! Je tenais à le préciser.

Applaudissementssur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC. –

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Santé », figurant à l’état B.

en euros

Mission

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Santé

Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins

Protection maladie

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° II-161, présenté par MM. Rachline et Ravier, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

en euros

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins

Protection maladie

TOTAL

SOLDE

Cet amendement n'est pas soutenu.

L'amendement n° II-68, présenté par M. Delattre, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

en euros

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins

Protection maladie

TOTAL

SOLDE

La parole est à M. le rapporteur spécial.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Mes chers collègues, cet amendement est très différent du précédent, même si les deux font l’objet d’une discussion commune !

L’amendement n° II-68 vise à ramener les autorisations d’engagement et les crédits de paiement à leur niveau de 2008. Madame la secrétaire d'État, je voudrais bien savoir pourquoi, depuis cette date, ces crédits ont augmenté d’environ 50 % !

Debut de section - Permalien
Pascale Boistard, secrétaire d'État

Je viens de l’expliquer !

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Ne nous dites pas que c’est l’augmentation du nombre de réfugiés qui est en cause.

Debut de section - Permalien
Pascale Boistard, secrétaire d'État

Je n’ai pas dit cela !

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

S’il est vrai que nous vivons des moments historiques particulièrement difficiles, je rappelle que toute personne qui demande l’asile a droit à la CMU dès le dépôt de son dossier. Les demandeurs d’asile ne font donc pas partie des bénéficiaires de l’AME.

J’invite ceux qui estiment que l’aide médicale d’État ne pose pas problème à se rendre à l’accueil des hôpitaux, à la rencontre des personnes qui y travaillent : vous verrez comment les choses se passent. Sur ce dossier, il y a un déni de réalité !

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Je peux vous dire que, dans deux grands hôpitaux de mon département, les abus en matière d’AME orientent le vote de la moitié des personnes travaillant à l’accueil dans le sens que l’on devine… Ce qu’elles voient, ce sont des personnes en situation irrégulière qui arrivent par groupes de sept, huit ou dix et qui exigent ! C’est ainsi que les choses se passent ! Certains ont l’air de l’ignorer.

Nous devons aborder ce dossier collectivement, de façon raisonnable, …

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

… sans nier la réalité.

Il y a aussi, dans ce pays, des personnes qui n’ont plus aucun droit, alors qu’elles ont cotisé pendant vingt ou trente ans. Quand on leur explique que l’étranger en situation irrégulière a droit – sous certaines conditions, certes – à l’aide médicale d’État, cela pose problème. Devant ce type de situations, tous les républicains doivent réfléchir. Dans mon département, dans ma ville, j’affronte régulièrement des candidats du Front national lors des élections, dans le cadre de triangulaires. Leur discours laisse des traces… Je peux vous dire qu’il est temps de réagir ! Si le Gouvernement ne l’entend pas, nous prendrons, nous, les initiatives qui s’imposent.

Nous ne demandons pas la suppression des crédits de l’aide médicale d’État ; par cet amendement d’appel, il s’agit simplement d’attirer votre attention sur la nécessité de travailler sérieusement sur cette question.

Monsieur Daudigny, vous nous avez accusés de prôner l’exclusion, au lieu d’engager un travail collectif. En ma qualité de rapporteur spécial, j’ai écrit au ministre, sans obtenir aucune réaction de sa part. Que faut-il faire, dans ces conditions ? Laisser courir ? Eh bien non, nous réagissons, parce que ce sujet nous semble essentiel !

C’est très bien de se présenter comme le pays le plus généreux de l’Europe, et même du monde. Mais comment finançons-nous cette générosité ? À crédit ! Pensez-vous que l’on puisse continuer éternellement à faire le progrès social à crédit ? Votre attitude me donne presque envie de dire : « Rocard, reviens ! » §Vous savez comme nous que nous n’avons pas les moyens d’accueillir toute la misère du monde.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Daudigny

Si vous citez Rocard, citez-le complètement !

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Je pense qu’il est plus conscient des difficultés que certains d’entre vous. Vous nous accusez de populisme, mais nous sommes devant un vrai problème, qui mérite mieux que les invectives habituelles.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

En tout cas, il mérite mieux que cet amendement !

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Voulez-vous que je vous rappelle quelques données intéressantes du projet de loi de financement de la sécurité sociale ? Pensez-vous que les comptes de l’assurance maladie soient équilibrés ?

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Il y a tout au plus un ralentissement de la progression de la dépense. La dette de la Caisse d’amortissement de la dette sociale, la CADES, s’élève à 160 milliards d’euros !

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Daudigny

Qu’avez-vous fait quand vous étiez au pouvoir ?

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Monsieur Daudigny, ne nous énervons pas ! La responsabilité est sûrement partagée.

L’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, l’ACCOS, qui est la caisse de compensation de tous les régimes, emprunte 34 milliards d’euros pour assurer la trésorerie.

Il est très gratifiant de nous présenter comme les champions du progrès social et les plus généreux du monde, mais la sécurité sociale et l’État sont aujourd'hui au bord de la faillite ! Vous savez très bien que l’on ne s’en sort aujourd'hui que parce que les marchés nous prêtent de l’argent au taux de 1 %. Pensez-vous que l’on puisse continuer à endetter la CADES à ce rythme sans faire, tôt ou tard, imploser le système ?

Nous vous présentons donc un amendement de raison, qui tient compte de l’environnement général, de la sociologie, des réalités du terrain. Le déni de réalité, c’est certes confortable, mais, dans certaines communes, quand on est maire, on ne peut pas se le permettre ! Notre responsabilité est de poser les vrais problèmes en termes corrects et d’essayer de les résoudre.

L’amendement vise à réduire de 156 millions d’euros les crédits, sans toucher à l’AME dite « de droit commun », au traitement des urgences. Le ministre ne daignant pas nous répondre, il s’agit d’appeler à une réflexion collective sur un sujet difficile.

Il faut savoir que, dans le projet de loi de finances rectificative que nous examinerons la semaine prochaine, plus de 150 millions d’euros supplémentaires sont affectés à l’AME. Nous devrions tout de même pouvoir en discuter avec le Gouvernement !

Debut de section - Permalien
Pascale Boistard, secrétaire d'État

Je suis à votre disposition pour le faire !

Debut de section - Permalien
Pascale Boistard, secrétaire d'État

Je voudrais apporter quelques précisions, en réponse à M. le rapporteur spécial.

Tout d’abord, les demandeurs d’asile ne font pas partie des bénéficiaires de l’AME, qui s’adresse aux étrangers en situation irrégulière.

Debut de section - Permalien
Pascale Boistard, secrétaire d'État

Le statut d’un demandeur d’asile n’est pas celui d’un étranger en situation irrégulière.

Debut de section - Permalien
Pascale Boistard, secrétaire d'État

L’AME n’est pas la CMU, monsieur le rapporteur spécial ! Puis-je poursuivre ?

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à Mme la secrétaire d’État et à elle seule, monsieur le rapporteur spécial !

Debut de section - Permalien
Pascale Boistard, secrétaire d'État

Vous donnez des leçons à tout le monde, mais semblez avoir quelques difficultés à écouter les autres, monsieur le rapporteur spécial ! Calmons-nous et tâchons d’être précis, car la confusion ne permet pas d’avoir un débat serein et de trouver des solutions. Au contraire, elle alimente les peurs et empêche de raisonner sur les bons éléments.

Il est en partie vrai que le nombre des bénéficiaires de l’AME a beaucoup augmenté. À force de repousser la réforme du droit d’asile, …

Debut de section - Permalien
Pascale Boistard, secrétaire d'État

… on a laissé, depuis dix ans, de nombreux demandeurs d’asile attendre jusqu’à deux ans une réponse. Dans ce laps de temps, la vie de ces hommes et de ces femmes demandant l’asile est très susceptible d’avoir évolué : peut-être se sont-ils mariés, ont-ils eu des enfants… Dès lors, s’ils reçoivent une réponse négative, ils demeurent sur notre territoire en situation irrégulière et s’inscrivent à l’AME.

Voilà aussi pourquoi nous souhaitons réformer le droit d’asile : par respect pour les demandeurs, qui ont besoin d’être très rapidement fixés sur leur sort, et pour tenir compte du fait que, en cas de réponse négative, il leur est parfois humainement impossible, après deux ans, de repartir, pour diverses raisons.

Tels sont les éléments de réponse que je peux vous apporter. Ils correspondent à des situations constatées quotidiennement par celles et ceux qui s’intéressent un peu sérieusement au sujet.

Par ailleurs, il n’existe pas de « sans-droits » dans notre pays, grâce à la création de la CMU et de la CMU-C par le gouvernement de Lionel Jospin. Ce fut une très grande avancée de la gauche plurielle. Il ne me semble pas que, à l’époque, beaucoup de parlementaires n’appartenant pas à celle-ci avaient voté en faveur de la création de ces dispositifs, aujourd’hui saluée unanimement…

Enfin, pour le dire de façon imagée, les virus ne s’embarrassent ni de frontières ni de papiers ! Les maladies qu’ils véhiculent doivent être traitées dès les premiers stades : au-delà de la question importante des coûts, nous préférons, sur le plan humain, avoir des personnes en bonne santé. §

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à Mme Agnès Canayer, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Agnès Canayer

L’aide médicale d’État est un sujet essentiel. Les crédits consacrés à ce dispositif augmentent de 12 % par rapport à 2014, après avoir progressé de plus de 17 % au cours des trois dernières années. En outre, la somme de 678 millions d’euros allouée pour 2015 est tout à fait sous-évaluée au regard des besoins sur le terrain.

Il s’agit non pas de chercher des boucs émissaires ou de stigmatiser quiconque, mais d’élaborer des réponses à la fois précises et pragmatiques, madame la secrétaire d’État. Notre pays ne peut rester passif, quand ses voisins européens agissent en mettant en place des conditions d’accès plus restrictives. Nous devons nous montrer responsables pour pouvoir continuer à offrir un niveau élevé de protection sociale à tous nos compatriotes.

Je tiens à saluer, au nom du groupe UMP, le travail mené par le rapporteur spécial, Francis Delattre, et par le rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, René-Paul Savary, qui ont cherché des solutions pragmatiques pour contenir cette progression, avec, d’une part, l’instauration d’une participation annuelle de 50 euros – c’est une mesure d’équité à l’égard de nos concitoyens, qui doivent s’acquitter des franchises médicales –, et, d’autre part, le recentrage de l’accès gratuit à tous les soins.

Le groupe UMP votera en faveur de l’adoption du présent amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à M. Vincent Capo-Canellas, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Capo-Canellas

Gardons-nous d’entrer dans un faux débat, limité à des postures, et abordons au fond ce sujet difficile, en regardant un certain nombre de difficultés en face. Selon moi, il nous faut conjuguer le respect des principes et la prise en compte des réalités.

Permettez-moi tout d’abord, madame la secrétaire d’État, d’apporter une précision. Tout à l’heure, Francis Delattre a dit clairement que les ressortissants du droit d’asile bénéficiaient de la CMU. Il n’a pas évoqué l’AME à propos de ce public. Je veux lui en rendre témoignage et contredire sur ce point les propos que vous avez tenus à l’instant.

Il faut concilier les principes et les réalités, ai-je indiqué. J’ai entendu le rapporteur spécial expliquer que l’AME était indispensable et qu’il ne souhaitait pas le rejet des crédits correspondants : la majorité sénatoriale aborde le débat dans cet esprit.

En revanche, le rapporteur spécial a appelé, de manière tout à fait claire, à une redéfinition des critères. Comment peut-on concevoir une AME tout à la fois humaniste et davantage respectueuse d’un certain nombre de critères ?

Enfin, le rapporteur spécial a également parlé d’un « amendement d’appel ». La navette doit permettre une évolution des positions de part et d’autre. On ne peut pas rester dans le déni ! La nouvelle majorité, à son arrivée aux affaires, a commencé par abroger certaines dispositions existantes, pour des raisons de principe.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Capo-Canellas

Malgré tout, les réalités demeurent.

Au-delà de l’amendement de M. Delattre, sans doute faut-il également réaliser un travail d’approfondissement avec les praticiens, refaire une mission… Il y a place pour le débat !

Nous le savons tous, chacun a droit à des soins…

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Capo-Canellas

… et les médecins n’ont pas à prendre en compte les réalités comptables dans le cadre de leur pratique.

Pour autant, nous avons l’obligation de fixer un certain nombre de règles en matière d’offre de soins. C’est tout l’enjeu du débat, qui n’est pas si simple !

Par ailleurs, j’ai entendu certains orateurs affirmer que, quelle que soit l’intention, elle ne peut être dissociée de la surenchère médiatique. Si cela est vrai, on risque de s’interdire d’évoquer de très nombreux sujets ! En définitive, mieux vaudra opter pour la politique de l’autruche, plutôt que d’aborder une question susceptible de prêter à caricature !

Il me semble précisément que le rôle du Sénat, en particulier, consiste à tenter de faire la part des choses entre l’écho médiatique et la recherche d’un consensus pour l’élaboration de dispositions sur des sujets aigus.

Nous sommes nombreux à convenir, me semble-t-il, de la nécessité d’une évolution. Peu d’entre nous considèrent que l’AME se porte parfaitement bien et que rien n’est à changer. Mme la secrétaire d’État elle-même a évoqué la lutte contre les filières, mais pour notre part nous abordons la question de l’AME non sous l’angle de l’immigration, mais sous celui de la santé, dans un souci à la fois d’humanisme et de respect de certaines règles.

Nous ne souhaitons nullement stigmatiser quiconque ! Dans mon département, la Seine-Saint-Denis, la question de la prise en charge des soins se pose de manière aiguë et doit être traitée au fond.

En termes de comparaisons internationales, l’Espagne, nous l’avons vu, a récemment modifié sa position, en révisant drastiquement les conditions d’accès aux soins gratuits en 2012, principalement pour des raisons financières. La France, quant à elle, se distingue par un très large accès aux soins gratuits.

La forte progression des crédits du programme « Protection maladie » découle presque totalement de l’évolution des crédits de l’AME. Comme cela a été rappelé, à l’exception de l’exercice 2012, les crédits consommés ont toujours été supérieurs aux crédits votés. Enfin, le nombre de bénéficiaires a crû d’environ 130 000 depuis 2002.

En conclusion, des ajustements complémentaires nous semblent nécessaires. Ils devront bien sûr préserver le double objectif humanitaire et sanitaire du dispositif, tout en fixant des règles applicables à tous. §

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Ce débat est très médiatique, nous dit-on… Ce n’est pas le seul ! En tout état de cause, les choses doivent être dites.

J’entendais notre collègue Françoise Laborde annoncer une augmentation de 73 000, en un an, du nombre des bénéficiaires de l’AME. Quand on nous assure que seule la charge du dispositif, et non le nombre de bénéficiaires, augmente, c’est donc faux ! Le contingent des bénéficiaires de l’AME s’accroît, et ce pour une raison toute mécanique.

Comme le rapporteur spécial l’a excellemment montré, les personnes qui sont déboutées du droit d’asile et deviennent, de fait, des « sans-papiers » passent de la CMU à l’AME. Or il se trouve que le nombre de demandes d’asile augmente considérablement depuis cinq ans, pour s’élever à l’heure actuelle à environ 70 000. L’Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d’asile ne délivrant que de 12 000 à 13 000 titres de réfugié, ce sont, chaque année, de 50 000 à 55 000 personnes à qui l’on refuse le droit d’asile, dont entre 10 000 et 15 000 seulement seront raccompagnées aux frontières.

Notre système est fou ! Faute de critères suffisants pour l’accès au droit d’asile, nous fabriquons, presque mécaniquement, de futurs titulaires de l’AME.

Je ne dis pas qu’il faille remettre en cause le principe de l’AME ou le serment d’Hippocrate : bien sûr que non ! Mais vous savez bien, madame la secrétaire d’État, que, depuis plusieurs années, les crédits inscrits au budget pour l’AME sont systématiquement complétés en loi de finances rectificative.

Comme je l’ai souligné dans mon rapport sur le droit d’asile et sur l’immigration, il faut raisonner à partir des vrais chiffres ! Rien n’est pire que les faux-semblants ou le mensonge dans le débat public, car ils ouvrent la voie aux extrêmes !

Si l’on exposait clairement les coûts, les critères pouvant être retenus, il serait possible de trouver un accord entre personnes raisonnables. Au lieu de cela, ceux qui veulent revoir l’AME sont taxés de xénophobie, d’inhumanité ! Cela n’a pas de sens ! Cette attitude pousse à une telle cristallisation du débat que le discours des partisans d’une suppression de l’AME finit par gagner du terrain dans l’opinion !

L’amendement de notre excellent collègue Francis Delattre ne remet pas en cause les soins d’urgence ; il vise ce que l’on appelle, avec une élégance rare, le « tourisme médical » et les filières qui l’organisent, un peu partout dans le monde. Il vise à éviter que des personnes ne viennent en France parce que notre système de santé, en particulier hospitalier, est remarquable et gratuit pour eux, grâce à l’AME. Il ne s’agit pas de fermer la porte devant les malheurs du monde, mais notre système hospitalier est sursaturé par les réseaux qui organisent le tourisme médical dans notre pays. Nous disons « oui » à une AME cohérente au regard des besoins en matière de soins d’urgence, « non » aux surcoûts liés aux réseaux !

Naturellement, je voterai l’amendement présenté par Francis Delattre. Je vous le dis sincèrement, madame la secrétaire d’État : en refusant obstinément de débattre du coût financier, des critères et de l’encadrement de l’AME, vous dénaturez totalement le sujet aux yeux de l’opinion publique et donnez des arguments aux extrêmes, alors que nous pouvons parfaitement, entre gens pondérés, trouver une solution.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à Mme Catherine Génisson, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Génisson

Monsieur le rapporteur spécial, vous avez cité Michel Rocard de façon incomplète, comme on le fait trop souvent. S’il a effectivement dit que notre pays ne pouvait pas accueillir toute la misère du monde, il ajoutait qu’il était fondamental, en contrepartie, d’instaurer de véritables politiques de coopération internationale, en particulier Nord-Sud. Il ne faut pas faire référence de façon tronquée à un homme qui a profondément marqué la politique de notre pays !

Nous devons en effet mener un débat de fond sur l’aide médicale d’État. Il s’est d'ailleurs engagé grâce au député UMP Claude Goasguen, qui s’étonnait que les dépenses de l’AME aient augmenté très significativement depuis son instauration dans les années 2000. Le rapport d’information qu’il a rédigé avec le député socialiste Christophe Sirugue montrait que ces dépenses augmentaient parce qu’elles commençaient seulement à être quantifiées et codifiées. Auparavant, les hôpitaux jouaient leur rôle d’hospice, au sens ancien du terme, sans que cela soit comptabilisé.

Il est vrai que les crédits alloués à l’aide médicale d’État ont très largement augmenté au fil des années, mais cette situation est d’abord liée à l’immigration et au droit d’asile. Pour traiter correctement de l’aide médicale d’État, il convient donc de réformer le droit d’asile

Marques d’approbation sur les travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Génisson

Il faut bien évidemment lutter contre les réseaux. Les personnels soignants qui accueillent des personnes éligibles à l’AME amenées par des réseaux savent à qui ils ont affaire. Les responsabilités sont partagées, il faut savoir le dire. Il est essentiel de combattre implacablement la fraude, qui est la première source d’inégalité entre nos concitoyens.

Monsieur le rapporteur spécial, j’ai exercé des responsabilités en tant que médecin urgentiste, au sein du SAMU du Pas-de-Calais. Je puis vous garantir que les migrants présents à Calais ne sont pas des fraudeurs, des profiteurs. Ce sont des personnes dans une situation de détresse morale, sociale et sanitaire profonde. Ils ne se rendent d'ailleurs pas spontanément dans les hôpitaux, mais y sont généralement conduits par les pompiers, alertés par des citoyens. Vous pouvez interroger sur ce point la maire UMP de Calais. Ces Syriens, ces Érythréens, ces Afghans sont dans la détresse la plus absolue en raison de conflits internationaux dramatiques : c’est une fierté républicaine que de les accueillir et de les soigner.

Nous devons rester sereins dans ce débat. Il est évidemment légitime de débattre de l’AME, mais il ne me paraît pas opportun de présenter des amendements dont on sait bien qu’ils n’aboutiront pas, qu’il s’agisse de diminuer les crédits de l’AME ou d’instaurer une participation forfaitaire. Ces amendements sont infondés et contribuent à entretenir, même si telle n’est pas la volonté de nos collègues ici présents, un climat délétère, malsain dans l’opinion. Ce n’est pas ainsi qu’il convient d’aborder ce débat.

Continuons à travailler sur l’aide médicale d’État ! Le vrai sujet, c’est d’abord le droit d’asile, les migrations de populations, …

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Génisson

… la coopération avec les différents pays d’origine des migrants. La question de l’AME va bien au-delà des crédits de la mission que nous étudions aujourd’hui.

Quoi qu’il en soit, le groupe socialiste votera les crédits de la mission « Santé » et contre les amendements que j’ai évoqués.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à Mme Aline Archimbaud, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Aline Archimbaud

Bien sûr, il faut toujours travailler à améliorer les dispositifs, celui de l’AME comme les autres. Néanmoins, certains propos faisaient quasiment l’amalgame entre ce qui relève de réseaux mafieux, de la fraude, qui existent dans ce secteur comme dans d’autres, et la grande majorité des personnes qui doivent être admises aux urgences faute d’avoir été soignées en amont.

Le groupe écologiste votera contre cet amendement, qui n’engage pas le débat sur des bases correctes. La solution proposée est à la fois inefficace et coûteuse. Contrairement à ce que prétend M. le rapporteur spécial, restreindre l’accès à l’AME nous coûterait très cher : les personnes se présenteraient à l’hôpital avec des pathologies beaucoup plus lourdes parce qu’elles n’auraient pas été traitées en amont. Je vous invite à en discuter avec les personnels des services des urgences.

En outre, restreindre l’accès à l’AME ferait courir des risques sanitaires réels. Nous avons tout intérêt à juguler des maladies contagieuses telles que la tuberculose, par exemple. Ce n’est pas en réduisant l’accès à l’AME que l’on y parviendra, au contraire !

Sur un autre plan, que nos collègues le veuillent ou non, leurs propositions ciblent des populations particulièrement fragiles, chassées par les conflits, les guerres, la faim. Comme nous le verrons lors de la discussion du projet de loi relatif à la santé, au printemps 2015, il y a certainement bien d’autres mesures à prendre pour réaliser des économies. Pourquoi vouloir faire des économies précisément sur l’AME, et non sur d’autres dispositifs ? Vous désignez une cible à une opinion publique angoissée par la situation économique et sociale ; vous lui offrez une fausse solution en rendant les bénéficiaires de l’AME responsables du déficit de l’assurance maladie.

J’appelle nos collègues à maintenir la tradition humaniste de notre assemblée. Nous ne pouvons pas faire abstraction du contexte dans lequel nous nous trouvons aujourd’hui ; nous en connaissons la dangerosité. Si le Sénat adopte des amendements de ce type, nous savons très bien que d’autres les utiliseront.

Je vous demande, mes chers collègues, de mesurer la responsabilité que vous prenez en ouvrant le débat public sur cette seule question de l’AME. La mission « Santé » recouvre bien d’autres sujets mais, comme par hasard, les amendements déposés portent sur la seule AME !

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Le débat me semble tronqué. La Haute Assemblée examine des crédits extrêmement importants pour la santé de nos concitoyennes et de nos concitoyens, un samedi après-midi ; nous ne sommes guère nombreux et le débat se polarise sur une question annexe en termes budgétaires.

M. le rapporteur spécial a indiqué qu’il avait déposé un amendement d’appel pour ouvrir le débat. Je peux l’entendre : pourquoi notre assemblée ne mènerait-elle pas un travail sérieux sur cette question ? Nous ne devons pas être sourds aux arguments avancés sur les autres travées.

J’observe que le rapport de l’IGAS va à l’encontre des propos tenus par nos collègues de l’UMP, puisqu’il ne fait nullement état d’une explosion du nombre de bénéficiaires de l’AME. Ce rapport est-il exact ? Faut-il créer une mission sur le sujet ? Pourquoi pas, mais, en tout cas, ce n’est pas au détour de l’examen d’un amendement que nous pourrons traiter sérieusement la question.

Si j’ai bien compris, monsieur le rapporteur spécial, votre amendement vise à recentrer le dispositif sur ses objectifs essentiels, notamment l’accès aux soins pour les femmes enceintes et les mineurs. Or, toujours selon l’IGAS, 80 % des bénéficiaires de l’AME sont des hommes. L’amendement apporte donc une mauvaise réponse.

Je mets en garde à mon tour contre les risques en termes de santé publique d’une réduction de l’accès aux soins pour les populations les plus fragiles. Là encore, l’amendement présenté ne répond pas à la problématique. La Haute Assemblée veut-elle répondre à une question de santé publique au détour de l’examen d’un amendement qui va provoquer un débat tronqué, dans un contexte politique nauséabond ?

J’entends M. le rapporteur spécial opposer les bénéficiaires de l’AME et ceux de la CMU-C. Mais si son amendement était adopté, cela ne donnerait rien de plus aux bénéficiaires de la CMU-C. Il ne s’agit donc pas d’une mesure de justice sociale. Cet amendement ne répond à aucune vraie question ! Dans ces conditions, pourquoi le maintenir, d’autant qu’il aura une vie très courte ? Il me semble malvenu, pour des raisons tant d’efficacité que de justice sociale et de respect de populations parmi les plus fragiles, déjà suffisamment stigmatisées. Mieux vaudrait que notre Haute Assemblée confie à une mission le soin de travailler sur cette question.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

Il n’est pas question, au travers de cet amendement, de stigmatiser qui que ce soit, …

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

… ni les bénéficiaires de l’AME ni les médecins ou les hôpitaux. Peut-on imaginer que, dans notre pays, un médecin ou un hôpital refuse de soigner un patient ?

Debut de section - Permalien
Pascale Boistard, secrétaire d'État

On risque d’en arriver là !

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

Si cela était, nous serions les premiers à dénoncer une telle situation ! Je serais le premier à dénoncer un confrère qui refuserait de soigner un patient, mettant en danger ce dernier et son entourage.

Je crois que le débat n’est pas là, soyons raisonnables…

Il y a toutefois un vrai problème, dont il faut souligner l’existence lors de la discussion du projet de loi de finances. Nos concitoyens ne comprennent plus cette politique. Nous ne pouvons demander des efforts aux uns et non aux autres. Comment expliquer qu’un Français ou un étranger en situation régulière soit soumis, en ce qui concerne les soins, à un ONDAM qui limite la progression des dépenses, mais pas un étranger en situation irrégulière résidant depuis plus de trois mois en France ? Moi, je ne peux plus l’expliquer.

Madame la secrétaire d’État, c’est un problème auquel il faut répondre en trouvant le juste milieu entre politique d’immigration et politique sanitaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Génisson

Ce n’est donc pas un problème de santé publique !

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

Il en va de même pour les mineurs étrangers isolés : il faut trouver le juste milieu entre politique de l’immigration et prise en charge médico-sociale.

Nous devons faire en sorte de ne pas attiser les haines, de ne stigmatiser personne, mais de répondre à un véritable problème ! Nous ne prétendons pas le faire aujourd’hui, mais nous voulons sensibiliser le Gouvernement à cette question essentielle.

Notre système ne doit pas favoriser les filières d’immigration clandestine, comme c’est le cas pour les mineurs étrangers isolés. J’interrogeais récemment l’un d’entre eux, en provenance d’un pays lointain. Il avait parcouru plusieurs milliers de kilomètres en camion, pour un coût de passage de 3 000 euros. Quand je lui ai demandé quelle destination finale lui avait été indiquée au début de son voyage, il m’a donné l’adresse du foyer départemental de l’enfance de la Marne !

J’ai le sentiment d’avoir contribué à organiser cette filière : nous avons mis en place un système qui permet à des réseaux de vendre à des personnes en difficulté une prestation de livraison dans notre pays ! Je ne veux pas être complice de cela !

Nous devons trouver le juste milieu qui caractérise en général les solutions apportées par le Sénat lorsqu’il s’agit de sujets difficiles à aborder et à expliquer à nos concitoyens.

Par cet amendement, nous proposons simplement de nous aligner sur ce que font les autres pays européens. Tous ont revu leur politique en la matière. Le dernier à l’avoir fait est l’Espagne. Je soutiens l’amendement présenté par M. Delattre.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à Mme Françoise Laborde, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Laborde

J’ai effectivement parlé d’une augmentation du nombre des bénéficiaires de l’AME, monsieur Karoutchi, mais j’ai aussi souligné qu’elle était due à l’activité d’un certain nombre de filières, comme l’a expliqué Mme la secrétaire d’État. Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes s’est engagée à lutter contre ces dérives.

Les opinions étant quelquefois diverses au sein de notre groupe, nous avons déjà engagé un débat sur cette question. Nous persistons à penser que l’AME est importante, car elle permet d’éviter la propagation de certaines maladies, telle la tuberculose.

Nous devons trouver les moyens à la fois de mettre fin aux activités de certaines filières et de permettre à toutes les personnes présentes sur notre territoire de se faire soigner, ne serait-ce que pour empêcher la propagation des maladies.

Debut de section - Permalien
Pascale Boistard, secrétaire d'État

Je suis bien sûr toujours défavorable à cet amendement, qui ne saurait à mon sens permettre de résoudre la question que vous soulevez, monsieur le sénateur Savary. Des textes vous seront bientôt soumis qui se prêteront mieux à cette fin, par exemple le projet de loi sur le droit d’asile.

Je réaffirme toute la détermination du Gouvernement à lutter contre ces réseaux mafieux qui exposent de jeunes mineurs et, plus généralement, des personnes croyant trouver sur notre territoire un nouvel Eldorado à des situations extrêmement dangereuses.

Ces personnes doivent être respectées. Il faut bien évidemment éviter les « appels d’air », mais cela doit se faire en travaillant sur la politique de l’immigration, y compris à l’échelon européen. La maire de Calais ne dit pas autre chose : sans réelle coopération européenne sur cette question de l’immigration et de la lutte contre les réseaux de traite des êtres humains, nous ne pourrons traiter le sujet. L’enveloppe allouée à l’AME ne baissera que lorsque les demandeurs d’asile obtiendront plus rapidement une réponse et que les réseaux mafieux auront été maîtrisés.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Je mets aux voix l'amendement n° II-68.

J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe UMP.

Je rappelle que l'avis du Gouvernement est défavorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

Il est procédé au dépouillement du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Voici le résultat du scrutin n° 51 :

Le Sénat a adopté.

L'amendement n° II-187 rectifié bis, présenté par MM. Laufoaulu, Magras, Frogier, Vendegou et D. Robert, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

en euros

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins

Protection maladie

TOTAL

SOLDE

La parole est à M. Michel Magras.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Magras

Notre collègue Laufoaulu, retenu à Wallis par la session de l’assemblée territoriale, m’a demandé de présenter cet amendement, dont l’enjeu est très important pour Wallis-et-Futuna, pour la Nouvelle-Calédonie et, surtout, pour les relations entre ces deux territoires.

La santé à Wallis-et-Futuna est une compétence de l'État, alors qu’elle est une compétence territoriale en Nouvelle-Calédonie.

Du fait du manque d’équipements médicaux et de spécialistes à Wallis-et-Futuna, les habitants ayant besoin de soins sont souvent évacués vers la Nouvelle-Calédonie.

Dotée d’un budget insuffisant, l’agence de santé de Wallis-et-Futuna a accumulé, à l’égard de la Nouvelle-Calédonie, une dette avoisinant 20 millions d’euros. Ce phénomène s'est déjà produit dans le passé, mais l'État avait toujours apuré sa dette avec rapidité.

Le Président de la République et le Gouvernement ont, à plusieurs reprises depuis un an et demi, réaffirmé que cette dette était bien celle de l'État et que ce dernier rembourserait la Nouvelle-Calédonie.

Cependant, rien n'a encore été fait et les tensions communautaires deviennent très vives en Nouvelle-Calédonie, où certains accusent les Wallisiens et Futuniens d'être responsables de l'insuffisance de l’offre de soins proposée aux Néo-Calédoniens.

Des heurts et des manifestations ont déjà eu lieu à Nouméa. Des évacués sanitaires venant de Wallis-et-Futuna ont même été refusés à l’hôpital de Nouméa, ce qui a entraîné – faut-il le rappeler ? – un décès.

Il n’est pas normal que l’État ne rembourse pas ses dettes à l’égard de la Nouvelle-Calédonie. Il n’est pas davantage normal que les habitants de Wallis-et-Futuna, qui sont pleinement Français et sont nombreux sous les drapeaux – le Président de la République l’a lui-même rappelé –, ne soient pas aussi bien traités et soignés que des étrangers en situation irrégulière…

Le rebasage du budget de l’agence de santé de Wallis-et-Futuna doit donc servir à éviter la reconstitution d’une nouvelle dette et à faire des investissements – je crois, par exemple, qu’elle souhaite doter le territoire d’un scanner –, visant à réduire le nombre des évacuations sanitaires. Il ne saurait en aucun cas servir au remboursement de la dette actuelle.

Afin de calmer les tensions communautaires en Nouvelle-Calédonie et d’éviter la survenue d’événements qui pourraient être dramatiques, cet amendement tend simplement à prélever 2 millions d’euros sur la dotation de l’AME pour les verser à la Nouvelle-Calédonie. Un tel geste marquerait le début d’un apurement rapide de la dette de l’État à l’égard de cette collectivité.

Le montant total de l’AME est de 678 millions d’euros ; les Wallisiens et les Futuniens demandent non pas de le diminuer, mais d’affecter 2 millions d’euros au règlement d’un problème délicat entre deux collectivités françaises.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

La commission des finances n’a pas eu l’occasion d’examiner cet amendement. Néanmoins, au moins deux de ses membres, sa présidente et moi-même, se sont déjà rendus à Wallis-et-Futuna.

Debut de section - Permalien
Pascale Boistard, secrétaire d’État

Moi aussi !

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Les habitants de ce territoire attendent toujours leur premier scanner. Ils sont donc très dépendants du soutien logistique de la Nouvelle-Calédonie, et plus particulièrement de l’hôpital de Nouméa.

D’après ce que m’a indiqué Robert Laufoaulu, la situation sur place en est parvenue au stade du conflit. L’hôpital de Nouméa refuse parfois des patients venus de Wallis-et-Futuna.

La dette de l’État se monte à 20 millions d’euros. Il faut absolument envoyer un signe à ces territoires : l’adoption de cet amendement en constituerait un. Affecter 2 millions d’euros au règlement de ce problème ne serait pas du luxe. Cela permettrait d’atténuer le conflit que crée la situation actuelle et que M. Laufoaulu essaie de calmer, ce qui explique son absence aujourd’hui. Ajoutons que Wallis-et-Futuna comptent trois rois…

Debut de section - Permalien
Pascale Boistard, secrétaire d’État

J’en ai rencontré un !

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Moi, j’ai rencontré les trois !

À titre personnel, je suis favorable à cet amendement.

Debut de section - Permalien
Pascale Boistard, secrétaire d’État

Monsieur le rapporteur spécial, vous n’êtes pas le seul à connaître un peu Wallis-et-Futuna et la Nouvelle-Calédonie !

Vous proposez, monsieur Magras, d’augmenter de 2 millions d’euros la subvention de l’agence de santé de Wallis-et-Futuna, afin qu’elle puisse commencer à apurer sa dette à l’égard du centre hospitalier territorial de Nouvelle-Calédonie.

Le Gouvernement partage évidemment votre préoccupation. Plusieurs mesures ont d’ailleurs été décidées afin de régler cette situation.

Premièrement, le Gouvernement a prévu, au sein du projet de loi de finances rectificative pour 2014, un abondement de 3 millions d’euros de la dotation de l’agence, afin de ne pas créer de nouvelle dette en 2014.

Deuxièmement, cet effort sera poursuivi en 2015. La dotation versée à l’agence de santé a été revalorisée de 2, 5 millions d’euros, passant de 26 millions d’euros en projet de loi de finances initiale pour 2014 à 28, 5 millions d’euros en projet de loi de finances pour 2015. Cette hausse de la dotation de l’agence de santé de Wallis-et-Futuna doit à nouveau permettre d’éviter de constituer de nouvelles dettes en 2015, en améliorant le fonctionnement de l’agence.

Troisièmement, le Président de la République, lors de son voyage en Nouvelle-Calédonie, le 19 novembre dernier, a annoncé qu’une solution avait été trouvée pour l’extinction définitive de cette dette.

Il n’apparaît donc plus justifié de relever la subvention à l’agence de santé, les mesures nécessaires ayant été prises par le Gouvernement pour apurer la dette. Au bénéfice de ces explications, je vous demande de bien vouloir retirer cet amendement, monsieur le sénateur.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Monsieur Magras, l’amendement n° II-187 rectifié bis est-il maintenu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Magras

Je peux entendre l’explication donnée par Mme la secrétaire d’État, et je pense que M. Laufoaulu l’entendra aussi.

Néanmoins, la mise en place du dispositif que vous proposez n’est pas encore effective et risque de prendre du temps, en tout cas plus de temps qu’annoncé. Depuis un an et demi, les engagements ont été pris et répétés, mais ils n’ont jamais été suivis d’effets concrets et immédiats.

Un geste doit donc être fait aujourd’hui, sous peine de risquer que la situation ne dégénère. Nos collègues du Pacifique sont inquiets. L’amendement est raisonnable : il ne prévoit qu’un geste d’apaisement, portant sur 10 % de la dette seulement et moins de 0, 3 % du budget de l’AME ; il ne fait pas obstacle à la mise en place du système que vous proposez pour les 18 millions d’euros de dette restants.

Vous l’avez dit vous-même, madame la secrétaire d’État, pour l’essentiel, les augmentations du budget de l’agence prévues sont destinées à empêcher la création de nouvelles dettes. Il y a deux questions parallèles : il faut donner à Wallis-et-Futuna les moyens de ne pas créer de nouvelles dettes, d’une part, et lui permettre d’apurer une dette qui est en fait celle de l’État, d’autre part. Robert Laufoaulu a tenu à le rappeler : sur ce territoire, en effet, la santé est une compétence non pas du territoire, mais de l’État. Il faut se mettre à la place de la Nouvelle-Calédonie, où cette compétence est territoriale : quand un hôpital a un trou de 20 millions d’euros dans son budget, c’est le territoire qui doit trouver des solutions pour le combler.

Dès lors, dans l’immédiat, je souhaite maintenir cet amendement. Je pense en effet, mes chers collègues, que nous pourrions faire un geste à l’égard des habitants de Wallis-et-Futuna et de Nouvelle-Calédonie.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Là encore, c’est la porte ouverte à l’opposition entre des catégories différentes de patients, à la mise en concurrence entre les bénéficiaires de l’AME et ceux de la CMU. Il s’agit ici de ponctionner 2 millions d’euros sur les crédits de l’AME. Après tout, ceux qui en bénéficient le méritent-ils ?... Cette politique d’opposition, de ségrégation, est extrêmement dangereuse.

Depuis le début de l’examen du projet de loi de finances et du projet de loi de financement de la sécurité sociale, le groupe CRC désapprouve le choix gouvernemental de la restriction budgétaire. Pour notre part, nous avons fait des propositions alternatives de financement par voie d’amendements, tous rejetés, y compris par vous-même, monsieur Magras, qui déplorez maintenant un manque d’argent. Vous auriez peut-être pu réfléchir à d’autres façons de financer notre système de protection sociale et de santé ! Il y a là une vraie contradiction.

Cette contradiction, d’ailleurs, est poussée à son paroxysme quand vous préconisez la mise en place d’un système de santé à plusieurs vitesses : il y aura la santé pour les pauvres et celle pour les nantis. Cela ne va pas ! Dans un régime démocratique, la protection sociale doit répondre à une autre logique, celle de la satisfaction des besoins humains.

Cet amendement, qui s’inscrit tout à fait dans la logique du précédent, va à l’encontre des principes que nous défendons. Il contribue à nourrir un climat particulièrement nauséabond !

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à Mme Catherine Génisson, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Génisson

La préoccupation des auteurs de l’amendement est tout à fait légitime. Néanmoins, Mme la secrétaire d’État y ayant parfaitement répondu, cet amendement pourrait à mon sens tout à fait être retiré.

Cela étant, la façon dont vous envisagez de résoudre les problèmes de financement de la santé à Wallis-et-Futuna, en puisant dans les crédits dédiés à l’AME, est totalement inadmissible. Y aurait-il des misères plus dignes d’intérêt que d’autres ? Nous devrions avoir un débat serein sur cette question, mais, avec cet amendement, nous sombrons vraiment dans l’inacceptable !

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Une fois n’est pas coutume, j’interviendrai sur le fond. J’ai la chance d’avoir, il y a bien longtemps, fait le voyage à Wallis-et-Futuna, et j’ai pu constater la réalité des problèmes de santé qui se posent dans ce territoire, particulièrement à Futuna.

Si elle avait pu examiner cet amendement, mon cher collègue, la commission des finances vous aurait probablement invité à le retirer.

Les Néo-Calédoniens vivent parfois mal l’arrivée de patients de Wallis-et-Futuna, nous le savons, mais nous examinerons dans quelques jours le projet de loi de finances rectificative. Dans cette attente, je vous invite à faire confiance au Gouvernement.

Debut de section - Permalien
Pascale Boistard, secrétaire d’État

L’annonce faite par le Président de la République il y a quelques jours à peine à Nouméa constitue, vous en conviendrez, monsieur le sénateur, un engagement très fort. Une solution a été trouvée et le sujet n’existe plus.

Dès lors, je réitère mon invitation à retirer cet amendement, ne souhaitant pas émettre un avis défavorable sur cet amendement, même si la compensation proposée est discutable.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à M. Michel Magras, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Magras

Madame Cohen, vous n’avez pas, je pense, bien compris le sens de ma démarche. Cet amendement ne s’inscrit pas dans la logique du précédent. La situation est différente : l’État a une dette importante à l’égard d’une collectivité, qu’il met de ce fait en difficulté.

Cela étant, j’entends la volonté de l’État de régler le problème. Il s’agit, au travers de cet amendement, d’alerter le Sénat et le Gouvernement sur l’urgence de régler une difficulté réelle. Les propos tenus par Mme la secrétaire d’État me donnent à penser que le Gouvernement s’engage à ce qu’une solution soit trouvée. Si je maintiens cet amendement et qu’il est adopté, je sais très bien que sa vie sera très brève : elle prendra fin dans quelques jours à l’Assemblée nationale.

Ce débat a été intéressant ; je pense que vous avez tous pris conscience du problème qui se pose dans ces territoires. Il n’est pas question d’une santé pour les pauvres et d’une santé pour les riches : tout le monde doit être soigné. L’État doit assumer ses responsabilités en matière de santé.

Cela étant dit, je retire l’amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

L'amendement n° II-187 rectifié bis est retiré.

Nous allons maintenant procéder au vote des crédits, modifiés, de la mission « Santé », figurant à l’état B.

Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix les crédits de la mission, modifiés.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe UMP.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

Il est procédé au dépouillement du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Voici le résultat du scrutin n° 52 :

Ces crédits sont adoptés.

J’appelle en discussion l’article 59 sexies et l’amendement qui est rattaché pour son examen aux crédits de la mission « Santé ».

Santé

I. – L’article L. 253-3 du code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :

1° Les mots : «, établissements de santé » sont supprimés ;

2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Les demandes en payement des prestations par les établissements de santé doivent, sous peine de forclusion, être présentées dans le délai mentionné à l’article L. 162-25 du code de la sécurité sociale. »

II. – Le I s’applique aux prestations fournies à compter du 1er janvier 2015.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

L'amendement n° II-69, présenté par M. Delattre, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 2

Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :

1° Les mots : « en payement » sont remplacés par les mots : « de paiement » et le mot : « doivent » est remplacé par le mot : « sont » ;

bis Les mots : «, établissements de santé » et le mot : « être » sont supprimés ;

II. – Alinéa 4

1° Remplacer les mots :

en payement

par les mots :

de paiement

et le mot :

doivent

par le mot :

sont

2° Supprimer le mot :

être

La parole est à M. le rapporteur spécial.

Debut de section - Permalien
Pascale Boistard, secrétaire d'État

Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État. Avis favorable.

Sourires

L'amendement est adopté.

L'article 59 sexies est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

J’appelle en discussion l’amendement tendant à insérer un article additionnel qui est rattaché pour son examen aux crédits de la mission « Santé ».

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

L'amendement n° II-1, présenté par M. Savary, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Après l’article 59 sexies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – La section II du chapitre II du titre IV de la première partie du livre Ier du code général des impôts est complétée par un XIII ainsi rédigé :

« XIII. – Participation à l’aide médicale de l’État.

« Art. 968 F – Le droit aux prestations mentionnées à l’article L. 251-2 du code de l’action sociale et des familles est conditionné par le paiement d’une participation annuelle d'un montant de 50 € par bénéficiaire majeur. »

II. – Le premier alinéa de l’article L. 251-1 du code de l’action sociale et des familles est complété par les mots : «, sous réserve, s’il est majeur, de s’être acquitté, à son propre titre et au titre des personnes majeures à sa charge telles que définies ci-dessus, de la participation annuelle mentionnée à l’article 968 F du code général des impôts ».

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

Cet amendement est dans la droite ligne du débat que nous avons eu précédemment.

Afin de responsabiliser les patients en termes de recours au système de soins, l’article 20 de la loi du 13 août 2004 relative à l’assurance maladie a instauré une contribution forfaitaire sur les actes médicaux et les actes de biologie dont le plafond annuel est fixé à 50 euros.

Cet amendement vise à instituer une participation comparable pour les bénéficiaires de l’aide médicale d’État. Le montant de la participation serait identique au plafond de la participation forfaitaire de droit commun en vigueur depuis le 1er janvier2005, soit 50 euros.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

La commission n’a pas examiné cet amendement qui a été adopté par la commission des affaires sociales. Toutefois, à titre personnel, j’y suis favorable.

Debut de section - Permalien
Pascale Boistard, secrétaire d'État

Avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Je mets aux voix l'amendement n° II-1.

J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe UMP.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

Il est procédé au dépouillement du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Voici le résultat du scrutin n° 53 :

Le Sénat a adopté.

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 59 sexies.

Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Santé ».

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au lundi 1er décembre 2014, à dix heures, à quatorze heures trente et le soir :

Suite du projet de loi de finances pour 2015, adopté par l’Assemblée nationale (107, 2014-2015).

Examen des missions :

- Justice (+ articles 56 à 56 quater).

M. Antoine Lefèvre, rapporteur spécial (rapport n° 108, tome 3, annexe 18) ;

M. Jean René Lecerf, rapporteur pour avis de la commission des lois (avis n° 114, tome 8) ;

M. Yves Détraigne, rapporteur pour avis de la commission des lois (avis n° 114, tome 9) ;

Mme Cécile Cukierman, rapporteure pour avis de la commission des lois (avis n° 114, tome 10).

- Action extérieure de l’État.

MM. Éric Doligé et Richard Yung, rapporteurs spéciaux (rapport n° 108, tome 3, annexe 1) ;

M. Christian Cambon et Mme Leila Aïchi, rapporteurs pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (avis n° 110, tome 1) ;

MM. Jacques Legendre et Gaëtan Gorce, rapporteurs pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (avis n° 110, tome 2) ;

M. Jean-Pierre Grand et Mme Marie-Françoise Perol-Dumont, rapporteurs pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (avis n° 110, tome 3) ;

M. Louis Duvernois, rapporteur pour avis de la commission de la culture (avis n° 112, tome 1).

- Engagements financiers de l’État.

Compte spécial : accords monétaires internationaux.

Compte spécial : avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics.

Compte spécial : participation de la France au désendettement de la Grèce.

Compte spécial : participations financières de l’État

M. Serge Dassault, rapporteur spécial (rapport n° 108, tome 3, annexe 13) ;

M. Maurice Vincent, rapporteur spécial (rapport n° 108, tome 3, annexe 21) ;

M. Alain Chatillon, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques (avis n° 109, tome 9).

- Remboursements et dégrèvements.

Mme Marie-France Beaufils, rapporteure spéciale (rapport n° 108, tome 3, annexe 27).

- Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation (+ articles 48 à 50).

M. Marc Laménie, rapporteur spécial (rapport n° 108, tome 3, annexe 5) ;

M. Jean Baptiste Lemoyne, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales (avis n° 111, tome 1).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

La séance est levée à dix-huit heures dix.