Intervention de René-Paul Savary

Réunion du 29 novembre 2014 à 14h45
Loi de finances pour 2015 — Santé

Photo de René-Paul SavaryRené-Paul Savary, de la commission des affaires sociales :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, autant annoncer la couleur : la commission des affaires sociales a émis un avis défavorable sur les orientations budgétaires définies par le Gouvernement pour la mission « Santé ».

Les contraintes croissantes qui pèsent sur les agences sanitaires à un moment où celles-ci doivent assurer des missions toujours plus denses et la progression non maîtrisée des crédits de l’AME lui paraissent, en effet, appeler une position plus que réservée.

S’agissant du programme 204, les opérateurs sanitaires de l’État sont invités à approfondir les efforts d’efficience et de productivité auxquels ils s’astreignent depuis maintenant plusieurs exercices. Le projet de loi de finances pour 2015 prévoit de diminuer de 4, 4 % le montant total des subventions qui leur sont allouées et de réduire leurs plafonds d’autorisations d’emplois d’environ 2 %.

Il semble tout à fait légitime à la commission des affaires sociales que les agences sanitaires prennent leur part dans les mesures de redressement des finances publiques. La poursuite de la démarche de rationalisation suscite cependant aujourd’hui des inquiétudes d’autant plus fortes qu’elles s’ajoutent à l’attribution de missions nouvelles et aux incertitudes liées au projet de loi relatif à la santé dont nous débattrons prochainement.

Je ne prendrai qu’un seul exemple : l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, l’ANSM. Malgré une subvention en baisse de plus de 3 % et une diminution de vingt équivalents temps plein par rapport à 2014, l’Agence devra non seulement organiser la montée en puissance de son département de pharmaco-épidémiologie, mais également s’assurer de la mise en œuvre du nouveau règlement européen relatif aux essais cliniques de médicaments. Elle devra, en outre, garantir l’application des mesures de la prochaine loi de santé, concernant notamment la sécurisation de la chaîne d’approvisionnement en médicaments ou encore la création d’un accès ouvert aux données de santé.

Toutes les agences du programme 204 ont souligné la nécessité de garder une taille critique suffisante pour maintenir une expertise de qualité. De ce point de vue, notre assemblée devra être attentive à l’article 42 du projet de loi relatif à la santé qui entend habiliter le Gouvernement à agir par ordonnances pour réformer le système d’agences sanitaires. L’étude d’impact reste en effet relativement sibylline sur la façon dont sont envisagés l’articulation des missions des différents opérateurs et les moyens qui leur seront attribués. Pouvez-vous d’ores et déjà, madame la secrétaire d’État, nous donner quelques éclairages à ce sujet ?

En ce qui concerne le programme 183, la commission des affaires sociales relève que les dépenses liées à l’AME se caractérisent par une augmentation très soutenue : leur rythme de croissance - plus de 12 % - est bien supérieur à celui des dépenses d’assurance maladie. Néanmoins, ces dépenses souffrent surtout d’une absence totale de fiabilité des prévisions budgétaires.

Pour 2015, les crédits ouverts au titre de l’AME de droit commun s’élèveraient à 633 millions d’euros, alors que la dépense tendancielle est de 717 millions d’euros. Comme chaque année, le Gouvernement est ainsi conduit à ouvrir des crédits supplémentaires dans le collectif budgétaire de fin d’exercice. Parallèlement, les restes à charge de l’État à l’égard de l’assurance maladie se maintiennent ; la dette s’élevait à 52 millions d’euros à la fin de 2013.

La Cour des comptes a considéré que cette situation faisait peser un risque d’insoutenabilité sur le programme 183. Dans ces conditions, la commission des affaires sociales estime que des mesures complémentaires aux ajustements en cours sont nécessaires.

Elle a adopté, sur ma proposition, un amendement venant compléter celui de la commission des finances et visant à instituer pour les bénéficiaires de l’AME une contribution forfaitaire annuelle comparable à la participation plafonnée de droit commun à laquelle sont soumis les assurés lorsqu’ils recourent à des soins médicaux, soit un forfait de 50 euros.

Tout en envoyant un signal responsable, cette mesure ne remet en cause ni la nécessité de protéger les personnes concernées ni la capacité à éviter que des affections non soignées ne s’étendent. Elle nous permet donc de rester fidèles au double objectif sanitaire du dispositif.

La commission des affaires sociales a donc émis un avis défavorable sur le programme 204, car le Gouvernement prévoit d’agir par ordonnances. Elle est également défavorable au programme 193, en raison de l’insoutenabilité des propositions budgétaires le concernant.

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