Intervention de Yves Daudigny

Réunion du 29 novembre 2014 à 14h45
Loi de finances pour 2015 — Santé, amendement 1

Photo de Yves DaudignyYves Daudigny :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, madame la présidente de la commission des finances, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, deux impératifs me semblent devoir guider l’examen de la mission « Santé » de ce projet de loi de finances pour 2015.

En premier lieu, cette mission nécessite, pour être appréhendée dans sa réalité, un effort de recul particulier, puisqu’elle ne constitue qu’une part des financements de notre protection sociale. Cet effort d’appréhension globale est d’autant plus nécessaire que la santé ne doit plus se décliner de manière cloisonnée par secteur, mais doit être analysée de manière transversale autour des trois piliers définis par la stratégie nationale de santé, en matière de prévention, d’organisation des soins et de démocratie sanitaire.

Il nous faut donc tenir compte des mesures de restructuration et de clarification des financements déjà engagées et de celles qui sont à venir, dans le cadre du projet de loi de santé publique.

Ce budget constitue, dans cette perspective, une étape de transition.

Il s’inscrit, en second lieu, dans l’effort collectif de redressement des comptes publics et de maîtrise des dépenses.

Ces deux considérations préalables nous permettent d’apprécier à sa juste valeur le montant global des crédits de la mission, portés à 1, 2 milliard d’euros en 2015, soit, à périmètre constant par rapport aux crédits inscrits en loi de finances initiale pour 2014, une progression de 3 %.

Cependant, les deux programmes concernés par ces crédits recouvrent des réalités différentes. L’un s’inscrit dans le moyen et le long terme ; l’autre répond, pour l’essentiel, à un impératif immédiat de santé publique. Ils ne sont donc absolument pas comparables.

Le programme 204, relatif à la prévention, à la sécurité sanitaire et à l’offre de soins, connaît, pour l’ensemble de ses huit actions, une augmentation de crédits de 0, 87 %, avec, toutefois, une certaine disparité, en raison des modifications de périmètres réalisées ou à venir et l’engagement d’une première étape de rationalisation pour 2015, conformément aux recommandations de la Cour des comptes.

Par exemple, la réunion des centres d’information, de dépistage et de diagnostic des infections sexuellement transmissibles – les CIDDIST – avec les centres de dépistage anonyme et gratuit du virus de l’immunodéficience humaine et des hépatites – CDAG – permet leur intégration dans les structures financées par l’assurance maladie et la création d’un service unique. Cette mesure figurait à l’article 33 du projet de loi de financement de la sécurité sociale et nous l’avons largement approuvée, de même qu’elle a recueilli l’accord des associations.

Le Gouvernement a également entendu marquer prioritairement son soutien à la politique de prévention. Celui-ci se traduit par une dotation aux projets régionaux de santé dans le cadre du Fonds d’intervention régional, le FIR, par une dotation de plus de 130 millions d’euros, auxquels s’ajoutent 247 millions d’euros de l’assurance maladie.

Par ailleurs, la nouvelle convention d’objectifs et de gestion de la Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés, la CNAMTS, assure au fonds de prévention une progression de 7, 3 % de ses crédits entre 2013 et 2017, soit 455, 4 millions d’euros.

Le réseau d’opérateurs sanitaires, en partie financé sur le programme 204, dont la réorganisation est nécessaire, comme le relève à juste titre le rapporteur pour avis de notre commission des affaires sociales, fait l’objet d’une restructuration et participe à la maîtrise des coûts.

L’article 42 du projet de loi de santé, outre des mesures de simplification de certaines procédures, prévoit à cet égard la création d’un nouvel établissement public, l’institut national de prévention de veille et d’intervention publique, qui fusionnera l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé, l’INPES, l’Institut de veille sanitaire, l’INVS et l’établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires, l’EPRUS. La voie de l’ordonnance s’impose-t-elle ? Nous aurons l’occasion d’en débattre.

Globalement, les charges de service public pour les agences se réduisent de plus de 4 % en 2015, notamment grâce à des efforts de gestion, qui ont permis à l’EPRUS des économies sur le programme de renouvellement des produits et le dispositif de stockage, ainsi que sur ses dépenses de fonctionnement.

L’action n° 19, Modernisation de l’offre de soins, connaît également un changement de périmètre. Deux opérateurs de l’État, le Centre national de gestion des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière, le CNG, et l’Agence technique de l’information sur l’hospitalisation, l’ATIH, pour partie financés par l’action n° 19 sur la part de subventions pour charges de service public, seront financés par l’assurance maladie à partir de 2015.

De la même manière, le financement de la formation médicale initiale est transféré de la part des dépenses d’intervention à l’assurance maladie.

Les autres dépenses d’intervention de l’offre de soins restent stables pour les subventions allouées à l’Agence des systèmes d’information partagés de santé, ASIP Santé, et augmentent de près de 2, 5 millions d'euros pour l’agence de santé de Wallis-et-Futuna.

Nous ne pouvons donc nous en tenir à la seule lecture comparée du montant global de subvention par action sans décomposer les crédits et examiner les raisons de certains écarts.

J’en viens au second programme de la mission, dédié à l’accès aux soins des personnes les plus défavorisées.

Est prévue pour 2015 une dotation de 632, 6 millions d’euros pour l’aide médicale d’État dite « de droit commun », de 40 millions d’euros pour l’AME pour soins urgents, de 4, 9 millions d’euros pour l’AME « humanitaire », accordée sur décision individuelle.

Sont également couvertes les évacuations sanitaires vers d’autres hôpitaux de personnes étrangères résidant à Mayotte, ainsi que les frais pharmaceutiques et les soins infirmiers des personnes gardées à vue.

Une ouverture de 155, 1 millions d’euros complémentaires est également prévue en loi de finances rectificative pour 2014, mais la dette de l’État envers l’assurance maladie n’est pas totalement couverte.

Le Gouvernement a par ailleurs rétabli, ce qui est une excellente décision, sa participation au Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante, à hauteur de 10 millions d’euros.

Chers collègues, nous allons, dans quelques instants, sur l’amendement n° II-1 adopté par la nouvelle majorité de la commission des affaires sociales, rouvrir un débat récurrent, et un débat, je me dois de le dire, nécessairement malsain.

En effet, quelle que soit l’intention des signataires de cet amendement, qui a pour objet de restreindre l’accès aux soins pour les personnes les plus défavorisées, quitte à mettre la population en danger et quitte à ce que retards ou renoncements à se soigner coûtent au final bien plus cher à la collectivité, cette proposition ne peut être dissociée de la surenchère médiatique à laquelle se livrent aujourd’hui certains candidats à la candidature, jusqu’à proposer la suppression pure et simple de l’aide médicale d’état.

Je le dis d’une façon solennelle, il est donc des femmes et des hommes politiques qui se disent responsables et qui sont prêts à laisser sans soins les étrangers irréguliers qu’il faudra bien pourtant hospitaliser lorsqu’ils seront au plus mal. C’est une absurdité, et c’est une honte.

Tel était d'ailleurs le système suédois, avant le déplacement en 2006 du rapporteur spécial des Nations unies pour le droit à la santé. Choqué par les méthodes discriminatoires d’un pays se targuant par ailleurs de sa tradition d’accueil, Paul Hunt a, par son rapport, permis, avec l’appui notamment de la Croix-Rouge, de changer la législation.

Vous avez certes simplement souhaité, monsieur le rapporteur pour avis – je vous cite –, « envoyer un signe ». Mais à qui ?

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