Intervention de Aline Archimbaud

Réunion du 29 novembre 2014 à 14h45
Loi de finances pour 2015 — Santé

Photo de Aline ArchimbaudAline Archimbaud :

Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, madame la présidente de la commission des finances, messieurs les rapporteurs, chers collègues, je ferai deux séries de remarques sur les deux programmes contenus dans cette mission « Santé ».

Concernant le programme 183, « Protection maladie », en hausse de 13, 7 %, madame la secrétaire d'État, tout d’abord, nous saluons la prise en compte de la réalité des besoins concernant l’aide médicale d’État et l’augmentation de ce budget, car il ne sert à rien, mais nous en reparlerons, de fermer les yeux et d’ignorer cette réalité.

Nous nous félicitons également que l’amélioration des délais de traitement des dossiers du Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante, le FIVA, dont la durée était préoccupante, voilà peu encore, ait été prise en compte par une contribution spécifique de 10 millions d’euros de l’État.

Cet effort est à saluer, mais nous restons vigilants, car, à la suite des travaux que j’ai pu mener sur le sujet avec mes collègues du Sénat au sein du comité de suivi sur l’amiante, je crains que nous n’ayons bientôt à prendre en compte une nouvelle génération de victimes de l’amiante, liée, cette fois, aux conditions dans lesquelles s’organisent trop souvent les activités de désamiantage, si des mesures énergiques ne sont pas prises rapidement.

Le budget prévisionnel du programme 183 nous convient donc tout à fait, et nous voterons contre les amendements qui prévoient de limiter l’accès à l’aide médicale d’État tel qu’il est actuellement réglementé. Je rappelle en effet que l’AME est attribuée sous condition de ressources. Les personnes dont les revenus sont inférieurs à 780 euros par mois doivent, par ailleurs, répondre à un certain nombre d’autres conditions et contrôles.

Aux collègues qui comptent soutenir ces amendements, je voudrais rappeler, au nom de notre groupe, ce que plusieurs rapports soulignent.

L’instauration d’un droit de timbre de 30 euros dû par les bénéficiaires de l’AME a certes contribué au ralentissement de l’augmentation de la dépense liée au dispositif en 2011. Mais c’est une économie en trompe-l’œil : les personnes concernées ont en effet reporté leurs soins, et leur état de santé s’est dégradé. In fine, elles ont dû se tourner vers des soins hospitaliers beaucoup plus lourds et donc beaucoup plus coûteux, ce que soulignent d’ailleurs très bien deux rapports rendus à ce sujet par l’Inspection générale des affaires sociales, l’IGAS, et par l’Inspection générale des finances, l’IGF.

Ces amendements renvoient à une conception des économies en santé publique totalement court-termiste et contre-productive. Certaines études récentes, telles que l’étude du secrétariat général pour la modernisation de l’action publique de 2013, montrent, à l’inverse, que l’ouverture de droits et d’accès à la santé pour des populations précaires permet, assez rapidement, de réduire les maladies et donc les dépenses publiques.

Derrière ces amendements s’exprime une position qui ne nous paraît pas responsable pour ce qui est de la sécurité sanitaire. Des épidémies comme la tuberculose, par exemple, épidémie liée à la misère, n’ont malheureusement pas disparu de notre pays.

Sur un plan plus politique, nous décelons également des considérations électorales. Cette volonté de stigmatiser des personnes particulièrement fragiles est une façon de diviser le pays, en faisant croire à certains de nos concitoyens en difficulté que les étrangers sont responsables de tous les maux.

Nous pensons, nous aussi, que ces propositions ne procèdent pas d’une attitude responsable. Attention à ne pas alimenter des fantasmes, des haines qui, là encore, pourraient nous dépasser !

Le second programme de la mission, le programme 204, « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins », accuse une baisse de 25 % de ses crédits, ce qui nous inquiète.

Apparemment, d’autres actions seront menées sur d’autres budgets, mais je n’ai pas bien compris lesquels. La situation me semble particulièrement inquiétante, car les baisses concernent essentiellement des budgets consacrés aux structures et à des actions de prévention.

Il semble que, dans la prochaine loi relative à la santé, il devrait être mis davantage l’accent sur la prévention, ce qui est une bonne chose, et sur le rééquilibrage de la politique de santé entre actions curatives et actions préventives.

Baisser ces budgets nous paraît donc être en contradiction totale avec la nécessité de développer la prévention. Encore une fois, quand on regarde dans le détail, il s’agit d’actions portant sur la santé des populations en difficulté, du programme contraception et des actions de lutte contre les violences faites aux femmes, contre les mutilations sexuelles, contre les risques infectieux – VIH, tuberculose et autres –, contre les maladies chroniques, contre les risques liés à l’environnement, ainsi que du financement du plan national santé environnement, qui vient d’être adopté. Ces arbitrages nous paraissent dommageables.

Nous déterminerons la position de notre groupe après l’examen des amendements.

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