Intervention de Françoise Laborde

Réunion du 29 novembre 2014 à 14h45
Loi de finances pour 2015 — Santé

Photo de Françoise LabordeFrançoise Laborde :

Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, les crédits de la mission « Santé » pour 2015 s’élèvent à près de 1, 2 milliard d’euros et contribuent à l’effort de redressement des comptes publics. Ce budget appelle quelques observations.

La première porte sur le programme « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins », qui financera huit opérateurs de l’État participant à la mise en œuvre des politiques nationales de prévention et de sécurité sanitaire. Comme l’a parfaitement expliqué mon collègue Gilbert Barbier en commission des affaires sociales, « nous assistons à un empilement de structures qui empêche de distinguer exactement qui fait quoi ».

En effet, la multiplicité des agences sanitaires, progressivement mises en place pour répondre à des crises sanitaires spécifiques, a contribué à rendre l’architecture de notre système de sécurité sanitaire complexe. Plusieurs rapports ont dénoncé les chevauchements de compétences, le manque de transparence, de lisibilité et l’absence de coordination entre les agences, qui ont progressivement perdu en crédibilité.

C’est la raison pour laquelle nous sommes favorables à une baisse du budget de fonctionnement de ces agences, qui s’inscrit dans le cadre de la réforme structurelle de notre système d’agences sanitaires ; nous aborderons cette question lors de l’examen du projet de loi relatif à la santé. Vous envisagez notamment de créer un Institut national de prévention, de veille et d’intervention en santé publique, qui reprendra les missions exercées par l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé, l’Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires et l’Institut de veille sanitaire. Vous l’avez rappelé, cette réforme permettra « d’améliorer l’efficacité de la réponse aux risques sanitaires, de créer une agence disposant d’une approche intégrée de la santé publique et de réaliser des économies sur les dotations à ces opérateurs ».

Je note ensuite avec satisfaction que le projet de loi de finances pour 2015 prévoit à nouveau d’abonder le FIVA à hauteur de 10 millions d’euros. Cette mesure emblématique vise à reconnaître la responsabilité de l’État dans l’indemnisation des victimes de l’amiante. C’est une très bonne chose.

J’en viens enfin au dernier point : l’aide médicale d’État. Je suis surprise d’entendre depuis quelque temps une partie de l’opposition réclamer la suppression de ce dispositif. Pourtant, il n’y a pas si longtemps – c’était en mars 2012, pendant la campagne de l’élection présidentielle –, Nicolas Sarkozy refusait que l’on remette en cause « cette générosité française » et y voyait même « notre honneur ». Il promettait alors qu’il n’y toucherait pas. Le discours a bien changé !

J’estime que ce dispositif est indispensable. Il répond à la fois à une nécessité de santé publique et à une exigence morale de respect des valeurs humanistes qui sont au cœur de notre pacte républicain. Les rapporteurs de la commission des finances et de la commission des affaires sociales nous proposeront tout à l’heure d’instaurer à nouveau une franchise, non plus de 30 euros comme avant 2012, mais de 50 euros, et de recentrer l’AME sur les soins urgents et de prévention, ainsi que sur les publics fragiles, décision nécessaire selon eux pour en maîtriser le coût.

Je rappellerai simplement qu’un rapport des inspections générales des affaires sociales et des finances avait jugé la franchise « financièrement inadaptée, administrativement complexe et porteuse de risques sanitaires » ; ce rapport écartait en outre la possibilité de « limiter la prise en charge aux seuls soins urgents ».

De telles mesures risquent en effet de susciter des prises en charge tardives et de favoriser le développement de maladies graves ou contagieuses. Les médecins eux-mêmes estiment qu’il est préférable que les personnes malades puissent accéder aux soins rapidement pour éviter toute propagation des maladies.

Certes, nous savons qu’il y a des abus, des dérives. Le budget consacré à l’AME a explosé en 2013, passant de 588 millions à 744 millions d’euros en l’espace d’un an, et 73 451 bénéficiaires supplémentaires ont été recensés entre 2011 et 2013. Cette hausse s’explique en partie par l’existence de filières permettant à des personnes étrangères de venir se faire soigner dans certains hôpitaux français.

En juin dernier, devant la commission des finances du Sénat, la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes s’est engagée à lutter contre les abus, notamment en renforçant les contrôles dans les différentes caisses primaires d’assurance maladie. Elle a également reconnu la nécessité d’enclencher très rapidement un travail diplomatique de coopération internationale avec les pays d’origine. Je ne peux que souscrire à cette démarche.

En conclusion, le groupe du RDSE, dans sa très grande majorité, votera en faveur de l’adoption des crédits de la mission « Santé ».

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