Intervention de Leila Aïchi

Réunion du 1er décembre 2014 à 14h30
Loi de finances pour 2015 — Action extérieure de l'état

Photo de Leila AïchiLeila Aïchi, rapporteur pour avi :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, comme vient de le souligner Christian Cambon, la dotation pour 2015 du programme 105, « Action de la France en Europe et dans le monde », repose sur des hypothèses relatives aux contributions internationales obligatoires, qui sont autant d’incertitudes.

Des révisions seront sans doute nécessaires, notamment pour le taux de change entre l’euro et le dollar.

D’ailleurs, un tel problème affecte les dépenses du ministère des affaires étrangères au-delà des seules contributions aux organisations internationales et aux opérations de maintien de la paix, puisque sont payées en devise, en particulier en dollars, non seulement les trois quarts de ces contributions, mais également une large part des dépenses de fonctionnement du réseau et des loyers à l’étranger.

On risque donc d’assister en cours d’exercice à de nouveaux arbitrages entre postes budgétaires. C’est un point d’inquiétude, alors que ce projet de budgetconserve a priori au réseau diplomatique, que ce soit pour le fonctionnement courant ou pour les importantes opérations de sécurisation, un caractère prioritaire ayant recueilli l’assentiment de la commission des affaires étrangères.

Cependant, l’orientation à la baisse des crédits prévue l’année prochaine pour le programme 105, « Action de la France en Europe et dans le monde », comme pour la mission « Action extérieure de l’État » dans son ensemble, n’est pas uniquement liée à la réduction supposée des dépenses de contributions internationales. Elle traduit aussi l’effort du ministère des affaires étrangères pour participer au redressement de nos comptes publics en poursuivant la baisse de ses effectifs.

Le plafond d’emplois retenu pour 2015 pour le programme 105, c’est-à-dire pour l’administration centrale du Quai d’Orsay et le réseau diplomatique, représente en effet une diminution de 109 équivalents temps plein travaillé. Les dépenses de personnel associées à ces effectifs enregistreront une baisse de 0, 3 % par rapport à 2014. Ainsi, se poursuit une tendance engagée depuis près de dix ans. Je crois qu’il faut saluer cet effort. Mais il faut aussi faire attention ; nous sommes arrivés « à l’os », ou peu s’en faut.

Pour le reste, je partage l’ensemble des remarques, y compris critiques, que mon corapporteur a développées.

D’abord, les moyens d’entretien immobilier du ministère des affaires étrangères doivent être « rapatriés » dans le budget général, où ils pourront ainsi faire l’objet d’une programmation plus fiable que celle qu’autorise aujourd’hui le système du compte d’affectation spécial. Ces crédits doivent être abondés au niveau des besoins d’un patrimoine parfois très dégradé.

Ensuite, notre coopération de sécurité et de défense doit cesser de servir de variable d’ajustement budgétaire pour être à la hauteur des ambitions que la France place, avec raison, dans cette action. Il faut être conséquent, monsieur le secrétaire d'État !

Enfin, le redéploiement géographique du réseau diplomatique, pour adapter cet outil aux évolutions stratégiques et économiques internationales, doit être accéléré, en particulier en direction des pays émergents. En effet, cette évolution reste lente – trop lente ! –, notamment pour renforcer la présence française en Asie. Du reste, évitons une vision trop étroite de l’émergence : l’avenir, c’est aussi l’Afrique ! Je plaide pour que l’on institue une représentation permanente de plein exercice auprès de l’Union africaine.

Ce redéploiement est essentiel pour mener à bien la diplomatie économique, devenue une priorité du Quai d’Orsay, désormais dénommé « ministère des affaires étrangères et du développement international ». La maquette budgétaire pour 2015 n’a pas entièrement suivi la nouvelle organisation gouvernementale. Mais, en tout état de cause, c’est au plus près des réalités de terrain que peut se mener utilement la bataille pour le développement des entreprises françaises à l’international et la promotion de l’attractivité de notre pays auprès des investisseurs et des touristes étrangers.

Sont allées dans ce sens la création des conseils économiques des ambassades et l’insertion systématique d’un volet économique dans le plan d’action des postes. Je rejoins mon collègue pour estimer que nos régions doivent être mieux associées à cette action. Je sais que vous êtes très sensible à ce sujet, monsieur le secrétaire d'État. La nomination d’ambassadeurs pour les régions a constitué un premier pas, mais il est encore modeste.

Par ailleurs, une réflexion sur le recrutement, la carrière et la formation des diplomates semblerait fort opportune, dans la mesure où la plupart d’entre eux ne sont pas naturellement familiers du monde économique. Il conviendrait également de réviser l’organisation des services économiques à l’étranger en suivant les récentes préconisations de la Cour des comptes. En outre, la promotion du tourisme en France doit être accentuée, compte tenu des enjeux considérables qui s’attachent pour l’avenir à ce secteur.

Enfin, à mon sens, il faudrait améliorer en quantité et en qualité la présence politique de l’État que garantissent les visites officielles, en particulier ministérielles, dans les pays où les entreprises françaises sont susceptibles de se développer. Ces visites sont souvent essentielles, car elles constituent l’occasion de mettre en valeur les atouts de nos PME. Les multiplier, c’est donc ajouter à leurs chances. Encore doivent-elles être calibrées, notamment en termes de durée sur place, pour ne pas aboutir à un effet d’« attente déçue », qui serait contre-productif.

J’espère que vous saurez vous faire l’écho de cette recommandation auprès de vos collègues, monsieur le secrétaire d'État. Nous voterons ce projet de budget. §

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