Séance en hémicycle du 1er décembre 2014 à 14h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • consulaire
  • diplomatie
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La séance

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La séance, suspendue à onze heures cinquante-cinq, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de Mme Jacqueline Gourault.

Photo de Jacqueline Gourault

La séance est reprise.

Nous poursuivons la discussion du projet de loi de finances pour 2015, adopté par l’Assemblée nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Action extérieure de l’État ».

La parole est à M. Éric Doligé, rapporteur spécial.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la mission « Action extérieure de l’État » regroupe les crédits du ministère des affaires étrangères et du développement international, à l’exception de ceux qui sont dévolus à l’aide publique au développement, ces derniers faisant l’objet d’une mission spécifique. Cela représente une masse financière de l’ordre de 3 milliards d’euros.

Deux changements de périmètre sont à signaler pour cette année : d’une part, l’intégration de l’opérateur Atout France, chargé de la promotion du tourisme en France ; d’autre part, l’arrivée d’un nouveau programme provisoire dédié à la préparation et à l’organisation de la Conférence Paris Climat 2015.

Les crédits de la mission diminuent de 2, 1 % à périmètre constant par rapport à l’année 2014. La baisse devrait s’établir à plus de 3 % sur l’ensemble de la période triennale 2015-2017. La mission « Action extérieure de l’État » participe donc pleinement à l’effort global de maîtrise des finances publiques, même si, nous le verrons, l’organisation de la Conférence sur le climat entraînera un surcroît de dépenses exceptionnel en 2016.

Ces économies passeront notamment par la maîtrise de la masse salariale, qui représente un peu moins du tiers des crédits demandés, soit 902 millions d’euros, pour un total de 12 172 équivalents temps plein travaillé.

À cet égard, on notera que l’objectif d’une réduction de 600 équivalents temps plein travaillé sur la période 2011-2013 a été atteint. Entre 2013 et 2015, la diminution des effectifs devrait atteindre 450 équivalents temps plein travaillé.

Il s’agira de poursuivre les mouvements engagés depuis plusieurs années en matière de format de nos réseaux à l’étranger, qu’il s’agisse du réseau diplomatique, du réseau consulaire ou du réseau culturel. En effet, le Gouvernement, tout comme son prédécesseur, a fait le choix de maintenir l’« universalité » de ce réseau, c'est-à-dire de ne pas complètement quitter des pays où nous disposons de postes. En revanche, la taille de ces derniers s’adapte aux nouvelles réalités.

Le symbole de cette politique reste le classement de nos ambassades en trois catégories, parmi lesquelles les « postes de présence diplomatique » se réduisent à une poignée d’emplois. Selon les éléments dont nous disposons, treize nouvelles ambassades devraient devenir des postes de présence diplomatique d’ici à 2017, ce qui représente un doublement par rapport à la situation actuelle.

Dans le même temps, le ministère des affaires étrangères et du développement international poursuit le basculement progressif des effectifs de certaines zones historiques vers les pays émergents les plus importants.

J’en viens à mes principales observations sur les deux programmes que j’ai plus particulièrement suivis.

Le programme « Action de la France en Europe et dans le monde » rassemble les crédits d’état-major du ministère, ceux du réseau diplomatique, ainsi que les contributions de la France aux principales organisations internationales. Il « pèse » 1, 8 milliard d’euros, soit un peu plus de 60 % de l’ensemble.

Dans la version initiale du projet de loi de finances, ces crédits diminuaient déjà de 2, 5 % en 2015, principalement sous l’effet de la diminution de 43 millions d’euros des contributions aux organisations internationales. Rappelons-le, cette budgétisation optimiste de dépenses à caractère obligatoire s’explique par plusieurs facteurs : la stabilisation du budget des organisations internationales, la révision du barème des Nations unies, la sortie de la France de l’Organisation des Nations unies pour le développement industriel. Elle s’explique aussi par l’hypothèse d’un taux de change moyen de 1, 36 dollar pour un euro, contre 1, 31 dollar auparavant.

C’est d’ailleurs là que se situe le principal point de fragilité de ce programme. En effet, le taux de change réel était d’un peu moins de 1, 25 dollar pour un euro ce week-end. Or un écart de 10 centimes par rapport à la prévision annulerait complètement l’économie de 43 millions d’euros espérée sur cette ligne. En outre, l’application d’un taux de mise en réserve de 8 % à ces dépenses obligatoires se justifie peu, dans la mesure où il est très probable que ces crédits soient débloqués en cours d’année pour honorer les engagements de la France.

Nous aurons l’occasion de revenir plus longuement sur le choix fait par le Gouvernement en seconde délibération à l’Assemblée nationale d’enlever encore 10 millions d’euros sur cette ligne. Je vous présenterai un amendement au nom de commission des finances sur le sujet.

Les dépenses immobilières constituent un autre point important de ces crédits. Elles devraient rester financées de manière dérogatoire, comme nous l’avait expliqué Roland du Luart ces dernières années. L’article 22 du projet de loi de finances prolonge ainsi de trois ans, jusqu’à la fin de l’année 2017, le système selon lequel le produit des cessions du ministère à l’étranger retourne à ce ministère.

Le principe est néanmoins écorné. D’une part, une contribution forfaitaire au désendettement « d’au moins 25 millions d’euros par an » sera demandée au ministère, que celui-ci réalise ou non des cessions. D’autre part, grâce à ces produits, le ministère continue de financer des dépenses qui auraient dû figurer dans les crédits de la mission – il s’agit de travaux de sécurisation de certains postes et de la rénovation lourde des postes –, à hauteur d’une vingtaine de millions d’euros par an. Il importera d’organiser la sortie progressive de ce système d’ici à l’année 2017.

Prosaïquement, le ministère n’en sort gagnant qu’à condition de réaliser au moins 50 millions d’euros de cessions par an, ce qui s’apparente à un pari sur le potentiel d’optimisation restant à réaliser sur le parc immobilier à l’étranger.

Je serai bref sur le nouveau programme intitulé « Conférence Paris Climat 2015 ». Je vous présenterai tout à l’heure un amendement adopté par la commission des finances, ce qui me permettra d’exposer le fond de ma pensée. Disons simplement que ce programme a pour objet de porter les crédits consacrés à la préparation et à l’organisation de la 21e Conférence des parties, la COP 21, à la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, qui se tiendra du 30 novembre 2015 au 11 décembre 2015 à Paris. Sa création suit la logique qui avait présidé en 2011 à l’établissement d’un programme isolant les crédits dévolus à l’organisation du G8 et du G20 en France.

Le montant des crédits demandés, qui s’élève à 179 millions d’euros en autorisations d’engagement et à 43, 4 millions d’euros en crédits de paiement, est loin d’être négligeable, les dépenses devant, pour l’essentiel, être effectuées au cours de l’année 2016.

Pour mémoire, les crédits budgétés à l’occasion de l’accueil du G8 et du G20 avaient entraîné une dépense de l’État de l’ordre de 70 millions d’euros.

L’échelle de la COP 21 est donc sensiblement supérieure. Il est vrai qu’il s’agira d’un événement au rayonnement mondial, réunissant des délégations venues du monde entier. Selon les documents qui nous ont été transmis, plus de 40 000 participants au total sont attendus pendant ces deux semaines.

Avant de laisser notre collègue Richard Yung, qui est également rapporteur spécial de la mission « Action extérieure de l’État », en présenter les deux autres programmes, j’indique que la commission des finances a décidé de recommander au Sénat d’adopter les crédits de cette mission. Comme je l’ai signalé, nous formulerons néanmoins quelques propositions, sous forme d’amendements, afin d’apporter des améliorations. §

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je centrerai mon propos sur les crédits du programme 185, « Diplomatie culturelle et d’influence », et sur ceux du programme 151, « Français à l’étranger et affaires consulaires ».

Le périmètre du programme « Diplomatie culturelle et d’influence » s’est enrichi de l’arrivée d’un nouvel opérateur, le groupement d’intérêt économique Atout France. C’est l’agence de développement touristique de la France. Elle est née en 2009 du rapprochement de la Maison de la France et de l’agence d’ingénierie touristique ODIT France. L’intégration dans la mission de sa subvention de 30, 4 millions d'euros symbolise la compétence du ministère des affaires étrangères en matière touristique. Le ministère prospère, et nous nous en réjouissons !

En revanche, on peut relever que les crédits du commerce extérieur, notamment ceux d’UBIFRANCE et ceux de l’Agence française pour les investissements internationaux, l’AFII, deux entités appelées à fusionner, figurent pour l’heure au sein de la mission « Économie ». Le système se révèle donc un peu boiteux : c’est le ministère des affaires étrangères qui pilote l’action pour les entreprises à l’extérieur, mais les crédits restent à Bercy !

Cette subvention de 30, 4 millions d’euros explique l’augmentation « optique » – ne vous réjouissez pas trop vite, mes chers collègues ! – de 2, 8 % des crédits du programme « Diplomatie culturelle et d’influence », qui devraient atteindre 745, 5 millions d’euros. En réalité, les crédits diminuent même de 0, 6 % par rapport à l’année dernière. Malheureusement, la diplomatie culturelle reste toujours aussi mal traitée. Je note d’ailleurs que le programme 185 aura perdu 264 équivalents temps plein travaillé depuis 2011 ; c’est beaucoup. Toute l’action culturelle à l’étranger, en particulier dans les centres culturels ou les instituts français, en souffre fortement. On parle toujours de soft power, mais la réalité est celle que je viens de décrire.

Les choix budgétaires du Gouvernement sont d’ailleurs assez clairs sur ce programme. Les crédits d’intervention dits « d’influence », comme les bourses de mobilité d’étudiants étrangers en France, restent au niveau de l’année dernière. Les opérateurs subissent uniformément un coup de rabot de 2 % sur le montant nominal de leur subvention. Toutefois, comme vient de le souligner Éric Doligé, il y a déjà eu une mise en réserve des crédits, à moins que l’on n’appelle cela un « gel », de 7 % à 8 %, ce qui porte à 10 % le montant total de cette épargne. Il me semble tout à fait curieux que le Parlement discute de projets de loi de finances en sachant déjà que les crédits en seront modifiés, plus souvent pour être coupés que pour être augmentés… Cela laisse un goût d’inachevé !

Je regrette en particulier que l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, chargée de chapeauter les plus de 450 établissements de notre réseau scolaire dans le monde ne soit pas épargnée par la diminution des crédits, alors que la mission d’enseignement dont elle est chargée aurait pu la protéger… M. Doligé et moi-même présenterons au nom de la commission un amendement à cet égard.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

L’effort prévu concerne également l’Institut français, qui promeut la culture française et fournit une sorte de catalogue de propositions à nos conseillers culturels partout dans le monde, ainsi que l’agence des échanges éducatifs et scientifiques, en plus de l’agence Atout France, comme je l’ai indiqué.

Nous ne disposons d’aucune information sur la manière dont les opérateurs géreront la diminution de leur subvention. Feront-ils des économies budgétaires ou décideront-ils d’une hausse de leurs recettes propres ? Des arbitrages ont-ils déjà été rendus, monsieur le secrétaire d’État ?

Les crédits du programme 151, « Français à l’étranger et affaires consulaires », diminueront, modestement, de 0, 6 % à périmètre constant. Plusieurs facteurs expliquent cette légère baisse.

Certains sont conjoncturels. Je pense en particulier à l’absence d’élections concernant les Français de l’étranger en 2015, à moins évidemment qu’il ne faille revoter pour les élections sénatoriales… §

Nouveaux sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Mais ce cas de figure, à supposer qu’il se présente, serait exceptionnel ; il n’est pas nécessaire de l’intégrer dans le projet de loi de finances.

D’autres facteurs sont d’ordre structurel.

Les crédits de personnel connaîtront une légère diminution du fait de la rationalisation du réseau consulaire. Toutefois, le projet de loi de finances prévoit pour la troisième année consécutive la création de vingt-cinq emplois affectés à l’instruction des demandes de visas ; au total, soixante-quinze équivalents temps plein supplémentaires auront été alloués aux services compétents. Nous nous en réjouissons, car la rapidité de délivrance des visas est une dimension importante de notre politique d’attractivité.

Monsieur le secrétaire d’État, nous comprenons bien les raisons pour lesquelles le réseau consulaire connaît des évolutions, et nous y sommes attentifs. Mais nous aimerions être informés des décisions, voire associés à la réflexion en amont. Aujourd’hui, en effet, les fermetures tombent tout d’un coup, comme du haut de l’Olympe, sans que nous, sénateurs représentant les Français de l’étranger, soyons de quelque manière prévenus. La surprise est toujours un peu désagréable, d’autant que nous devons ensuite expliquer les décisions. Nous ne demandons pas à cogérer le ministère, mais nous aimerions être avertis. Une réunion d’information sur les projets du Gouvernement pour les deux ou trois prochaines années, sachant qu’ils peuvent évidemment évoluer, pourrait, me semble-t-il, être organisée.

Parmi les facteurs d’économies figure également la réforme, intervenue au mois de juillet 2013, de la représentation des Français établis hors de France, qui s’est traduite par une économie de plus de 20 %, les crédits passant de 3, 4 millions d’euros à 2, 7 millions d’euros, soit une économie de 700 000 euros. Pour mémoire, cette réforme a consisté à réduire fortement le nombre des membres de l’Assemblée des Français de l’étranger, ramené de 190 à 90, à créer 160 conseils consulaires, au sein desquels siègent 443 conseillers consulaires élus, et à réviser le mode d’indemnisation des élus.

En revanche, les crédits consacrés aux bourses scolaires augmentent de 5, 6 %, passant de 118 millions d’euros à 125 millions d’euros. Il s’agit d’assurer le respect d’un engagement pris par le Président de la République en 2012 : le rattrapage en trois ans, sur le budget des bourses attribuées selon des critères sociaux, de la suppression de la prise en charge automatique des droits d’inscription de tous les lycéens sans considération des revenus des familles, dont le coût s’envolait de manière inconsidérée et incontrôlable.

Je me félicite que l’engagement soit tenu, à un détail près. Du fait de l’augmentation du taux de mise en réserve des crédits, 1, 2 million d’euros manqueront à l’appel. Il conviendrait sans doute de dégeler cette somme en gestion, afin de respecter l’engagement présidentiel.

Je présenterai tout à l’heure au nom de la commission des finances un amendement sur un sujet qui revient chaque année et qui nous occupe beaucoup : les ambassadeurs thématiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

M. Richard Yung, rapporteur spécial. Voilà deux ans, j’avais procédé à un contrôle en la matière, mais sans pouvoir présenter mon rapport en séance publique – quel dommage pour la République !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

J’ai également signé l’amendement qu’Éric Doligé présentera au nom de la commission des finances sur la mesure au sujet de laquelle le Gouvernement avait demandé une seconde délibération à l’Assemblée nationale.

En définitive, mes chers collègues, je suivrai avec plaisir et conviction les recommandations de la commission des finances, et je voterai les crédits de la mission !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur les travées du RDSE . – M. Aymeri de Montesquiou applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Cambon

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je présenterai les observations de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, saisie pour avis, sur le programme 105, « Action de la France en Europe et dans le monde », pour en reconnaître les vertus, mais également pour en souligner les défauts et pointer quelques incertitudes.

Ce programme, qui représente près du tiers des crédits dont dispose le Quai d’Orsay, voit sa dotation de 1, 8 milliard d’euros réduite de 2, 5 % par rapport à 2014, dans un contexte budgétaire particulièrement contraint.

Cette baisse tient principalement à la diminution attendue des contributions obligatoires dues par notre pays aux organisations internationales et aux opérations de maintien de la paix. De prime abord, on pourrait s’en réjouir : moins de dépenses contraintes, c’est une marge d’action nouvelle pour nos services. Néanmoins, les hypothèses sur lesquelles reposent les prévisions nous laissent sceptiques.

En particulier, l’hypothèse retenue par le Gouvernement en ce qui concerne la parité de l’euro par rapport au dollar, 1, 36 dollar pour 1 euro, devra selon toute vraisemblance être révisée. L’évolution récente des taux de change montre que le taux de change devrait être moins favorable au budget des affaires étrangères.

En tenant compte du fait que les trois quarts des contributions internationales sont payés en dollars ou en devises liées au dollar, une parité égale à son niveau du mois dernier, soit 1, 25 dollar pour 1 euro, porterait les besoins de financement aux environs de 875 millions d’euros, quand 795 millions d’euros seulement sont inscrits dans le projet de loi de finances. Monsieur le secrétaire d’État, nous aimerions obtenir quelques explications sur ce sujet important.

M. Robert Hue acquiesce.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Cambon

Au demeurant, à l’Assemblée nationale, en seconde délibération, le Gouvernement a abaissé de 10 millions d’euros le coût prévisionnel de ces contributions obligatoires, officiellement « grâce à une meilleure priorisation des dépenses ». Cette réduction, qui visait à assurer le financement des mesures votées par nos collègues députés, nous laisse aussi dubitatifs que nos collègues de la commission des finances.

Par ailleurs, le nouveau barème onusien des contributions obligatoires dépendra en partie de négociations qui restent à faire aboutir. Anticiper ce résultat, c’est tenir pour acquis quelque chose qui, par nature, comporte un aléa.

Enfin, en matière d’opérations de maintien de la paix, le Gouvernement prévoit des reports de charges sur l’exercice 2016. Certes, cette opération allège le fardeau pour 2015, mais ce n’est, par définition, qu’un différé de paiement. Du reste, il est bien difficile de savoir quelles nouvelles opérations devront être financées en urgence l’année prochaine.

Après avoir exposé les incertitudes, je tiens à mettre en valeur les quelques vertus de ce budget.

Le projet de loi de finances préserve les moyens de notre réseau diplomatique. Somme toute, c’est l’essentiel.

Ainsi, la sécurisation des postes est maintenue comme priorité. Nous savons gré au Gouvernement d’avoir tenu compte, en faisant ce choix primordial, du contexte sécuritaire qui se dégrade en différents points du monde, aggravant les menaces qui pèsent sur le personnel de nombreux postes diplomatiques.

Par ailleurs, les moyens de fonctionnement de nos ambassades sont en légère augmentation, de 1, 5 %. Cela devrait favoriser la mue en cours de notre outil diplomatique.

Cette mue comporte le redéploiement géographique de notre outil, qui nous paraît indispensable, notamment vers les pays émergents. La marche dans cette direction se poursuit, mais elle est lente. Au 1er janvier dernier, seulement 16 % des effectifs étaient affectés en Asie, contre près de 40 % en Afrique, alors que l’Asie est le continent où les enjeux stratégiques et économiques sont désormais majeurs.

Elle vise à mobiliser nos moyens sur le terrain de la diplomatie économique, au service du soutien aux exportations françaises et de la promotion de la destination « France » auprès des investisseurs comme des voyageurs étrangers.

Cette mobilisation n’est, pour l’essentiel, pas quantifiée au plan budgétaire, ce qui peut faire obstacle à la capacité du Parlement d’apprécier, aujourd’hui, l’adéquation des moyens prévus aux objectifs fixés et, demain, l’efficience de l’action. Nous invitons donc le Gouvernement à exploiter les ressources multiples de la comptabilité analytique pour accomplir un plus grand effort d’information envers le Parlement. Du reste, le meilleur indicateur du succès dans ce domaine sera l’évolution du solde de notre balance commerciale !

Nous soutenons bien entendu cette politique, mais elle reste à consolider. Or il existe un moyen d’y contribuer à peu de frais. Monsieur le secrétaire d’État, ma corapporteur pour avis, Mme Aïchi, et moi-même nous en sommes entretenus avec vous lorsque vous nous avez fait la gentillesse de nous accueillir. Ce moyen, c’est le renforcement de l’implication de nos régions.

En effet, les régions françaises sont des acteurs de premier plan pour le soutien aux PME exportatrices, qui sont les entreprises ayant le plus besoin de soutien, dans la mesure où les grands groupes savent prendre par eux-mêmes les contacts nécessaires à l’étranger. Les régions doivent être plus systématiquement associées aux initiatives de l’État, notamment pour la préparation et la réalisation des déplacements officiels. C’est l’une des clés du redressement de notre commerce extérieur !

Je terminerai en formulant deux critiques, je le crains, aussi récurrentes que les défauts sur lesquelles elles portent.

La première vise la gestion de notre patrimoine immobilier diplomatique. Cette gestion est dynamique, mais elle repose sur un modèle qui fait dépendre l’entretien des bâtiments des recettes de cessions d’immeubles, ce qui n’est ni vertueux en termes économiques ni tenable à plus ou moins long terme. Pour ainsi dire, la France vend les « bijoux de famille », non sans alarmer les esprits. Je pense en particulier au sort réservé au palais Clam Gallas, …

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Cambon

… siège de l’Institut français de Vienne, que notre collègue Robert del Picchia connaît bien.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Cambon

Cependant, les crédits n’en sont pas moins insuffisants. Nous appelons donc à leur « rebudgétisation », assortie de dotations annuelles à la hauteur des besoins. Il faut savoir entretenir le patrimoine de nos ambassades. Cela contribue au rayonnement de notre pays !

Ma seconde critique porte sur la diminution des crédits alloués à la coopération de sécurité et de défense, qui baisseront de 3, 6 % l’année prochaine, après avoir déjà été réduits de 4, 3 % cette année. Cette orientation ne nous paraît pas cohérente avec les ambitions affichées. Elle n’est en phase ni avec les conclusions du sommet de l’Élysée du mois de décembre 2013 ni avec l’implication de nos forces armées en opérations extérieures dans la bande sahélo-saharienne. Il y a là une forme de contradiction de notre politique étrangère, que M. le secrétaire d’État pourra peut-être nous expliquer.

Au total, malgré les réserves que j’ai exposées, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a émis un avis favorable sur l’adoption des crédits du programme 105, et de ceux de l’ensemble de la mission ! §

Debut de section - PermalienPhoto de Leila Aïchi

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, comme vient de le souligner Christian Cambon, la dotation pour 2015 du programme 105, « Action de la France en Europe et dans le monde », repose sur des hypothèses relatives aux contributions internationales obligatoires, qui sont autant d’incertitudes.

Des révisions seront sans doute nécessaires, notamment pour le taux de change entre l’euro et le dollar.

D’ailleurs, un tel problème affecte les dépenses du ministère des affaires étrangères au-delà des seules contributions aux organisations internationales et aux opérations de maintien de la paix, puisque sont payées en devise, en particulier en dollars, non seulement les trois quarts de ces contributions, mais également une large part des dépenses de fonctionnement du réseau et des loyers à l’étranger.

On risque donc d’assister en cours d’exercice à de nouveaux arbitrages entre postes budgétaires. C’est un point d’inquiétude, alors que ce projet de budgetconserve a priori au réseau diplomatique, que ce soit pour le fonctionnement courant ou pour les importantes opérations de sécurisation, un caractère prioritaire ayant recueilli l’assentiment de la commission des affaires étrangères.

Cependant, l’orientation à la baisse des crédits prévue l’année prochaine pour le programme 105, « Action de la France en Europe et dans le monde », comme pour la mission « Action extérieure de l’État » dans son ensemble, n’est pas uniquement liée à la réduction supposée des dépenses de contributions internationales. Elle traduit aussi l’effort du ministère des affaires étrangères pour participer au redressement de nos comptes publics en poursuivant la baisse de ses effectifs.

Le plafond d’emplois retenu pour 2015 pour le programme 105, c’est-à-dire pour l’administration centrale du Quai d’Orsay et le réseau diplomatique, représente en effet une diminution de 109 équivalents temps plein travaillé. Les dépenses de personnel associées à ces effectifs enregistreront une baisse de 0, 3 % par rapport à 2014. Ainsi, se poursuit une tendance engagée depuis près de dix ans. Je crois qu’il faut saluer cet effort. Mais il faut aussi faire attention ; nous sommes arrivés « à l’os », ou peu s’en faut.

Pour le reste, je partage l’ensemble des remarques, y compris critiques, que mon corapporteur a développées.

D’abord, les moyens d’entretien immobilier du ministère des affaires étrangères doivent être « rapatriés » dans le budget général, où ils pourront ainsi faire l’objet d’une programmation plus fiable que celle qu’autorise aujourd’hui le système du compte d’affectation spécial. Ces crédits doivent être abondés au niveau des besoins d’un patrimoine parfois très dégradé.

Ensuite, notre coopération de sécurité et de défense doit cesser de servir de variable d’ajustement budgétaire pour être à la hauteur des ambitions que la France place, avec raison, dans cette action. Il faut être conséquent, monsieur le secrétaire d'État !

Enfin, le redéploiement géographique du réseau diplomatique, pour adapter cet outil aux évolutions stratégiques et économiques internationales, doit être accéléré, en particulier en direction des pays émergents. En effet, cette évolution reste lente – trop lente ! –, notamment pour renforcer la présence française en Asie. Du reste, évitons une vision trop étroite de l’émergence : l’avenir, c’est aussi l’Afrique ! Je plaide pour que l’on institue une représentation permanente de plein exercice auprès de l’Union africaine.

Ce redéploiement est essentiel pour mener à bien la diplomatie économique, devenue une priorité du Quai d’Orsay, désormais dénommé « ministère des affaires étrangères et du développement international ». La maquette budgétaire pour 2015 n’a pas entièrement suivi la nouvelle organisation gouvernementale. Mais, en tout état de cause, c’est au plus près des réalités de terrain que peut se mener utilement la bataille pour le développement des entreprises françaises à l’international et la promotion de l’attractivité de notre pays auprès des investisseurs et des touristes étrangers.

Sont allées dans ce sens la création des conseils économiques des ambassades et l’insertion systématique d’un volet économique dans le plan d’action des postes. Je rejoins mon collègue pour estimer que nos régions doivent être mieux associées à cette action. Je sais que vous êtes très sensible à ce sujet, monsieur le secrétaire d'État. La nomination d’ambassadeurs pour les régions a constitué un premier pas, mais il est encore modeste.

Par ailleurs, une réflexion sur le recrutement, la carrière et la formation des diplomates semblerait fort opportune, dans la mesure où la plupart d’entre eux ne sont pas naturellement familiers du monde économique. Il conviendrait également de réviser l’organisation des services économiques à l’étranger en suivant les récentes préconisations de la Cour des comptes. En outre, la promotion du tourisme en France doit être accentuée, compte tenu des enjeux considérables qui s’attachent pour l’avenir à ce secteur.

Enfin, à mon sens, il faudrait améliorer en quantité et en qualité la présence politique de l’État que garantissent les visites officielles, en particulier ministérielles, dans les pays où les entreprises françaises sont susceptibles de se développer. Ces visites sont souvent essentielles, car elles constituent l’occasion de mettre en valeur les atouts de nos PME. Les multiplier, c’est donc ajouter à leurs chances. Encore doivent-elles être calibrées, notamment en termes de durée sur place, pour ne pas aboutir à un effet d’« attente déçue », qui serait contre-productif.

J’espère que vous saurez vous faire l’écho de cette recommandation auprès de vos collègues, monsieur le secrétaire d'État. Nous voterons ce projet de budget. §

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. Jacques Legendre, rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Legendre

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, mon propos portera sur le programme 185, « Diplomatie culturelle et d'influence ». Mon collègue Gaëtan Gorce traitera de la politique d’attractivité et du réseau français d’enseignement à l’étranger. Pour ma part, je commenterai les crédits destinés à l’action culturelle extérieure, à la promotion de la langue française et au tourisme.

Environ 88, 5 millions d’euros sont consacrés en 2015 à l’action culturelle extérieure – hormis les crédits de promotion de la langue française, que je mets à part –, soit une enveloppe en diminution. Sur cette enveloppe, 74 millions d’euros sont des crédits de soutien, qui comprennent notamment la dotation de fonctionnement aux instituts français, en hausse de 2 millions d’euros, et la dotation de fonctionnement à l’Institut français, opérateur de l’action culturelle extérieure, en baisse de 9, 5 millions d’euros par rapport au montant inscrit l’année dernière.

Cependant, en 2014, cette dotation a été diminuée en gestion du fait de l’abandon du projet de rattachement du réseau culturel. En pratique, la subvention ne baisse que de 0, 6 million d’euros, soit 2, 1 %, ce qui est conforme la norme de diminution fixée par Bercy pour tous les opérateurs de l’État. Le reste, soit environ 14, 5 millions d’euros, correspond à des crédits d’intervention destinés au financement d’une grande variété d’actions et de projets – expositions, salons, festivals, soutien à des associations locales, études… – principalement mis en œuvre par les instituts français.

On le voit, il s’agit de moyens limités, et les instituts français, tout comme l’Institut français, doivent s’efforcer de trouver des partenariats et des cofinancements pour compléter les crédits d’intervention, qui jouent avant tout un rôle de levier.

En ce qui concerne l’Institut français et le réseau culturel public, je voudrais revenir sur un projet qui me tenait à cœur beaucoup et qui n’a malheureusement pas abouti : le rattachement du réseau des instituts français à l’opérateur Institut français.

Le projet avait été suggéré par la commission de la culture et la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat. Tel que nous avions conçu le projet, l’Institut français avait vocation à prendre la tête du réseau des instituts français, et se rapprocher ainsi du modèle de British Council ou du Goethe Institut.

Malheureusement, une expérimentation menée entre 2012 et 2013 avec une douzaine de postes a été suspendue l’année dernière. Il a été finalement décidé d’abandonner ce projet, plusieurs rapports ayant mis en avant son coût et des difficultés pratiques tenant notamment au fait que les instituts français n’interviennent pas seulement en matière de coopération culturelle, mais travaillent également pour le compte d’autres opérateurs.

Je peux l’entendre, mais je regrette que cette expérimentation ait été réalisée sur une période aussi courte, de dix-huit mois, alors qu’elle était initialement prévue pour trois ans. Au surplus, pendant cette période, il y a eu une autre réforme : la fusion des services de coopération et d’action culturelle, les SCAC. Cela n’a pas simplifié les choses. J’ai le sentiment que cela n’a pas été bien compris par une partie de nos diplomates.

Résultat, l’Institut français, qui était en quelque sorte « programmé » pour absorber le réseau et qui s’était doté des outils administratifs et comptables pour y faire face, se retrouve à la fois avec une structure inutilement lourde à gérer et en manque de missions, même si le ministère lui a promis un nouveau positionnement.

L’élaboration d’un nouveau contrat d’objectifs et de moyens, que nous attendons, doit être l’occasion de redéfinir ces missions, ce qui devrait conduire, nous le souhaitons, à conforter son rôle de stratège.

D’un montant d’environ 22 millions d’euros, les crédits destinés à la promotion de la langue française sont, je tiens à le souligner, en augmentation de 5 %. Sur cette enveloppe, 7 millions d’euros sont destinés au réseau des Alliances françaises, dont 1, 35 million d’euros pour la fondation Alliance française et 5, 67 millions d’euros pour les alliances françaises locales.

Le reste des crédits consacrés à cette politique finance divers programmes et activités portés par les autres acteurs du réseau culturel et divers partenaires du ministère. Je le rappelle, avec 220 millions de locuteurs francophones – nous sommes au lendemain d’un sommet de la francophonie –, le français est aujourd’hui la neuvième langue parlée dans le monde. Mais il reste souvent la deuxième langue de travail dans les grandes organisations internationales, comme l’ONU. La question de sa place dans le monde et de son éventuel déclin est un sujet sensible, très débattu, qui fait l’objet d’appréciations divergentes. Ce qui est certain, c’est qu’il s’agit d’un vecteur d’influence à ne pas négliger.

Pour finir, je dirai un mot du tourisme, dont la promotion fait désormais partie du programme. Les crédits prévus en la matière sont exclusivement destinés au versement de la subvention de fonctionnement d’Atout France. Comme un certain nombre d’opérateurs, Atout France voit sa subvention baisser depuis plusieurs années, ce qui pose problème. Compte tenu des restructurations intervenues depuis dix ans, l’organisme ne dispose plus vraiment de marges d’optimisation. Il est contraint de trouver toujours plus de financements extérieurs alors même que les défis à relever sont nombreux – l’attractivité des territoires est très inégale, notre parc hôtelier se dégrade… – et qu’il nous faut supporter la concurrence de plus en plus vive d’autres destinations touristiques.

Le développement touristique fait désormais partie des priorités de la diplomatie d’influence, dont le champ d’action ne cesse de s’étendre. Donnons à notre volonté politique la capacité financière de se réaliser.

Sous ces réserves, je recommande l’adoption des crédits.

Applaudissements sur les travées de l'UMP, de l'UDI-UC et du RDSE, ainsi que sur quelques travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Gaëtan Gorce

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la France est-elle encore fière de sa langue ? C'est la question que posait Jacques Legendre. Est-elle prête à se donner les moyens de défendre cette belle langue et de s'en servir pour soutenir le projet politique qu’elle est censée incarner ?

Je ne suis pas sûr que ce budget permette de répondre à une aussi importante question. Mais il va tout de même nous y aider un peu, sachant qu’il était difficile d’aller plus loin dans le contexte actuel.

Compte tenu du partage des responsabilités que Jacques Legendre et moi-même avons décidé, il me revient d’évoquer deux composantes de ce programme 185, « Diplomatie culturelle et d'influence » : les crédits consacrés à l'enseignement supérieur et à la recherche, d’une part, et ceux qui sont consacrés à l’enseignement du français à l’étranger, d’autre part.

Sur le premier volet, les crédits progressent de 5 % pour s'établir à 106 millions d’euros. Ils concernent de nombreuses activités, en particulier l’accueil d’étudiants étrangers en France. De ce point de vue, on notera que la France accueille presque 300 000 étudiants étrangers. Ce nombre, en progression régulière, a augmenté de près de 30 % en 10 ans, les principaux pays d’origine restant le Maroc et la Chine. En tant que pays d’accueil, la France repasse désormais au troisième rang mondial, devant l’Australie, qui, elle, retrouve donc son quatrième rang.

Les étudiants étrangers représenteraient 12 % de nos effectifs globaux, ce qui n’est pas négligeable. Mais ils représentent surtout 40 % de nos doctorants, ce qui montre l’importance de leur implication dans les études de fin de cycle universitaire.

Pour soutenir l’accueil de ces étudiants, nous disposons notamment de deux types d’outils : Campus France, la plate-forme chargée d’organiser leur accueil, dont les crédits accusent malheureusement une baisse de 2 %, et nos bourses universitaires, qui bénéficient à environ 15 000 étudiants et progressent d’environ 5 %, même si nous sommes loin des montants qui existaient voilà une dizaine d’années.

Les crédits destinés à la recherche sont globalement stables. Avec un million d’euros supplémentaires, ils connaissent même une légère progression, de 3 %. On soulignera que les dotations versées aux vingt-sept instituts de recherche à l’étranger n’évoluent pas. Nous pouvons nous féliciter qu’ils ne soient pas touchés par les mesures de réduction des crédits.

L’enseignement du français à l’étranger mobilise plus de 327 000 élèves – là encore, le chiffre est en progression régulière – et 494 établissements dans plus de 135 pays. La France intervient pour l’essentiel par le financement de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, l’AEFE, qui, avec des crédits en baisse de 2 %, se voit malheureusement appliquer le rabot destiné aux crédits concernant l’ensemble des activités administratives. Nous le regrettons naturellement.

En revanche, les crédits dédiés aux bourses affichent, eux, une progression significative. Mais ils relèvent d’un autre programme : le programme n°151, « Français à l'étranger et affaires consulaires ».

On peut évidemment regretter que les moyens conférés à l’AEFE soient en léger retrait – on sait les difficultés que rencontrent tous les établissements concernés –, même si, en jouant sur les conventionnements et les partenariats, un équilibre peut être recherché en renforçant la présence sans pour autant augmenter les moyens.

La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a émis un avis favorable sur les crédits du programme 185 et vous invite à les adopter. §

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. Jean-Pierre Grand, rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Grand

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la communauté des Français résidant à l’étranger, qui est estimée à plus de 2 millions de personnes, ne cesse de croître, et les Français de passage à l’étranger ont représenté plus de 21 millions de personnes en 2013. Le programme 151 a pour objet de financer les services essentiels délivrés par les postes consulaires et de participer, par la délivrance de visas, à la politique d’entrée en France des étrangers.

Les crédits de ce programme, qui s’élèvent à plus de 373 millions d’euros, enregistrent pour 2015 une légère baisse de 2, 25 millions d’euros. Cela résulte à la fois d’une diminution des crédits de l’action n° 1, relative aux services consulaires, et d’une augmentation des crédits de l’action n° 2, destinés au versement des bourses scolaires, ainsi que des crédits de personnel de l’action n° 3, consacrés à l’activité des visas.

La diminution des crédits de l’action n° 1 était en partie attendue. Elle s’explique par la disparition en 2015 des enveloppes qui étaient consacrées en 2014 à l’organisation des élections, soit environ 6 millions d’euros, et par la baisse d’un million d’euros de la dotation à l’Assemblée des Français de l’étranger, consécutive à la réforme adoptée l’année dernière. S’ajoute à cela une diminution d’environ 3 millions d’euros des crédits du titre 2, ainsi que diverses mesures d’économies, notamment en matière d’aide sociale. Parmi ces mesures, il faut mentionner la suppression, que nous n’approuvons pas, de la dotation de soutien à l’emploi et à la formation professionnelle. Celle-ci, d’un montant pourtant modeste, servait à financer des actions très utiles localement. Il est dommage de priver nos concitoyens expatriés d’un tel levier.

Constitué de 228 postes, notre réseau consulaire, désormais le troisième mondial en termes d’implantations, continue de s’adapter. Le contexte budgétaire ne permettant plus de financer son expansion et requérant au contraire des économies, il est nécessaire, et nous le comprenons, d’alléger notre présence dans les pays où c’est possible, principalement en Europe et en Amérique du Nord, afin d’être en mesure de la renforcer dans les pays émergents, en Asie et en Afrique, où les besoins sont importants.

De nombreuses mesures d’adaptation ont déjà été adoptées et mises en œuvre. Elles se poursuivront en 2015. Sont ainsi prévues la fermeture de quelques sections consulaires d’ambassades et la transformation de plusieurs consulats généraux en sections, consulats d’influence ou agences consulaires.

À ce sujet, et comme suite aux échanges que nous avons eus en commission, je souhaite faire passer un message : les fermetures ou transformations de postes devraient être mieux annoncées et faire l’objet d’une plus large concertation en amont, notamment avec les élus.

L’activité des postes consulaires est, quant à elle, toujours aussi soutenue.

Il s’agit tout d’abord des services administratifs fournis aux Français de l’étranger. Ainsi, 240 000 passeports ont été délivrés en 2013, soit une augmentation de 8 % par rapport à 2012 et de 70 % sur les cinq dernières années. Le nombre de cartes d’identité délivrées, autour de 90 000, reste en revanche stable, les demandes étant moins nombreuses en raison notamment d’un délai de délivrance nettement plus long : 45 jours contre 11, 8 jours en moyenne pour les passeports. Cette situation est d’ailleurs critiquée par l’une des associations d’expatriés que nous avons entendues. Comment cela s’explique-t-il ? Est-il envisagé d’y remédier?

Les consulats ont également établi et transcrit en 2013 près de 120 000 actes d’état civil et près de 4 000 actes notariés. Ces chiffres sont, à mon sens, le reflet de la vitalité de l’expatriation française.

L’activité est également soutenue s’agissant de la délivrance de visas, le nombre des demandes ne cessant d’augmenter. Ainsi, 2, 5 millions de visas ont été octroyés en 2013, soit une augmentation de 8, 7 % par rapport à l’année précédente. Cette activité, soulignons-le, rapporte beaucoup à l’État, 137 millions d’euros en 2013, sans compter les recettes qu’elle permet indirectement par le tourisme. Une telle manne justifie que nous mettions tout en œuvre pour satisfaire la demande croissante de visas. À cet égard, voilà un an encore, la situation en Chine était problématique, de nombreux ressortissants chinois n’ayant pu se rendre en France faute d’un visa. Depuis, cela semble s’être amélioré, notamment grâce au dispositif tendant à la délivrance des visas en 48 heures. Pourriez-vous nous citer quelques chiffres illustrant cette amélioration, monsieur le secrétaire d’État ?

Le dispositif « visa en 48 heures », qui a vocation à être étendu à d’autres pays et d’autres zones, est un exemple des démarches innovantes mises en œuvre par le réseau consulaire et la direction des Français à l’étranger pour gagner en efficacité. Je pourrais également évoquer l’utilisation des stations mobiles ITINERA, qui facilite le recueil des données nécessaires à l’établissement des titres d’identité, ou encore les multiples projets de dématérialisation des procédures, le grand projet attendu étant, en la matière, la gestion dématérialisée des inscriptions au registre des Français établis hors de France. Celle-ci n’a malheureusement pas pu aboutir cette année, mais nous suivons attentivement la progression du dossier.

Pour finir, je voudrais mettre l’accent sur la nécessité de mieux former les agents chargés de l’accueil dans les consulats, afin qu’ils reçoivent nos compatriotes avec toujours plus de professionnalisme et de diligence. N’oublions pas qu’ils sont les uniques représentants de l’administration française pour nos concitoyens. Cette demande a été exprimée à plusieurs reprises au cours de nos débats en commission, notamment par nos collègues représentant les Français à l’étranger, mais aussi par des associations d’expatriés que nous avons auditionnées. L’examen budgétaire est pour nous l’occasion de relayer cette préoccupation.

La commission des affaires étrangères a émis un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Action extérieure de l’État », dont fait partie le programme 151.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à Mme Marie-Françoise Perol-Dumont, rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Françoise Perol-Dumont

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, mon propos portera également sur le programme 151, « Français à l’étranger et affaires consulaires ». Je m’attacherai plus particulièrement à commenter les crédits relatifs à l’aide sociale et à l’aide à la scolarité, avant de faire un point sur les différents scrutins organisés par le réseau consulaire en 2014.

Nous constatons que les crédits d’aide sociale diminuent de 1, 5 million d’euros, cette baisse s’expliquant notamment par la suppression de l’enveloppe consacrée à l’emploi et à la formation professionnelle, dotée l’année dernière de 800 000 euros. Nous ne pouvons que regretter, et mon collègue vient de le faire, la disparition de cette dotation, qui, en dépit d’un montant modeste, permettait d’aider certains résidents à se former et à trouver un emploi. Je pense notamment aux personnes dépourvues d’emploi, venues en couple dans le cadre d’un projet d’expatriation, qui se retrouvent seules à la suite d’un aléa de la vie et doivent alors chercher un travail.

L’enveloppe consacrée au versement de divers soutiens à des publics fragiles, notamment aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à l’enfance en détresse, qui représente la plus grande part des crédits d’aide sociale, soit 15, 7 millions d’euros, enregistre également une légère baisse de 526 000 euros. Néanmoins, selon les informations dont nous disposons, et que vous pourrez sans doute nous confirmer, monsieur le secrétaire d’État, cette évolution correspond plus à un recul des besoins qu’à une mesure d’économie. Nous avons également relevé une légère diminution des crédits destinés aux rapatriements sanitaires et hospitalisations d’urgence. Nous espérons que cela n’affectera pas la capacité de nos postes à répondre aux situations les plus graves.

Pour le reste, nous constatons que sont reconduites les subventions destinées aux organismes locaux d’entraide et de solidarité, à la Caisse des Français de l’étranger et aux organismes d’assistance.

Je voudrais souligner avec une satisfaction particulière l’augmentation sensible, quoique portant sur un montant peu élevé, de l’enveloppe consacrée à l’adoption internationale. Ces crédits sont destinés aux organismes agréés pour l’adoption. Ils visent à favoriser une meilleure structuration de ce secteur, qui en a bien besoin, dans lequel opèrent en ordre dispersé de nombreux acteurs. L’enjeu est important, car le nombre d’adoptions internationales est en forte baisse : il est passé de 3 000 par an voilà quelques années à 1 569 en 2012 et à 1 346 en 2013. Cette évolution tient à différents facteurs : d’abord, le développement, dont il faut se réjouir, de l’adoption nationale liée à l’émergence de classes moyennes dans les pays d’origine ; ensuite, les freins mis par certains pays, comme la Russie et la Colombie, au départ de leurs enfants à l’étranger ; enfin, la proportion croissante d’enfants proposés à l’adoption plus âgés ou présentant des pathologies lourdes. Il paraît donc utile de renforcer les moyens des organismes œuvrant dans ce domaine.

Les crédits destinés aux bourses scolaires représentent en 2015, une enveloppe de 125, 5 millions d’euros, en augmentation de 6 % par rapport à 2014, conformément, il faut le souligner, aux engagements pris par le Gouvernement.

Nous avons maintenant un peu de recul sur la mise en œuvre de la réforme des bourses, puisqu’une campagne complète a été effectuée sous le nouveau régime. Cette réforme, je le rappelle, répondait à une double exigence d’équité et de maîtrise de la dépense publique. Les résultats de la campagne 2013-2014 du cycle nord montrent que le nouveau dispositif est plus redistributif que le précédent. En effet, le nombre de bourses à taux plein a baissé, alors que le nombre de bourses de quotités intermédiaires a augmenté, ce qui traduit un plus grand lissage et une meilleure répartition de l’aide. Par ailleurs, de nouvelles familles sont entrées dans le dispositif ; on ne peut que s’en féliciter.

En outre, et c’est important, l’objectif de maîtrise budgétaire est atteint, puisqu’en 2013, pour la première fois, la dépense d’aide à la scolarité a été contenue dans les crédits inscrits en loi de finances initiale.

J’évoquerai enfin les élections organisées en 2014 par le réseau consulaire, en application de la loi du 22 juillet 2013 relative à la réforme de la représentation des Français de l’étranger : élections des nouveaux conseils consulaires, les 24 et 25 mai, en même temps que les élections européennes ; élections des conseillers de la nouvelle Assemblée des Français de l’étranger, l’AFE, les 21 et 22 juin 2014. Je souhaite formuler plusieurs observations.

L’organisation de ces différents scrutins, qui représentait à l’évidence une lourde charge pour les postes consulaires, s’est bien déroulée. Je pense tout particulièrement aux scrutins des 24 et 25 mai, qui portaient à la fois sur les élections consulaires et les élections européennes. Cela impliquait un doublement des moyens matériels, des bureaux de vote, mais également la tenue de deux listes électorales différentes. C’était un défi de taille pour les consulats ; ils l’ont parfaitement relevé grâce à une mobilisation qu’il faut saluer.

Si l’on excepte les élections des conseillers à l’AFE, la participation à ces scrutins est restée particulièrement faible ; elle a été de 16, 5 % pour les élections consulaires et de 11, 06 % pour les élections européennes. Nous ne pouvons naturellement que le regretter.

Enfin, lors des élections européennes, la possibilité offerte aux Français de l’étranger de voter à leur consulat alors qu’ils peuvent voter dans leur pays de résidence a, semble-t-il, été à l’origine de complications, les électeurs ne sachant parfois plus sur quelle liste électorale ils étaient admis à voter. A contrario, rien ne garantit qu’un double vote ne puisse se produire. Ne faudrait-il pas simplifier ce dispositif ou, à tout le moins, améliorer la transmission de l’information entre les États membres concernant les listes électorales ?

Au regard des éléments développés par mon collègue Jean-Pierre Grand et de ceux que j’ai tenté de vous apporter, la commission des affaires étrangères a émis un avis favorable sur les crédits de cette mission. §

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. Louis Duvernois, rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Duvernois

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, au sein du programme 185, « Diplomatie culturelle et d’influence », de la mission « Action extérieure de l’État », seule la politique d’attractivité universitaire et scientifique, conduite auprès des étudiants et chercheurs étrangers par le biais de Campus France et de nos programmes de bourses, est solidement stabilisée et bénéficie même d’un petit surplus de crédits résultant d’un redéploiement lié à la fin de l’expérimentation du rattachement du réseau culturel à l’Institut français.

Il me semble nécessaire de modérer, dans le cadre du prochain budget triennal, les normes de réduction de la dépense applicables à notre diplomatie culturelle et d’influence. Les opérateurs du programme 185 ont d’ores et déjà largement contribué aux efforts de redressement des comptes publics, avec une diminution des crédits culturels, hors dépenses de personnel, de plus de 32 % au cours de la période 2009-2015.

L’effondrement des crédits d’intervention culturels, de plus de 60 % sur la même période, nourrit le découragement de nos personnels culturels à l’étranger, qui n’ont plus les moyens de mettre en œuvre des opérations culturelles ambitieuses et de soutenir la créativité des artistes français et étrangers dans le monde.

Parmi les trois principaux opérateurs de notre action culturelle extérieure, l’Institut français est sans doute celui qui se trouve confronté à la situation la plus délicate.

Sa dotation, alimentée par le ministère des affaires étrangères et le ministère de la culture, d’un montant total de 31, 3 millions d’euros en 2015, se voit logiquement appliquer la norme de réduction des subventions aux opérateurs de l’État de 2 %.

Dans son rapport de 2013 sur le réseau culturel de la France à l’étranger, la Cour des comptes estimait que seulement 14 % du budget d’activité de l’Institut français en 2012 était consacré à des subventions directes au réseau des établissements culturels publics à autonomie financière, alors que l’objectif affiché était de 37, 5 %.

Toutefois, l’Institut appelle à tenir compte des crédits d’intervention qui sont versés aux partenaires extérieurs en coordination avec le réseau. De ce point de vue, il considère que 68 % de son budget d’activité, soit plus de 15 millions d’euros, ont été versés directement ou indirectement au réseau culturel.

L’expérimentation du rattachement du réseau culturel à l’Institut français s’est achevée le 31 décembre 2013. M. le ministre des affaires étrangères a jugé que ses résultats n’étaient pas probants. Néanmoins, il serait dommageable de revenir au statu quo ante. À cet égard, quels moyens le Gouvernement entend-il donner à l’Institut français pour imposer sa légitimité dans le pilotage stratégique du réseau culturel alors que son budget d’intervention se trouve chaque année amputé ?

J’évoquerai brièvement la francophonie, sujet d’actualité. Hier après-midi, lors de la clôture du sommet de l’Organisation internationale de la francophonie à Dakar, nous avons assisté à la succession de son secrétaire général dans une atmosphère qu’on peut qualifier de « très confuse ». Cela nous interpelle et, plus encore, nous inquiète.

Cela étant, le montant total de la dotation versée par l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger s’établit dans le projet de budget pour 2015 à un peu plus de 537 millions d’euros, soit une légère diminution par rapport à 2014. L’AEFE constitue un levier puissant et précieux de notre dispositif d’influence culturelle, linguistique et intellectuelle auprès des élites étrangères.

Je tiens par ailleurs à rappeler que l’agence est la seule à assumer la prise en charge à l’étranger des pensions civiles de personnels détachés de l’éducation nationale. Sur les 10 000 personnels qui assurent leur service en dehors de l’éducation nationale, 8 000 sont affectés à des établissements d’enseignement français à l’étranger, parmi lesquels 6 500 expatriés résidents dont les pensions civiles sont prises en charge par l’agence.

En revanche, les établissements homologués bénéficiant de détachés directs n’ont pas à payer les pensions civiles correspondantes. On estime à 60 millions d’euros le montant de ces pensions civiles non provisionnées. Cette situation, outre qu'elle crée de la dette, désavantage l’opérateur. Comment le Gouvernement compte-t-il y remédier ?

Campus France peut compter sur la sanctuarisation de notre politique de bourses en faveur des étudiants et des chercheurs étrangers, dont il assure en grande partie la gestion. En prenant en charge l’ensemble de la chaîne d’accueil des étudiants étrangers, Campus France a gagné la confiance des élites étrangères.

Des progrès peuvent encore être réalisés s’agissant de la délivrance de titres de séjour aux étudiants étrangers. En effet, Campus France a constaté une forme de zèle au sein de certains consulats, qui réclament aux étudiants étrangers des pièces non exigées par les circulaires et les télégrammes diplomatiques relatifs à l’octroi de titres de séjour par les postes diplomatiques à l’étranger, notamment en posant des conditions de logement ne figurant pas dans ces documents.

Campus France s’est ému que certains consuls généraux opposent un barrage quasi systématique aux demandes de titres de séjour en vue de l’apprentissage du français langue étrangère.

À cet égard, je partage les propositions émises par Campus France, qui demande, d’une part, d’exonérer de l’obligation de visa les ressortissants étrangers souhaitant intégrer un parcours d’apprentissage français langue étrangère n’excédant pas six mois et, d’autre part, de rétablir l’obligation de motivation des décisions de refus de visa étudiant prises par les autorités consulaires.

Enfin, je souhaiterais aborder très brièvement la question de l’audiovisuel extérieur de la France.

Marques d’impatience sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Duvernois

Le financement de France Médias Monde, nouvelle dénomination de l’audiovisuel extérieur, repose désormais entièrement sur la contribution à l’audiovisuel public. Les parts françaises de TV5 Monde sont détenues majoritairement par France Télévisions, dont la situation financière risque d’ailleurs de continuer à se dégrader.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Duvernois

Comment le Gouvernement compte-t-il peser sur le développement stratégique de notre audiovisuel extérieur ?

En conclusion, malgré les réserves que j’ai émises sur l’érosion très préoccupante des crédits d’intervention culturels sur la période 2009-2015, j’ai proposé à la commission de la culture, qui m’a suivi, de donner un avis favorable à l’adoption des crédits du programme 185 au sein de la mission « Action extérieure de l’État ».

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. le président de la commission des affaires étrangères.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, chacun l’aura remarqué, les rapporteurs de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées ont tous appelé à voter les crédits de cette mission. Cependant, nous avons tous ensemble des commentaires à faire sur la politique que ce budget doit financer.

« C’est parce que nous ne sommes plus une grande puissance qu’il nous faut une grande politique, parce que si nous n’avons pas une grande politique, comme nous ne sommes plus une grande puissance, nous ne serons plus rien. » Cette phrase, prononcée en 1969 par le général de Gaulle, résume à la fois nos contraintes et notre vocation. Notre vocation, c’est cette « exception française » qui a conduit à ce que le général appelait lui-même la « singularité dérangeante » de l’action de la France dans le monde.

Cette grande politique repose sur la conviction que nous incarnons un modèle particulier autour duquel peuvent s’agréger nos partenaires. C’est ce modèle qui est aujourd’hui en question, en particulier du fait de la crise économique, mais aussi d’une certaine crise morale.

Les contraintes d’une puissance moyenne, nous les connaissons tous. Elles se trouvent accentuées par les difficultés économiques et financières. Nos rapporteurs viennent de les rappeler ; elles ne sont pas nouvelles.

Déjà, en 2008, Alain Juppé et Louis Schweitzer rappelaient, en conclusion du Livre blanc sur la politique étrangère et européenne de la France, que l’une des conditions de la réforme était d’accepter d’en payer le prix et de donner au Quai d’Orsay les moyens budgétaires nécessaires sous peine de déstabiliser en profondeur l’outil diplomatique et, en conséquence, d’affaiblir notre politique étrangère.

Depuis lors, la situation ne s’est pas améliorée et les budgets, d’année en année, ont été diminués. Nous sommes devant ce paradoxe d’une grande ambition portée par un ministère fragile, non pas par sa mission, ni par son titulaire, mais par ses moyens.

Comme en matière de défense, la concordance entre notre parole et nos actes est de plus en plus en plus difficile à réaliser. Comme en matière de défense, il arrive un moment où l’extrême qualité des hommes, leur compétence et leur dévouement au service de la Nation, trouve ses limites.

Certes, nous savons tous que le redressement de nos finances est la condition de notre indépendance. C’est aussi le moyen indispensable pour conduire une grande politique étrangère. Or, aujourd’hui, les performances économiques de notre pays sont très largement inférieures à celles de nos principaux partenaires européens, qu’il s’agisse de la croissance, du chômage ou du commerce extérieur.

Notre perte d’influence sur la scène internationale est un sujet d’inquiétude pour nous tous. Nous vivons une crise de l’identité et du projet européens. Plus grave, le couple franco-allemand semble grippé en raison du décrochage économique de notre pays.

Sur les grands dossiers internationaux – je pense à l’Ukraine, au Moyen-Orient, à la prolifération nucléaire –, notre pays est associé, en particulier parce qu’il est un membre extrêmement actif du Conseil de sécurité des Nations unies, mais il ne joue pas en première ligne. Il est même parfois accusé d’« alignement ». Seules les crises africaines lui ont permis de conserver un rôle majeur et incontournable.

La raison de cette perte d’influence est claire. Pour nous-mêmes et pour nos partenaires, nous peinons à peser sur les affaires du monde alors que nous n’arrivons pas à surmonter nos propres crises. Notre difficulté à nous redresser nous fragilise.

Dans le même temps, nous assistons au bouleversement progressif de l’ordre international avec la montée en puissance des « pays continents ». Ce rééquilibrage global touche l’ensemble de la communauté internationale, y compris, bien entendu, l’ « hyperpuissance » américaine, dont, mécaniquement, le poids diminue.

Cela se traduit pour elle par le leadership from behind, par le recentrage sur l’Asie, où s’est déplacé le centre névralgique du monde, et par un certain retour sur soi, permis naturellement par la perspective de l’indépendance énergétique et par une pression de plus en plus insistante sur ses alliés pour qu’ils prennent leur part du fardeau.

La conclusion que nous tirons immédiatement de ces analyses, c’est que notre pays devra nécessairement accomplir des réformes internes structurelles s’il veut tenir son rang dans un monde sans cesse en mouvement et continuer à être une puissance qui compte dans le monde des continents, alors que la France métropolitaine représente à peine plus de 0, 5 % des terres émergées et moins de 1 % de la population mondiale.

Dans ce contexte, quelles doivent être les priorités diplomatiques de la France dans ce nouveau monde ? Comment retrouver une influence et ne pas être ravalé au rang d’un pays ordinaire, d’une puissance moyenne ? À mes yeux, ce chemin passe par la valorisation des atouts de cette « exception française », qui nous permettra de renouer avec notre « singularité dérangeante ».

La première des priorités est la relance du projet européen, et singulièrement du « moteur » franco-allemand, qui est irremplaçable. Or, nous le savons, cette alchimie motrice de l’Europe, qui passe entre nos deux pays depuis les pères fondateurs, suppose à la fois que nos deux économies convergent et que, progressivement, l’Allemagne s’implique davantage sur les questions politico-militaires.

Aujourd’hui, dans presque tous les domaines, la France inquiète l’Allemagne. Il semble qu’elle ne saurait faire sa part du chemin dans ces conditions. Tous nos efforts doivent porter sur la refondation d’une crédibilité. Cela ne peut résulter que de réformes structurelles.

La deuxième priorité, c’est à l’évidence de réaffirmer le caractère exceptionnel du lien entre la France et l’Afrique. La commission a parfaitement expliqué pourquoi avant le sommet de l’Élysée du mois de décembre dernier, dans un rapport d’information intitulé L’Afrique est notre avenir.

Alors que vient de se tenir le sommet de la francophonie à Dakar, nous devons mettre l’accent sur ce lien et cette chance que constitue l’emploi du français dans le monde, et singulièrement en Afrique. Si nous ne relâchons pas notre effort, ce continent pourrait compter 700 millions de locuteurs dans les années à venir.

La semaine dernière, nous avons entendu Jacques Attali émettre des réserves sur cette perspective. Il était déçu par le manque d’initiative depuis de nombreuses années sur ces sujets. La relation entre la France et la francophonie doit être intensifiée. La francophonie, c’est la modernité, et non pas l’expression d’un archaïsme, comme on l’entend trop souvent. Nous n’utilisons pas assez la solidarité politique qui lie les États membres de la francophonie.

Ce sujet nous concerne tous. En dépit des contraintes budgétaires, notre priorité doit être de préserver l’instrument principal de diffusion de la langue française : ce réseau scolaire de plus de 460 établissements français implantés dans 130 pays qui rassemblent 250 000 élèves de toutes nationalités.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

C’est un instrument d’influence exceptionnelle. La langue française n’est pas seulement un moyen de communication ; elle est un instrument d’incarnation et de transmission des valeurs.

M. Abdou Diouf, qui quitte le mandat qu’il a brillamment exercé pendant douze années, le répète régulièrement : en matière de francophonie, le problème n’est pas la demande de français ; c’est l’offre !

L’Afrique est aussi un continent au sein duquel certains États sont particulièrement fragiles. Cette fragilité permet le développement des réseaux terroristes, que ce soit dans l’ensemble du Sahel ou dans les zones où sévit Boko Haram. Elle donne toute liberté au développement de tous les trafics et de tous les réseaux mafieux, souvent liés au terrorisme. La France, qui a entièrement renouvelé ses accords de défense avec nos alliés africains, a pris toutes ses responsabilités, non seulement au nom de la sécurité de nos intérêts et de ceux de l’Europe, mais aussi parce qu’il n’existe pas de développement sans sécurité ni de sécurité sans développement.

Pourtant, cet engagement au nom d’intérêts et de valeurs partagés par l’ensemble des pays de l’Union européenne ne me semble pas être suffisamment soutenu par nos alliés. Se pose là un réel problème de solidarité européenne ; il conviendra de le traiter.

L’Asie constitue une troisième priorité pour notre diplomatie. La question qui se pose est de savoir comment faire exister la France dans cet immense espace, dont la force s’est encore récemment manifestée lors du sommet de l’APEC, ou Asia-Pacific Economic Cooperation.

Ces dernières années, notre commission a effectué des missions en Inde, au Japon, en Australie, en Nouvelle-Calédonie et, en 2014, dans le Sud-Est asiatique. Son dernier rapport contient des recommandations précises sur les actions que nous pourrions mener à court, moyen et long termes. Elles visent en particulier la diplomatie économique que nous devrions mener, notamment en Inde, au Vietnam ou en Thaïlande.

Avec la Chine, en ce cinquantième anniversaire de l’ouverture de nos relations diplomatiques, la France doit pouvoir jouer la carte de sa « singularité ». Dans le même esprit que celui qui animait la France de 1964, ce cinquantenaire doit nous permettre d’identifier ce que la France et la Chine peuvent et doivent faire, afin que le monde à venir surmonte ses bouleversements actuels et devienne, comme le disent les Chinois, plus harmonieux, mais aussi et surtout plus juste.

Dans la Chine de demain qui se dessine, la place de la France comme partenaire de premier plan paraît s’imposer. Parmi les domaines dans lesquels notre expérience est indiscutable, vous connaissez nos priorités sur la ville, l’agroalimentaire, les transports, l’énergie. Nous avons participé ensemble en Chine à un forum d’entrepreneurs qui a montré cette volonté et cette dynamique, monsieur le secrétaire d’État.

Cette culture de l’indépendance, qui doit nous animer, est attendue par les peuples en guerre au Moyen-Orient notamment. Personne n’oublie la position de Jacques Chirac en 2003 sur l’Irak, qui fut l’honneur de la France : cette capacité à faire entendre la voix de la France pour l’expression de la paix !

Je terminerai mon propos en abordant cette « nouvelle frontière » de la politique étrangère française qu’est la diplomatie économique.

Je salue les efforts personnels, l’impulsion politique et les initiatives ouvertes que le ministre des affaires étrangères a engagés pour dynamiser cette diplomatie économique. Elle marque son empreinte.

Je me suis félicité du rattachement du commerce extérieur et du tourisme au Quai d’Orsay. Naturellement, cette décision rationnelle ne suffira pas à redresser nos comptes. Elle s’inscrit en complément des réformes structurelles qu’il faut accomplir. Elle est bienvenue, mais l’effet de levier que doit avoir la diplomatie économique est encore insuffisant aujourd’hui.

Faire de l’ambassadeur le « chef d’équipe France à l’export », mobiliser tous les acteurs du jeu diplomatique – je pense là à la nomination des personnalités sur des fonctions de représentant spécial –, développer un « réflexe France », créer une direction des entreprises… tout cela va dans le bon sens, mais 75 % des crédits du commerce extérieur sont encore à Bercy. Il reste donc du travail à accomplir pour coordonner et rendre plus cohérente cette action. Monsieur le secrétaire d’État, vous nous direz comment doit se concrétiser dans les années à venir ce rattachement du commerce extérieur au ministère des affaires étrangères.

Cette diplomatie économique assume par la défense de nos intérêts notre ambition européenne. Mais nous connaissons certaines réticences de nos partenaires, notamment sur la notion de « préférence communautaire ». Pour autant, nous ne considérons pas normal que le montant des marchés publics attribués à des entreprises extérieures à l’Union européenne atteigne quelque 300 milliards d’euros alors qu’il n’est, par exemple, que de 34 milliards aux États-Unis, protégés par le Buy American Act. §La notion de réciprocité doit être le maître mot pour les négociateurs sur les questions d’ouverture des marchés.

Telles sont les réflexions que nous inspire ce projet de budget, au service de cette grande politique que nous attendons. La commission des affaires étrangères du Sénat est, dans son ensemble, prête à faire confiance. Nous mesurons aujourd’hui combien les singularités de la politique étrangère de la France sont une force pour le pays. L’alignement, quel qu’il soit, n’est jamais pour la France un horizon acceptable !

Applaudissements sur les travées de l'UMP, de l'UDI-UC et du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à Mme la présidente de la commission de la culture.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, l’examen du projet de loi de finances pour 2015 est le prélude à ce qui va constituer un moment-clé pour la définition de la stratégie de l’Institut français, l’opérateur pivot de notre politique culturelle à l’étranger ; je veux parler de la négociation de son prochain contrat d’objectifs et de moyens, ou COM, pour la période allant de 2015 à 2017.

Le Gouvernement a annoncé à la fin de l’année 2013 qu’il serait mis un terme à l’expérimentation du rattachement du réseau culturel à l’institut, au motif que les résultats n’étaient pas suffisamment probants. Sans doute eût-il fallu, comme l’a souligné notre collègue Louis Duvernois, que l’Institut ait disposé des moyens adaptés et, comme l’a pointé Jacques Legendre voilà quelques minutes, de suffisamment de temps.

Bref, réexaminer les moyens qui lui permettront d’exercer un véritable pilotage stratégique de nos instituts culturels à l’étranger est désormais un défi pour l’Institut.

Dans un contexte budgétaire toujours plus contraint, le Gouvernement entend cibler l’intervention de l’Institut français auprès des jeunes publics et des classes moyennes et supérieures : en d’autres termes, le public scolaire, les étudiants, les jeunes professionnels, et les décideurs et élites étrangères. Dont acte.

Mais, pour continuer à toucher un large public, le plus large possible, l’Institut doit aussi relever les défis de la mutation numérique et, à l’évidence, miser sur les nouvelles technologies de l’information et de la communication, afin d’optimiser ses interventions. Il doit multiplier les plates-formes numériques en soutien au réseau, ce qu’il a fait jusqu’ici avec un certain succès dans plusieurs domaines. J’en veux pour preuve les dispositifs IFCinéma, IFMapp et les outils du numérique éducatif.

Mais qu’en est-il des applications pour téléphones intelligents et tablettes ? N’est-ce pas là encore le meilleur moyen de toucher le plus grand nombre, en particulier en Asie ?

En faisant une recherche sur vos App Store – je devrais dire sur les « boutiques d’applications pour mobiles » –, vous trouverez au moins cinq applications labellisées par le Goethe Institut et plus d’une quinzaine d’applications mises au point par le British Council. L’Institut français n’en propose qu’une, dont les potentialités sont du reste très limitées, puisqu’elles ne comportent aucun volet d’apprentissage de la langue française, de sa grammaire ou de son vocabulaire. Faut-il en déduire que l’Institut français n’est encore qu’un nain digital ?

Je regrette également qu’il ne soit pas reconnu à l’Institut français un rôle prééminent, avec, évidemment, les moyens que cela suppose, dans la coordination de la coopération décentralisée en matière culturelle, artistique et linguistique. Dans son avis sur le projet du précédent COM de l’Institut français, notre commission de la culture, par la voix de notre collègue Marie-Christine Blandin, avait réclamé une stratégie plus claire et offensive en la matière, avec une articulation opérationnelle entre l’Institut, la délégation à l’action extérieure des collectivités territoriales du ministère et les services des relations extérieures des collectivités. Nos collectivités territoriales ont, vous le savez, une véritable valeur ajoutée à apporter au rayonnement international de notre pays, que ce soit dans les domaines du patrimoine, du tourisme ou encore de la gastronomie.

Prenons l’exemple de nos départements et collectivités d’outre-mer. Que fait l’Institut français pour les accompagner dans leur insertion au sein de leur espace régional le plus proche ? Nos partenaires étrangers ont-ils seulement conscience que la France est aussi l’un des pays dotés de la plus grande biodiversité au monde, avec nos lagons et barrières de corail à La Réunion, à Mayotte et en Nouvelle-Calédonie, que certains de nos territoires présentent une richesse linguistique qui ne se rencontre nulle part ailleurs, avec des familles extraordinaires de langues régionales et locales, comme les langues amérindiennes en Guyane, les langues polynésiennes en Polynésie française, les langues kanakes de Nouvelle-Calédonie et nos créoles des Caraïbes et de l’océan Indien ?

Ces territoires sont les meilleurs ambassadeurs des valeurs fondamentales portées par notre République, au premier rang desquelles figure le respect de la diversité culturelle et linguistique. Pourtant, il n’y a pas une seule mention de la coopération décentralisée et encore moins de l’outre-mer français dans le précédent COM de l’Institut français ! Je demande au Gouvernement de réparer cet oubli dans le prochain contrat d’objectifs et de moyens.

On peut également s’interroger sur le degré de coopération entre l’Institut français, nos organismes de recherche et nos musées d’histoire naturelle en matière de diffusion et de partage de la culture scientifique, technique et industrielle. À mon sens, l’intervention de l’Institut français peut être déterminante pour endiguer le recul préoccupant de la langue française dans un secteur aussi stratégique que la recherche.

Nos scientifiques publient désormais presque exclusivement en anglais. Le français est plus que marginal dans les sciences exactes et autant dire qu’il est inexistant dans celles de l’univers. Est-ce à dire que les progrès scientifiques ne peuvent plus être compris dans d’autres langues que l’anglais ?

Le Centre national d’études spatiales, le CNES, et le Centre national de la recherche scientifique, le CNRS, ont largement contribué au succès de la mission Rosetta de l’Agence européenne spatiale et de l’atterrissage du robot Philae sur une comète. Il est inconcevable que le rayonnement scientifique que notre pays peut espérer tirer de cette première mondiale ne se traduise pas par un nombre plus important d’articles en français dans les plus grandes publications scientifiques.

M. Jacques Legendre acquiesce.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

C’est pourquoi je demande très solennellement au Gouvernement de placer la diffusion de la culture scientifique au cœur des objectifs stratégiques du prochain contrat d’objectifs et de moyens de l’Institut français par un appui renforcé de notre réseau d’instituts français de recherche à l’étranger, les IFRE, et le développement de partenariats ambitieux avec nos organismes nationaux de recherche, dont le CNRS, le CNES, mais aussi l’Institut national de la santé et de la recherche médicale, l’INSERM.

Je puis vous le garantir, la commission de la culture, de l’éducation et de la communication examinera avec la plus grande vigilance et la plus grande attention le prochain projet de COM que vous nous proposerez, je l’espère, très rapidement, l’année prochaine. Je vous rappelle que notre commission s’était prononcée par un avis défavorable sur le précédent projet de contrat d’objectifs et de moyens. Il s’agit désormais de se montrer à la hauteur des ambitions que nous pouvons nourrir pour notre rayonnement culturel, linguistique et intellectuel.

Pour terminer, au lendemain du quinzième sommet de la francophonie qui s’est tenu à Dakar, auquel certains de nos collègues se sont rendus, quels qu’aient été les débats, je tenais à féliciter la nouvelle secrétaire générale de la francophonie, Mme Michaëlle Jean, qui, choisie par les chefs d’État et de gouvernement, succède à M. Abdou Diouf. Je tenais à la féliciter et surtout à lui formuler des vœux de pleine réussite tant le défi de la défense et de la promotion de notre langue française à travers le monde est important.

Applaudissements sur les travées de l'UMP, de l'UDI-UC et du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.

Je vous rappelle également qu’en application des décisions de la conférence des présidents, aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de trente minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Aymeri de Montesquiou.

Debut de section - PermalienPhoto de Aymeri de Montesquiou

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la mission « Action extérieure de l’État » n’a jamais traduit une telle volonté de pragmatisme. La diplomatie économique mise en œuvre a entraîné sa réorganisation, en plaçant sous la responsabilité du ministre des affaires étrangères les portefeuilles du commerce extérieur et du tourisme, réunissant ainsi sous la même autorité l’ensemble des atouts qui devraient faire grand notre pays.

Le projet de loi de finances pour 2015 entérine ce changement de périmètre. Vous disposez de 2, 962 milliards d’euros en crédits de paiement et 3, 093 milliards d’euros en autorisations d’engagement.

Le transfert d’Atout France au programme 185 et le programme temporaire « Conférence Paris Climat 2015 » donnent à la baisse de fait des crédits de cette mission une apparence de modération, cette baisse participant à l’effort de maîtrise de la dépense publique.

Les choix stratégiques opérés sont empreints de lucidité et d’un courage certain dans un budget contraint. Le programme 105 tend à préserver l’universalité de notre réseau diplomatique, qui est passé du deuxième rang au troisième rang, désormais après les États-Unis et la Chine, et à l’adapter selon les priorités de nos postes.

La présence française est déclinée en trois formats : missions élargies, dont huit à format d’exception, missions prioritaires et présence diplomatique. Comme le souligne le rapporteur spécial à l’Assemblée nationale Pascal Terrasse, le ministère devra continuer à innover. Nous espérons tous que l’ingéniosité demeure une qualité française.

La logique de la nouvelle orientation de la diplomatie tend à confier à l’ambassadeur tous les attributs de l’action économique, afin d’organiser le redéploiement des ressources et des moyens vers les zones au fort potentiel de croissance, en particulier les pays émergents. C’est l’une de mes exhortations récurrentes depuis des années. Je suis heureux, bien qu’étant aujourd’hui dans l’opposition, de partager les choix de l’exécutif.

J’ai pourtant un certain nombre d’interrogations.

Sur huit pays accueillant une ambassade de format d’exception, quatre sont des partenaires de l’Union européenne. Or la Chine, la Russie et l’Inde, qui n’en font pas partie, bénéficient tout de même d’effectifs supplémentaires. Cela n’est pas cohérent avec les choix du ministère.

Quelles sont les raisons des réductions d’effectifs au Brésil et en Argentine ? Envisagez-vous un renforcement des postes en Malaisie et en Corée, dont le dynamisme économique attire de plus en plus de nos jeunes expatriés ? Quelle est votre stratégie pour l’Asie du Sud-Est ?

La fusion en cours d’UBIFRANCE et de l'Agence française pour les investissements internationaux, l’AFII, sera effective au 1er janvier prochain. Comment s’opère ce rapprochement ? Est-ce une fusion des agences avec une stratégie d’ensemble ou une simple addition des compétences et des administrations ? Quelle sera l’articulation avec les services économiques des ambassades ? L’efficacité et l’attractivité induites ambitionnées ne seront-elles pas neutralisées par des doublons ?

Le regroupement de nos services diplomatiques, consulaires et culturels en une même localisation avec ceux de nos partenaires européens constitue un moyen pertinent pour mutualiser les charges et les compétences des cultures diplomatiques nationales, parfois notablement différentes. Les difficultés de collaboration avec d’autres sections consulaires européennes demeurent-elles ? L’accord-cadre diplomatique franco-allemand de 2006 fait-il des émules au sein d’autres pays de l’Union ? Des coopérations sont-elles en projet ?

La colocalisation consoliderait surtout la visibilité, la cohérence et le poids diplomatique de l’Union européenne à l’étranger.

Monsieur le secrétaire d’État, affirmons aussi la citoyenneté européenne, si chère aux membres de l’UDI, comme une réalité ! Quand oserons-nous enfin supprimer les consulats des États membres au sein de l’Union européenne ? Cette idée sera-t-elle portée auprès de la nouvelle Commission Juncker ? Accessoirement, cela entraînerait des économies bienvenues.

La politique des visas, action 3 du programme 151, est un outil de notre rayonnement. Les étudiants, Français à l’étranger et étrangers en France, deviennent les meilleurs ambassadeurs de notre pays. En effet, 39 % des visas de long séjour concernent des études, alors que 17 % des visas de court séjour le sont pour affaires. Est-il envisageable de les augmenter au-delà de ces proportions, en particulier avec des partenaires comme la Russie et la Chine ? Une externationalisation a été mise en place dans les postes les plus sollicités. Quels enseignements en tirez-vous ?

Notre collègue Olivier Cadic vous incite à mener une réflexion sur le rôle des consuls honoraires ; jamais le nombre de nos concitoyens installés à l’étranger n’a été aussi élevé. Alors que votre budget est contraint, il faudrait donc revenir sur les modalités de délivrance des actes d’état civil à l’étranger. Les consuls honoraires devraient pouvoir le faire sur le modèle d’un pay as you go qui permettrait d’autofinancer la production de ces actes.

Je conclurai sur le tourisme.

Avec mon collègue du Gers, Franck Montaugé, je m’interroge sur l’essor de partenariats étrangers avec des entreprises installées dans des zones rurales.

Le Gouvernement a-t-il élaboré un plan d’action, par exemple dans le cadre des contrats de plan État-région, pour attirer les investissements internationaux dans les régions et développer le tourisme ?

Je me permets d’attirer votre attention sur le département du Gers. M. le ministre Laurent Fabius y a résidé, en connaît les difficultés économiques et en a apprécié l’excellence culinaire. Quelle application de la diplomatie gastronomique voudra-t-il mettre en œuvre, à l’image hier de Talleyrand avec le cuisinier Carême ou aujourd’hui d’Hillary Clinton avec le Diplomatic Culinary Partnership ?

Monsieur le secrétaire d’État, menons une diplomatie pleine de panache, une diplomatie mousquetaire ! §

Debut de section - PermalienPhoto de Aymeri de Montesquiou

Menons une diplomatie inventive, audacieuse et libre de toute sujétion, sans alignement, comme l’a souligné tout à l’heure notre collègue Jean-Pierre Raffarin, à l’instar du général de Gaulle !

Les membres du groupe UDI-UC soutiennent les priorités et la réorganisation de notre diplomatie. Ils voteront les crédits de la mission « Action extérieure de l’État ».

Applaudissements sur les travée s de l'UDI-UC, de l'UMP et du RDSE, ainsi que sur certaines travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Michelle Demessine

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, les crédits de la mission « Action extérieure de l’État », bien qu’ils soient modestes au regard des autres budgets, ne doivent pas nous faire sous-estimer l’importance d’un département ministériel dont le rôle est de promouvoir les valeurs, la culture, la langue de notre pays, mais aussi de défendre ses intérêts politiques et économiques à travers le monde. Dans le contexte que nous connaissons, ce sont des objectifs ambitieux et difficiles à atteindre. Toutefois, si l’on est vraiment attaché à la place de la France dans le monde, il faut y consacrer les moyens nécessaires ou, tout au moins, suffisants.

Or, paradoxalement, pour conserver le statut de puissance d’influence de notre pays, vous nous proposez de réduire les crédits affectés à quelques programmes et, avec des moyens diminués, de redéployer la présence française vers de nouvelles sphères d’influence.

En apparence, vos crédits sont en légère augmentation par rapport à 2014. Néanmoins, c’est une illusion, puisque cette évolution s’explique par deux facteurs : d’une part, le périmètre de votre département ministériel a été étendu au tourisme et à une partie du commerce extérieur ; d’autre part, notre pays est l’organisateur de la Conférence des parties à la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, qui aura lieu en 2015.

Par conséquent, si l’on retirait les crédits exceptionnels prévus à cette occasion, les crédits proprement dits de la mission « Action extérieure de l’État » seraient très nettement en baisse. Il en est ainsi des crédits du programme 105, « Action de la France en Europe et dans le monde ». Cela se traduira notamment par la suppression de 450 postes entre 2015 et 2017, dont 220 dès l’année prochaine. Certes, avec 162 ambassades et 16 représentations permanentes, notre réseau diplomatique est encore le troisième au monde. Mais, en poursuivant sur cette pente, en supprimant des postes chaque année, le rayonnement auquel nous prétendons aura plus de difficultés à s’exercer dans le monde actuel.

En termes de ressources humaines, le ministère des affaires étrangères et du développement international aura une capacité moindre pour faire face aux divers défis, écologiques, démographiques, alimentaires, voire sécuritaires, auxquels notre diplomatie est directement confrontée.

C’est dans ce cadre rétréci que, pour limiter les effets négatifs de cette déflation des effectifs, vous avez décidé le redéploiement d’une centaine d’agents du ministère vers des zones géographiques prioritaires, comme les pays dits « émergents ».

Toujours à propos du programme 105, je déplore également que, lors de l’examen de votre budget à l’Assemblée nationale, le Gouvernement ait fait voter, par une seconde délibération, une réduction de 10 millions d’euros sur nos contributions aux organisations internationales et sur les opérations de maintien de la paix, auxquelles nous participons pourtant de plus en plus fréquemment. À mes yeux, ce n’est pas à la hauteur de la place et du rôle que nous prétendons jouer dans le monde.

Le rayonnement de notre pays tient aussi à notre capacité à développer l’éducation.

Il est donc difficilement compréhensible que les moyens dévolus au programme 185 diminuent de 2 %. Ce programme recouvre pour l’essentiel les crédits destinés au service d’enseignement français à l’étranger, et il regroupe l’ensemble des moyens octroyés aux politiques culturelles, linguistiques, universitaires et scientifiques. D’une manière générale, il me semble que, depuis la loi du 27 juillet 2010 relative à l’action extérieure de l’État, qui avait pour objet de réformer la diplomatie culturelle et d’influence, les choses n’ont que très légèrement avancé.

Certes, l’Institut français a été créé, ainsi que Campus France et France expertise internationale. Toutefois, la question de savoir s’il faut privilégier les agences ou donner aux ambassadeurs l’autorité nécessaire a-t-elle été clairement tranchée ? Tant que le réseau culturel s’interrogera sur ses structures et que les orientations et les moyens des opérateurs ne seront pas précisés, notre action culturelle extérieure pâtira de la situation et sera difficilement lisible pour nos interlocuteurs étrangers.

Monsieur le secrétaire d’État, le ministère des affaires étrangères pilotera désormais la politique touristique de notre pays. Vous connaissez l’intérêt que je porte à ce secteur, pour en avoir assumé la responsabilité de 1997 à 2001.

Le Président de la République a réaffirmé l’importance à accorder à ce secteur économique, mais aussi à son rôle social, éducatif et culturel. Ces préoccupations ont d’ailleurs été largement exprimées dans les récentes Assises du tourisme.

La France, qui est toujours la première destination touristique au monde, ambitionne d’accueillir 100 millions de visiteurs étrangers à l’horizon de 2015, et ce dans des conditions qui visent l’excellence. C’est un beau challenge économique, mais pas uniquement, car le tourisme n’est pas une économie comme les autres : il est un vecteur d’échanges, de partage, de culture et surtout de paix.

N’oublions pas, cependant, que les touristes français sont nos meilleurs visiteurs, puisque 80 % d’entre eux choisissent la France chaque année pour leurs vacances. Ne l’oublions pas non plus, près de la moitié des Français, en particulier les jeunes familles, ne partent pas en vacances. C’est préoccupant !

C’est dire si la réaffirmation d’une politique touristique ambitieuse et dynamique, adossée à ce grand ministère et au secrétariat d’État de Carole Delga, au titre de l’économie sociale et solidaire et de l’aménagement du territoire, a été bien accueillie par l’ensemble des acteurs touristiques de notre pays.

Toutefois, monsieur le secrétaire d’État, je voudrais m’associer aux inquiétudes exprimées par M. le rapporteur spécial s’agissant de l’outil principal de notre action publique d’État que constitue Atout France. En effet, le budget de la promotion de la France a perdu 30 % de 1997 à 2001, période où il avait retrouvé des couleurs. Son budget est de nouveau en baisse depuis plusieurs années, et cette évolution s’accentue depuis 2011.

Il faut avouer que cela brouille un peu le message de remobilisation de notre pays en faveur du développement du tourisme. Pourtant, le tourisme, c’est aussi une industrie, qui plus est non-délocalisable et pourvoyeuse d’emplois. Notre pays a l’ambition d’agir prioritairement pour la réindustrialisation de notre pays. Pourquoi cette vigilance prioritaire n’accompagne-t-elle pas ce secteur d’activité, réparti de surcroît sur l’ensemble de notre territoire et dont, vous le savez, ses moyens sont appelés à se multiplier : un euro investi dans la promotion touristique permet de lever entre huit euros et neuf euros de partenariat, avec le secteur privé, les collectivités locales et territoriales ?

À un moment où un certain nombre de nos voisins européens font le choix inverse et décident d’investir plus massivement dans leur promotion touristique, il me semble important d’associer ambitions et moyens si nous voulons animer une véritable mobilisation pour répondre à ce défi.

Les discussions budgétaires ne nous laissent pas le temps nécessaire pour débattre des grandes orientations de notre politique étrangère, au sujet de laquelle – vous le savez, monsieur le secrétaire d’État – les membres de notre groupe expriment de profonds désaccords avec le Gouvernement.

Néanmoins, je profite de l’examen de ces crédits pour indiquer combien nous souhaiterions que ceux-ci soient mieux utilisés, au service d’une politique plus autonome, plus attentive aux grands mouvements du monde et plus solidaire des luttes des peuples aspirant à leur émancipation, à la démocratie et à la paix.

Ce budget, dont je n’ai évoqué que quelques points, me laisse donc sur ma faim. Il n’est pas à la hauteur des ambitions que le Gouvernement affiche pour notre pays. En conséquence, les membres du groupe CRC s’abstiendront sur les crédits du ministère des affaires étrangères et du développement international.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Hue

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le 5 juin 1841, en prenant place à l’Académie française, Victor Hugo ouvrait son allocation en ces termes : « Au commencement de ce siècle, la France était pour les nations un magnifique spectacle ». En ce début de XXIe siècle, notre pays a-t-il conservé ce rayonnement vanté par l’écrivain ?

C’est un vaste débat, dont nous avons tenté de nous approcher voilà quelques instants et auquel il ne me sera pas permis de répondre aujourd’hui. Néanmoins, au détour de la mission « Action extérieure de l’État », il est possible d’évaluer notre potentiel dans quelques-uns des secteurs qui témoignent de l’attractivité de la France.

J’évoquerai tout d’abord la diplomatie culturelle et d’influence, dont les crédits sont inscrits au programme 185 de la mission, qui représente un quart du budget de celle-ci.

Mes chers collègues, vous le savez, ces crédits regroupent les moyens dédiés à la coopération culturelle et d’influence, ainsi que ceux qui sont destinés au service d’enseignement public français à l’étranger. Cette année, il faut y ajouter les crédits attribués à Atout France puisque, conformément au souhait du ministre des affaires étrangères, nous sommes entrés dans l’ère de la diplomatie globale, ce qui conduit à enrichir l’action extérieure de la politique touristique. J’adhère à cette nouvelle conception, tant que l’on garantit les fondamentaux de notre diplomatie, à savoir la transmission des valeurs inhérentes aux droits de l’homme et à la solidarité internationale.

À périmètre constant, les crédits du programme 185 sont réduits de 1, 8 % en 2015. Cette baisse découle essentiellement de la diminution des subventions versées aux opérateurs, en l’occurrence l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, l’Institut français et Campus France.

Comme pour bien d’autres missions, il s’agit de faire participer les grands opérateurs de l’État à l’effort de réduction des dépenses publiques.

Certes, chacune des missions doit faire des économies. Mais prenons garde à ne pas atteindre un seuil au-delà duquel cette politique nuirait à l’efficacité de nos principaux leviers d’influence. Comme notre collègue Louis Duvernois l’a indiqué dans son rapport, l’AEFE est un « levier puissant et précieux dispositif d’influence culturelle, linguistique et intellectuelle auprès des élites étrangères ».

Et Campus France, bien qu’étant de création récente, a déjà fait la preuve de son efficacité en rationalisant la chaîne de vie des étudiants étrangers dans notre pays. La France est ainsi devenue le troisième pays d’accueil de la mobilité étudiante internationale en 2012, derrière les États-Unis et le Royaume-Uni.

Voilà qui témoigne d’un intérêt toujours intense pour l’enseignement du français dans le monde. Mais soyons très vigilants : comme plusieurs orateurs l’ont rappelé, le français, s’il résiste mieux que bien d’autres langues, est menacé. C’est notamment le cas au sein de la communauté scientifique, où, il faut bien le dire, nos concitoyens ont de plus en plus tendance à lui préférer l’anglais.

Si la plupart des crédits du soutien direct à la francophonie dépendent d’une autre mission, je profite de l’actualité et du sommet de Dakar pour insister sur la nécessité de soutenir la politique francophone, en particulier en Afrique, continent qui concentre 85 % des locuteurs francophones.

Le français n’a plus le monopole de la liberté, comme au temps de la Révolution française, mais son enseignement peut et doit demeurer, au-delà de ses qualités linguistiques, un puissant vecteur de progrès culturel et social : c’est également de cela qu’il s’agit.

Au sein de cette mission, j’insisterai également sur le programme 105, « Action de la France en Europe et dans le monde », et plus particulièrement sur les moyens attribués aux affaires consulaires.

Depuis quelques années, notre réseau diplomatique est réorganisé, en vue de répondre aux nouveaux besoins, mais aussi, soyons honnêtes, pour faire des économies. La hiérarchisation du réseau n’a pas contenu la décrue des effectifs. Sur ce front également, il faut se montrer raisonnable quant aux objectifs à atteindre : l’instabilité, hélas ! permanente du monde et la mobilité croissante de nos concitoyens nous obligent à conserver un réseau suffisamment dense, pour répondre aux attentes des ressortissants français, en termes tant administratifs que de sécurité.

Le rééquilibrage entre les postes d’agents doit être opéré selon la meilleure logique. Globalement, il en va déjà ainsi. Je m’interroge simplement sur le cas du Maroc : ce poste diplomatique va gagner trois agents alors qu’il est déjà, avec 336 personnes, le deuxième dont dispose la France, après celui des États-Unis.

Parallèlement, je regrette que de nombreux pays d’Afrique francophones, tels que le Bénin, le Cameroun, le Burkina Faso ou la République du Congo, perdent des agents, alors que le continent africain est devenu central, comme l’ont bien compris d’autres pays qui, a contrario, l’investissent.

En revanche, je salue les efforts déployés dans les pays en crise. Je pense au Mali, qui gagne cinq postes, ou encore à l’Irak, qui en obtient deux autres. Là où la France mène des opérations extérieures, il est important de conserver les moyens nécessaires pour faire face aux enjeux de sécurité liés aux interventions militaires.

J’en profite pour ouvrir une parenthèse sur notre engagement dans la lutte contre Daesh. Une nouvelle fois, la France se retrouve bien seule parmi les pays européens à s’engager franchement sur le terrain. L’Allemagne, qui, dans un premier temps, a donné l’impression de se mobiliser, n’a finalement pas tenu ses engagements vis-à-vis de l’OTAN. Le conflit en Irak pose la question de l’effectivité de la politique étrangère commune.

J’en reviens à la mission qui nous occupe stricto sensu pour évoquer, avant de conclure, le programme 341.

Il s’agit là d’un programme éphémère, consistant à financer la Conférence Paris Climat 2015, qui se tiendra à la fin de l’année prochaine. §Je le rappelle, l’objet est d’inciter, à l’issue de cette conférence, le plus grand nombre de pays à s’investir dans la transition écologique, vers un nouveau modèle de développement porteur de croissance verte.

J’espère que nous obtiendrons des avancées significatives à la faveur de cette présidence française, car c’est l’avenir de toute la société humaine qui dépend de la sauvegarde de l’écosystème. Pour aller plus loin encore, je milite pour ce que j’appelle « l’écoprogressisme », c’est-à-dire pour réorienter notre appareil productif dans une perspective durable qui conjugue besoins sociaux et impératifs écologiques. J’aurai l’occasion d’y revenir.

Mes chers collègues, telles sont les quelques remarques que je tenais à formuler au sujet du budget de l’action extérieure de l’État.

Je terminerai en revenant à ma première interrogation. Oui, la France reste influente sur la scène internationale ! Et tous les leviers de sa diplomatie y contribuent pour beaucoup, notamment notre réseau consulaire, qui est le troisième du monde. Toutefois, il existe une inclination à l’affaiblissement de nos capacités. Il est essentiel de contrecarrer cette tendance pour que perdure le rayonnement de notre pays.

Ces observations étant faites, les membres du RDSE voteront les crédits de la mission « Action extérieure de l’État ». §

Debut de section - PermalienPhoto de Joëlle Garriaud-Maylam

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, j’espère pouvoir prononcer mon discours malgré une extinction de voix.

Assurer un service public de proximité et de qualité a toujours constitué un défi considérable à l’étranger. La réforme de l’Assemblée des Français de l’étranger, l’AFE, a d’ailleurs été menée au prétexte d’améliorer le maillage territorial de nos communautés à l’étranger. Résultat : un nombre accru d’élus de terrain, mais une baisse de 20 % du budget affecté à cette instance. Les nouveaux élus auront-ils réellement les moyens d’assumer leur mandat sur l’ensemble de leur circonscription ?

Bien sûr, nous sommes favorables aux économies. Mais nous souhaiterions que ces dernières proviennent de réformes structurelles plutôt que de coupes ponctuelles sans effets durables, voire potentiellement nuisibles.

Au sein du réseau diplomatique et consulaire, je note que, malgré la création de 25 postes consacrés au traitement des visas, ce sont 220 équivalents temps plein travaillé qui vont être supprimés par rapport à 2014.

L’oratrice, souffrant d’une extinction de voix, doit s’interrompre.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Mme la présidente. Madame Garriaud-Maylam, à titre exceptionnel, souhaitez-vous que l’un des collègues de votre groupe lise votre intervention à votre place ?

Mme Joëlle Garriaud-Maylam acquiesce.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Legendre

M. Jacques Legendre. Je suis prêt à venir aider notre collègue, madame la présidente.

Applaudissements.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Legendre

« Certes, la dématérialisation et la simplification des procédures allègent les besoins en emplois. Par ailleurs, il est naturel que le ministère des affaires étrangères contribue aux efforts de la Nation. Mais soyons clairs : le rétrécissement des équipes implique une réduction des missions, ce qui se fera au détriment soit des Français présents sur place, soit de notre politique d’influence. Nous devons donc rester vigilants quant aux conséquences de ces suppressions d’emplois sur la qualité du service public rendu à l’étranger.

« Je m’interroge notamment sur le rythme de passage de certaines ambassades au format très allégé, c’est-à-dire ne comptant plus que quatre agents au maximum, ambassadeur inclus. Le nombre des ambassades concernées devrait doubler en 2015, alors même que la première vague du dispositif n’a pas produit tous ses effets et qu’aucun bilan n’a pu être dressé.

« De même, je m’inquiète de la poursuite des fermetures de consulats, notamment à Porto et à Édimbourg. Pour ce dernier poste, l’annonce est d’autant plus surprenante que, à la suite du référendum sur l’indépendance, l’Écosse jouit d’une autonomie renforcée légitimant le maintien d’un véritable dispositif diplomatique.

« Au reste, il y a une certaine légèreté à prétendre que, pour les 1 300 Français d’Écosse, les services consulaires, déjà passablement engorgés, suffiront au renouvellement des passeports. J’ajoute que Londres et Édimbourg sont séparés, au bas mot, par une distance de 600 kilomètres.

« N’oublions pas que les services consulaires sont souvent le seul point de contact pour les expatriés et qu’il faut préserver ce lien.

« Dès lors, quels pourraient être nos leviers pour conserver, malgré les contraintes budgétaires, la qualité et le maillage d’un réseau diplomatique et consulaire unique au monde ?

« Je remarque que l’un des seuls services qui embauche en 2015 est celui, lucratif, des visas. Les bénéfices engrangés grâce à cette activité ne pourraient-ils pas contribuer à financer une part plus importante des services publics aux Français de l’étranger, inscrits dans le même programme budgétaire, au lieu d’être reversés au budget général ? Le gain net de cette activité est de l’ordre de 60 millions d’euros à l’échelle mondiale, soit 30 % des crédits du programme 151 !

« Autre marge de manœuvre que l’on peut faire jouer dans les postes en danger : aux licenciements en nombre d’agents consulaires préférer le remplacement du chef de poste par un chargé d’affaire, source de sensibles économies budgétaires.

« En outre, je m’étonne qu’au sein de l’enveloppe “frais de tournées et de représentation consulaire” 75 % des crédits soient destinés aux frais de représentation et 25 % aux tournées consulaires, ne laissant qu’un budget très insuffisant pour le service de proximité aux Français établis loin des consulats : recueil des procurations de vote, demande et remise des passeports, exercice de la protection consulaire.

« On a beaucoup parlé du lancement des valises ITINERA destinées au recueil des données biométriques hors des consulats. Encore faut-il pouvoir financer les déplacements de cet outil et mieux soutenir les consuls honoraires, dont le rôle ne cesse de croître, alors qu’ils ne bénéficient que d’un appui limité.

« Le dernier point que je souhaite évoquer au sujet du service public aux Français de l’étranger est la suppression de la Maison des Français de l’étranger, la MFE. Le ministère évoque pudiquement sa dématérialisation. Le terme serait justifié si, malgré la fermeture de l’accueil physique, une interaction avec les usagers continuait d’être assurée par téléphone, ou au moins par courriel. Mais la MFE virtuelle semble être réduite à la mise à jour de pages web, pour un montant néanmoins non négligeable de 100 000 euros.

« Le deuxième enjeu essentiel est la sécurité. Les crises géopolitiques se sont multipliées ces derniers mois, notamment au Moyen-Orient et en Afrique. Des sommes importantes ont été investies dans la sécurisation des ambassades. Mais qu’en est-il de la sécurité de nos communautés ?

« Après une vague d’actualisation des plans de sécurité des ambassades, le sous-indicateur relatif à cette mesure a été supprimé des documents budgétaires, au prétexte que 100 % des plans auraient déjà été actualisés. L’argument vaut peut-être pour cette année. Il importe toutefois de garantir le financement d’actualisations régulières. J’espère donc que l’indicateur sera réintégré dès l’année prochaine. À défaut, nous risquons de retrouver rapidement des plans de sécurité obsolètes.

« Un exemple illustre cette nécessité de procéder à des actualisations : l’évolution de l’indicateur “pourcentage de relecture des fiches dites de conseils aux voyageurs” ; alors que ce pourcentage atteignait 99 % en 2012, il est tombé à 80 %, et aucune amélioration n’est prévue en 2015. Ces fiches sont pourtant essentielles pour prévenir les comportements à risque. À l’heure où les réseaux sociaux facilitent une diffusion en temps réel des informations, il est essentiel de consacrer des ressources suffisantes à cette mission.

« Je note en outre une baisse de 3, 6 % des crédits relatifs à la coopération de sécurité et de défense. Un poste de coopérant militaire sur six sera supprimé.

« Rapporteur général à l’Assemblée parlementaire de l’OTAN, travaillant notamment sur la question du terrorisme, je sais à quel point cette coopération est essentielle pour prévenir les enlèvements, les prises d’otages et les actes de terrorisme, à l’étranger comme sur notre propre sol. Nous devons veiller à maintenir un financement suffisant des coopérations bilatérales en matière de sécurité. Sans doute faudrait-il également encourager et accompagner davantage le déploiement d’un réseau de réservistes citoyens français à l’étranger.

« Rentrant tout juste du sommet de la francophonie de Dakar, j’évoquerai, en conclusion, notre diplomatie culturelle et les liens étroits qui l’unissent à la francophonie.

« Comme le souligne Jacques Attali, “il est urgent de prendre conscience de la dimension économique de cet atout linguistique”. Cela passe notamment par une meilleure diffusion de l’enseignement français à l’étranger. Le réseau des écoles françaises à l’étranger, piloté par l’AEFE est, à cet égard, un dispositif d’excellence à préserver. Le coup de rabot de 2% pratiqué sur son budget public la contraint, comme les autres opérateurs du ministère, à un autofinancement accru. Espérons que des solutions créatives permettront d’éviter une hausse incontrôlée des frais de scolarité, qui mettrait en difficulté de nombreuses familles.

« Dans la mesure où les trois quarts des enfants français à l’étranger n’ont pas accès à ces écoles, il importe de développer d’autres dispositifs d’apprentissage en français : c’est essentiel pour renforcer notre influence auprès des élites étrangères. Le rapport Attali résume un certain nombre de pistes envisagées ces dernières années afin de soutenir des initiatives privées sans alourdir le fardeau budgétaire pour les finances françaises. »

Debut de section - PermalienPhoto de Claudine Lepage

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, comme l’ont rappelé mes collègues rapporteurs, les crédits de la mission « Action extérieure de l’État » baissent de 2 %. Celle-ci concourt donc pleinement à l’objectif de maîtrise des dépenses publiques.

La dotation du programme 151 connaît une baisse de 0, 6 % qui ne soulève pas d’inquiétude majeure : elle s’explique conjoncturellement par l’absence d’élections pour les Français de l’étranger en 2015.

Les crédits consacrés aux bourses scolaires augmentent, quant à eux, de 5, 6 % ; cela doit être salué. Je rappelle toutefois, sans malice aucune, qu’il s’agit seulement du respect de la promesse présidentielle de compenser intégralement en trois ans la suppression de la PEC, la prise en charge des frais de scolarité des enfants français scolarisés dans un établissement français à l'étranger.

Je regrette, en revanche, que, dans le cadre du programme 185, la subvention destinée à l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger subisse une baisse de 2 %. Certes, l’ensemble des opérateurs de l’État doit participer aux économies. Le Gouvernement a cependant fait de l’éducation un véritable marqueur de sa politique, ce que nous saluons. Nous regrettons donc d’autant plus que cette priorité, une fois de plus, ne soit pas déclinée auprès de nos jeunes compatriotes qui résident à l’étranger. Je reviendrai sur ce point lors de l’examen de l’amendement tendant à annuler cette baisse.

S’agissant de l’enseignement supérieur, je me félicite que les bourses de mobilité accordées aux étudiants étrangers soient préservées. Dans un contexte de plus en plus concurrentiel, le maintien de ce dispositif est bienvenu.

Le classement QS, du nom de cet institut britannique qui a récemment élu Paris meilleure ville du monde pour les étudiants, révèle combien notre pays conserve une attractivité importante. Dans ce domaine, Paris est capable de rivaliser avec des villes comme Melbourne ou Londres. L’action menée par Campus France n’est certainement pas étrangère à cette performance. Cet opérateur joue aujourd’hui pleinement son rôle et jouit d’une réelle reconnaissance dans le domaine de la mobilité étudiante.

Le lancement, le 26 novembre dernier, de France Alumni, le nouveau réseau social français destiné aux étrangers ayant étudié en France, est aussi une très bonne nouvelle. Cet outil nous permettra de garder un lien avec ces anciens étudiants, qui sont autant d’ambassadeurs de la France à l’étranger et d’atouts précieux pour notre diplomatie économique.

J’en viens à la situation de l’Institut français, qui doit lui aussi faire face à une baisse de sa dotation à hauteur de 2 %. Cet établissement public industriel et commercial, créé par la loi du 27 juillet 2010, est chargé de la promotion de la culture française hors de nos frontières.

Le nouveau contrat d’objectifs et de moyens 2015-2017, qui sera sans doute signé au début de l’année 2015, devra nécessairement prendre en compte la baisse de ses crédits et définir des financements alternatifs. Des choix stratégiques devront également être opérés. Je fais toute confiance au talent de son nouveau président, Antonin Baudry, auteur de la célèbre bande dessinée Quai d’Orsay et diplomate expérimenté, qui prendra ses fonctions le 1er janvier prochain.

Après des débuts difficiles et la décision prise il y a un an de ne pas lui rattacher le réseau de coopération et d’action culturelle du ministère des affaires étrangères, l’Institut français est en passe de devenir une marque culturelle reconnue dans le monde entier.

Pour conclure, je veux évoquer le redéploiement de notre réseau consulaire, atout essentiel de notre diplomatie. Il se poursuit avec la transformation de treize nouvelles ambassades en postes de présence diplomatique. Je comprends parfaitement que cette modularité du réseau soit un enjeu central pour le ministère.

Concernant le consulat d’Édimbourg, cependant, et au-delà de la question de la Auld Alliance, je me dois de relayer l’inquiétude des quelque 10 000 Français résidant en Écosse qui, quoi qu’on en dise, ne bénéficieront plus de la même qualité de service.

Un problème similaire, quoique très différent par le nombre de personnes concernées, se pose à Tegucigalpa. Les conseillers consulaires m’ont alertée notamment sur les réunions des conseils consulaires dédiés aux bourses scolaires, qui contraignent dorénavant tous les acteurs du lycée à se déplacer à Guatemala. J’aimerais savoir si, pour d’évidentes raisons pratiques et dans un souci d’équité, ces réunions pourraient avoir lieu dans les locaux du lycée franco-hondurien de Tegucigalpa.

Je terminerai en indiquant que je soutiendrai l’amendement n° II–78, relatif aux ambassadeurs thématiques, qu’a déposé Richard Yung, au nom de la commission des finances. §

Debut de section - PermalienPhoto de Leila Aïchi

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je vais m’exprimer maintenant au nom du groupe écologiste sur l’ensemble de la mission «Action extérieure de l’État », qui voit, cette année encore, ses crédits diminuer de 2, 1 % à périmètre constant.

Il faut préciser que nous examinons pour la première fois les crédits de cette mission selon la nouvelle architecture gouvernementale puisque, depuis le décret n° 2014–400 du 16 avril 2014, le tourisme et le commerce extérieur relèvent du ministère des affaires étrangères. Cet élargissement reflète la volonté d’adapter notre diplomatie aux défis multidimensionnels d’aujourd’hui, non seulement politiques, sécuritaires, culturels, mais aussi économiques et environnementaux.

Notre diplomatie doit donc être dynamique afin de s’adapter à l’évolution rapide de l’environnement international. Il y va du statut de la France en tant que puissance européenne et mondiale et de sa capacité à encourager le multilatéralisme.

En ce sens, je me réjouis, tout d’abord, que les moyens alloués à l’action européenne dans le cadre du programme 105 soient préservés. Dans un contexte de maîtrise des finances publiques, il paraît en effet essentiel de promouvoir l’échelon européen sur le plan politique comme d’un point de vue fonctionnel, avec, notamment, la mutualisation des implantations immobilières. Le projet de loi de finances pour 2015 porte la trace de la volonté de réorienter le projet européen afin que ce dernier soit plus solidaire et plus abouti. Nous ne pouvons qu’encourager une telle initiative !

Le dynamisme de notre politique étrangère passe également par le redéploiement de notre réseau diplomatique. Nous notons l’entrée de la Chine, de l’Inde et du Brésil parmi les dix postes diplomatiques français les plus importants, mais nous ne pouvons que constater qu’au 31 décembre 2013, l’ambassade de France au Maroc comptait 336 équivalents temps plein, soit plus que notre ambassade en Chine, qui en compte 311. De même, le Sénégal devançait largement le Brésil avec 208 équivalents temps plein, contre seulement 177. Des efforts restent donc à faire pour adapter les objectifs de notre politique étrangère aux enjeux d’aujourd’hui.

Ceux-ci ne relèvent pas seulement des domaines économique et politique. Il s’agit également pour la France de soutenir sa diplomatie culturelle et d’influence. À ce titre, le programme 185 affiche pour 2015 une progression de son budget de 2, 7 %, en raison de l’intégration des crédits destinés à Atout France. À périmètre constant, ses crédits diminuent en réalité de 1, 94 %, ce qui correspond pour l’essentiel à la baisse des dotations des opérateurs, conformément à la norme de 2 % de réduction fixée par le Gouvernement.

Les autres crédits bénéficient d’une évolution relativement favorable, notamment en ce qui concerne les crédits d’intervention en matière de politique culturelle, de promotion de la langue française ou de défense de l’attractivité de l’enseignement supérieur et de la recherche.

Je note plus particulièrement, pour la regretter, la baisse de 3, 36 % des crédits alloués à l’action Enjeux globaux, qui vise à renforcer la coordination internationale en matière d’environnement et à promouvoir la vision française et européenne d’une mondialisation mieux régulée.

Gardons à l’esprit que notre diplomatie culturelle est un atout majeur et qu’elle doit être renforcée, car elle concourt au rayonnement de la France au même titre que le tourisme.

À cet égard, je dirai quelques mots sur notre politique en matière de visas. Cette dernière tend souvent à compliquer, rallonger et retarder le délai de traitement des documents administratifs. Si l’on note une amélioration des procédures de délivrance de visas de court séjour, notamment à une augmentation, pour la troisième année consécutive, des effectifs, avec vingt-cinq emplois supplémentaires, un certain nombre de difficultés pratiques persistent toujours sur le terrain. Il est donc indispensable que les moyens alloués au programme 105, en tant que programme de soutien à l’ensemble du réseau consulaire, et au programme 151 soient préservés dans ce domaine.

Outre les aspects fonctionnels et administratifs, qui sont certes indispensables, je souhaite revenir sur un volet plus politique. En effet, je m’inquiète de la nouvelle baisse des crédits accordés à la coopération de sécurité et de défense.

Il s’agit pourtant là d’un outil majeur de notre politique de prévention au travers de la formation, du conseil et de l’expertise technique que nous apportons. Alors que la coopération structurelle est un outil permettant un effet de levier important, les crédits qui lui sont consacrés enregistrent de nouveau une diminution de 3, 6 % par rapport à la loi de finances de 2014, qui avait déjà marqué une baisse de 4, 3 % par rapport à 2013.

Il me paraît utile de rappeler ce qui est indiqué dans la présentation de la programmation pluriannuelle de la mission : « La France doit rester une puissance d’influence et développer une diplomatie de la paix [...] pour assurer la stabilité et la sécurité dans le monde » ?

La baisse continue des moyens financiers, capacitaires et humains alloués à cet outil de coopération, de stabilisation et de reconstruction a des conséquences directes sur la capacité de la France à « gagner la paix ». La prévention ne saurait devenir une variable d’ajustement sur le long terme. Alors que tout le monde déplore le coût exorbitant de nos OPEX, comment comprendre que la France ne mette pas tout en œuvre pour minimiser en amont la probabilité d’intervention militaire sur le terrain ? Il s’agit là d’une incohérence flagrante de notre politique étrangère.

Enfin, concernant l’objectif d’une « meilleure gouvernance mondiale » poursuivi par le Gouvernement, le groupe écologiste se félicite de l’inscription, dans ce projet de budget, du programme 341, consacré à la Conférence Paris Climat 2015.

Il s’agit là, en effet, d’un événement majeur pour le rayonnement de la France sur la scène internationale. Cette échéance sera l’occasion pour notre pays de se positionner comme leader dans le cadre des négociations internationales sur le climat. Mais surtout, même si nous, écologistes, sommes conscients des contraintes budgétaires, nous considérons que l’urgence climatique ne doit souffrir ni de la concurrence, ni de la démagogie, ni de l’irresponsabilité.

Certains d’entre vous se sont interrogés sur la pertinence du niveau des crédits demandés dans le cadre de la COP 21. Le recours à des partenariats privés proposés par plusieurs collègues pose un certain nombre de questions. Quels partenariats ? Quelle visibilité ? Quelle transparence ? Quelles modalités ? Il est primordial que nous maintenions en l’état le budget alloué à l’organisation de ce sommet international.

Le temps n’est plus aux recommandations ni aux hypothèses ; le temps est à l’action !

Fort des récentes déclarations du Président de la République et du Premier ministre dans le cadre de la Conférence environnementale, qui s’est tenue la semaine dernière à Paris, le Gouvernement français doit apparaître déterminé en envoyant un signal fort en amont de la COP 21.

Pour l’ensemble de ces raisons, et malgré quelques réserves, le groupe écologiste votera en faveur des crédits de la mission « Action extérieure de l’État », qui est le cœur du rayonnement de la France sur la scène internationale. §

Debut de section - PermalienPhoto de Robert del Picchia

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, j’aurais aimé poser quelques questions à M. Fabius, mais nous connaissons les raisons de son absence. J’aurais aimé, par exemple, l’interroger sur la reconnaissance de l’État palestinien. Que pense-t-il d’une résolution d’origine parlementaire ?

J’aurais souhaité également l’interroger sur la situation en Ukraine et les relations avec Moscou, la lutte contre le terrorisme et la sécurité des Français de l’étranger, le virus Ebola...

J’aurais pu parler de la grande politique étrangère de la France, mais mon collègue Jean-Pierre Raffarin l’a fait beaucoup mieux que je ne saurais le faire !Aussi limiterai-je mon propos aux questions relatives aux Français de l’étranger et, ne vous inquiétez pas, monsieur le secrétaire d'État, j’ai quelques questions à vous poser à ce sujet.

Commençons d’abord par la fameuse AEFE. Certains de nos collègues ont parlé de « l’Agence pour l’enseignement du français à l’étranger », alors qu’il s’agit de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger ! Vous pouvez vous reporter à la loi, mes chers collègues !

À l’instar de nombreux orateurs, à commencer par Richard Yung, je regrette la baisse de 2 % du budget de l’AEFE.

Mes chers collègues, imaginez une seconde que l’on réduise de 2 % les crédits alloués à l’enseignement français en France… Quelque 620 millions d’euros ! Les enseignants, les parents d’élèves ne défileraient-ils pas dans les rues de Paris et de toutes les autres grandes villes de France ? Mais là, comme cela concerne les Français de l’étranger, on n’en parle pas !

Toutefois, je me réjouis de la volonté du ministère des affaires étrangères et du ministère de l’éducation nationale de renforcer leurs liens. On en parle depuis vingt ans ! Moi-même j’en parle depuis au moins seize ans, depuis que je siège au Sénat ! Mais on ne voit rien venir, les deux ministères voulant conserver leurs prérogatives et ne pas abandonner une partie de leur pouvoir en ce domaine.

Il me semble qu’une mesure concrète pourrait voir le jour ou, à tout le moins, être mise en débat : la prise en charge par l’éducation nationale des bourses scolaires servies aux élèves Français de l’étranger. Cela ne représenterait qu’une goutte d’eau pour l’éducation nationale : quelque chose comme 0, 001 % de son budget ! Et je ne parle pas des reliquats, qui pourraient alimenter le budget des bourses des Français de l’étranger sans porter un coup à l’éducation nationale, mais qui rendraient un grand service à l’AEFE.

Concernant la formation professionnelle de nos compatriotes à l’étranger, il semble que celle-ci soit menacée. Qu’en est-il ?

Je m’attarderai un instant sur les compétences des consulats d’influence. Je pense en particulier au consulat général d’Édimbourg, qui doit être transformé en consulat à gestion simplifiée. Cette perspective inquiète, à juste titre, nos ressortissants dans la région. En effet, ils ignorent jusqu’à présent quelles seront les attributions dévolues à ce consulat. Ils se demandent en particulier s’ils devront se rendre à Londres pour effectuer leurs démarches administratives. Quel est donc l’avenir de ce consulat, monsieur le secrétaire d'État ?

À l’heure où l’on vante la simplification administrative, il me paraît essentiel, pour nos ressortissants, de pouvoir au moins continuer à déposer, si ce n’est à traiter, leurs demandes de passeport, carte d’identité, acte civil, bourse scolaire dans les consulats d’influence.

Par ailleurs, la proposition de création d’une agence consulaire au sein de l’ambassade de France à Ottawa a-t-elle été retenue ? Car il me semble que, pour le moment, les Français doivent se déplacer à Toronto.

J’aborderai maintenant les prérogatives du mandat des conseillers consulaires

On a voulu réformer la représentation des Français de l’étranger, en accroissant le nombre de leurs représentants et en cherchant à faire d’eux de véritables élus de proximité. Fort bien ! Mais encore faut-il qu’ils soient reconnus comme tels par les postes consulaires ou, tout au moins, qu’ils apparaissent en leur qualité d’élus des Français de l’étranger sur leur site internet. Certaines ambassades n’ont pas encore engagé cette démarche.

Par ailleurs, il faut qu’ils soient identifiables par nos ressortissants et qu’ils puissent communiquer facilement ensemble pour mettre en commun leurs expériences et leurs solutions. Cela passe, semble-t-il, par un espace intranet ou, pour certains, un passeport de service : cette dernière idée a été abandonnée, alors que des représentants en auraient besoin pour se rendre dans d’autres pays, parfois des pays où il est difficile d’entrer. Peut-être faudrait-il également mettre en place une messagerie commune.

Tout cela suppose une réforme de la représentation.

La représentation des Français de l’étranger est évidemment un sujet fondamental pour nous. C’est pourquoi j’ai déposé, en juin dernier, une proposition de loi visant à revoir la réforme de 2013, que je ne remets pas vraiment en cause, afin de renforcer le rôle des élus dans le dispositif institutionnel.

Je propose également, au travers d’un procédé relativement facile à mettre en place, de remédier aux nombreux dysfonctionnements observés lors des élections des conseillers consulaires.

À cet égard, j’ai noté avec intérêt que les députés se sont insurgés contre la tentative de dématérialiser les documents électoraux lors des prochaines élections départementales : ceux-ci ont supprimé la disposition visée. L’impérieuse nécessité d’informer efficacement les électeurs pour stimuler la participation a prévalu sur les considérations budgétaires. Je pense que le même raisonnement doit être appliqué pour ce qui concerne les élections locales organisées à l’étranger.

C’est pourquoi le retour aux professions de foi imprimées est l’une des propositions qui me semblent devoir être débattues par le Parlement. Les consulats pourraient adresser les professions de foi sur papier au moins aux électeurs n’ayant pas communiqué de mail pour voter par internet, soit 40 % des électeurs inscrits. Ceux-ci n’ont aucune information sur les listes parmi lesquelles ils doivent choisir un candidat. Imaginez le tollé si pareille situation se produisait en France !

La composition actuelle de l’Assemblée des Français de l’étranger est un autre problème. Il nous semble fondamental que l’ensemble des élus des Français de l’étranger – et non pas seulement les quatre-vingt-dix conseillers consulaires ! – puisse être réuni à Paris au moins une fois par an. C’est vital pour une bonne démocratie.

J’espère que ma proposition de loi sera rapidement inscrite à l’ordre du jour de nos travaux, car il est nécessaire d’avoir un débat sur la représentation des Français expatriés. Monsieur le secrétaire d'État, si le Gouvernement souhaite reprendre nos propositions dans un projet de loi, nous soutiendrons celui-ci très volontiers ! §

Pour l’heure, je voterai la mission « Action extérieure de l’État », et j’espère obtenir des réponses aux questions légitimes que je vous ai posées.

Comme l’a souligné notre collègue Jean-Pierre Raffarin, il faut une grande politique étrangère pour la France. J’ajouterai que cette grande politique étrangère passe aussi par les Français de l’étranger. §

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Leconte

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la mission « Action extérieure de l’État » comprend le programme 105, « Action de la France en Europe et dans le monde », le programme 151, « Français à l’étranger et affaires consulaires », le programme 185, « Diplomatie culturelle et d’influence », et, provisoirement, le programme 341 relatif à l’organisation de la Conférence Paris Climat 2015.

Hors le programme 341, ce budget, qui s’établit à 2, 9 millions d’euros, est stable. Toutefois, si l’on examine les crédits dans le détail, on peut formuler plusieurs remarques.

Tout d’abord, le tourisme est intégré à budget constant. Les crédits du programme 151, qui vise à offrir un service public de qualité aux Français de l’étranger, passent de 211 millions à 200 millions d’euros.

Quant aux crédits du programme 185 relatifs à l’AEFE, ils passent de 417 millions à 408 millions d’euros, alors que plus de 9 000 élèves sont scolarisés par an et que plus de 400 classes sont ouvertes chaque année. À l’évidence, comme cela a été souligné, la priorité à l’éducation n’a pas franchi nos frontières…

Enfin, les crédits dévolus à la coopération culturelle s’établissent à 67 millions, contre 74 millions d’euros l’an passé.

Le ministère des affaires étrangères et du développement international a, selon moi, une immense tâche à remplir : d’une part, faire comprendre la France d’aujourd'hui au monde, d’autre part, faire comprendre le monde d’aujourd'hui à la France. J’ai la conviction que, s’il parvenait à la mener à bien, avec nos idéaux d’universalité et notre diversité, tous les doutes que la France nourrit elle-même se dissiperaient et toutes les forces de la France se réuniraient pour nous aider à sortir de la crise.

Aussi, l’action de ce ministère est absolument prioritaire et mérite les moyens adéquats pour conduire cette action.

Agir aujourd'hui pour le rayonnement culturel, c’est avoir de l’influence politique demain afin d’être capable, après-demain, de faire du commerce et de créer des emplois en France dans nos entreprises.

Je prendrai deux exemples pour montrer le lien entre l’investissement culturel, la politique et l’économie.

Tout d’abord, dans son rapport sur la francophonie économique, Jacques Attali établit une corrélation entre le pourcentage de francophones dans un pays et la part de marchés de nos entreprises dans ce même pays.

Ensuite, la relation de la France avec la Turquie passe par des hauts et des bas, alors qu’elle est très ancienne et stratégique. Elle a été stabilisée par des dispositifs anciens, tels que les lycées congréganistes francophones, un dispositif renforcé sur l’initiative de François Mitterrand dans le cadre de la MICEL, la mission de coopération éducative et linguistique, et notre coopération avec l’université Galatasaray. Ces actions doivent être poursuivies.

Ces deux exemples montrent combien il est important pour notre influence politique et notre développement économique d’investir d’abord dans le domaine de la culture.

Aujourd’hui, nous faisons face à des enjeux géopolitiques très lourds pour notre sécurité nationale. Jamais peut-être depuis la crise de Suez ou la crise de Cuba nous ne nous sommes trouvés dans une situation aussi dangereuse pour notre propre sécurité, mais aussi pour celle des Français de l’étranger. Je pense aussi aux crises sanitaires, en particulier à celle que cause le virus Ebola.

Dans ce contexte difficile, nous devons avoir les moyens d’accompagner les efforts et la mobilisation des agents du ministère des affaires étrangères. À cet égard, je tiens à rendre un hommage particulier, d’une part aux centres de crise, d’autre part à l’ensemble des agents de recrutement local, qui travaillent souvent dans des conditions difficiles, parfois avec des contrats précaires. Leur action mérite d’être saluée.

La réforme du réseau implique aussi un changement d’état d’esprit. En termes plus triviaux, je dirai que la « diplomatie de papa », c’est fini ! Lorsque les ambassades ne comptent plus que quatre ou cinq personnes, elles doivent pouvoir s’appuyer sur les communautés françaises ; sinon, elles n’auront plus d’influence. C’est la raison pour laquelle la réforme de la représentation des Français de l’étranger engagée l’année dernière avait beaucoup d’importance. Lorsqu’une réforme du réseau est engagée, la concertation doit avoir lieu en amont, afin de mobiliser les communautés françaises.

La réforme du réseau doit maintenant être appliquée, et la concertation doit désormais faire partie des réflexes de l’ensemble de notre diplomatie. J’évoquerai deux exemples : la fermeture du Palais Clam Gallas, qui a été décidée à Paris, alors qu’il n’est pas un diplomate ayant été en poste à Vienne qui défendrait cette décision ; quant à celle qui intéresse le consulat d’Édimbourg, c’est une erreur sur le fond comme sur la forme, et elle va démobiliser notre communauté dans un territoire d’une importance politique majeure tant pour la Grande-Bretagne que pour l’ensemble de l’Union européenne.

J’ajoute que certains postes sont notoirement en sous-effectif. Dans des pays où l’état civil est défaillant, nos compatriotes voient alors leurs droits violés, et le phénomène risque de s’amplifier.

Bien sûr, il faut réformer notre réseau, mais en y appliquant la politique de simplification qui a été mise en place en France. Je pense là, en particulier, aux passeports : en France, ceux-ci vont pouvoir être renouvelés par voie électronique ; j’espère que cela sera également possible à l’étranger. Sinon, la rationalisation se traduira, pour les Français de l’étranger, par une situation kafkaïenne !

J’ai aussi quelques inquiétudes concernant les visas biométriques, qui seront mis en place l’an prochain pour les ressortissants de la Chine, de l’Inde, de la Russie et de l’Ukraine. Un délai de quarante-huit heures a été évoqué, mais comment cela sera-t-il possible si les habitants de ces pays doivent systématiquement se déplacer vers leur capitale ? L’attractivité de la France ne va-t-elle se trouver ainsi mise en cause ?

Depuis cette année, le développement international est intégré à la mission « Action extérieure de l’État ». C’est une bonne réforme, mais le périmètre de cette mission devrait inclure véritablement l’ensemble de ses aspects, ce qui permettrait de mettre totalement fin aux éventuels doublons.

La Cour des comptes a mis en évidence, en juin 2013, dans une note sur le budget des affaires étrangères, qu’une trop forte baisse du nombre d’emplois avait des effets négatifs, conduisant à un gonflement des frais de fonctionnement dans la mesure où le travail devant malgré tout être fait. J’ai l’impression que les conclusions de cette note n’ont pas toutes été tirées dans le budget tel qu’il nous est présenté.

Cela étant dit, monsieur le secrétaire d’État, compte tenu de nos ambitions, vous pouvez compter sur le Parlement, en particulier sur le Sénat, pour se battre à vos côtés et défendre ce budget.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Deromedi

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le développement des échanges internationaux de la France repose sur trois grands piliers : l’économie, la culture, la recherche.

Notre pays a été honoré cette année par l’attribution des prix Nobel d’économie et de littérature et de la très prestigieuse médaille Fields de mathématiques. C’est la preuve éclatante que la France continue à occuper une place importante sur l’échiquier mondial.

Néanmoins, les chiffres parlent d’eux-mêmes. La France compte deux fois moins d’entreprises exportatrices que l’Italie et près de quatre fois moins que l’Allemagne. Un millier seulement des 120 000 entreprises françaises exportatrices assurent 70 % des exportations. Le déficit du commerce extérieur, hors énergie, a été réduit à 13, 5 milliards d’euros, mais le total en 2013 a été de 61, 2 milliards d’euros.

Pour y remédier, la diplomatie économique est un concept porteur. Le regroupement des affaires étrangères et du commerce extérieur dans un seul ministère est novateur. Désormais, le ministre des affaires étrangères « est compétent pour définir et mettre en œuvre la politique du développement international de la France, notamment au titre du commerce extérieur et du tourisme ».

Les Français de l’étranger ont longtemps demandé un ministère particulier. Votre décret d’attribution, monsieur le secrétaire d'État, les associe au commerce extérieur et au tourisme. C’est une excellente complémentarité !

Le commerce extérieur, ce n’est pas seulement une réalité économique abstraite et des statistiques sans âme, ce sont des hommes et des femmes dynamiques et inventifs qui mettent leur intelligence, leur expérience et leur énergie au service de notre pays.

À cet égard, permettez-moi de souligner tout particulièrement l’action des conseillers du commerce extérieur de la France, qui a toujours été l’un des moteurs de nos échanges économiques. Au total, 4 300 hommes et femmes bénévoles, chefs d’entreprise, entrepreneurs, sont répartis dans 146 pays dans le monde. Comment comptez-vous les impliquer dans la réforme en cours, monsieur le secrétaire d’État ?

Vous disposez de compétences importantes dans le domaine du commerce extérieur, qu’il s’agisse des négociations commerciales européennes et internationales ou de celles qui sont menées dans le cadre de l’Organisation mondiale du commerce. Vous connaissez certainement, monsieur le secrétaire d’État, le vœu déjà très ancien, mais toujours actuel, de nos élus de l’étranger, les conseillers à l’Assemblée des Français de l’étranger, et, à présent, les conseillers consulaires, d’être informés et consultés sur ces négociations. Nos élus ont l’avantage de bien connaître le terrain. Ils peuvent apporter leur expertise précieuse dans ces négociations, tant d’un point de vue fiscal que du point de vue plus général des relations économiques.

Dans cette nouvelle politique de la diplomatie économique, il y a toutefois quelques bémols. Le regroupement des moyens n’a pas été total. La réforme n’a pas entraîné un regroupement général des services à l’export. Le ministère de l’économie a conservé une large partie de ses attributions.

Ainsi, les services de la direction générale du Trésor et de la direction des entreprises n’ont été transférés qu’en partie au ministère des affaires étrangères et du développement international, celui-ci pouvant seulement en « disposer. » Les services économiques extérieurs de la direction générale du Trésor sont placés sous l’autorité conjointe de deux ministères. Le ministère des affaires étrangères et du développement international n’est qu’« associé » à la politique de financement de l’exportation. Les instruments financiers gérés par la Banque publique d’investissement et la COFACE restent principalement du ressort du ministère des finances.

Le constat est le même en ce qui concerne la nomenclature budgétaire. Deux lignes de crédits seulement ont été transférées de la mission « Économie » à la mission « Action extérieure de l’État » : les crédits de fonctionnement d’« État-major » et la dotation principale à l’agence Atout France, soit près de 31 millions d’euros. Quant à la nouvelle agence qui remplacera Ubifrance et l’AFII – Agence française des investissements internationaux –, ainsi que, a fortiori, les services économiques extérieurs, ils restent financés par la mission « Économie».

La question qui se pose, monsieur le secrétaire d’État, est donc de savoir si le Gouvernement envisage d’aller plus loin dans le regroupement des services et des crédits. Quelles procédures entend-il mettre en œuvre pour que les deux ministères travaillent de façon coordonnée ? Sans nouvelles avancées, la dispersion administrative et budgétaire que nous constatons risque de paralyser notre action en faveur du commerce extérieur.

À l’échelon local, vous avez souhaité mieux mobiliser l’ensemble des services des ambassades sur les thématiques économiques et sur le soutien de nos entreprises à l’international. L’évaluation des ambassadeurs n’en sera que plus importante. Elle tiendra compte de leur implication, à partir de cinq critères d’évaluation. Pouvez-vous nous donner des informations, monsieur le secrétaire d’État, sur ces procédures d’évaluation ?

La Cour des comptes a demandé une révision de la cartographie de nos services économiques, qui sont d’après elle trop centrés sur l’Europe : les pays européens et de l’OCDE concentrent en effet 40 % des effectifs, à parité avec les pays émergents et porteurs – 39%. Je souscris à cette analyse. La Cour des comptes recommande des formes de représentations allégées et concertées entre le ministère des affaires étrangères et du développement international et les ministères économiques et financiers. Quelles sont, monsieur le secrétaire d’État, les intentions du Gouvernement pour répondre aux observations de la Cour des comptes ?

La mission d’animation économique des ambassadeurs doit s’appuyer sur des « conseils économiques. » Leur création est prévue dans les pays significatifs pour notre commerce extérieur, où les exportations françaises dépassent 50 millions d’euros. Au total, 109 postes sur les 120 concernés ont créé de tels conseils. Ceux-ci doivent être réellement représentatifs des intérêts économiques français et inclure, par exemple, les experts techniques internationaux de l’innovation, les conseillers du commerce extérieur et les chefs d’entreprise. Pouvez-nous nous informer, monsieur le secrétaire d’État, sur les dispositions prises dans ce domaine ?

Je note le concours de personnalités qui sont un peu les missi dominici des relations économiques avec des pays clés. Plusieurs de nos collègues sénateurs en font partie : Jean-Pierre Raffarin pour l’Algérie, Alain Richard pour les Balkans.

La fusion prochaine de l’AFII et d’Ubifrance devrait permettre de rendre plus cohérent le dispositif français de soutien à l’international. Pouvez-vous nous préciser les échéances et le dispositif de cette réforme ?

J’évoquerai enfin la politique des visas. Elle doit être mise au service de la croissance économique et de l’attractivité de la France. Un dispositif de délivrance des visas en quarante-huit heures est expérimenté en Chine.

La gestion des visas pour études a permis à la France de retrouver son rang de troisième pays d’accueil. Nous attendons, monsieur le secrétaire d’État, de nouveaux progrès dans ce domaine.

Enfin, il est bon d’élaborer une nouvelle structuration des différents services et acteurs à l’étranger, mais il faut qu’il y ait un retour, une étroite coopération de ces nouvelles structures à l’étranger avec les services économiques en France, qu’il s’agisse de la coopération décentralisée, des chambres de commerce et d’industrie, des chambres d’agriculture, de BPI France. Actuellement, cette tâche échoit à l’excellent réseau des conseillers du commerce extérieur. Quels sont les projets du Gouvernement dans ce domaine ?

Permettez-moi, monsieur le secrétaire d’État, de terminer par un petit excursus gastronomique. Talleyrand l’avait dit : la gastronomie française est l’un des meilleurs agents de notre diplomatie. Je remarque que Singapour a été classé parmi les pays prioritaires pour l’exportation des produits français liés à la gastronomie. Voilà qui conjugue excellemment la convivialité et la diplomatie ! §

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, l’action extérieure de l’État est un domaine qui nous semble essentiel sur l’ensemble des travées de cet hémicycle. Il s’agit de la voix de la France dans le monde, de la présence de notre pays et de son influence dans un espace globalisé, marqué par un accroissement des crises et des tensions.

Porter la parole de la France dans ce monde en pleine mutation impose de définir nos priorités et de réexaminer notre présence dans certaines parties du monde.

Il s’agit non pas, et nous l’avons bien compris, de supprimer notre présence dans certains pays, mais bien de veiller à affirmer une présence efficace avec des moyens adéquats. Évidemment, il ne faut pas tourner le dos à ce que l’on appelle notre « héritage historique », car il est nécessaire de maintenir une présence dans des zones porteuses d’une histoire commune. Tout en maintenant une présence, il devient pertinent de la redimensionner et de procéder à des redéploiements d’effectifs en direction des zones émergentes.

La question du rythme de ces redéploiements se pose. Il semble assez lent pour certains. M. le ministre des affaires étrangères a répondu à cette critique, qu’il a jugée fondée, lors du débat à l’Assemblée nationale. Je peux comprendre certaines inquiétudes sur les mutations du réseau. Elles me paraissent légitimes, mais force est de constater que notre présence évolue différemment sans marquer un réel recul.

L’action extérieure de l’État se compose de quatre programmes. Ils sont la marque de notre compréhension des défis contemporains et de notre volonté d’y répondre de manière appropriée.

L’un des défis concerne la sécurité du monde, marqué par une succession de crises à plusieurs échelles. Il nous revient de porter une parole stable, gage d’apaisement des tensions, et de veiller à disposer des bons outils d’analyse et d’action face aux soubresauts de certaines régions.

Notre présence doit être gage de soutien à nos entreprises afin qu’elles puissent trouver de nouveaux marchés porteurs et y accéder. Ils seront ensuite autant de relais de croissance. Nous soutenons fortement la vision de la diplomatie économique portée par M. le ministre des affaires étrangères.

Notre présence est aussi un déterminant essentiel pour diffuser notre message sur la nécessité d’une régulation économique et politique à l’échelle de la planète.

Les situations encore trop nombreuses de dumping social, fiscal et environnemental doivent nous inciter à rechercher des solutions.

Dans un monde en forte mutation, la France se doit aussi de faire entendre les valeurs qu’elle défend et d’aider à la transition démocratique de certains pays. Notre capacité à constituer une force de proposition, d’une part, et à respecter nos engagements internationaux, d’autre part, est une constante de notre politique extérieure.

La crise est également multidimensionnelle : outre les conflits armés, nous devons faire face aux défis engendrés par la crise économique qui secoue la construction européenne depuis maintenant plusieurs années.

Alors qu’une nouvelle Commission vient de se mettre en place dans un contexte de questionnement des peuples sur la construction européenne et sur la pertinence des politiques économiques et sociales menées, nous devons contribuer à définir les priorités des politiques internes en hiérarchisant clairement les besoins de l’Europe. Il nous faut veiller à ce que notre influence demeure et que la voix de la France soit prise en compte dans nombre de questions lourdes de sens pour l’avenir national et européen.

L’ensemble de ces défis et la volonté de mieux répondre aux enjeux actuels justifient la réorganisation progressive des services de l’État.

Le budget présenté par le ministère des affaires étrangères est resserré, dans un contexte budgétaire contraint. Il permet cependant une réorientation de notre action vers les priorités du quinquennat. Je ne reprendrai pas le détail chiffré de toutes les actions, nos rapporteurs l’ont fort bien exposé. De fait, la grande innovation de ce budget consiste à concentrer pour la première fois l’ensemble des moyens d’influence au sein du ministère, faisant de celui-ci le bras armé de l’action extérieure de la France.

Ce budget est ainsi le premier construit dans le cadre du nouveau périmètre incluant le tourisme, via le programme 185, « Diplomatie culturelle et d’influence », qui consacre 30 millions d’euros au fonctionnement d’Atout France.

J’insisterai pour ma part sur deux thèmes : le tourisme et les étudiants étrangers.

Pays le plus visité au monde, la France a à offrir des paysages, des cultures, une gastronomie, un art de vivre et des services non délocalisables qui participent également de nos valeurs et de nos principes. De plus, le tourisme est vecteur de paix et de partage, comme cela a été dit.

Grâce à ces nombreux atouts, nous devrions pouvoir prendre notre part dans l’accroissement de ce marché au niveau mondial, mais encore faut-il s’en donner les moyens ! Sur cette question, je partage les observations de notre collègue Jacques Legendre.

La subvention de l’État à Atout France s’élève à 30, 38 millions d’euros, avant la reprise de la réserve de précaution, qui ramène le budget à seulement 28, 7 millions d’euros, ce qui rend l’exercice budgétaire très tendu sur le plan de la soutenabilité pour Atout France. Michelle Demessine a déjà évoqué la diminution des crédits ; je n’y reviens pas.

J’ai deux observations à formuler sur ce qu’on appelle pudiquement la « réserve de précaution », qui est portée à 1, 6 million d’euros pour 2015.

Premièrement, en cinq ans, il n’y a eu aucune levée partielle de la réserve de précaution. En cinq ans, Atout France a ainsi supporté 8 millions d’euros de réserve de précaution, auxquels s’ajoutent 2 millions d’euros de gel et 373 000 d’euros de « surgel », soit, au total, plus de 10 millions d’euros cumulés sur la période. Ce n’est plus une « réserve de précaution » : c’est bien un gel de crédits par anticipation, comme l’a fort justement souligné notre collègue Richard Yung.

Deuxièmement, la méthode utilisée pour le calcul de cette réserve de précaution m’apparaît contestable. Si l’on admet le principe de la réserve de précaution, son montant devrait être calculé sur la seule base de la subvention de l’État. Or ce n’est pas le cas, puisqu’il s’agit d’un pourcentage appliqué à l’ensemble du budget prévisionnel de la structure – dont le statut, rappelons-le, est celui d’un groupement d’intérêt économique –, laquelle complète son budget par des apports extérieurs assez importants, le rapport étant de 1 à 8, ainsi que Michelle Demessine l’a rappelé.

Cela revient à dire que plus Atout France enregistre d’adhésions, plus le GIE arrive à convaincre ses partenaires et trouve des budgets complémentaires pour la promotion de la France, plus cette structure est pénalisée par le mode de calcul choisi par Bercy pour établir le montant de cette réserve de précaution.

Monsieur le secrétaire d’État, je ne pense pas que votre intention soit de pénaliser la performance. Je vous demande donc de veiller à ce que le calcul de cette réserve de précaution soit réalisé dorénavant uniquement sur la dotation de l’État, et non sur le dynamisme du groupement d’intérêt économique.

Je tiens à rappeler qu’Atout France a déjà accompli beaucoup d’efforts, puisque, il y a quelques années, nous avions souhaité par la loi – j’en étais le rapporteur – la fusion de trois services de l’État chargés de politiques touristiques et du maintien de notre réseau à l’étranger. Malgré les doutes de certains, la fusion s’est particulièrement bien passée et des économies d’échelle ont été réalisées. Mieux, Atout France a réussi cette fusion sans dommage en faisant naître un véritable esprit d’entreprise au sein de ces services remplissant des fonctions différentes, mais complémentaires, en tout cas essentielles à notre industrie touristique.

J’en viens à la question des étudiants.

Je salue le lancement, sous l’autorité de M. le ministre des affaires étrangères, du réseau social France Alumni, qui permet à des personnes ayant étudié en France de se retrouver. Le Gouvernement a accompli là un acte fort, essentiel même. Par ce geste, il montre tout l’intérêt qu’il témoigne à ces étudiants ou ex-étudiants et tente de faire oublier la trop fameuse « circulaire Guéant » du 31 mai 2011. Il est clair que les étudiants que nous recevons sont les meilleurs prescripteurs pour nos entreprises et nos meilleurs ambassadeurs. Ils seront à la manœuvre pour nos emplois de demain.

Au-delà des observations que je viens de formuler, le groupe socialiste votera évidemment les crédits de la mission « Action extérieure de l’État », car elle témoigne d’une ambition pour notre pays doublée d’un sérieux budgétaire. §

Debut de section - PermalienPhoto de Josette Durrieu

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, mon propos portera sur Israël et la Palestine. J’y étais encore hier. J’étais à Ramallah vendredi, lorsque M. le ministre des affaires étrangères a prononcé son discours à l’Assemblée nationale. Aujourd’hui, j’aurais quelque peine à parler d’autre chose…

Je suis allée en Palestine en tant que membre du Conseil de l’Europe et de la sous-commission sur le Proche-Orient et le monde arabe. Je conduisais une délégation de quatorze parlementaires européens venus chacun d’un pays différent. Pour l’Europe, c’était le bon moment de faire ce voyage.

Je précise à ce propos que la contribution de la France pour le Conseil de l’Europe au titre de 2015 s’élève à environ 35 millions d’euros. Cette contribution, qui est fixe et obligatoire, et c’est tant mieux, est bien utilisée, car le travail réalisé par le Conseil de l’Europe, qui reste parfois confidentiel, est exceptionnel, tout comme le travail accompli par la délégation française. C’est nous, en effet, qui avons été à l’origine de l’institution de cette sous-commission sur le Proche-Orient et c’est nous qui avons créé un statut spécifique pour certains pays méditerranéens. Ainsi, le Maroc, la Tunisie, la Palestine et la Jordanie ont pu rejoindre le Conseil de l’Europe en qualité de « partenaires pour la démocratie ».

Bref, cette institution permet d’exercer une véritable diplomatie parlementaire et d’accompagner les efforts de nos diplomates dans la région. Je peux donc vous assurer de la présence financière et de l’influence politique de la France.

On va beaucoup parler cette semaine d’Israël et de la Palestine, et je m’en félicite. J’aborderai trois problèmes cruciaux : l’existence, la sécurité, l’occupation.

Concernant l’existence, la question primordiale est : l’État palestinien est-il encore possible ? Ma réponse est oui, mais le temps presse.

Les terres fondent, mais le peuple reste : 2, 7 millions de Palestiniens vivent en Cisjordanie et 1, 8 million à Gaza.

La création de l’État palestinien est-elle nécessaire ? Oui, elle est nécessaire à l’existence même d’Israël !

Un constat : tout tend à rendre impossibles la création et la coexistence des deux États. La situation est bloquée, mais elle est bloquée depuis Oslo.

J’en viens à la sécurité.

D’abord, celle d’Israël. Les 8 millions d’Israéliens sont-ils menacés ? Oui : par le Hamas, le Hezbollah, l’Iran… Ces derniers évolueront. Il faudra qu’ils évoluent.

La protection des Israéliens est assurée par Israël lui-même : par sa force militaire, notamment nucléaire – il faut bien en parler ! –, mais aussi, et c’est tant mieux, par l’immunité juridique dont il jouit à l’ONU

Et la sécurité des 4 à 5 millions de Palestiniens vivant en Cisjordanie et à Gaza ? Ils n’ont pas d’État, pas d’armée et le statut de la Palestine est celui d’un État non membre de l’ONU. Elle ne bénéficie pas de l’immunité juridique à l’ONU, ni donc de protection juridique.

Les Palestiniens disent, à juste titre, qu’ils sont colonisés, occupés et même annexés, assiégés et dispersés – car la Cisjordanie est un véritable archipel ! Pour ma part, me refusant à peser mes mots, j’ajouterai : pillés.

L’occupation de la Palestine ne coûte rien à Israël ! En revanche, le Premier ministre palestinien en a évalué le coût pour son peuple à 3 milliards de dollars par an.

Le pays n’est pas pauvre, mais les Palestiniens doivent tout payer, y compris l’électricité et même leur propre eau, puisque 120 millions de mètres cubes d’eau sont vendus aux Palestiniens.

Pourtant, ils détiennent des atouts très forts : l’agriculture, la vallée du Jourdain, appelée « le jardin », dont les Israéliens veulent s’emparer – et ils s’en empareront…

Dans le domaine du tourisme, ils possèdent des atouts majeurs et même des « marques », puisqu’on raisonne maintenant en termes de marques : Jérusalem, Bethléem, la mer Morte… Ce sont des trésors, peut-être aussi précieux que le Vatican, le pape en moins !

Je veux lancer l’alerte sur Jérusalem-Est, Jérusalem murée, isolée, avec 20 000 logements détruits, sans parler du dernier projet répartition horaire de l’accès à l’esplanade des mosquées, donc à la mosquée d’al-Aqsa : de quatre heures à midi pour les Israéliens et de midi à treize heures pour les musulmans. Je dis : attention !

En Cisjordanie, 651 000 colons, sur 1 million d’habitants, occupent 62 % du territoire. Le ministre des affaires étrangères le sait sûrement, il y a parmi ces colons 2 500 Français en possession de passeports français.

Quant à Gaza, c’est une prison à ciel ouvert grande comme l’Andorre et où, je l’ai dit, vivent 1, 8 million de Palestiniens. Mais Gaza est « rentable » ! J’ose cette formule qui n’est pas très diplomatique…

Qui a le pouvoir à Gaza ? Le Hamas. Qui a le contrôle ? Israël. Qui a intérêt au maintien du statu quo ? Les deux !

La reconstruction après la guerre de 2008-2009 – l’opération « Plomb durci » – n’a pas été menée à son terme !

Et, aujourd’hui, après les cinquante et un jours de guerre de l’opération « Bordure protectrice », le bilan est terrible : 2 000 morts, dont 600 enfants, 6 000 prisonniers, dont 700 enfants de dix à douze ans, 400 000 sans-abri, 200 000 personnes hébergées, notamment dans des écoles, 110 000 personnes déplacées et 23 000 enfants sans école.

La reconstruction coûtera entre 2 et 5 milliards de dollars, 3, 5 milliards selon l’ONU.

Les donateurs sont les pays du Golfe, à hauteur de 2 milliards de dollars, le Qatar, pour 1 milliard de dollars, l’Arabie Saoudite, pour 500 millions de dollars, les États-Unis, peut-être pour 300 millions de dollars – ils attendent la résolution de l’ONU –, et la France, qui contribue à combler le déficit budgétaire, aura apporté deux fois 8 millions d’euros.

Mais je voudrais insister sur un problème tout à fait nouveau : le blocus organisé par Israël sur le matériel de construction, l’acier et le ciment. Le prétexte de ce blocus est que l’usage de ces matériaux pourrait être à double finalité. Comment engager la reconstruction dans ces conditions ?

L’urgence humanitaire est évidente. La France a déjà donné 3, 5 millions d’euros à ce titre. Les Palestiniens attendent 500 millions de dollars dans l’immédiat. Et ils les auront ! Ils en ont absolument besoin.

Le statu quo est intolérable, sur les plans politique, financier, humain, moral. Il peut rendre la coexistence des deux États impossible. Il peut rendre la paix au Moyen-Orient impossible.

Le ministre des affaires étrangères demandait l’autre jour si le temps était venu. Eh bien oui, c’est maintenant qu’il faut agir, parce qu’il y a trois processus nouveaux et importants en cours.

Premièrement, les Palestiniens ont décidé d’avancer, non plus par les armes et les négociations, sauf s’ils en ont la maîtrise, mais en faisant valoir le droit, leurs droits. Mahmoud Abbas, président de l’Autorité palestinienne, seule autorité légale, va déposer une résolution à l’ONU pour fixer une date de fin de l’occupation. C’est une démarche importante.

Deuxièmement, il y a ce mouvement qui s’est créé en Europe en faveur de la reconnaissance de l’État palestinien. Il était attendu, il était espéré, il est arrivé : merci à la Suède, parce que c’est le gouvernement suédois qui a donné l’impulsion. La Chambre des Communes britannique lui a emboîté le pas, en votant en faveur de la création d’un État palestinien avec seulement – cela doit nous faire réfléchir ! – douze voix contre. L’Espagne a suivi avec des restrictions, mais il y a tous ces autres pays derrière : la Belgique, l’Irlande, la Slovénie, etc.

Le mouvement est lancé ! On attendait l’Europe, l’Europe s’est mise en mouvement.

Troisièmement, je suis ravie d’avoir entendu cette proposition émanant de la France d’organiser une conférence internationale pour fixer la fin de l’occupation en 2016 et engager un processus de paix qui pourrait, lui aussi, trouver son terme dans les deux ans qui viennent.

Oui, la dynamique est engagée, oui, le moment est propice, oui les occasions sont là. Or, souvent, elles ne repassent pas ! §

Debut de section - Permalien
Matthias Fekl

Madame la présidente, mesdames, monsieur les présidents de commission, mesdames, messieurs les rapporteurs spéciaux et pour avis, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis honoré et heureux de vous présenter aujourd’hui le projet de budget de la mission « Action extérieure de l’État » et vous prie de bien vouloir excuser M. Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères et du développement international. J’associe bien entendu mes collègues secrétaires d’État Mme Annick Girardin et M. Harlem Désir à cette présentation. Au demeurant, Mme Girardin aura l’occasion d’échanger demain soir avec vous sur l’ensemble des crédits relatifs à l’aide publique au développement, au Proche-Orient comme ailleurs dans le monde.

Le présent budget a été construit avec un triple objectif.

Premier objectif : participer au redressement de notre économie. Ce projet de loi de finances entérine le nouveau périmètre du ministère des affaires étrangères et du développement international. L’attractivité de notre territoire dépend à la fois de notre image, de notre influence culturelle, de notre économie, de notre promotion touristique et de notre capacité à délivrer des visas dans des délais raisonnables. Pour la première fois, l’ensemble des réseaux et des acteurs qui concourent à notre attractivité se trouvent réunis.

Deuxième objectif : préserver la capacité d’action d’un ministère connu pour être aussi, malheureusement, « le ministère des crises », à un moment où celles-ci ne manquent pas sur la scène internationale. Nous avons entamé, sous l’impulsion de Laurent Fabius, un processus d’adaptation du réseau diplomatique et consulaire, afin qu’il soit en phase avec les enjeux du XXIe siècle. Nous avons fait le choix de préserver l’universalité de notre réseau diplomatique. Dans le même temps, nous veillons à différencier notre présence et nos modes d’action, en fonction de nos priorités. Nous opérons des redéploiements, à partir d’une réduction des effectifs dans les pays à grand réseau et de la transformation d’un certain nombre d’ambassades en postes de présence diplomatique au format plus réduit. Dans ce contexte de réforme structurelle, il est important de préserver les moyens de fonctionnement ainsi que ceux qui ont trait à la sécurité : c’est la proposition qui vous est faite dans ce projet de budget.

Ces deux objectifs sont poursuivis tout en contribuant aux nécessaires économies budgétaires, dont personne ne peut nier le besoin. Notre troisième objectif est donc de bâtir un budget économe : les crédits de la mission « Action extérieure de l’État » s’élèvent à 2, 9 milliards d’euros au total, soit une baisse de 2, 2 % à périmètre constant. Le Quai d’Orsay participe donc pleinement à la stratégie gouvernementale de redressement des finances publiques, à raison de son poids dans le budget de l’État.

Vous avez abordé, mesdames, messieurs les sénateurs, un certain nombre de thèmes au cours de vos interventions. Je voudrais maintenant essayer de répondre à vos questions, en les regroupant par programmes budgétaires.

S’agissant tout d’abord du programme 185, « Diplomatie culturelle et d’influence », le budget pour 2015 est le premier construit avec le nouveau périmètre du Quai d’Orsay. Ce changement se traduit encore de manière inégale d’un pur point de vue budgétaire : s’il est déjà significatif dans le domaine du tourisme, avec la création d’une action spécifique, il est encore marginal dans le domaine du commerce extérieur, même si cet enjeu est pleinement pris en compte sur le plan politique.

En interne, la diplomatie économique, qui était déjà intégrée par les diplomates à l’étranger, est devenue une réalité quotidienne pour l’ensemble des agents du ministère. Une filière économique est en train de se constituer, ce qui devrait se traduire dès 2015 par un renforcement de la place de l’économie dans les épreuves des concours. Des formations sont en outre mises en place pour les agents. Il me semble que ces éléments sont de nature à répondre aux questions posées par Mme Aïchi.

L’attractivité de notre territoire est une priorité. Dans ce contexte, nos moyens d’influence culturelle jouent un rôle clé, comme l’a souligné M. Duvernois. Vous avez rappelé dans vos interventions, mesdames, messieurs les sénateurs, la diminution des crédits intervenue ces dernières années. Il a été mis fin à cette baisse. Comme vous avez pu le constater, l’ensemble de nos moyens d’influence culturelle sont préservés dans le projet de loi de finances qui vous est soumis. C’est le cas des dotations aux établissements à autonomie financière, des subventions aux alliances françaises, des bourses de mobilité étudiante, des échanges d’expertise et des échanges scientifiques, ainsi que des autres moyens bilatéraux d’influence mis à la disposition de nos ambassades.

Quelques mots sur les opérateurs qui participent à cette politique d’influence, dont vous avez été nombreux à parler.

L’Institut français, tout d’abord : le bilan de ses premières années d’existence est tout à fait positif. Sa visibilité est aujourd’hui pleinement établie, grâce à la création d’une marque « Institut français » et à l’organisation des « Saisons ». Une cinquantaine de conventions de partenariat ont été signées avec les principaux opérateurs culturels français et européens. L’institut s’est imposé dans le paysage culturel international, via nos instituts français sur le terrain, qui s’appuient sur son expertise, ses programmes et ses plates-formes numériques.

Je voudrais revenir, en écho aux propos de plusieurs d’entre vous, sur les raisons qui ont conduit à mettre fin à l’expérimentation de rattachement des établissements à autonomie financière à l’Institut français. Cette expérimentation a montré que ce rattachement n’aboutissait pas à de réels gains d’efficience et d’efficacité, que sa généralisation présentait des risques en matière juridique et financière, avec l’introduction d’une personnalité juridique distincte de l’ambassade, ainsi qu’un surcoût budgétaire, évalué à 52 millions d’euros pour la période 2014-2016.

Il n’y a pas pour autant de retour en arrière. L’Institut se voit conforté dans ses missions d’appui à l’ensemble du réseau. La fusion entre les services de coopération et d’action culturelle des ambassades et les établissements à autonomie financière permet une plus grande souplesse de gestion et une meilleure adaptation aux enjeux actuels de la diplomatie d’influence. Elle est aussi mieux adaptée au développement de ressources extrabudgétaires.

Un nouveau contrat d’objectifs et de moyens est en préparation pour la période 2015-2017. Il doit être l’occasion de préciser les missions prioritaires de l’opérateur. L’Institut français doit se concentrer sur ses domaines d’excellence et cibler ses projets en termes de visibilité, d’attractivité et d’impact sur des publics cibles, notamment les jeunes et de nouveaux relais d’influence. Il doit également resserrer ses priorités géographiques. J’ai entendu les remarques de Mme la présidente Catherine Morin-Desailly sur l’action internationale des collectivités territoriales et j’ai pris bonne note des suggestions pertinentes qu’elle a avancées en la matière.

J’ajoute un mot sur la gastronomie, notamment celle du Sud-Ouest, à laquelle je suis moi aussi très sensible, vous le comprendrez aisément. Pour répondre à M. de Montesquiou, je précise qu’il s’agit d’une priorité portée par Laurent Fabius, notamment à travers la semaine « Goût de France », un événement d’envergure mondiale qui se tiendra partout dans le monde autour du 19 mars 2015. Toutes les gastronomies de France, celle du Sud-Ouest comme les autres, seront à l’honneur et pourront se faire connaître dans un grand nombre de pays.

Concernant Campus France et notre politique d’attractivité universitaire, je voudrais souligner l’augmentation de 2 % du nombre d’étudiants internationaux accueillis en 2013-2014 : avec près de 300 000 étudiants au total, la France est la troisième destination universitaire au monde. Nous construisons, depuis quelques années, une chaîne de l’accueil universitaire en France, visant à permettre l’accompagnement et le suivi des étudiants et des chercheurs d’un bout à l’autre de leur parcours, de la demande de visa à la fin de leurs études, avec un suivi a posteriori, afin que le lien avec eux perdure. C’est ainsi qu’est en train d’être créée une plate-forme numérique, « Alumni », qui a vocation à recenser tous les anciens étudiants et chercheurs étrangers en France.

S’agissant enfin de l’AEFE, le ministre Laurent Fabius a présidé, le 20 novembre, avec la ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, une réunion dont l’objet était de fixer une feuille de route, conformément au plan d’action pour l’enseignement français à l’étranger de l’automne 2013, qui prévoit un renforcement du pilotage stratégique de l’AEFE. Un certain nombre d’orientations ont été fixées à cette occasion.

Tout d’abord, nous souhaitons conforter l’excellence du réseau des établissements homologués, qui constitue le plus grand réseau scolaire à l’étranger, avec 494 établissements dans 135 pays et près de 330 000 élèves. Nous allons renforcer la coordination entre les deux ministères pour mieux accompagner le développement de ce réseau en fonction des objectifs de notre diplomatie, notamment là où les communautés françaises croissent et où nos intérêts se concentrent. Le ministère de l’éducation nationale jouera un plus grand rôle dans l’accompagnement pédagogique du réseau, garantie de la qualité de l’enseignement dispensé.

Par ailleurs, nous allons développer l’offre complémentaire d’éducation française, par l’intermédiaire des dispositifs et établissements qui proposent une offre éducative en français, tels que les 56 établissements labellisés « FrancEducation » et les 150 associations favorisant l’utilisation du français comme langue maternelle. Ils constituent la base d’un réseau complémentaire du réseau homologué.

Nous encouragerons enfin la structuration d’une offre française d’enseignement dans le domaine de la formation professionnelle et technologique, hors réseau homologué, en lien avec le secteur privé.

La subvention au groupement d’intérêt économique Atout France, qui relevait de la mission « Économie », figure maintenant au sein du programme 185. Le tourisme est un secteur majeur de notre économie, comme nombre d’orateurs l’ont rappelé, en particulier Mmes Michelle Demessine et Bariza Khiari.

La France accueille 8 % du tourisme mondial. Les dépenses des touristes se sont élevées à 149 milliards d’euros en 2013, soit plus de 7 % de notre PIB, et 2 millions d’emplois sont directement ou indirectement liés à ce secteur.

Les perspectives sont immenses, avec le passage prévu de 1 milliard de touristes en 2013 à près de 2 milliards d’ici à 2030. Nous avons des marges de progression pour mieux capter ce marché en forte croissance : tout en étant la première destination mondiale, la France ne se classe en effet que troisième en termes de recettes, derrière les États-Unis et l’Espagne. Nous avons, avec Atout France, toutes les cartes en main – sans jeu de mots – pour réussir à donner sa pleine place à ce secteur à la fois magnifique et stratégique pour notre économie. Dans cette perspective, madame Khiari, vos suggestions seront très utiles.

La fusion entre Ubifrance et l’AFII est en cours. Elle sera opérationnelle dès le tout début de l’année 2015 et devrait nous permettre de structurer, auprès de ce grand opérateur, une politique de l’export plus claire, plus simple, plus lisible pour nos entreprises, en particulier nos PME, qui doivent pouvoir passer plus de temps à développer leurs projets et leurs innovations qu’à rechercher le bon interlocuteur.

Les conseillers du commerce extérieur de la France font pleinement partie de cette priorité à l’export. J’ai rencontré encore ce matin leur président, M. Bentéjac, pour évoquer avec lui les nombreuses pistes qui permettront de mobiliser pleinement ce réseau qui, présent dans la plupart des pays du monde, constitue une chance extraordinaire pour la France.

Vous m’avez interrogé sur l’évolution des subventions allouées aux opérateurs du programme 185. Leur dotation diminue de 2 %, selon la norme interministérielle fixée au titre de leur contribution à la réduction des déficits publics. Cette diminution est similaire à celle qu’enregistre la mission « Action extérieure de l’État » dans son ensemble. Nous nous sommes assurés de la faisabilité de cette mesure pour les opérateurs concernés.

Le programme 341 est consacré à la Conférence Paris Climat 2015, dite « COP 21 ». Nombre d’entre vous ont souhaité obtenir des précisions ; des amendements ont d'ailleurs été déposés. Ces interrogations sont tout à fait légitimes, et le Parlement est là, bien sûr, tout à fait dans son rôle.

Sur l’initiative du Président de la République, la France accueillera donc, du 30 novembre au 11 décembre 2015, la 21e conférence des Nations unies sur les changements climatiques. L’enjeu est majeur, puisque cette COP 21 doit aboutir à un nouvel accord international sur le climat, dans le but de maintenir le réchauffement mondial en deçà de deux degrés d’ici à 2100.

La France aura une double responsabilité : de favoriser l’obtention d’un accord en présidant les négociations et en jouant un rôle de facilitateur ; d’accueillir pendant deux semaines, en tant que pays hôte, plus de 40 000 participants, à savoir 20 000 délégués accrédités, 3 000 journalistes et 20 000 représentants de la société civile.

La COP 21 sera sans doute, par sa durée et sa dimension, le plus grand sommet diplomatique jamais organisé sur notre territoire. Nous devons réussir cette gageure en veillant à une gestion efficiente des deniers publics, en mettant en pratique l’esprit de la conférence, qui doit être écoresponsable, et en étant exemplaire en matière d’implication des acteurs locaux : la région d’Île-de-France, le département de Seine-Saint-Denis, la Ville de Paris.

Le site du Bourget a été retenu parce qu’il présente de très bonnes conditions d’accessibilité et d’accueil pour plus de 40 000 personnes. Il faut cependant l’aménager et couvrir l’ensemble des frais liés à l’accueil du public.

La création d’un programme budgétaire spécifique a pour objectif d’assurer une parfaite lisibilité des dépenses engagées, pour le Parlement, pour les services de l’État comme pour les citoyens, ainsi qu’un suivi rigoureux de l’utilisation des crédits. Ce programme est appelé à couvrir les dépenses liées à la préparation, à l’organisation et au déroulement de la conférence, mais aussi aux réunions préparatoires et postérieures à celle-ci, puisque la présidence française s’achèvera lors de la COP suivante, à la fin de l’année 2016.

Au total, nous demandons l’ouverture de 187 millions d'euros pour les années 2015 et 2016. Après application de la réserve de précaution, cela fait un budget disponible de 172 millions d'euros. Ce coût prévisionnel important est lié au nombre de participants, à la durée de l’événement – deux semaines – et aux exigences particulières du cahier des charges des conférences des Nations unies. Ce budget est un plafond, estimé de façon rigoureuse et sincère : nous ne voulons pas que l’on nous reproche plus tard d’avoir sous-estimé le budget prévisionnel. En cas de sous-estimation, les critiques seraient évidemment légitimes.

Le secteur privé est mobilisé pour contribuer au financement de la conférence à travers des actions de mécénat. Nous avons contacté à ce stade une soixantaine d’entreprises, qui nous ont généralement réservé un accueil positif. C’est aussi une occasion pour elles de valoriser les savoir-faire français. Des contributions financières et en nature seront apportées, par exemple dans le domaine des transports, des télécommunications, de l’équipement informatique et du recyclage des déchets.

L’organisation de la COP 21 sera bénéfique pour l’économie locale, en particulier pour le secteur du tourisme. L’Office de tourisme de la Ville de Paris estime que la conférence rapportera 100 millions d'euros à la région du fait des dépenses des participants, notamment en matière d’hébergement et de restauration. Elle sera également une vitrine pour valoriser nos savoir-faire et notre capacité à accueillir un événement mondial d’une telle envergure.

J’en viens au programme 151, « Français à l’étranger et affaires consulaires ». Vous savez que je suis particulièrement attentif à la question des Français de l’étranger, que vous êtes nombreux à suivre, en raison de l’atout extraordinaire que représentent nos compatriotes installés à l’étranger, mais aussi parce que j’ai moi-même été un Français de l’étranger pendant plus de la moitié de ma vie. Je suis donc tout à fait conscient des spécificités de cette situation.

Le projet de loi de finances pour 2015 marque une étape importante en ce qui concerne l’aide à la scolarité. L’enveloppe allouée aux bourses scolaires atteint le niveau auquel le Président de la République s’était engagé à la porter : 125, 5 millions d'euros. La ventilation des crédits est plus équitable. Elle correspond mieux au niveau de revenu des familles, grâce à une meilleure progressivité des quotités. Au total, un plus grand nombre de familles bénéficient de bourses. Par ailleurs, le nouveau système prend mieux en compte les différences de coût de la vie entre les pays ; nous savons qu’elles peuvent être très importantes.

Madame Perol-Dumont, vous m’avez interrogé sur l’aide sociale. L’enveloppe allouée aux affaires sociales passe de 19, 3 millions d'euros dans la loi de finances pour 2014 à 18 millions d'euros dans le présent projet de budget. L’essentiel de cette différence tient à la suppression de la ligne dédiée à la formation professionnelle et à l’aide à l’emploi dans les pays étrangers. Le reste provient de l’alignement de la dotation sur l’exécution budgétaire constatée ces dernières années. Il n’y aura donc pas de conséquence sur le niveau d’aide sociale accordée, et nous y sommes très attentifs.

Vous avez attiré mon attention sur la question de la formation professionnelle et de l’aide à l’emploi. La dotation budgétaire pour les formations professionnelles en France de Français expatriés est inchangée. La seule différence est que, en application de la loi du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale, le dispositif sera désormais mis en œuvre par les régions.

Par ailleurs, comme je l’ai déjà souligné, la ligne budgétaire dédiée à la formation professionnelle et à l’aide à l’emploi dans les pays étrangers, qui représentait 800 000 euros, est supprimée. Ces aides, allouées par les comités consulaires pour l’emploi et la formation professionnelle, ont été critiquées par la Cour des comptes en 2013, compte tenu de leur efficacité limitée. La suppression de ces crédits n’entraînera pas pour autant la fin de l’accompagnement local de nos concitoyens. Nous travaillons avec les chambres de commerce et d’industrie, qui, dans la plupart des cas, touchent ces subventions, pour les aider à augmenter leurs recettes et donc leur autofinancement. En outre, les crédits d’aide sociale pourront être utilisés, de façon dégressive, pour faciliter la phase de transition.

S’agissant des visas, la tendance à la hausse de la demande se confirme partout, et plus particulièrement dans les pays émergents. La hausse a été de 13 % pour les dix premiers mois de l’année 2014. En Chine, elle était de 57 % : de janvier à octobre, 500 000 visas ont été délivrés, contre 316 000 l’année dernière sur la même période.

Le renforcement des services des visas est essentiel pour que la France puisse pleinement bénéficier des retombées de la demande étrangère en matière de tourisme et d’investissements. Les résultats sont déjà là, comme le montre le succès de l’opération « visa en 48 heures » en Chine, qui sera étendue dès le 1er janvier 2015 à l’Inde, à l’Afrique du Sud et à certains pays du Golfe.

Le programme 105, « Action de la France en Europe et dans le monde », se caractérise par l’importance des contributions aux organisations internationales et aux opérations de maintien de la paix, ou OMP, qui représentent plus de 40 % du total des crédits ; M. Christian Cambon, notamment, a évoqué cette question.

Nos efforts en faveur d’une meilleure maîtrise de ces budgets portent leurs fruits, ce qui nous permet de diminuer les enveloppes. Nous le devons à l’exigence de la diplomatie de la France et de ses partenaires ; l’objectif est de maintenir une croissance nominale zéro des budgets des organisations internationales. Le renforcement des procédures d’évaluation de ces organisations nous conduit à quitter l’Organisation des Nations unies pour le développement industriel, l’ONUDI, à partir d’une analyse du rapport coût/avantages de notre contribution. Nous agissons enfin pour contenir la hausse des coûts des OMP, en demandant la baisse des effectifs des missions dont l’activité n’a plus besoin d’être aussi importante au vu de l’évolution de la situation.

La diminution de l’enveloppe s’explique également par le choix de reporter à 2016 le paiement de plusieurs appels à contribution qui ne nous seront transmis qu’en décembre 2015, au moment de la clôture comptable. Par ailleurs, le fait que le budget des OMP ne soit pas calé sur l’année civile nous permet de prendre en compte, pour la deuxième partie du prochain exercice, les nouveaux barèmes tels qu’ils seront renégociés en 2015, et dont nous attendons une diminution de la quote-part française.

Concernant la coopération de sécurité et de défense, nous rationalisons notre dispositif afin de répondre aux nouveaux enjeux et aux nouveaux impératifs de réduction des déficits publics. La baisse sera de 1, 1 million d'euros en 2015. Le ministère établit des priorités pour que notre action soit cohérente avec notre politique étrangère. Nous renforçons les capacités des États partenaires dans une logique d’appropriation. Nous agissons en priorité en Afrique subsaharienne et dans la bande sahélo-saharienne, du fait notamment des enjeux sécuritaires.

Notre politique vise également à renforcer l’influence française par des actions de conseil et de formation.

Vous m’avez interrogé sur les questions immobilières. Notre politique est fondée sur trois principes : la rationalisation de nos implantations, en privilégiant les regroupements et les relocalisations dans des sites mieux sécurisés et mieux adaptés ; le respect des ratios d’occupation définis par le Gouvernement ; la valorisation de nos biens, en finançant les opérations de gros travaux et d’achats par le produit de nos cessions.

Cela m’amène à évoquer le processus plus large d’adaptation du réseau. Nous conservons l’universalité du réseau, mais nous adaptons notre présence et nos modes d’action selon les enjeux. La transformation d’ambassades en postes de présence diplomatique aux missions allégées et le réexamen de nos effectifs dans les pays où nous disposons de moyens importants, souvent hérités de l’histoire, nous permettent de nous renforcer là où nos priorités politiques et économiques l’exigent.

Cette adaptation nous permet de renforcer notre dispositif dans les pays émergents. C’est ainsi que, depuis 2012, nos effectifs ont augmenté de 12 % en Chine, de 8 % en Indonésie et au Qatar, de 5 % en Éthiopie, de 4 % en Inde et de 3 % au Brésil, et cela malgré la baisse du plafond d’emplois global du ministère.

Monsieur Yung, j’ai bien entendu votre demande au sujet des redéploiements. En ce qui concerne les postes de présence diplomatique, des réunions de concertation ont été organisées avec les élus représentant les Français de l’étranger. Si, ici ou là, des besoins d’information supplémentaire se font entendre, je suis disposé à y répondre avec l’ensemble des équipes du Quai d’Orsay ; Laurent Fabius y répondra lui-même en tant que de besoin.

Le rôle des ambassadeurs thématiques a été évoqué. La Cour des comptes a récemment effectué une enquête à leur sujet. Voici ce qu’elle écrit : « Pour un coût budgétaire limité, ils sont l’un des moyens possibles pour incarner une présence française sur des questions qui appellent plus qu’une simple présence administrative. »

Comme Richard Yung dans le cadre de son contrôle budgétaire, la Cour des comptes demande que les conditions de leur nomination et de l’exercice de leurs fonctions soient harmonisées. Nous y veillerons ; nous serons notamment attentifs à la remise systématique d’une lettre de mission fixant le cap à suivre, au rattachement à une direction et à la communication régulière de rapports d’activité rendant compte des missions effectuées et des résultats obtenus.

Je rappelle enfin que le nombre d’ambassadeurs thématiques a diminué ces dernières années : ils étaient vingt-huit en 2011 ; ils ne sont plus que vingt-deux aujourd’hui.

La question des colocalisations a été soulevée. C’est avec l’Allemagne que ce mouvement est le plus avancé, en particulier dans le domaine culturel et éducatif ; j’étais la semaine dernière sur l’Eurocampus franco-germano-irlandais de Dublin. La colocalisation progresse également sur le plan diplomatique et consulaire : trois implantations sont déjà une réalité – à Rio, à Pyongyang, dans un contexte particulier, et à Brazzaville – et cinq projets devraient être achevés en 2015 : à Dakar, au Koweït, au Brunei, en Érythrée et en Jamaïque.

Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de budget qui vous est présenté est à la fois porteur d’économies, cohérent et ciblé.

Comme M. Jean-Pierre Raffarin l’a rappelé, un budget doit être analysé au regard de la politique qu’il traduit. En l’occurrence, ce budget est en phase avec les priorités nationales, en termes de redressement économique comme en termes d’action diplomatique. Il dote le ministère des affaires étrangères et du développement international des moyens de remplir sa mission, tout en s’adaptant aux enjeux du XXIe siècle, un siècle où le monde aura, plus que jamais, besoin de la France. §

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Action extérieure de l’État », figurant à l’état B.

(en euros)

Mission

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Action extérieure de l’État

Action de la France en Europe et dans le monde

Dont titre 2

604 587 372

604 587 372

Diplomatie culturelle et d’influence

Dont titre 2

80 579 050

80 579 050

Français à l’étranger et affaires consulaires

Dont titre 2

218 237 248

218 237 248

Conférence « Paris Climat 2015 »

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° II-162, présenté par MM. Ravier et Rachline, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

en euros

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Action de la France en Europe et dans le monde

Dont Titre 2

Diplomatie culturelle et d’influence

Dont Titre 2

Français à l’étranger et affaires consulaires

Dont Titre 2

Conférence ‘Paris Climat 2015’

Total

Solde

Cet amendement n'est pas soutenu.

L'amendement n° II-77, présenté par M. Doligé, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

en euros

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Action de la France en Europe et dans le monde

Dont titre 2

Diplomatie culturelle et d’influence

Dont titre 2

Français à l’étranger et affaires consulaires

Dont titre 2

Conférence « Paris Climat 2015 »

Total

Solde

La parole est à M. Éric Doligé, rapporteur spécial.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

Cet amendement a pour objet de diminuer de 10 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 2 millions d’euros en crédits de paiement les crédits du programme 341, pour ce qui concerne l’action n° 2.

Nous souhaitons d’abord interroger précisément le Gouvernement sur la manière dont a été déterminé le montant important du budget de la Conférence Paris Climat 2015, même si M. le secrétaire d’État a déjà fourni, dans son intervention, un certain nombre d’indications à cet égard.

À propos du budget de la COP 21, on a parlé tantôt de 182 millions d’euros, tantôt de 171 ou 172 millions d’euros, tantôt de 179 millions d’euros… Ces variations sont certainement liées au rabotage de 8 % et à un certain nombre d’éléments qui ont modifié les chiffres. En tout état de cause, le budget initialement consacré à la conférence nous a paru très important, même s’il est réparti sur deux années et concerne essentiellement l’année 2016.

Par ailleurs, nous pensons que l’on doit pouvoir sans trop de difficultés, pour financer en partie les dépenses qu’occasionnera la tenue de la COP 21, obtenir des contributions de la part d’entreprises ; vous avez d'ailleurs vous-même évoqué cette possibilité, monsieur le secrétaire d'État. En commission, nous avons estimé que cette somme de 10 millions d’euros pourrait être ainsi rassemblée et que, donc, il était parfaitement envisageable de diminuer les crédits du programme 341 à due concurrence.

Vous nous avez dit que Laurent Fabius avait rencontré les représentants d’une soixantaine d’entreprises et que celles-ci étaient prêtes à participer à Paris Climat 2015, conférence de nature à mettre en valeur des entreprises françaises qui occupent une place importante dans différents domaines. Cependant, nous n’avons pas vu ces financements extérieurs retracés dans les documents relatifs à cette opération. Peut-être ne sont-ils pas suffisamment assurés pour figurer dans le projet de financement…

J’ai reçu, dans ma collectivité, une entreprise qui soutiendra la COP 21 pendant dix-huit mois. Cette entreprise a formulé un certain nombre de propositions intéressantes, notamment pour obtenir des partenariats d’entreprises extérieures. Il a été question d’un certain nombre de grandes entreprises françaises présentes dans l’organisation de la conférence, comme Veolia, Carrefour et bien d’autres.

Il apparaît à la commission des finances qu’il doit être relativement aisé de récupérer ces 10 millions d’euros, compte tenu de l’intérêt et de l’attrait de cette opération.

En outre, il nous semble qu’un certain nombre de lignes budgétaires afférentes à l’organisation de la COP 21 doivent pouvoir être améliorées. En effet, nous avons quelques interrogations sur certaines des dépenses prévues.

Je fais remarquer que la diminution des crédits sur laquelle la commission des finances s’est accordée est moindre que celle qui était proposée dans l’amendement précédent, qui n’a pas été soutenu. C’est dire, monsieur le secrétaire d'État, si nous sommes généreux avec vous ! §

Debut de section - Permalien
Matthias Fekl, secrétaire d'État

J’ai essayé de vous apporter quelques éléments de réponse tout à l'heure, mais je suis évidemment tout à fait disposé à apporter les compléments nécessaires pour vous convaincre, mesdames, messieurs les sénateurs.

Je répète que ce débat est légitime : le Gouvernement comprend que le Parlement souhaite avoir des informations lui permettant de juger en toute connaissance de cause de la pertinence du budget prévu pour la COP 21.

Nous avons tous rappelé l’importance politique, économique et écologique de cette manifestation. Encore une fois, il s’agira probablement du plus grand sommet jamais accueilli par notre pays, avec des exigences très particulières en termes d’organisation, étant donné qu’il s’agit d’un événement placé sous l’égide de l’Organisation des Nations unies.

Nous avons budgété les différentes sommes en nous fondant sur des ratios très techniques, notamment sur le coût d’aménagement au mètre carré observé lors de l’organisation de précédentes conférences internationales en France et sur les surfaces à mobiliser pour respecter le cahier des charges fixé par l’ONU.

Nous avons aussi la volonté d’associer très largement la société civile à la COP 21, avec environ 20 000 participants attendus de ce côté. L’ensemble des parties prenantes, notamment les ONG, seront donc amenées à s’exprimer et à participer à cette conférence.

Vous le voyez, le budget de la Conférence Paris Climat 2015 est établi de manière très précise et très rigoureuse.

Par ailleurs, il représente un plafond à ne pas dépasser : nous ne souhaitons en aucun cas qu’il puisse y avoir des demandes de rallonge en cours d’exercice.

L’ensemble des membres du Gouvernement, au premier rang desquels le ministre des affaires étrangères et du développement international, sont mobilisés pour essayer d’augmenter au maximum la part des contributions privées dans le financement de cette conférence, qu’il s’agisse d’euros sonnants et trébuchants ou de contributions en nature.

La question du mécénat et de la participation des entreprises françaises, qui ont souvent des savoir-faire tout particuliers dans les domaines de l’écologie et de l’environnement, est évidemment essentielle. Nous souhaitons que cette contribution soit aussi élevée que possible, et nous y travaillons. Toutefois, en dépit de notre énorme implication sur ce dossier, nous ne pouvons pas, à ce stade, nous engager devant vous de manière sincère et rigoureuse sur des montants chiffrés, lesquels ne dépendent pas de nous. Ce ne serait pas honnête de notre part.

C’est pourquoi, tout en comprenant la demande d’information que vous formulez, monsieur le rapporteur spécial, le Gouvernement sollicite le retrait de votre amendement. À défaut, il émettrait un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Monsieur le rapporteur spécial, l'amendement n° II-77 est-il maintenu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

Madame la présidente, j’ai écouté avec beaucoup d’intérêt les explications de M. le secrétaire d'État.

Je trouve son discours un peu pessimiste : à mon avis, il ne devrait pas être trop difficile de trouver 10 millions d’euros auprès des entreprises concernées, d’autant qu’elles bénéficieront de cette belle opération, intéressante pour l’Île-de-France, pour Paris et pour la France entière et donnant une belle image de notre pays.

Notre intention n’est pas du tout de remettre en cause la COP 21, bien au contraire ! Nous pensons simplement que les entreprises trouveront un grand intérêt à apporter des financements. Au reste, les soixante entreprises qui ont été mentionnées ne devraient pas avoir beaucoup de mal à réunir 10 millions d’euros…

Je comprends votre souci de rigoureuse sincérité, monsieur le secrétaire d'État. Néanmoins, lorsque vous avez évoqué l’action de la France en Europe et dans le monde, vous avez indiqué que vous pourriez reporter certains crédits d’une année sur l’autre. Dès lors, en cas de difficulté, vous pourriez recourir à une telle solution pour l’organisation de la COP 21.

Cela dit, je suis persuadé que vous n’aurez aucun mal à obtenir des financements privés et c'est la raison pour laquelle je maintiens l’amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Je mets aux voix l'amendement n° II-77.

J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe UMP.

Je rappelle que l'avis du Gouvernement est défavorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

Il est procédé au dépouillement du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Voici le résultat du scrutin n° 54 :

Le Sénat a adopté.

Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° II-193 rectifié, présenté par Mme N. Goulet et les membres du groupe Union des démocrates et indépendants-UC, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

en euros

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Action de la France en Europe et dans le monde

Dont Titre 2

3 150 000

3 150 000

Diplomatie culturelle et d’influence

Dont Titre 2

Français à l’étranger et affaires consulaires

Dont Titre 2

Conférence « Paris Climat 2015 »

Total

Solde

La parole est à M. Aymeri de Montesquiou.

Debut de section - PermalienPhoto de Aymeri de Montesquiou

Cet amendement a pour objet de poser, une nouvelle fois, la question de l’utilité des ambassadeurs « thématiques ». Cette question revient régulièrement au cours de nos débats budgétaires depuis six ans.

Dès 2008, en effet, notre collègue Nathalie Goulet s’est interrogée sur l’existence de tels postes. Un amendement de suppression des crédits consacrés à ces ambassadeurs avait été adopté en juillet 2012, lors de l’examen du deuxième collectif budgétaire de l’année. Un amendement demandant un rapport d’évaluation de ces diplomates avait également été adopté en décembre dernier, lors de l’examen du dernier collectif de l’année 2013. Notre collègue Richard Yung, qui a déposé un amendement posant les mêmes questions, a mené une opération de contrôle budgétaire sur le sujet. En un mot, le Sénat a beaucoup travaillé sur la question, mais a finalement obtenu peu de résultats.

Monsieur le secrétaire d’État, quelle utilité notre appareil diplomatique trouve-t-il à conserver un ambassadeur pour la piraterie, pour la Shoah, pour la mer ou pour tout autre sujet transversal habituellement traité dans des enceintes internationales où travaillent des équipes diplomatiques spécifiques, en lien avec la direction de la mondialisation de votre ministère ? Depuis six ans, nous ne comprenons toujours pas !

C’est pourquoi le présent amendement vise à supprimer un peu plus de 3 millions d’euros des crédits de la mission « Action extérieure de l’État », afin d’adresser au Gouvernement un signal vigoureux sur cette question qui préoccupe notre assemblée depuis déjà bien longtemps.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

L’amendement n° II-78, présenté par M. Yung, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

en euros

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Action de la France en Europe et dans le monde

Dont titre 2

0

0

Diplomatie culturelle et d’influence

Dont titre 2

Français à l’étranger et affaires consulaires

Dont titre 2

Conférence « Paris Climat 2015 »

Total

Solde

La parole est à M. Richard Yung, rapporteur spécial, pour présenter cet amendement et pour donner l’avis de la commission sur l’amendement n° II-193 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Je me vois, en la circonstance, placé dans la situation d’être en quelque sorte juge et partie…

L’amendement que vient de présenter Aymeri de Montesquiou est à 3, 1 millions d’euros, le mien à 150 000 euros. C’est moins cher ! §Je suis nettement moins ambitieux que Nathalie Goulet et ses collègues : je joue « petit bras » !

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

M. Roger Karoutchi. On voit que vous avez perdu la majorité !

Nouveaux sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

C’est un débat déjà ancien, mais nous n’avions pas pu le pousser à son terme les années précédentes puisque nous n’avions pas examiné la seconde partie du projet de loi de finances : nous n’avions donc pas pu inscrire dans les faits l’idée contenue dans ces amendements.

La somme de 3, 1 millions d’euros représente à peu près la totalité du coût des actuels vingt et un ambassadeurs thématiques. J’attire cependant votre attention, mes chers collègues, sur le fait que ces personnes sont, pour beaucoup, des diplomates du Quai d’Orsay ou des fonctionnaires issus d’autres administrations, qu’il faudrait payer de toute façon. Ce n’est donc pas sur leurs traitements que l’on peut faire des économies. Le reste des dépenses liées à l’existence de ces ambassadeurs est assez modeste ; c’est pourquoi mon amendement ne supprime que 150 000 euros, chiffre qui me semble plus conforme à l’économie que l’on peut réaliser à cet égard.

Supprimer 3, 5 millions d’euros de crédits signifie que l’on supprime les vingt et un ambassadeurs thématiques d’un coup. Or telle n’est pas ma position : il me semble que certains d’entre eux exercent des tâches bien identifiées, remettant parfois des rapports. Pour d’autres, en revanche, on peut se poser plus de questions… J’ai demandé à plusieurs reprises des éclaircissements au ministère des affaires étrangères, sans obtenir de précisions supplémentaires.

Sur le fond, la commission des finances critique le fait que ces ambassadeurs soient nommés dans des conditions dérogatoires. L’article 13 de la Constitution dispose que les ambassadeurs sont nommés en conseil des ministres. Or un grand nombre de ces ambassadeurs thématiques sont nommés par des notes de service, des circulaires ou sur décision du secrétaire général du Quai d’Orsay, c’est-à-dire de façon tout à fait anormale. La commission des finances considère que ces procédés ne sont pas dignes du respect dû à la Constitution et à la République.

Pour l’ensemble de ces raisons, la commission n’est pas favorable à l’amendement n° II-193 rectifié et a adopté l’amendement n° II-78. Il s’agit d’inciter le Gouvernement à mettre de l’ordre dans les modalités de nomination et à nous indiquer plus précisément à quoi servent ces ambassadeurs, voire à envisager de supprimer certains postes.

Monsieur le secrétaire d’État, il me semble que, dans votre intervention, vous avez montré que vous aviez compris nos préoccupations : nous voulons avant tout que ces nominations soient claires et conformes à notre droit.

Debut de section - Permalien
Matthias Fekl, secrétaire d’État

En vérité, les ambassadeurs thématiques sont aujourd’hui au nombre de vingt-deux. En effet, depuis la préparation du budget, un nouvel ambassadeur thématique a été nommé, avec la création de la task force Ebola.

Cela étant, ils étaient vingt-huit en 2011 : leur nombre est donc, de toute façon, en diminution.

Laurent Fabius est extrêmement attentif à ce que ne soient nommés que des ambassadrices et des ambassadeurs qui apportent une réelle plus-value et dont la nomination se justifie par la qualité du travail effectué. Par ailleurs, il veille à ne procéder à de telles nominations que dans les cas où la présence d’un haut fonctionnaire ayant rang d’ambassadeur est susceptible de représenter un atout.

Debut de section - Permalien
Matthias Fekl, secrétaire d’État

Je ne crois pas que nous puissions, en cet instant, débattre de chaque cas individuellement…

Nous nous engageons à ce que les conditions de nomination de ces ambassadeurs, celles dans lesquelles ils travaillent et la définition de leur mission soient précisées. Une lettre de mission sera systématiquement adressée aux intéressés, détaillant les résultats attendus de leur mission. Nous ferons également en sorte qu’ils soient systématiquement rattachés à une direction du ministère des affaires étrangères et du développement international. Enfin, des rapports d’activité devront être régulièrement rendus, afin que ces ambassadeurs rendent compte de leur action, des résultats obtenus ou des difficultés rencontrées.

C’est la raison pour laquelle, bien que nous partagions votre volonté de veiller au bon emploi des ressources humaines, il ne nous semble pas que la suppression de crédits soit la bonne manière de procéder. Nous comprenons votre volonté de soulever le débat et d’attirer l’attention du Gouvernement. Soyez assurés qu’il est prêt à revenir vers vous dans le courant de l’année pour examiner comment la situation aura évolué, notamment en ce qui concerne les conditions de nomination de ces ambassadeurs et d’exercice de leurs fonctions.

Vous l’aurez compris, l’avis du Gouvernement est défavorable sur ces deux amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. Robert del Picchia, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert del Picchia

Monsieur le secrétaire d’État, je comprends tout à fait votre position et je vais d’ailleurs m’abstenir sur ces deux amendements.

Vous souhaitez que ces ambassadeurs remettent des rapports. Permettez-moi de suggérer que ces rapports, dès lors qu’ils ne sont pas secrets, soient transmis aux présidents des commissions des affaires étrangères des deux assemblées. Une telle pratique serait de nature à nous rassurer.

Debut de section - Permalien
Matthias Fekl, secrétaire d’État

Je suis tout à fait d’accord avec vous, monsieur le sénateur. Ces rapports pourront vous être adressés, tout comme vous avez la possibilité, si vous le jugez utile, d’auditionner chaque ambassadeur thématique pour qu’il vous présente son travail et, éventuellement, que vous lui suggériez des pistes d’action.

L’amendement n’est pas adopté.

L’amendement n’est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

L’amendement n° II-76, présenté par MM. Doligé et Yung, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

en euros

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Action de la France en Europe et dans le monde

Dont titre 2

0

0

Diplomatie culturelle et d’influence

Dont titre 2

Français à l’étranger et affaires consulaires

Dont titre 2

Conférence « Paris Climat 2015 »

Total

Solde

La parole est à M. Éric Doligé, rapporteur spécial.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

Cet amendement a pour objet d’annuler l’amendement proposé par le Gouvernement sur cette mission dans le cadre de la seconde délibération qu’il a demandée à l’Assemblée nationale – dans la limite permise par l’article 40 de la Constitution, c’est-à-dire en rétablissant les crédits de la mission inscrits dans le projet de loi de finances adopté en conseil des ministres.

À cette fin, la commission des finances propose d’augmenter de 8, 3 millions d’euros les crédits du programme 105, « Action de la France en Europe et dans le monde », action n° 4, Contributions internationales.

Sur le fond, il ne s’agit pas de limiter les économies à réaliser afin de compenser l’alourdissement du déficit résultant des votes de l’Assemblée nationale en première délibération. En revanche, il est indispensable que ces diminutions correspondent à des économies réelles, de sorte que le budget adopté par le Parlement soit sincère.

En l’espèce, il n’a pas paru possible à la commission des finances d’accepter la diminution de 10 millions d’euros des crédits alloués aux contributions de la France aux organisations internationales dont elle est membre ainsi qu’aux opérations de maintien de la paix menées sous l’égide de l’ONU. En effet, ces contributions ont un caractère obligatoire et la France ne saurait s’y soustraire.

De plus, comme je l’ai indiqué dans le cadre de la discussion générale, le taux de change entre l’euro et le dollar rend déjà très incertaine l’exécution de la ligne budgétaire inscrite par le Gouvernement dans la version initiale du projet de loi de finances.

La diminution de crédits adoptée par l’Assemblée nationale en seconde délibération, qui ne s’appuie sur aucune mesure nouvelle ou aucun élément permettant de la justifier, n’est donc pas réaliste et doit, pour ce motif, être rejetée.

D’ailleurs, monsieur le secrétaire d’État, lors de la première délibération à l’Assemblée nationale, le Gouvernement s’était lui-même opposé à tous les amendements des députés qui visaient à diminuer cette ligne, au nom du même réalisme qui inspire à présent notre démarche.

Le Gouvernement doit prendre ses responsabilités en dégageant des économies réelles et les exprimer clairement devant le Parlement. Les rapporteurs spéciaux proposent quelques pistes en ce sens au travers de leurs propres amendements de diminution de crédits, qui correspondent, eux, à des baisses de dépenses.

J’espère, monsieur le secrétaire d’État, que la précision de vos explications me permettra de retirer cet amendement.

Vous avez parlé tout à l’heure d’un éventuel report des paiements sur 2016, compte tenu des dates de facturation prévues en 2015. Cependant, si l’on examine les perspectives pour 2016, on ne décèle pas de « bosse » financière permettant d’assumer ces paiements, ce qui signifie que les mêmes reports devraient intervenir pour les années suivantes. Cette solution ne nous paraît donc pas satisfaisante.

Nous avons également pu constater que, si des baisses étaient intervenues dans le cadre de ce budget, c’était parce que les contributions des autres pays participant aux organisations internationales en question étaient plus importantes. En effet, ces contributions sont le plus souvent calculées en fonction du poids international de chaque pays : comme notre poids relatif diminue régulièrement, cela signifie que nos contributions diminuent de même. Sur certains postes, l’effort du Gouvernement est intéressant, mais n’est pas aussi important que celui que vous nous avez présenté, monsieur le secrétaire d’État.

Debut de section - Permalien
Matthias Fekl, secrétaire d’État

Les amendements adoptés en première délibération à l’Assemblée nationale ont augmenté le montant total des dépenses de l’État et des ajustements ont donc été rendus nécessaires en deuxième délibération, afin de ne pas augmenter le déficit global de notre pays.

C’est dans cet état d’esprit que le ministère des affaires étrangères et du développement international a vu son projet de budget réduit, notamment de 10 millions d’euros sur la mission « Action extérieure de l’État ».

Vous l’avez rappelé, monsieur le sénateur, le fléchage sur les contributions internationales et les opérations de maintien de la paix part du principe que nous avons la possibilité, au vu du calendrier du budget de ces opérations, qui va de juillet à juin et non de janvier à décembre, de reporter un certain nombre de dépenses sur le début de l’année 2016. Du reste, j’ai apporté tout à l'heure un certain nombre de précisions à cet égard. Cette solution n’est pas optimale – je le reconnais bien volontiers –, mais elle est, dans la situation globale que je vous ai exposée, la moins mauvaise manière de faire.

C’est la raison pour laquelle j’émets, au nom du Gouvernement, un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Monsieur le rapporteur spécial, l’amendement n° II-76 est-il maintenu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

Chacun aura remarqué que M. le secrétaire d’État voulait faire à peu près 10 millions d’euros d’économies. Or nous les lui avons déjà trouvés avec notre amendement n° II-77 !

Monsieur le secrétaire d’État, si l’on nous donne raison sur cet amendement, vous ressortirez d’ici avec 10 millions d’euros d’économies en plus. C’est tout de même intéressant pour M. Michel Sapin, qui est arrivé juste à temps pour apprendre cette bonne nouvelle !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

Quoi qu'il en soit, je retire l’amendement n° II-76, madame la présidente.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

L’amendement n° II-76 est retiré.

L'amendement n° II-194 rectifié ter, présenté par MM. Cadic, Frassa et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

en euros

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Action de la France en Europe et dans le monde

Dont Titre 2

Diplomatie culturelle et d’influence

Dont Titre 2

Français à l’étranger et affaires consulaires

Dont Titre 2

Conférence ‘Paris Climat 2015’

Total

Solde

La parole est à M. Aymeri de Montesquiou.

Debut de section - PermalienPhoto de Aymeri de Montesquiou

Au travers de cet amendement, notre collègue Olivier Cadic pose une importante question, liée à l’accès à l’enseignement du français pour les enfants de nos concitoyens expatriés ou les enfants binationaux.

En effet, les structures de l’enseignement français à l’étranger ont profondément évolué depuis 2012. Malheureusement, environ un quart des enfants français à l’étranger seulement a accès au réseau de l’AEFE. Parmi eux, ils ne sont que 21 % à bénéficier d’une bourse scolaire, soit 5 % du total des enfants français établis hors de France.

Si le principal objectif de l’AEFE est de « servir et promouvoir un réseau scolaire unique au monde », nous constatons chaque année qu’une proportion non négligeable d’enfants binationaux ne parle pas le français. Dans certains pays, quelque 15 % de ces enfants ne parlent pas notre langue, et c’est un minimum.

Cette situation n’est pas acceptable. Je rappelle que l’article 2 de notre Constitution affirme que « la langue de la République est le français ». C’est l’école qui a permis d’imposer la pratique de la langue nationale sur tout le territoire français en la démocratisant lors des deux derniers siècles.

Cet amendement a ainsi pour objet d’inciter le Gouvernement à renforcer le soutien à l’enseignement du français à destination des enfants de nos concitoyens expatriés. Il vise à garantir l’accès égal de tous nos compatriotes à l’enseignement français ou du français à l’étranger en créant un « chèque éducation » de 1 100 euros en moyenne par enfant vivant à l’étranger en âge d’être scolarisé.

Il s’agit de permettre à tous les enfants de bénéficier d’un enseignement en français en transformant en « chèques éducation » ouverts à tous les enfants les bourses actuellement consenties à 5 % des enfants sur les crédits de l’action n° 2 du programme 151.

Ces « chèques éducation » pourraient être utilisés exclusivement pour financer un enseignement français ou en français dans les écoles du réseau français à l’étranger, qu’il s’agisse des écoles privées, de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, l’AEFE, de la Mission laïque française, la MLF, ou des associations « Français langue maternelle », ou FLAM. Ils pourraient également être affectés à l’ouverture d’un droit de formation du français à distance gratuit par la voie du Centre national d’études à distance, le CNED, selon les orientations qui seront décidées par les responsables de programmes compétents.

Cela nécessite de faire passer le budget initial de 125 millions d’euros à 385 millions d’euros. Cette décision permettrait de redéployer les effectifs de l’administration consulaire dédiés à l’étude des demandes de bourse. L’augmentation de 260 millions d’euros du budget de l’action n° 2 du programme 151 est financée par la diminution du même montant de l’action n° 5, Agence pour l’enseignement français à l’étranger, du programme 185.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

La commission des finances n’ayant pas été saisie de ces amendements, je vais émettre un avis personnel.

Votre proposition, monsieur le sénateur, est une sorte de déflagration atomique : ce sont 260 millions d’euros qui sont en cause ! §Ce n’est pas tous les jours que nous discutons d’un amendement visant un tel montant…

On comprend bien l’intention, qui est généreuse. Toutefois, comme souvent, l’enfer est pavé de bonnes intentions.

Si je vous comprends bien, vous proposez une somme égale pour tout le monde. Or c’est en contradiction avec la réforme du système de bourse intervenue voilà un an et demi, sur laquelle on peut certes revenir, mais qui visait à rendre le système progressif, c'est-à-dire lié à la progression des revenus. Tel n’est pas le cas avec ce que vous nous proposez.

Surtout, ces 260 millions d’euros seraient pris sur le budget de l’AEFE, qui gère nos 450 lycées à l’étranger et qui est dotée d’un budget de 453 millions d’euros. Autrement dit, l’adoption de votre amendement reviendrait à diviser par plus que deux la dotation de l’AEFE. Allons-nous devoir fermer la moitié des lycées ? Il y a tout de même quelque chose qui ne va pas ! Vous en êtes d'ailleurs conscient, monsieur le sénateur.

Pour cette raison et pour beaucoup d’autres, que je pourrais développer, je vous demande, à titre personnel, de bien vouloir retirer cet amendement.

Debut de section - Permalien
Matthias Fekl, secrétaire d'État

Il est clair que deux philosophies existent s'agissant du soutien à la scolarité des jeunes à l’étranger. Mon prédécesseur, Mme Hélène Conway-Mouret, avait beaucoup travaillé sur le sujet, précisément pour poser une réforme juste, prenant en compte les capacités contributives de chacun.

En ce qui concerne cet amendement, un dispositif existe déjà pour les jeunes Français qui ne fréquentent pas un établissement français à l’étranger et qui veulent néanmoins apprendre notre langue lorsque leurs parents et eux ont fait ce choix.

L’AEFE finance, en effet, le dispositif « français langue maternelle », ou dispositif FLAM, qui permet à 150 associations, dans 37 pays, d’offrir un système périscolaire de soutien en français pour les élèves non scolarisés dans le réseau homologué.

Les dispositions de votre amendement posent, par ailleurs, la question des bourses. Le point de vue du Gouvernement est qu’un prélèvement de 260 millions d’euros sur le budget de l’AEFE, outre qu’il constituerait une déflagration, comme M. le rapporteur spécial l’a souligné, ruinerait irrémédiablement le système d’enseignement scolaire à l’étranger et les établissements gérés par l’AEFE.

C’est la raison pour laquelle, monsieur le sénateur, j’émets sur votre amendement, au nom du Gouvernement, un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Aymeri de Montesquiou

M. Aymeri de Montesquiou. Bien que les combats désespérés soient les plus beaux

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

L’amendement n° II-194 rectifié ter est retiré.

L'amendement n° II-165, présenté par MM. Ravier et Rachline, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

en euros

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Action de la France en Europe et dans le monde

Dont Titre 2

Diplomatie culturelle et d’influence

Dont Titre 2

Français à l’étranger et affaires consulaires

Dont Titre 2

Conférence ‘Paris Climat 2015’

Total

Solde

Cet amendement n'est pas soutenu.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

L'amendement n° II-107, présenté par Mmes Lepage et Conway-Mouret et MM. Leconte et Yung, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

en euros

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Action de la France en Europe et dans le monde

Dont Titre 2

Diplomatie culturelle et d’influence

Dont Titre 2

Français à l’étranger et affaires consulaires

Dont Titre 2

Conférence ‘Paris Climat 2015’

Total

Solde

La parole est à Mme Claudine Lepage.

Debut de section - PermalienPhoto de Claudine Lepage

Il y a quelques semaines, devant les députés, à l’occasion de l’examen des crédits de l’enseignement scolaire, Mme la ministre de l’éducation nationale, Najat Vallaud-Belkacem, se félicitait que l’éducation nationale redevienne le premier poste budgétaire de l’État, devant la charge de la dette. Elle précisait ainsi combien ce budget est important, car il constitue un véritable marqueur de la politique du Gouvernement, un marqueur de la priorité donnée à la jeunesse et de l’importance accordée à l’éducation comme levier de progrès, de croissance et de réussite dans notre pays.

Je ne puis, bien sûr, que saluer cette position, tout en me désolant, dans le même temps, que cette priorité accordée à l’éducation ne soit pas déclinée auprès de nos jeunes compatriotes qui résident hors de nos frontières.

En effet, l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, l’opérateur public qui gère notre réseau d’établissements français à l’étranger, voit, cette année encore, sa dotation réduite de près de 9 millions d’euros !

Alors même que toujours plus de Français construisent un projet de vie professionnelle et familiale à l’étranger et contribuent ainsi activement au rayonnement de la France, alors que le nombre d’enfants scolarisés dans le réseau est en constante croissance – plus 3 % cette année et plus 13 % en quatre ans –, le budget de l’Agence décroît inexorablement : moins 2 % cette année, moins 2 % l’année dernière, après la stagnation des années précédentes.

Cette baisse des moyens fragilise assurément l’AEFE, notamment dans ses relations avec ses partenaires. Et, quoi qu’on en dise, s’il devait se pérenniser, ce rabotage constant de ses moyens finira par avoir des conséquences sur les frais de scolarité, déjà exceptionnellement élevés – il est bon de le rappeler quand certains médias continuent d’entretenir le mythe d’une scolarité gratuite à l’étranger – et, donc, sur le volume des bourses.

Monsieur le secrétaire d’État, nous ne demandons aucune faveur. Nous nous contentons de réclamer une application à l’étranger, ne serait-ce que a minima, des engagements du Gouvernement en faveur de l’éducation. Une simple stabilité de la dotation de l’AEFE, tel est l’objet de cet amendement, que je vous demande d’approuver.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

La commission ne s’est pas réunie sur ce sujet, et j’émettrai donc un avis à titre personnel.

Je constate que le nom de M. Yung figure toujours parmi les signataires des amendements les plus modestes sur le plan financier !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

La proposition de Mme Lepage aurait pour effet d’augmenter de 9 millions d’euros les crédits de l’AEFE. La compensation, puisqu’il en faut une, viendrait d’une diminution des crédits attribués à l’informatique et aux télécommunications du ministère.

Or, s’il est légitime que les opérateurs de l’État participent à l’effort général de réduction de la dépense publique, les opérateurs financés par le ministère ne sont pas plus mal traités que les autres. De plus, une réduction des dépenses d’informatique ne manquerait pas de se payer, l’entretien du parc et des réseaux étant nécessaire au bon fonctionnement du ministère.

C’est la raison pour laquelle je vous demande, chère collègue, de bien vouloir retirer votre amendement.

Debut de section - Permalien
Matthias Fekl, secrétaire d'État

Madame la sénatrice, vous êtes très attentive à notre réseau éducatif français à l’étranger et vous avez raison. Le ministère des affaires étrangères y est également sensible. Ancien élève de ce réseau à partir de la classe de quatrième, je le suis moi aussi, à titre personnel.

Debut de section - PermalienPhoto de Aymeri de Montesquiou

C’est la preuve que c’est un bon enseignement !

Debut de section - Permalien
Matthias Fekl, secrétaire d'État

Plus sérieusement, la subvention à l’AEFE diminue de 2 % dans le projet de budget pour 2015, et cela selon la norme interministérielle fixée aux autres opérateurs de l’État, au titre de la contribution à la nécessaire réduction des déficits publics.

Cette évolution correspond aussi à la réduction des crédits de la mission « Action extérieure de l’État » et du ministère des affaires étrangères et du développement international dans son ensemble. Cette baisse n’est donc pas spécifique au budget de l’AEFE.

Sur un budget de 1, 1 milliard d’euros pour l’AEFE, la baisse représente 8, 5 millions d’euros pour 2015. Présent il y a quelques jours à l’AEFE pour échanger avec les équipes et examiner les différents projets en cours, je me suis assuré que cet effort était absorbable pour l’opérateur. L’agence dispose de la capacité d’amortir la baisse de la subvention, notamment en maîtrisant davantage l’évolution de ses dépenses de fonctionnement dans les établissements en gestion directe.

Le programme d’investissement immobilier pourra être poursuivi dans les conditions prévues ; là aussi, j’ai fait le point projet par projet. Je pense en particulier aux travaux de sécurité qui, malheureusement, constituent une priorité dans de nombreux endroits.

Le projet de loi de finances pour 2015 prévoit, à cet égard, le renouvellement du dispositif des avances de l’Agence France Trésor pour 6 millions d’euros.

Je rappelle, par ailleurs, que pour 2015 nous augmentons de 7 millions d’euros la ligne consacrée aux bourses, ce qui, dans le contexte budgétaire que nous traversons, manifeste la priorité donnée par le Président de la République à l’éducation. Cette mesure s’inscrit également dans la réforme, qui a été votée, visant à rendre le système de bourses dans nos établissements français à l’étranger plus juste, plus efficace et plus pertinent.

Vous proposez, madame la sénatrice, de gager cette dépense à hauteur du quart de l’ensemble des crédits d’informatique et de télécommunications du Quai d’Orsay. Or cela reviendrait, à la fois, à mettre en péril la sécurité et la fiabilité de nos systèmes de communication et à ralentir des projets de dématérialisation dont nous savons qu’ils portent des gains d’efficience et d’efficacité à moyen et long termes.

Pour l’ensemble de ces raisons, je vous suggère de retirer cet amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Claudine Lepage

Je n’ai pas d’illusions sur le sort qui sera réservé à cet amendement. Je le maintiens toutefois, au nom de la priorité qu’il convient de donner à l’éducation.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Lenoir

Le Gouvernement peut dire merci aux voix de l’UMP !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Nous allons procéder au vote des crédits, modifiés, de la mission « Action extérieure de l’État », figurant à l’état B.

Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits, modifiés.

Ces crédits sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Action extérieure de l’État ».

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Engagements financiers de l’État », des comptes de concours financiers « Accords monétaires internationaux » et « Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics », ainsi que des comptes d’affectation spéciale « Participation de la France au désendettement de la Grèce et « Participations financières de l’État ».

La parole est à M. Serge Dassault, rapporteur spécial.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Dassault

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je tiens à rappeler en préambule de cette intervention que le Gouvernement indiquait, à la fin de 2013, que le redressement était en vue… Dans le budget pour 2014 qu’il nous présentait, le déficit prévu était de 3, 6 % du PIB et la croissance de 0, 9 %. Or il se trouve que, à la fin de 2014, le déficit atteint 4, 4 % et la croissance seulement 0, 4 % !

Ces derniers chiffres expliquent pourquoi la croissance prévue pour 2015 ne sera certainement pas de 1 %, ainsi que l’a déclaré le Premier président de la Cour des comptes, M. Didier Migaud. Nous n’aurons donc pas les recettes fiscales attendues. Le déficit espéré – 4, 3 % en 2015 – sera, dès lors, également plus élevé que prévu, bien loin des 3 % exigés par la Commission européenne.

Je l’ai déjà dit, il faut toujours se méfier des prévisions trop optimistes, qui ne se réalisent pas.

Debut de section - Permalien
Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics

Des pessimistes aussi !

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Dassault

Mieux vaut être prudent. Certes, chacun peut se tromper, mais moins les prévisions seront optimistes, moins on se trompera.

Par ailleurs, le financement nécessaire au règlement de notre dette arrivant à échéance en 2015, notre déficit budgétaire devra être couvert par un emprunt de 188 milliards d’euros, ce qui sera sans doute insuffisant.

On emprunte de plus en plus, non pour investir, mais pour rembourser les créanciers qui financent nos dépenses de fonctionnement, ce qui devrait être rigoureusement interdit pour l’État, comme pour les entreprises. Les emprunts ne devraient être utilisés que pour des dépenses d’investissement, et jamais comme des variables d’ajustement pour équilibrer les budgets, comme cela a été fait trop souvent par les gouvernements précédents, de droite comme de gauche.

Ces emprunts de fonctionnement ne créent aucune recette. Pour les rembourser, il faut emprunter de nouveau !

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Dassault

Nous sommes dans un cercle vicieux mortel. Dans moins de deux ans, 30 % de notre dette arriveront à échéance. C’est écrit ! Cela signifie qu’il faudra réemprunter 450 milliards d’euros en deux ans, en y ajoutant les déficits budgétaires.

Debut de section - Permalien
Michel Sapin, ministre

C’est la somme que vous avez empruntée en 2009 et 2010 !

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Dassault

Je crains que l’on ne trouve pas les financements nécessaires, en tout cas pas à de faibles taux, comme aujourd’hui, et qu’une augmentation de ces taux ne conduise à un alourdissement considérable de la charge de la dette, prévue pour 2015 à 44, 3 milliards d’euros. Ce sera dramatique, car, si la charge de la dette augmente, elle réduira nos recettes fiscales, entraînant de nouveaux emprunts. Nous risquerons alors de ne plus trouver de prêteurs et de nous retrouver dans une situation de cessation de paiement, c’est-à-dire de faillite totale.

Pour éviter cette catastrophe, il faudrait changer totalement de politique budgétaire et diminuer les impôts qui suppriment toute possibilité de croissance et augmentent le chômage.

Debut de section - Permalien
Michel Sapin, ministre

Pour augmenter le déficit ?

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Dassault

Je préconise donc, monsieur le ministre, mes chers collègues, une augmentation de la TVA.

Je préconise, surtout, l’adoption d’un taux unique pour tous les revenus, comme c’est le cas pour la CSG, laquelle, avec un taux de 7 % applicable à tous les contribuables, rapporte 85 milliards d’euros, quand l’impôt à taux progressif ne rapporte que 65 milliards d’euros, tout en admettant un nombre élevé de niches fiscales qui diminuent les recettes de l’État.

Il vaut mieux que chacun paie les impôts et les charges avec ses revenus, plutôt que d’avoir des impôts trop élevés compensés par des subventions de l’État.

La Russie a adopté un taux d’imposition unique de 13 %. Cette mesure a pour effet de supprimer toute fraude fiscale, puisque tous les contribuables paient de faibles sommes, et d’augmenter le pouvoir d’achat de tous.

Debut de section - Permalien
Michel Sapin, ministre

M. Michel Sapin, ministre. S’il n’y a plus d’impôt à payer, en effet, il n’y a plus de fraude...

Sourires sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Dassault

La mise en place d’un impôt à taux unique pour tous les revenus du travail et du capital permettrait de donner un coup de fouet à notre économie, de mettre un terme aux expatriations, de renouer avec les investissements, donc de créer des emplois et de la croissance, d’augmenter nos recettes fiscales, de diminuer notre déficit budgétaire et de rétablir l’équilibre de nos budgets. Ce serait, alors, le moment de dire : « Le redressement est en vue. » Tel n’est pas le cas aujourd’hui...

Parallèlement, il faudra diminuer nos dépenses, car c’est ce qu’attend la Commission européenne. Si on ne le fait pas, la Commission Juncker nous pénalisera lourdement, à hauteur de 4 milliards d’euros, une somme que l’on trouvera, non par des réductions de dépenses, mais par des augmentations d’emprunts.

Telles sont les remarques que je voulais formuler sur la situation générale de notre pays. En attendant, mes chers collègues, je vous propose, au nom de la commission des finances, d’adopter pour 2014 les crédits de cette mission, ainsi que les crédits des comptes spéciaux rattachés, soit 45, 2 milliards d’euros, dont 44, 3 milliards d’euros pour la charge de la dette. §

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Vincent

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, pour la première fois cette année, la commission des finances a décidé que le compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État », qui est le support budgétaire des opérations conduites par l’État en tant qu’actionnaire, ferait l’objet d’un rapport budgétaire spécifique, qu’elle a bien voulu me confier.

Je voudrais tout d’abord rappeler quelques caractéristiques de ce compte atypique.

Il s’agit tout d’abord d’un compte d’affectation spéciale, c’est-à-dire qu’il existe un lien direct entre ses recettes et ses dépenses. En l’espèce, les recettes du compte résultent de cessions de participations, c’est-à-dire de la vente d’actions détenues par l’État, et les dépenses proviennent de prises de participations. En outre, le compte peut financer le désendettement de l’État.

S’agissant des recettes, le Gouvernement ne souhaite pas s’engager a priori sur un montant ou sur un rythme de cessions. Cette position est justifiée par des raisons de confidentialité, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Vincent

... mais également d’opportunité, en fonction des conditions de marché.

Il en résulte que, dans chaque projet de loi de finances, quelque 5 milliards d’euros de recettes sont inscrits, même si, depuis plusieurs années, ce montant n’a jamais été atteint. En revanche, en dépenses, certaines opérations sont d’ores et déjà connues et peuvent être budgétées.

Mes chers collègues, comme vous le savez, l’État possède de nombreuses participations financières dans différents secteurs. Depuis deux ans, il a repris en main son rôle d’actionnaire, bien décidé à utiliser tous les outils à sa disposition pour conduire sa politique économique, à mon avis à juste titre.

Ce chantier de modernisation repose plus particulièrement sur une doctrine d’investissement, qui autorise ce que l’Agence des participations de l’État, l’APE, appelle la « gestion active des participations ». Autrement dit, si l’État identifie qu’une de ces participations lui est plus utile ou plus stratégique, alors il peut la céder pour réaliser de nouveaux investissements ou favoriser le désendettement.

Depuis janvier 2014, l’État actionnaire a eu l’occasion de mettre en œuvre sa nouvelle doctrine au travers de deux opérations.

Ainsi, il a cédé 1 % du capital d’Airbus Group afin de financer une partie de l’acquisition de 14, 1 % du capital de PSA, dont chacun sait qu’il s’agissait d’accompagner la relance. De même, en juin dernier, il a procédé à la cession de 3, 6 % du capital de GDF-Suez pour un montant de 1, 5 milliard d’euros. Une somme identique a été versée à la Caisse de la dette publique, la CDP, pour contribuer au désendettement de l’État. Or ces opérations n’ont pas conduit à une perte d’influence de l’État au sein de la société.

Pour l’année 2015, monsieur le ministre, nous avons quelques questions à vous poser au regard de l’actualité récente. Notre principale interrogation porte sur l’annonce, que vous avez faite, selon laquelle l’État devrait céder entre 5 et 10 milliards d’euros de participations d’ici aux dix-huit prochains mois.

Nous connaissons la confidentialité qui entoure ces sujets, mais nous serions très heureux que vous puissiez apporter à la représentation nationale quelques précisions sur les projets du Gouvernement, compte tenu de l’importance de cette évolution.

Les recettes ainsi dégagées seraient en priorité affectées au désendettement. Une somme de 4 milliards d’euros est d’ailleurs inscrite sur le tableau de financement du projet de loi de finances pour 2015. La ministre de l’écologie a également évoqué le financement de la transition énergétique. Monsieur le ministre, un arbitrage en ce sens a-t-il été rendu ?

En tant que rapporteur spécial, je constate que l’équilibre à trouver dans ce secteur, comme dans d’autres, est délicat. Dans le même temps, en effet, ces participations rapportent 3, 5 milliards d’euros par an à l’État, sous forme de dividendes. Il faut donc que l’État garde un niveau suffisant de participations pour conserver ces rémunérations.

La vente de participations est donc une solution « à un seul coup », qui a l’avantage d’être conduite à un moment où la valeur du portefeuille coté de l’État a nettement augmenté, puisque l’on constate une hausse de 40 % ces derniers mois.

Monsieur le ministre, les dernières informations évoquant l’hypothèse de la vente de participations dans les sociétés aéroportuaires m’incitent à souligner, pour les regretter, les errements passés lors de la privatisation des sociétés d’autoroutes. Dans quelle mesure toutes les garanties seront-elles prises pour éviter une sous-estimation de ces rentrées et pour garantir aux collectivités territoriales que ces infrastructures continueront à contribuer au développement des territoires ? En effet, c’est une question que posent de nombreux élus locaux.

J’évoquerai maintenant plus précisément la situation de trois entreprises dont l’État est actionnaire.

Tout d’abord, Dexia, dont le sauvetage, comme vous le savez, a déjà coûté près de 7 milliards d’euros, n’a pas obtenu la certification européenne au test de résistance conduit par la Banque centrale européenne, la BCE. Or l’État français reste actionnaire à hauteur de 44 %, ce qui est préoccupant pour l’avenir.

Ensuite, dans le domaine de l’armement, Nexter a engagé des négociations en vue de se rapprocher de son homologue allemand Krauss-Maffei Wegmann, KMW. Pour l’instant, nous avons peu de détails sur le contenu de l’opération. Monsieur le ministre, pouvez-vous nous assurer que, lors de l’examen du prochain projet de loi, le Parlement en saura davantage sur ce projet industriel qui aura sans doute un impact sur de nombreuses régions ?

Enfin, Areva vient de procéder à diverses annonces assez peu favorables : difficultés à tenir ses objectifs financiers, risques d’une recapitalisation par l’État. Ces difficultés sont réelles, mais les risques sont-ils objectifs ?

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Vincent

M. Maurice Vincent, rapporteur spécial. Mes chers collègues, sous le bénéfice de ces observations, la commission des finances vous propose d’adopter le compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État ».

Applaudissementssur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Chatillon

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je présente devant vous l’analyse des comptes et de la politique de l’État actionnaire de la commission des affaires économiques. Pour faire bref, elle se résume à un certain nombre de constats et de suggestions.

Le portefeuille de l’État a progressé d’un tiers environ en 2014. Cette augmentation paraît cependant extraordinairement fragile, car elle dépend essentiellement, sur les entreprises concernées, non pas d’une gestion active, mais de l’évolution du cours de deux titres, EDF et GDF-Suez, qui représentent à eux seuls les trois quarts du portefeuille coté. Voilà une première raison de plaider pour une diversification de ce portefeuille, notamment en misant sur des entreprises de taille intermédiaire d’avenir, dont certaines deviendront des champions nationaux.

Par ailleurs, ce compte comporte des informations réduites au strict minimum. C’est une habitude bien ancrée depuis longtemps. La Cour des comptes a déjà déploré la visibilité insuffisante des engagements relatifs à la défaisance du Crédit lyonnais. Aujourd’hui subsiste le risque Dexia, que notre collègue Maurice Vincent a évoqué et qui est estimé à environ 17 milliards d’euros, ce qui correspond par exemple à mille fois les crédits alloués au Fonds d’intervention pour les services, l’artisanat et le commerce, le FISAC, sur lesquels les débats parlementaires sont nourris.

C’est pourquoi nous proposons cette année de confectionner un indicateur pour mieux signaliser les risques sous-jacents au portefeuille de l’État actionnaire.

Il faut plus d’audace et de réalisme dans la gestion du portefeuille de l’État actionnaire. C’est une préoccupation constante de la commission, que l’on retrouve désormais dans le discours officiel. Toutefois, encore faut-il passer des intentions aux actes. Voici quelques propositions pragmatiques tirées de l’observation des derniers événements.

Tout d’abord, m’appuyant sur l’exemple concret de la privatisation en cours de l’aéroport de Toulouse, j’ai appelé l’attention du Gouvernement sur le fait que l’État actionnaire devait, à mon sens, soigneusement différencier son approche, selon qu’il cède les titres de grandes entreprises, déjà très largement détenus par des non-résidents, ou qu’il privatise un outil qui structure depuis près d’un siècle un territoire, un bassin d’emploi.

L’État actionnaire est imprégné d’une tradition de confidentialité administrative, alors que l’économie de nos territoires tire sa force d’un élan commun collectif, qui implique une large concertation, surtout si la privatisation concerne de près le poumon industriel d’une région.

La méthodologie des privatisations d’entités locales semble ainsi perfectible sur plusieurs points. L’adjudication de l’aéroport de Toulouse a été lancée le 11 juillet dernier pour s’achever à la fin des grandes vacances. Malheureusement, nos opérateurs français n’ont pas eu le temps de réfléchir.

En outre – autre remarque que je formule –, il faut voir plus loin que le prix affecté. Pour avoir été chef d’entreprise pendant trente-huit ans, je ne conçois pas qu’un actionnaire prenne une participation et oblige ensuite ses partenaires – ici, les collectivités – à suivre, s’il décide des investissements lourds. Or c’est ce qui se passerait. Comment feront les collectivités, alors que les aides de l’État sont réduites ? C’est un risque important.

Privatiser, c’est aussi prévoir les retombées à moyen terme sur l’économie d’un territoire et programmer, pour les collectivités et l’État, les investissements nécessaires en équipements publics, afin de garantir un développement équilibré. J’ajoute que, dans le cas de Toulouse, il est hautement souhaitable que l’État et les collectivités conservent la majorité du capital, ce qui impliquerait que l’État conserve sa participation résiduelle de 10, 1 %.

Ensuite, il faut privilégier les acquisitions offensives. Le décret du 14 mai 2014, par lequel la France soumet à autorisation l’acquisition d’entreprises exerçant des activités stratégiques, est désormais un outil opérationnel. Ce « bouclier réglementaire » ne peut-il pas permettre de dispenser l’État de procéder à tout ou partie d’achats défensifs de titres ? Compte tenu de la situation de nos finances publiques, la commission estime opportun de s’interroger sur les investissements de substitution qui permettraient à des entreprises en pleine croissance de changer d’échelle et de s’internationaliser.

À présent que le programme de désendettement du compte d’affectation spéciale est réactivé, il nous a semblé très utile de prendre position sur la manière dont il doit être alimenté.

Je pars d’une constatation simple : le portefeuille de l’État, qui ne représente qu’un vingtième de la dette, produit des revenus réguliers, qui couvrent le dixième de la charge de la dette. Sauf cas d’extrême urgence, nous suggérons donc d’allouer en priorité au désendettement non pas le produit éphémère des cessions de titres de l’État, mais plutôt les revenus réguliers qu’ils produisent. Une telle démarche de désendettement durable suppose, pour plus de clarté budgétaire, d’affecter au compte spécial les dividendes perçus, alors qu’ils sont aujourd’hui reversés au budget général.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Chatillon

Monsieur le ministre, notre souci est d’avoir une gestion plus proche des réalités. Sur les désinvestissements, avant de nous engager – je sais que la décision concernant la cession de l’aéroport de Toulouse est en cours –, réfléchissons bien aux investissements nécessaires pour accompagner nos collectivités qui sont en grande difficulté financière en ce moment.

Pour le reste, mes chers collègues, je vous renvoie à la lecture de mon rapport.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.

Je vous rappelle également qu’en application des décisions de la conférence des présidents, aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de quinze minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à M. André Gattolin.

Debut de section - PermalienPhoto de André Gattolin

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, qu’est-ce que la dette ? Au sens étymologique, la dette, c’est le devoir. Quel est précisément ce devoir ? Plus encore, qui nous l’impose ?

Si l’on écoute l’air du temps, notre devoir serait de rembourser nos créanciers. En effet, si ceux-ci ont aujourd’hui l’amabilité de nous prêter à des taux remarquablement bas, cela pourrait ne pas durer éternellement. À plus ou moins long terme, nous pourrions alors faire face à une explosion de la charge de la dette. Ce serait donc pour retrouver notre souveraineté que notre devoir serait, dans cette période difficile, de réduire fortement les dépenses publiques.

En prenant un peu de recul, on peut déjà remarquer que la baisse des dépenses publiques, telle que la conçoit le Gouvernement, est destinée non pas à résorber le déficit, qui d’ailleurs augmente, mais à financer des subventions sans conditionnalité aux entreprises privées.

Au-delà de cet élément conjoncturel, on peut se demander d’où nous vient cette dette qui nous oblige désormais. Il est toujours utile de rappeler que, depuis l’introduction de l’euro et jusqu’en 2008, la dette de la zone euro était stable, autour de 70 % du PIB. Entre 2008 et aujourd’hui, elle est passée à environ 90 % du PIB. Par la magie du système dans lequel nous vivons, la crise de la finance privée s’est donc transformée en une crise de la dette publique. Par conséquent, expliquer que c’est au nom de notre souveraineté qu’il faudrait aujourd’hui nous astreindre, toutes affaires cessantes, au règlement de cette dette s’apparente à un travestissement de la réalité.

La souveraineté, ce serait plutôt de ne pas céder aux acteurs financiers qui ont provoqué cette crise par leurs prises de risques inconsidérées, d’autant plus que ce sont les mêmes qui aujourd’hui spéculent sans retenue sur la dette des États.

La vraie souveraineté consisterait à mutualiser à l’échelle européenne tout ou partie de nos dettes, lesquelles bénéficieraient ainsi d’une garantie collective, ce qui aurait pour effet mécanique de desserrer l’étau des taux dans lequel notre économie est bloquée. Ce serait là une solution simple, rappelant le primat de la politique sur l’économie, qui permettrait de retrouver un peu de marge de manœuvre à court terme.

Pour autant, le problème est bien plus profond. Si la crise financière explique l’explosion récente des dettes publiques, on ne peut pas lui imputer l’accumulation progressive de la dette depuis les années soixante-dix.

L’histoire de cette dette-là est celle d’une promesse, celle d’une croissance infinie, préfinancée par l’endettement. Malheureusement, cette promesse n’a pas été tenue.

En France, dans les années soixante, la croissance était en moyenne de 5, 7 % par an ; dans la décennie soixante-dix, elle était de 3, 7 % ; dans la décennie quatre-vingt, de 2, 4 % ; dans la décennie quatre-vingt-dix, de 2 % ; et de 1, 1 % dans la décennie deux mille. Je vous laisse imaginer la suite...

Les promoteurs d’un avenir libéral-productiviste radieux ont en effet commis une erreur de taille, déjà pointée en 1972 par le Club de Rome dans un fameux rapport. La croissance n’est pas qu’une construction de l’esprit ; elle est assise sur la réalité physique que constituent l’environnement et les ressources naturelles, qui, par définition, sont des ressources finies. Chaque année, l’ONG Global Footprint Network calcule le jour où l’empreinte écologique de l’humanité dépasse la capacité annuelle de régénération de la planète, c’est-à-dire le jour de l’année à partir duquel nous vivons écologiquement à crédit. En 2014, ce jour est tombé le 19 août.

C’est au début des années soixante-dix que nous sommes devenus écologiquement déficitaires, en même temps que la dette a commencé à s’accumuler sérieusement. Nous sommes désormais pris, de manière durable, non plus dans un étau, mais dans un ciseau des taux : la dette écologique augmente, tandis que la croissance, censée la financer, baisse.

Il aura fallu il y a quelques années le rapport d’un économiste réputé, Nicholas Stern, pour que l’on prenne enfin conscience que cette dette écologique, qui ne se négocie pas plus qu’elle ne se restructure, allait bientôt présenter la facture.

D’ailleurs, si Barack Obama a marqué récemment une rupture dans la politique environnementale des États-Unis, avec son ambitieux plan climat, ce n’est pas nécessairement pour faire plaisir aux Européens, mais ce n’est pas sans rapport avec le lobbying des assureurs et réassureurs américains. Ceux-ci commencent en effet à s’inquiéter de la récente multiplication de catastrophes naturelles extrêmement coûteuses.

En conclusion, monsieur le ministre, mes chers collègues, notre devoir aujourd’hui, notre responsabilité, c’est de réduire notre dette écologique, pas de nous soumettre aux exigences de ceux qui dansent sur la crise.

Je conclurai en précisant que le groupe écologiste votera bien entendu les crédits de cette mission.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-France Beaufils

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, des enjeux particulièrement importants, des sommes d’un niveau élevé : telles sont les caractéristiques essentielles de la mission « Engagements financiers de l’État » et des quatre comptes spéciaux soumis à notre examen, qui recouvrent des réalités aussi différentes que le patrimoine mobilier de l’État et la participation de la France aux plans de stabilité de la zone euro ou encore la dette publique de l’État.

Je ne reviendrai pas cette après-midi sur le fameux plan de désendettement de la Grèce qui, sous la férule de la « troïka » formée de l’Union européenne, du Fonds monétaire international et de la Banque centrale européenne, a fait reculer l’économie de ce pays d’une bonne dizaine d’années. Il me suffira de souligner que, selon un journal économique, le produit intérieur brut de la Grèce s’est contracté de 24 % entre 2007 et 2013, tandis que le taux de chômage dans ce pays frise désormais les 30 %.

Ainsi, les politiques d’austérité draconienne imposées à la Grèce ont produit une insécurité juridique et une incertitude économique lourdes de conséquences pour ce pays et pour sa population.

En ce qui concerne la France, je commencerai par faire observer que la dette publique continue de progresser, sous l’effet des choix budgétaires qui sont opérés. De fait, le projet de loi de finances fixe la prévision de déficit budgétaire pour 2015 à environ 75, 6 milliards d’euros.

Cette année, nous aurons émis pour 188 milliards d’euros de titres de dette, dont la plus grande partie, 119, 5 milliards d’euros, aura servi à amortir la dette existante. Dans le même temps, nous aurons versé, sous forme de remboursements et dégrèvements les plus divers, quelque 76, 8 milliards d’euros aux entreprises de notre pays.

Encore ce chiffre ne prend-il pas en compte l’incidence financière de dispositifs aussi importants que les modalités particulières de calcul de l’impôt, comme le régime des groupes, et les allégements et exonérations de cotisations sociales. Sans parler des effets cumulés sur la durée de la baisse du taux de l’impôt sur les sociétés et de la quasi-disparition de la fiscalité locale des entreprises.

Ce lent, mais sûr mouvement de pertes de recettes pour l’État, nous en connaissons les ressorts passés et présents : depuis trente ans, l’État s’endette pour favoriser, avec l’argent public, le redéploiement des capacités de production et de profit de nos entreprises, et les lois de finances exaucent largement les seuls désidératas du MEDEF.

D’ailleurs, le vice-président de cette organisation, M. Geoffroy Roux de Bézieux, a lui-même confirmé cette appréciation : mettant en avant une prétendue ponction de 30 milliards d’euros opérée sur les entreprises depuis 2010, celui qui préside aussi aux destinées de l’assurance chômage a affirmé que les effets du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le CICE, clef de voûte de la politique gouvernementale en direction des entreprises, ne se feraient pas sentir avant 2017 en matière d’investissement et d’emploi.

La manipulation patronale est d’ailleurs tout à fait grossière, …

Sourires sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-France Beaufils

… puisque, en 2010, après le vote de multiples projets de loi de finances rectificative et de dispositions diverses, la dégradation du solde budgétaire a atteint un degré particulièrement élevé, le déficit s’établissant à 148, 8 milliards d’euros.

Or cette dégradation était notamment due à un impôt sur les sociétés qui a été réduit à 32, 9 milliards d’euros nets, pour cause de remboursements anticipés et massifs de créances disponibles.

La vérité est donc très prosaïque : le déficit public, que l’on instrumentalise depuis trop longtemps, est en réalité le résultat de l’acceptation de la loi du marché. La contribution que l’État apporte aux stratégies de nos plus grands groupes lui impose de procéder ensuite aux ajustements de dépenses et de recettes nécessaires pour éponger la facture de ses choix.

La dette publique va, avant peu, atteindre et dépasser les 100 % du PIB. Le mouvement semble inexorable, eu égard aux taux d’intérêt non pas nominaux, mais réels, quand bien même les bons du Trésor à taux négatif et les obligations à dix ans au taux de 1, 75 % sont quelque peu séduisants ; eu égard aussi à l’atonie de l’activité économique, dont les milliers de chômeurs supplémentaires que nous découvrons chaque mois sont le témoignage incontestable.

Je tiens à insister sur certaines remarques que j’ai déjà formulées dans la discussion générale. Sur un strict plan scientifique, comparer le flux de création de richesses, le PIB, avec le stock de la dette publique, de surcroît composé d’éléments très divers, n’a aucun sens. Selon nous, il convient de considérer plutôt l’accroissement du patrimoine public au regard de l’évolution du niveau de la dette.

Or, en la matière, les collectivités territoriales ont donné l’exemple : en cinq ans, malgré la dégradation de leur environnement due à la banalisation des financements, elles ont réussi le tour de force de n’accroître que de 17 milliards d’euros leur dette de moyen et long terme, pour financer 280 milliards d’euros de dépenses réelles d’investissement.

En réalité, disposer d’un patrimoine immobilier, foncier et même immatériel de grande valeur est essentiel.

À ce propos, permettez-moi de répéter que toute cession par l’État de titres, parts sociales ou actions constituerait aujourd’hui une erreur, compte tenu de la rentabilité moyenne de ces valeurs, qui est de 4 %, puisque celles-ci rapportent à l’État des dividendes supérieurs au taux d’intérêt de la dette de long terme. Préférons donc valoriser les actifs sous cette forme, plutôt que de les céder à vil prix. Évitons surtout de nouvelles ventes à l’encan, après la cession des parts de l’État dans les sociétés autoroutières !

Exigeons aussi de la Banque centrale européenne qu’elle devienne, sous des formes et dans des proportions à définir au niveau de l’Union européenne, prêteuse en dernier ressort des États, ne serait-ce que pour modifier le profil général de leur dette. Rapprocher les taux réels de zéro participera alors pleinement au redressement des économies de la zone euro et, par voie de conséquence, à la solidité de la monnaie.

En désaccord avec les principes qui conduisent les comptes publics à l’endettement que l’on connaît aujourd’hui, nous ne voterons pas les crédits de la mission, ni ceux des comptes spéciaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Yvon Collin

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la dette de notre pays atteint des niveaux inédits : en septembre dernier, le seuil symbolique des 2 000 milliards d’euros a été franchi.

Cette situation est le résultat de quarante années de budgets exécutés en déficit sous toutes les majorités, de droite comme de gauche ; à ceux qui seraient tentés de donner des leçons, je rappellerai simplement que, entre 2007 et 2012, la dette est passée de 64, 1 % à 84, 5 % du PIB.

Cet endettement élevé rend les engagements financiers de l’État particulièrement cruciaux. En effet, la charge de la dette, estimée à 44, 3 milliards d’euros pour 2014, constitue le second poste de dépenses de notre pays après la mission « Enseignement scolaire », exception faite de la mission « Remboursements et dégrèvements » ; elle est supérieure aux crédits alloués à la Défense nationale.

Le besoin de financement total prévu par le projet de loi de finances pour 2015 s’élève à 196, 6 milliards d’euros.

Mes chers collègues, l’atonie de la croissance mondiale, la faible inflation et son corollaire, la menace déflationniste, sont autant d’obstacles à la reprise économique sur notre continent et de freins à l’effort en faveur du redressement de nos comptes publics.

Dans ce contexte particulièrement défavorable, nous devons nous réjouir que les taux d’intérêt auxquels l’Agence France Trésor emprunte sur les marchés mondiaux soient historiquement bas, parfois même négatifs. Cette situation nous permet, alors que notre encours de dette augmente, du fait notamment de l’accumulation des déficits budgétaires, d’en maîtriser la charge. L’Agence France Trésor a même procédé à des rachats de dette anticipés afin de profiter des conditions de taux avantageuses.

Cette conjoncture favorable ne doit cependant pas nous conduire à relâcher notre effort en matière de maîtrise de la dépense et de rétablissement de nos comptes publics ; du reste, monsieur le ministre, le Gouvernement ne le relâche pas.

Certaines Cassandres nous mettent en garde contre une brutale remontée des taux. Il est vrai qu’une telle évolution aurait des conséquences financières importantes, mais le scénario est peu probable. Une remontée modérée des taux est attendue ; elle est d’ailleurs anticipée dans le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019, que nous avons adopté avec modifications au début du mois de novembre.

D’aucuns prétendent que le moyen de réduire rapidement notre dette consisterait à mener une politique de rigueur et de coupes budgétaires drastiques. Un tel choix pourrait entraîner des conséquences sociales dramatiques et des effets économiques néfastes, en éloignant toute perspective de reprise ; telle est en tout cas ma conviction.

M. Dassault, rapporteur spécial, préconise notamment de supprimer l’ISF, de ne plus assujettir les dividendes aux charges sociales, de rendre les licenciements automatiques en cas de ralentissement de l’activité et de refonder la fiscalité en transformant l’impôt progressif en impôt à taux unique. Je ne suis pas certain que ce remède de cheval serait de nature à soigner notre pays ; je pense, au contraire, que le remède serait pire que le mal.

Le Gouvernement n’a pas fait ce choix, comme le confirme le projet de loi de programmation des finances publiques, et nous soutenons sa position. Je n’ai pas la naïveté de considérer les lois de programmation des finances publiques comme paroles d’Évangile ; reste que le projet de loi de programmation prévoit, pour les années 2014 à 2019, une trajectoire de solde effectif conduisant à une baisse de la dette, certes modérée, à partir de 2017.

Dans le temps réduit qu’il me reste, je m’attacherai au compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État ».

En période de vaches maigres budgétaires, il est tentant pour l’État de céder sa participation dans des entreprises, afin de renflouer les caisses à l’étiage. Reste qu’il s’agit, comme on l’a signalé il y a quelques instants, d’un fusil à un coup. Si cession il y a, elle ne doit pas être réalisée dans l’urgence et doit s’inscrire dans un projet industriel cohérent. N’oublions pas non plus que, en vendant sa participation dans certaines entreprises, l’État se prive d’éventuels dividendes.

Monsieur le ministre, je salue la réforme de la doctrine de l’État actionnaire. À cet égard, l’année 2014 a été marquée par une prise de participation symbolique dans le groupe automobile PSA, dont l’État a acquis 14, 1 % du capital, à parité avec la famille Peugeot et le groupe chinois Dongfeng.

Il est du rôle de l’État de participer au capital des entreprises de secteurs sensibles en termes de sécurité nationale et d’entreprises qui fournissent des services essentiels. Il lui appartient aussi, en tant que stratège, d’accompagner nos grands groupes dans certains secteurs clefs, pour les aider à affronter les mutations, parfois brutales, de la mondialisation ; en l’espèce, le groupe PSA était jusqu’à présent resté en dehors du vaste mouvement de concentration qui touche son secteur.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, les sénateurs de mon groupe voteront à l’unanimité les crédits de cette mission et ceux des quatre comptes spéciaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Bourquin

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Engagements financiers de l’État » s’inscrit dans une stratégie de l’État actionnaire qui est en vigueur depuis 2012 et qui me paraît équilibrée : une partie des sommes disponibles est consacrée au désendettement, une autre, très substantielle, est vouée à des actions de réinvestissement productif, donc au soutien global de l’activité.

Je tiens à mettre en évidence deux actions précises, en commençant par la mobilisation tout à fait opportune de l’État en faveur d’Alstom, dont il faut se féliciter. Alors que notre indépendance énergétique était menacée, le décret du 14 mai 2014 relatif aux investissements étrangers soumis à autorisation préalable a été un pare-feu efficace.

La seconde action qui mérite d’être signalée est la recapitalisation de PSA intervenue au début de l’année, à la suite de laquelle la participation de l’État s’élève à 800 millions d’euros, soit 14, 1 % du capital du groupe. En accompagnant PSA dans son redressement, l’État a joué pleinement son rôle pour protéger le patrimoine et le savoir-faire de cette entreprise, dont 44 % de la production est réalisée en France, avec à la clef des dizaines de milliers d’emplois, mais aussi pour protéger son avenir, puisqu’elle est le premier dépositaire de brevets en France.

Ce niveau de recapitalisation va de pair avec des exigences. La majorité des sites de PSA sont en France : nous devons conserver ces capacités de production. Il faut aussi que nous soyons très attentifs à la recherche-développement, qui est localisée à 75 % en France et qui doit le rester. La vigilance est de mise sur ces questions. Nous avons d’ailleurs signalé à Carlos Tavares que la représentation nationale ferait preuve d’une grande vigilance en ce qui concerne l’avenir de PSA.

Sans nier la nécessité de se désendetter, nous pensons, monsieur le ministre, que les actions de réinvestissement doivent être prioritaires. Vous avez indiqué que, sur les 10 milliards d’euros de produits de cessions annoncés pour 2015, quelque 4 milliards d’euros seraient alloués au désendettement, les 6 milliards d’euros restants pouvant être mobilisés pour des réinvestissements compétitifs. Vous n’en serez pas étonné : nous tenons à ce que la part destinée au réinvestissement soit très majoritaire, car la relance de l’activité dépend bien sûr d’injections ciblées de capitaux dans certaines activités, branches et entreprises qui ont besoin, pour se développer, du soutien de l’État.

À la vérité, le retour de la croissance nécessite un équilibrage fin entre le désendettement et une stratégie de réinvestissement capable d’entraîner des effets à long terme sur l’économie. Du reste, nous savons tous que le désendettement dépend aussi de l’activité économique. Mes chers collègues, c’est par l’activité économique que nous arriverons à désendetter le pays !

Pourriez-vous, monsieur le ministre, nous indiquer dans quel domaine vous envisagez de faire des réinvestissements, et quels seront-ils ? Par exemple, la transition écologique et, bien sûr, les technologies d’avenir seront-elles fortement ciblées ?

Ces informations nous paraissent déterminantes, car, pour le groupe socialiste, la transparence est essentielle, à la fois de la part du Gouvernement et dans les comités d’entreprise, lorsqu’il faut donner des informations sur les reprises d’entreprise. La transparence est un gage de responsabilité et d’efficacité conjuguées.

L'État actionnaire dispose de 761 représentants dans des conseils d'administration, et il n’y a pas que des jetons de présence en jeu. Il s'agit là d’une véritable responsabilité, qui va au-delà de la gestion dynamique des titres.

Je souhaite suggérer, monsieur le ministre, que vous donniez très clairement un mandat à tous ces représentants pour qu’ils prennent en compte la préservation de l’ensemble du tissu économique. L’aval des filières, en soutien aux ETI et aux PME locales, aux sous-traitants de premier rang ou de deuxième rang, sera essentiel, de même que le respect le plus scrupuleux de la loi, par exemple en matière de concurrence déloyale ou de dumping social ou environnemental.

La survie des territoires et, surtout, l’avenir d’une France productive, d’une France redevenue industrielle, dépend essentiellement de l’action du Gouvernement. L'État actionnaire est stratège, mais il doit aussi, au travers de ses représentants, faire œuvre de pédagogie et d’exemplarité.

Au final, monsieur le ministre, mes chers collègues, le groupe socialiste votera les crédits de cette mission.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe écologiste et du RDSE . – M. Jean-Claude Lenoir applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Savin

Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, la mission « Engagements financiers de l’État » comprend des programmes d’une très grande diversité. Je m’arrêterai en particulier sur deux d’entre eux, avant d’évoquer le compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État » – le CAS PFE.

J’aborderai ainsi, en premier lieu, la grande question de la charge budgétaire de la dette. En 2014 et 2015, bien qu’elle soit élevée, et malgré l’augmentation de l’encours de dette, elle reste contenue. En 2015, les intérêts de la dette constitueront le deuxième poste budgétaire de l’État, après l’éducation nationale, avec une dépense de 44, 3 milliards d’euros. Ce montant est cependant inférieur à la charge prévisionnelle de 2014 – plus de 46 milliards en LFI, puis près de 45 milliards dans la LFR d’août 2014.

Ce niveau stable des intérêts de la dette malgré l’augmentation de son encours s’explique – vous l’avez tous souligné – par les gains de refinancement de l’État. En effet, la France a bénéficié cette année de conditions de financement très favorables. De manière générale, les taux ont baissé dans toute la zone euro.

Je rappelle ainsi que nous finançons notre dette à des taux, comme on dit, « historiquement bas ». Vous l’avez sans doute noté, nos taux à dix ans sont même passés en dessous de 1 % la semaine dernière, ce qui est une première dans l’histoire de la France. Pour l’ensemble de nos émissions à moyen et long terme depuis le début de l’année 2014, le taux est de 1, 33 %, soit, là encore, le taux le plus bas jamais atteint. Je rappelle que ce taux était de 4, 1 % en 2008. On voit donc que l’écart est considérable, et nous engrangeons aujourd’hui des niveaux de taux faibles qui nous aideront durablement à contenir la charge d’intérêt.

La constatation de cette baisse des taux nous conduit à prévoir une diminution de la charge de la dette pour 2015 de 400 millions d’euros en comptabilité maastrichtienne.

Ce scénario pour 2015 reste cependant un scénario prudent, qui prend comme hypothèse une remontée des taux – causée, par exemple, par une remontée des taux américains. Les taux de ce scénario excèdent ainsi de dix à vingt points de base ceux qu’anticipent, par ailleurs, les économistes. Il s'agit donc d’un scénario extrêmement prudent, qui nous réservera peut-être de bonnes surprises.

Un autre point important de cette mission est, bien sûr, le financement du fonds d’aide aux collectivités locales pour sortir ces dernières des emprunts dits « toxiques » qu’elles ont souscrits dans le passé.

La loi de finances pour 2014 a créé un fonds de soutien en faveur des organismes publics locaux ayant souscrit des emprunts structurés et des instruments financiers particulièrement sensibles. Le versement des aides attribuées d’ici à l’été 2015 par le fonds sera réalisé pour l’essentiel sur quinze ans – entre 2014 et 2028 –, à raison de 100 millions d’euros par an. Une petite partie – de l’ordre de 50 à 60 millions d’euros au maximum – pourra être versée en une fois.

Le Gouvernement, je dois l’avouer, a pris du retard dans la mise en œuvre concrète de ce fonds – certains, ici, le savent bien –, mais, ces derniers mois, nous avons beaucoup avancé.

Ainsi, le service de pilotage du fonds a été mis en place. De plus, le comité national d’orientation et de suivi a donné un avis favorable à la doctrine d’emploi du fonds, qui a été publiée ce mois-ci. Vous connaissez bien le président de ce comité, puisqu’il s'agit du sénateur Jean Germain. Des représentants de toutes les strates de collectivités y siègent. Les collectivités sont donc désormais en mesure de déposer leur dossier et de demander une aide au fonds de soutien.

J’en arrive au compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État », qui, à juste titre, a attiré l’attention de beaucoup d’entre vous. L’année écoulée aura marqué une nouvelle étape dans la modernisation de l’actionnariat public, avec, successivement, la publication d’une doctrine – saluée par plusieurs d’entre vous – et l’adoption le 20 août dernier de l’ordonnance relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique.

Comme l’a appelé M. le rapporteur spécial, les lignes directrices de l’État actionnaire, adoptées par le Gouvernement le 15 janvier 2014, ont permis de préciser et clarifier ses objectifs d’intervention en fonds propres. Cette doctrine permet à l’État actionnaire d’adopter une gestion plus active de ses participations. L’État cède ainsi certaines de ses participations pour réinvestir là où c’est le plus utile, mais aussi, bien sûr, pour se désendetter.

Dans ce même esprit, nous avons simplifié et renforcé le cadre juridique de la gouvernance des entreprises à participation publique, grâce à l’ordonnance précitée. Nous devions prendre en compte l’évolution depuis trente ans des bonnes pratiques en matière de gouvernance, afin de rapprocher celle des entreprises à participation publique du droit commun des sociétés, et cela pour donner à l’État une capacité d’influence réelle, au moins égale à celle d’un actionnaire privé.

Nous avons bien entendu préservé certaines spécificités des entreprises à participation publique, par exemple dans le domaine d’une plus grande représentation des salariés dans les organes de gouvernance, dans celui de la protection d’intérêts stratégiques de l’État, ou dans le domaine de la défense nationale – certains, ici, en connaissent bien les enjeux.

Comme M. le rapporteur spécial l’a relevé, cette politique de gestion plus dynamique a été parfaitement illustrée, cette année, par la réalisation de plusieurs opérations de cessions – titres d’Airbus et de GDF SUEZ –, ainsi que par l’opération en cours d’ouverture du capital de l’aéroport de Toulouse. L’État a utilisé ces produits de cession pour prendre une participation de 15 % dans PSA en avril – ce qui a été salué – et pour contribuer à limiter l’endettement de l’État à hauteur de 1, 5 milliard d’euros, au début du mois d’octobre. Cela n’était pas arrivé depuis 2007.

L’année 2015 se situera dans la continuité de cette stratégie, avec un accent particulier mis sur la limitation de l’endettement de l’État, quelque 4 milliards d’euros de produits de cessions devant être affectés à cet emploi.

Je vois bien que différentes rumeurs circulent sur ce que l’État céderait ou non, mais il ne serait pas responsable de ma part, quelles que soient les questions que les uns et les autres ont pu me poser, de les commenter au risque de déstabiliser les entreprises concernées. En tout état de cause, un examen au cas par cas de chaque participation doit être effectué avant de prendre une décision.

Madame la présidente, je souhaite maintenant apporter des éléments de réponse aux quelques questions qui m'ont été plus précisément posées.

Mesdames, messieurs les sénateurs, plusieurs d’entre vous m'ont demandé si nous pensions, au travers du CAS PFE, financer la transition énergétique. Comme vous le savez, le Président de la République a annoncé la constitution d’un Fonds de la transition énergétique, qui sera doté de 1, 5 milliard d’euros sur trois ans et dont la gestion sera assurée par la CDC, la Caisse des dépôts et consignation. Ses ressources proviendront non pas du CAS PFE, mais d’une partie des dividendes perçus par l’État dans le secteur de l’énergie – c’est logique –, du programme d’investissement d’avenir et de la CDC, dont la participation est ainsi requise.

S’agissant des questions aéroportuaires – plusieurs d’entre vous m'ont interrogé à ce sujet, soit de manière globale, soit à propos de Toulouse –, nous nous situons dans le processus d’ouverture du capital de l’aéroport de Toulouse-Blagnac. Les collectivités territoriales ont bien sûr été associées à cette opération, qu’elles ont d'ailleurs abondamment commentée.

J’insiste sur le fait qu’il s'agit d’opérations sur le capital de l’aéroport et que, en tout état de cause, l’État gardera évidemment un rôle majeur en tant que concédant. De plus, il ne s'agira pas d’une entreprise autonome, car nous sommes aussi concessionnaires. Par ce biais, qui nous évitera de reproduire ce qui a pu se passer dans d’autres opérations, non pas aéroportuaires, mais autoroutières, nous pourrons conserver la totalité de nos prérogatives de concédant. L’État pourra donc continuer à exercer son influence sur les investissements réalisés par l’aéroport – beaucoup d’entre vous y ont fait allusion –, ainsi que sur le niveau des redevances.

S'agissant de Dexia, cette banque fait partie de celles qui ont subi le fameux stress test mené par la Banque centrale européenne. Cette dernière a toutefois reconnu à Dexia une spécificité, au titre de laquelle elle n’a pas demandé la recapitalisation de la banque. Pour leur part, les marchés financiers n’ont pas réagi aux résultats du test. Quoi qu’il en soit, mes services, comme ceux des autres pays concernés, restent bien sûr vigilants quant à la situation de Dexia.

S'agissant de Nexter, l’enjeu du développement de son activité est au cœur de l’opération de rapprochement avec KMW, qui n’est pas simple à mener. Tout le sens de cette opération est de constituer un champion franco-allemand, qui atteigne une taille critique pour faire face à une concurrence extrêmement vive.

Ce rapprochement nécessite en effet une autorisation du Parlement, et il est prévu d’introduire une disposition ad hoc dans le projet de loi pour l’activité, dit « projet de loi Macron ». Le Parlement aura donc l’opportunité de débattre de cette opération.

Enfin, monsieur le rapporteur spécial, vous m'avez interrogé sur Areva, dont on sait qu’elle connaît un certain nombre de difficultés. Cela dit, Areva bénéficie d’une situation tout à fait satisfaisante en termes de liquidité et d’un carnet de commandes solide. Areva n’a donc pas besoin aujourd’hui d’être recapitalisée.

Par ailleurs, Areva a constitué un comité, dans lequel les représentants de l’État seront bien sûr présents, afin d’élaborer les mesures de redressement nécessaires. Nous suivrons de près ces travaux.

Voilà, mesdames, messieurs les sénateurs, le commentaire général et les réponses particulières que je souhaitais apporter à ce stade de notre débat.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Nous allons maintenant procéder au vote des crédits de la mission « Engagements financiers de l’État », figurant à l’état B.

en euros

Mission

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Engagements financiers de l’État

Charge de la dette et trésorerie de l’État (crédits évaluatifs)

Appels en garantie de l’État (crédits évaluatifs)

Épargne

Majoration de rentes

Dotation en capital du Mécanisme européen de stabilité

Augmentation de capital de la Banque européenne d’investissement

Fonds de soutien relatif aux prêts et contrats financiers structurés à risque

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits.

Ces crédits sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Nous allons procéder au vote des crédits du compte de concours financiers « Accords monétaires internationaux », figurant à l’état D.

en euros

Mission

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Accords monétaires internationaux

Relations avec l’Union monétaire ouest-africaine

Relations avec l’Union monétaire d’Afrique centrale

Relations avec l’Union des Comores

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits.

Ces crédits sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Nous allons procéder au vote des crédits du compte de concours financiers « Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics », figurant à l’état D.

en euros

Mission

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Avances à divers services de l’État ou organismesgérant des services publics

Avances à l’Agence de services et de paiement, au titre du préfinancement des aides communautaires de la politique agricole commune

Avances à des organismes distincts de l’État et gérant des services publics

Avances à des services de l’État

Avances à l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales au titre de l’indemnisation des victimes du Benfluorex

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits.

Ces crédits sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Nous allons procéder au vote des crédits du compte d’affectation spéciale « Participation de la France au désendettement de la Grèce », figurant à l’état D.

en euros

Mission

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Participation de la France au désendettement de la Grèce

Versement de la France à la Grèce au titre de la restitution à cet État des revenus perçus sur les titres grecs

Rétrocessions de trop-perçus à la Banque de France

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits.

Ces crédits sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Nous allons procéder au vote des crédits du compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État », figurant à l’état D.

en euros

Mission

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Participations financières de l’État

Opérations en capital intéressant les participations financières de l’État

Désendettement de l’État et d’établissements publics de l’État

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits.

Ces crédits sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Engagements financiers de l’État », des comptes de concours financiers « Accords monétaires internationaux » et « Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics », ainsi que des comptes d’affectation spéciale « Participation de la France au désendettement de la Grèce et « Participations financières de l’État ».

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements ».

La parole est à Mme la rapporteur spéciale.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-France Beaufils

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Remboursements et dégrèvements » constitue un volet important de la politique fiscale de l’État, puisque ses crédits représentent plus d’un quart des recettes fiscales brutes. Ce montant est en diminution par rapport à la loi de finances initiale pour 2014.

Les dépenses retracées dans cette mission découlent de nombreux dispositifs fiscaux, qu’il s’agisse de l’impôt sur le revenu, de l’impôt sur les sociétés, de la taxe sur la valeur ajoutée ou des principaux impôts locaux.

L’évolution des indicateurs de performance met notamment en évidence les difficultés que rencontrent de plus en plus de contribuables pour acquitter leurs impôts. En effet, je note cette année une dégradation, certes faible, du délai de traitement des réclamations contentieuses relatives à l’impôt sur le revenu et à la taxe d’habitation. La dégradation de ces indicateurs de performance serait due, selon la direction générale des finances publiques, à la hausse du nombre de recours gracieux.

Par ailleurs, comme chaque année, je regrette que les documents budgétaires soient toujours aussi peu étoffés. En outre, malgré ma demande concernant le nombre de ménages qui bénéficient d’exonérations et de dégrèvements d’impôts locaux, ces informations ne m’ont pas été communiquées.

Les remboursements et dégrèvements liés aux impôts d’État représentent les neuf dixièmes des crédits de la mission. Ils auraient tendance à augmenter en 2015, à hauteur d’environ 4 milliards d’euros par rapport à l’estimation révisée pour 2014.

L’estimation de la loi de finances initiale pour 2014 a été fortement revue à la baisse en cours d’année. Ce différentiel ne pose pas, en soi, de problème, puisque les crédits de la mission sont évaluatifs : ils reposent sur des prévisions, et toute prévision est appelée à évoluer.

Cependant, l’écart important entre l’estimation de la loi de finances initiale pour 2014 et la prévision révisée pour cette même année renforce la nécessité, que j’ai déjà pointée, de présenter l’estimation révisée de façon détaillée dans les documents budgétaires et d’expliquer les écarts par rapport à la prévision.

Une fois de plus, j’invite donc le Gouvernement à tenir compte de cette remarque, afin de donner au Parlement les moyens d’une analyse plus ambitieuse. Le législateur ne dispose aujourd’hui que de l’évolution de prévisions, dont il ne connaît pas les hypothèses.

L’augmentation prévue pour 2015 s’inscrit dans une tendance à la hausse observée depuis le début des années 2000. Deux observations doivent être faites à ce sujet.

D’une part, les gouvernements successifs mènent des politiques fiscales qui s’appuient de plus en plus sur des mécanismes d’exonération ou de crédit. Or ces dispositifs dérogatoires présentent le double inconvénient d’être peu pilotables par l’État d’une année sur l’autre et peu lisibles pour le citoyen. C’est un peu une dépense publique sans pilote !

D’autre part, la hausse des remboursements et dégrèvements d’impôts d’État profite avant tout aux entreprises : même lorsque les remboursements et dégrèvements liés à la TVA sont retranchés du montant destiné aux entreprises, celui-ci reste bien supérieur aux transferts en direction des ménages.

Les transferts aux entreprises par le biais des remboursements et dégrèvements connaissent également une évolution très – voire trop –, dynamique : ils ont augmenté de près de 50 % entre 2012 et 2015. Sur la même période, les transferts vers les ménages diminuaient d’environ 1, 5 %.

Pour ce qui concerne les remboursements et dégrèvements d’impôts locaux, ils sont relativement stables depuis 2011 et la suppression de la taxe professionnelle : ils s’élèvent à 11 milliards d’euros environ.

Cette stabilité cache toutefois, en 2015, deux mouvements de sens contraire, mais de faible ampleur. Il s’agit, d’une part, d’un renchérissement du coût du plafonnement de la taxe d’habitation en fonction du revenu, et, d’autre part, de la diminution du dégrèvement transitoire et d’une diminution anticipée des restitutions de la CVAE, la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises.

S’agissant des impôts dits « ménages », je regrette que l’expérimentation de la révision des valeurs locatives des locaux d’habitation n’ait toujours pas été engagée : les départements où aurait lieu l’expérimentation devaient être désignés à la fin de 2014. Que pouvez-vous nous dire à ce sujet, monsieur le ministre ? Nous sommes en effet très attentifs à cette question.

En ce qui concerne les impôts dits « économiques », je remarque des différences dans l’évolution de la CVAE selon les secteurs d’activité. Ainsi, la contribution des activités financières et d’assurance a particulièrement diminué entre 2010 et 2012. Je me demande dans quelle mesure ces variations de CVAE peuvent s’expliquer par des comportements d’optimisation.

Enfin, je tiens à saluer le projet de la direction générale des finances publiques, en partenariat avec les associations d’élus, qui vise à favoriser la transmission aux collectivités territoriales des données relatives à leurs recettes fiscales. En effet, nous le savons tous, la prévisibilité de leurs recettes, et en particulier de la CVAE, est une donnée majeure pour nos collectivités territoriales, qui peuvent ainsi préparer leurs projets budgétaires, et ce le plus tôt possible.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

J’indique au Sénat que le Gouvernement dispose au total de cinq minutes pour intervenir.

La parole est à M. le ministre.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Savin

Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, la mission « Remboursements et dégrèvements » est une mission assez atypique au sein du budget de l’État, et ce pour deux raisons.

Tout d'abord, c’est, en volume, la plus importante du budget général, puisque ce sont près de 100 milliards d’euros de crédits qui sont prévus pour l’exercice 2015. Ensuite, c’est une mission dont les dépenses sont de nature particulière : ce sont des dépenses en atténuations de recettes, dont l’évolution est intimement liée à celle des recettes fiscales. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle les crédits de cette mission sont évaluatifs.

Les crédits du programme 200 dépendent étroitement de l’évolution des recettes fiscales, car la plus grande part des dépenses prévues dans le cadre de ce programme est liée à la mécanique de certains impôts : il s’agit des remboursements de crédits de TVA et des remboursements d’acomptes d’impôt sur les sociétés. L’évolution de ces remboursements découle directement du dynamisme de ces recettes.

L’évolution de ces dépenses très particulières ne peut donc être comprise qu’au regard de celle, plus globale, des recettes fiscales nettes, c’est-à-dire des recettes brutes nettes de remboursements et dégrèvements.

Je rappellerai donc les principaux déterminants des prévisions des recettes fiscales en 2015. L’hypothèse de croissance spontanée des recettes fiscales nettes a été fixée à seulement 1, 7 %, soit une élasticité à la croissance de 0, 9 point, ce qui est peu : on suppose que, pour la troisième année consécutive, les recettes fiscales augmenteront moins vite que l’activité économique. Cette hypothèse semble prudente quand on sait que, à moyen terme, l’élasticité moyenne a vocation à être égale à l’unité.

S’agissant plus particulièrement de la TVA et de l’impôt sur les sociétés, l’IS, qui concernent une grande part des dépenses de la mission, leur croissance spontanée en 2015 est estimée à 1, 4 % pour la TVA, soit une faible élasticité de 0, 7 point, et à 0, 4 % pour l’IS, soit une élasticité de 0, 2 point. Ce sont donc des prévisions extrêmement prudentes, mais qui restent bien entendu soumises à tous les aléas imaginables dans le cadre d’une anticipation de l’avenir.

Pour assurer la bonne information du Sénat, je souhaite par ailleurs apporter quelques précisions utiles sur les contentieux fiscaux de masse, dont les dépenses sont retracées dans le cadre de cette mission.

Vous le savez, les contentieux sur le précompte mobilier et la taxation des revenus des OPCVM ont conduit, avant que nous arrivions aux responsabilités, à des condamnations de la France devant la Cour de justice de l’Union européenne. Il s’agit de dépenses de plusieurs milliards d’euros, étalées sur plusieurs années, qu’il nous faut donc assumer.

S’agissant du contentieux sur le précompte mobilier, nous avions initialement anticipé un coût total de 2 milliards d’euros. Compte tenu d’une décision du Conseil d’État favorable aux intérêts financiers de l’État, les jugements au cours de l’année écoulée se sont révélés moins coûteux que prévu pour les finances publiques. Nous avons donc revu à la baisse le coût total du contentieux à 1, 3 milliard d’euros. Toutefois, avant de connaître les décisions définitives, il subsiste encore des incertitudes sur le coût exact de cette dépense.

S’agissant du contentieux OPCVM, le coût total du contentieux demeure estimé à 5 milliards d’euros. En revanche, la chronique de décaissement a été revue, avec une prévision de 700 millions d’euros cette année, de 1, 75 milliard d’euros en 2015 et 2016, puis un apurement complet en 2017. En effet, les délais de traitement des demandes de remboursement exprimées par les contribuables sont plus longs que prévu, et ce pour deux raisons.

D’une part, une seule juridiction centralise la totalité des recours contentieux. D’autre part, ces affaires sont souvent complexes et nécessitent de vérifier, ce qui prend du temps, les pièces justificatives apportées par les contribuables.

Voilà, en quelques mots, mesdames, messieurs les sénateurs, les éléments qui me semblent devoir être portés à votre connaissance.

J’ajoute simplement, madame la rapporteur spéciale, que l’expérimentation relative à l’évaluation des valeurs locatives des locaux d’habitation est sur le point d’être lancée. Cinq départements sont concernés, me semble-t-il.

Dans quelques jours, je serai en mesure de vous faire connaître les conditions dans lesquelles cette expérimentation sera menée, de manière à ce qu’elle soit efficace, sans pour autant mobiliser un nombre trop important des personnels de la DGFIP, qui sont par ailleurs – vous le savez, puisque vous leur avez rendu hommage – extrêmement accaparés par leurs tâches, qu’ils accomplissent, je tiens à le souligner, dans des conditions difficiles.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Nous allons maintenant procéder à l’examen des crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements », figurant à l’état B.

en euros

Mission

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Remboursements et dégrèvements

Remboursements et dégrèvements d’impôts d’État (crédits évaluatifs)

Remboursements et dégrèvements d’impôts locaux (crédits évaluatifs)

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Je suis saisie d’un amendement n° II-241, présenté par le Gouvernement, et ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

en euros

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Remboursements et dégrèvements d’impôts d’État (crédits évaluatifs)

Remboursements et dégrèvements d’impôts locaux (crédits évaluatifs)

Total

Solde

La parole est à M. le ministre.

Debut de section - Permalien
Michel Sapin, ministre

Il s’agit d’un amendement technique. À l’instar de l’amendement déposé par le Gouvernement sur l’article d’équilibre, il a pour objet de réviser les prévisions des recettes fiscales nettes pour 2015, afin de tenir compte des dernières informations disponibles.

Ces recettes enregistrent notamment une baisse de 500 millions d’euros au titre du dynamisme des remboursements et dégrèvements de l’impôt sur les sociétés qui a été observé à la fin de 2014. Cet amendement vise donc à majorer de 500 millions d’euros les remboursements et dégrèvements de l’impôt sur les sociétés du programme 200, « Remboursements et dégrèvements d’impôts d’État ».

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-France Beaufils

La commission n’a pas pu se réunir pour se prononcer sur cet amendement.

Le Gouvernement nous affirme que les prévisions de recettes fiscales nettes pour 2015 sont révisées, afin de tenir compte des dernières informations disponibles. On nous fait état de modifications apportées. Or un ajustement à la baisse des crédits de la mission a d’ores et déjà été adopté lors de l’examen du texte par l’Assemblée nationale.

Je n’ai pas bien compris comment, dans le court laps de temps qui s’est écoulé depuis la discussion du projet de loi de finances par l’Assemblée nationale, l’estimation des recettes fiscales a pu être de nouveau modifiée.

Par ailleurs, je le rappelle, l’impôt sur les sociétés a déjà fortement baissé ces dernières années, puisqu’il est passé de 47, 1 milliards d’euros en 2013 à quelque 33, 1 milliards d’euros en 2015, selon le document d’évaluation des voies et moyens, soit une baisse de 30 %.

Aujourd'hui, vous nous dites, monsieur le ministre, que les remboursements et dégrèvements de l’impôt sur les sociétés augmenteront de 500 millions d’euros. Je l’avoue, je ne comprends pas bien comment s’explique une telle situation.

Par conséquent, puisque nous n’avons pas réussi à obtenir des informations plus précises, j’émets un avis défavorable sur cet amendement, à moins que vous soyez en mesure, monsieur le ministre, de nous apporter des renseignements complémentaires.

Debut de section - Permalien
Michel Sapin, ministre

Les dispositions de l’amendement du Gouvernement obéissent à une volonté de transparence. Il s’agit de faire en sorte que les chiffres votés par le Parlement soient les plus exacts possible au moment de son vote définitif.

S’agissant des rentrées de l’impôt, les évaluations et le constat se font au fil de l’eau, ce qui explique les variations intervenues depuis l’examen du texte par l’Assemblée nationale.

Je tiens à le souligner, cette augmentation de 500 millions d’euros est équilibrée par d’autres éléments de révision, lesquels n’ont pas d’effet sur la mission « Remboursements et dégrèvements ». Ils concernent l’équilibre global : il s’agit en particulier des retenues à la source, qui sont augmentées de 200 millions d’euros, de la taxe sur les transactions financières, qui connaît une hausse de 50 millions d’euros ou des droits de succession, qui ont été majorés de 50 millions d’euros.

Ainsi, au total, ces opérations s’annulent et ne changent rien à l’équilibre global du projet de loi de finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-France Beaufils

Je souhaite simplement réagir à vos propos, monsieur le ministre.

Cette mission fait partie de celles qui manquent véritablement d’éléments nous permettant d’apprécier la pertinence de l’évaluation proposée. Ce qui vient de se passer confirme le questionnement que j’ai évoqué tout à l’heure dans mon propos. À mes yeux, un travail plus fin devrait être mis à notre disposition, afin que nous puissions véritablement apprécier la situation.

Je m’en remets donc à la sagesse du Sénat sur cet amendement.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Nous allons procéder au vote des crédits, modifiés, de la mission « Remboursements et dégrèvements », figurant à l’état B.

Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits, modifiés.

Ces crédits sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements »

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Je rappelle au Sénat que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation de deux sénateurs appelés à siéger au sein de la commission supérieure du service public des postes et des communications électroniques.

La commission des affaires économiques a fait connaître qu’elle propose la candidature de MM. Philippe Leroy et Bruno Sido pour siéger au sein de cet organisme extraparlementaire.

Ces candidatures ont été publiées et seront ratifiées, conformément à l’article 9 du règlement, s’il n’y a pas d’opposition à l’expiration du délai d’une heure.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation de deux sénateurs appelés à siéger, respectivement comme membre titulaire et comme membre suppléant, au sein du Conseil national de l’habitat.

Conformément à l’article 9 du règlement, la commission des affaires économiques a été invitée à présenter des candidatures.

Les nominations au sein de cet organisme extraparlementaire auront lieu ultérieurement, dans les conditions prévues par l’article 9 du règlement.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt-deux heures.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à vingt heures, est reprise à vingt-deux heures.