Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Remboursements et dégrèvements » constitue un volet important de la politique fiscale de l’État, puisque ses crédits représentent plus d’un quart des recettes fiscales brutes. Ce montant est en diminution par rapport à la loi de finances initiale pour 2014.
Les dépenses retracées dans cette mission découlent de nombreux dispositifs fiscaux, qu’il s’agisse de l’impôt sur le revenu, de l’impôt sur les sociétés, de la taxe sur la valeur ajoutée ou des principaux impôts locaux.
L’évolution des indicateurs de performance met notamment en évidence les difficultés que rencontrent de plus en plus de contribuables pour acquitter leurs impôts. En effet, je note cette année une dégradation, certes faible, du délai de traitement des réclamations contentieuses relatives à l’impôt sur le revenu et à la taxe d’habitation. La dégradation de ces indicateurs de performance serait due, selon la direction générale des finances publiques, à la hausse du nombre de recours gracieux.
Par ailleurs, comme chaque année, je regrette que les documents budgétaires soient toujours aussi peu étoffés. En outre, malgré ma demande concernant le nombre de ménages qui bénéficient d’exonérations et de dégrèvements d’impôts locaux, ces informations ne m’ont pas été communiquées.
Les remboursements et dégrèvements liés aux impôts d’État représentent les neuf dixièmes des crédits de la mission. Ils auraient tendance à augmenter en 2015, à hauteur d’environ 4 milliards d’euros par rapport à l’estimation révisée pour 2014.
L’estimation de la loi de finances initiale pour 2014 a été fortement revue à la baisse en cours d’année. Ce différentiel ne pose pas, en soi, de problème, puisque les crédits de la mission sont évaluatifs : ils reposent sur des prévisions, et toute prévision est appelée à évoluer.
Cependant, l’écart important entre l’estimation de la loi de finances initiale pour 2014 et la prévision révisée pour cette même année renforce la nécessité, que j’ai déjà pointée, de présenter l’estimation révisée de façon détaillée dans les documents budgétaires et d’expliquer les écarts par rapport à la prévision.
Une fois de plus, j’invite donc le Gouvernement à tenir compte de cette remarque, afin de donner au Parlement les moyens d’une analyse plus ambitieuse. Le législateur ne dispose aujourd’hui que de l’évolution de prévisions, dont il ne connaît pas les hypothèses.
L’augmentation prévue pour 2015 s’inscrit dans une tendance à la hausse observée depuis le début des années 2000. Deux observations doivent être faites à ce sujet.
D’une part, les gouvernements successifs mènent des politiques fiscales qui s’appuient de plus en plus sur des mécanismes d’exonération ou de crédit. Or ces dispositifs dérogatoires présentent le double inconvénient d’être peu pilotables par l’État d’une année sur l’autre et peu lisibles pour le citoyen. C’est un peu une dépense publique sans pilote !
D’autre part, la hausse des remboursements et dégrèvements d’impôts d’État profite avant tout aux entreprises : même lorsque les remboursements et dégrèvements liés à la TVA sont retranchés du montant destiné aux entreprises, celui-ci reste bien supérieur aux transferts en direction des ménages.
Les transferts aux entreprises par le biais des remboursements et dégrèvements connaissent également une évolution très – voire trop –, dynamique : ils ont augmenté de près de 50 % entre 2012 et 2015. Sur la même période, les transferts vers les ménages diminuaient d’environ 1, 5 %.
Pour ce qui concerne les remboursements et dégrèvements d’impôts locaux, ils sont relativement stables depuis 2011 et la suppression de la taxe professionnelle : ils s’élèvent à 11 milliards d’euros environ.
Cette stabilité cache toutefois, en 2015, deux mouvements de sens contraire, mais de faible ampleur. Il s’agit, d’une part, d’un renchérissement du coût du plafonnement de la taxe d’habitation en fonction du revenu, et, d’autre part, de la diminution du dégrèvement transitoire et d’une diminution anticipée des restitutions de la CVAE, la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises.
S’agissant des impôts dits « ménages », je regrette que l’expérimentation de la révision des valeurs locatives des locaux d’habitation n’ait toujours pas été engagée : les départements où aurait lieu l’expérimentation devaient être désignés à la fin de 2014. Que pouvez-vous nous dire à ce sujet, monsieur le ministre ? Nous sommes en effet très attentifs à cette question.
En ce qui concerne les impôts dits « économiques », je remarque des différences dans l’évolution de la CVAE selon les secteurs d’activité. Ainsi, la contribution des activités financières et d’assurance a particulièrement diminué entre 2010 et 2012. Je me demande dans quelle mesure ces variations de CVAE peuvent s’expliquer par des comportements d’optimisation.
Enfin, je tiens à saluer le projet de la direction générale des finances publiques, en partenariat avec les associations d’élus, qui vise à favoriser la transmission aux collectivités territoriales des données relatives à leurs recettes fiscales. En effet, nous le savons tous, la prévisibilité de leurs recettes, et en particulier de la CVAE, est une donnée majeure pour nos collectivités territoriales, qui peuvent ainsi préparer leurs projets budgétaires, et ce le plus tôt possible.