En soutenant le budget proposé par le Gouvernement, je reste donc cohérent avec la position que je défendais lorsque j’étais dans l’opposition. Je suis d’ailleurs très content que vous l’ayez évoquée et vous pouvez parfaitement vérifier que ce que je vous dis est vrai.
Votre proposition, quant à elle, va beaucoup plus loin et vous allez voir que son coût n’est pas du tout de l’ordre de 600 000 euros, mais de plusieurs millions d’euros. Vous proposez en effet d’instaurer un mécanisme de réversion des pensions militaires en faveur des conjoints survivants des plus grands invalides de guerre, en mettant en place un système par paliers variant en fonction du niveau de la pension de l’invalide. À cet effet, vous prévoyez un financement de 600 000 d’euros gagés sur la journée défense et citoyenneté – vous voulez vraiment l’achever cette journée !
L’intention qui vous anime – renforcer la reconnaissance de la Nation envers les conjoints survivants des grands invalides de guerre – est des plus louables, et je la partage comme mon prédécesseur.
Le problème est celui du dénombrement des personnes ciblées. C’est la raison pour laquelle mon prédécesseur avait mis en place un groupe de travail spécifique sur cette question, qui, comme je l’ai indiqué dans mon intervention, s’est réuni deux fois cette année.
Il a demandé au Contrôle général des armées une étude pour mieux connaître la population concernée, savoir quelles sont les masses en jeu et de quoi on discute. Cette étude a été transmise aux parlementaires et aux associations représentées dans le groupe de travail.
C’est pourquoi une mesure nouvelle ciblée, dédiée aux conjoints survivants de grands invalides ayant arrêté de travailler en raison des soins dispensés à leur conjoint avant sa disparition, a été proposée dans le budget pour 2015.
Dans le même temps, la condition de durée des soins pour bénéficier de cette majoration spéciale est abaissée de quinze ans à dix ans. Voilà encore une autre mesure, qui n’existait pas.
La revalorisation du dispositif de cinquante points en janvier 2015, puis de nouveau en 2016, est également prévue. Elle correspond à une hausse totale de 116 euros par mois, ou de 1400 euros par an, soit l’équivalent d’un SMIC brut, comme je l’ai souligné tout à l’heure. Cela n’est pas négligeable.
Près d’un tiers des conjoints survivants de grands invalides de plus de 2000 points seront concernés par cette mesure qui, si elle est ciblée, concerne tout de même une part importante des conjoints survivants.
Je ne prétends pas que cette mesure va régler tous les problèmes, mais nous avons fait le choix d’agir cette année en nous concentrant sur une population particulièrement fragile.
En tout état de cause, je souhaite que le groupe de travail continue de se réunir. Les mesures que vous avez évoquées pourront, parmi d’autres, être étudiées dans ce cadre, sous leurs différents aspects juridiques et financiers. En effet, je ne m’engagerai jamais sur une mesure dont je ne vois pas le bout, c’est-à-dire si je ne connais pas l’engagement que je fais prendre aux différents gouvernements successifs.
Il me faut tout de même souligner que le coût d’un dispositif par paliers tel que vous le proposez serait, en première analyse, de plusieurs dizaines de millions d’euros, soit bien plus que le coût cumulé de l’ensemble des mesures nouvelles en faveur du monde combattant qui sont intégrées dans le PLF pour 2015, et même de l’ensemble des mesures qui ont été prises depuis le PLF pour 2012. On est donc très loin des 600 000 euros que vous évoquez dans votre amendement.
Ce type de dispositif par paliers pourrait également remettre fondamentalement en cause l’équilibre actuel entre les pensions d’invalides et les pensions de conjoints survivants. Il pourrait en effet aboutir à ce que de nombreux conjoints survivants se voient attribuer des pensions supérieures à celles de nombreux invalides. Attribuer une pension forfaitaire de 1000 points au conjoint survivant reviendrait à lui attribuer la même pension que celle que perçoit un très grand invalide pensionné à 100 %, c’est-à-dire 14 000 euros par an.
De surcroît, attribuer de manière systématique les aides à tous les conjoints survivants des grands invalides ne paraît pas opportun dans le contexte budgétaire actuel. Il me semble donc préférable de cibler la mesure en direction de la grande précarité. Toutefois, le groupe de travail pourra bien évidemment se pencher sur la question.
Les pensions versées au titre du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de la guerre sont, comme vous le savez, non imposables, cumulables avec tous les revenus d’activité et de placements et avec toutes les pensions des régimes de retraite. Les droits des conjoints survivants de grands invalides doivent être appréciés au regard d’un ensemble de dispositions dont elles peuvent bénéficier, comme la retraite mutualiste ou l’action sociale de l’ONAC-VG.
Pour l’ensemble de ces raisons, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement, monsieur le rapporteur pour avis. À défaut, j’y serai défavorable. Je ne me fais toutefois guère d’illusions sur l’issue qui sera réservée à cet amendement : il connaîtra sans doute le même sort que le précédent.