Ainsi, l'État doit aujourd'hui emprunter 10 milliards d'euros pour permettre aux Français de travailler moins. Ce n'est pas une bonne gestion, et il faut que cela cesse ! Songez, monsieur le ministre, à ce que serait votre budget avec 10 milliards d'euros de dépenses en moins : vous seriez plus heureux ! Pourquoi, par exemple, ne pas supprimer toute limitation aux heures supplémentaires et en ne les payant qu'au-delà de 39 heures ? Vous pourriez ainsi réaliser des économies tout en supprimant des charges pour les entreprises, qui retrouveraient leur liberté de gestion.
Mais ce n'est pas tout ! Vous avez décidé de transférer à la sécurité sociale la somme énorme de 19 milliards d'euros, financée par l'article 41, au lieu de la conserver dans le budget de l'État, comme en 2005. Cette somme correspond aux 10 milliards d'euros des 35 heures et aux exonérations de charges sociales jusqu'à 1, 6 SMIC, qui augmentent de 2 milliards d'euros par an. Ainsi, vous réalisez cette opération pour ne pas faire apparaître une augmentation des charges budgétaires de 2 milliards d'euros par rapport au budget de 2005. Mais si vous aviez décidé de ramener ces exonérations de 1, 6 SMIC à 1, 5 SMIC, vous auriez économisé ces 2 milliards d'euros, et vous auriez pu ainsi ne pas augmenter les dépenses de votre budget !
De plus, si cette somme de 19 milliards d'euros est transférée au budget de la sécurité sociale, vous serez obligé de supporter cette charge éternellement, et votre budget continuera à être gravement déficitaire pour rien. Vous utiliserez pour le financer l'article 41, dont je souhaite le retrait.
Au contraire, en conservant cette somme de 19 milliards d'euros dans votre budget, vous pourriez diminuer chaque année l'allégement de cotisations sociales et supprimer peu à peu les aides aux 35 heures. Dans quelques années, vous diminueriez ainsi de 19 milliards d'euros les dépenses ! Ce n'est pas un rêve, mais, pour cela, il faut le vouloir car, quand on n'a pas les moyens de dépenser, on ne dépense pas, c'est un principe élémentaire de gestion.
Comme l'a préconisé M. Marini, soyons courageux !
Emprunter pour payer les charges des entreprises ne me paraît pas une utilisation efficace de nos recettes fiscales, que l'on devrait utiliser pour les investissements.
Je voudrais aussi rappeler qu'en 1997 toutes ces charges n'existaient pas, à l'exception d'une somme modeste de 197 millions d'euros due à l'exonération concernant le dispositif de Robien. Mais, pour 2006, ces 197 millions sont devenus 19 milliards d'euros ! Songez à ce qu'aurait été votre budget d'aujourd'hui si vous n'aviez eu que ces 197 millions d'euros à dépenser !
Il faut arrêter cette spirale mortelle, et cela ne dépend que de vous !
Dans le domaine de l'emploi, vous avez maintes fois annoncé, monsieur le ministre, que la lutte contre le chômage était votre priorité, et vous avez eu raison. Pour cela, vous proposez de dépenser 13, 6 milliards d'euros, dont 7 milliards d'euros pour l'accès et le retour à l'emploi et 4, 39 milliards d'euros pour l'accompagnement de mutations économiques, sociales et démographiques. Ce sont des sommes considérables, et j'aimerais savoir combien d'emplois auront été créés grâce à ces sommes à la fin de l'année.
En revanche, je ne vois rien dans votre budget qui permettrait aux entreprises de développer leur activité en leur accordant des crédits. Car on oublie trop souvent que ce sont les entreprises qui embauchent : il ne sert à rien de créer des aides à l'emploi, de mettre en place un plan d'aide au retour à l'emploi, des emplois aidés, bref d'inciter les chômeurs à travailler si aucune entreprise ne leur offre du travail !
Mais les entreprises n'embaucheront pas si elles ne peuvent pas bénéficier de la flexibilité de l'emploi. La garantie de l'emploi n'existe pas, et la rigidité de l'emploi n'aboutit qu'à la garantie du chômage. Ce sont les pays où la flexibilité de l'emploi est assurée qui connaissent le plus faible taux de chômage : 5 % au Danemark, en Angleterre, au Canada, contre 10 % chez nous et en Allemagne. Et, autre avantage non négligeable, la flexibilité ne coûte rien !
Vous pourriez ainsi consacrer une partie de ces 13, 6 milliards d'euros du budget de l'emploi à des crédits en faveur des entreprises, pour la formation des chômeurs à des emplois disponibles.
En particulier, l'apprentissage à partir de quatorze ans, récemment décidé par M. le Premier ministre, est une excellente initiative pour former les jeunes à des emplois sûrs.
En diminuant peu à peu ces 19 milliards d'euros, en employant différemment les 14 milliards d'euros du budget de l'emploi et en appliquant la flexibilité, vous pourriez ramener peu à peu votre déficit à 27 milliards d'euros - peut-être même moins - au lieu de 46 milliards d'euros. Vous pourriez ainsi bénéficier d'une grande souplesse et vous n'auriez plus de souci s'agissant des critères de Maastricht.
Ce sont d'autres choix, mais ils seraient plus efficaces et moins coûteux.
Le contrat « nouvelles embauches » décidé par M. de Villepin est un pas vers la flexibilité et il aura, j'en suis sûr, un grand succès.