Le Président de la République, l'Assemblée nationale ou le Sénat, par l'intermédiaire de leurs présidents, les ministres ou les responsables d'institutions de recherche sont autant d'acteurs susceptibles de saisir le Comité d'une question. Tout citoyen, association ou institution peut présenter un sujet de réflexion que nous choisirons de traiter s'il est d'une portée suffisamment générale et importante. Enfin, le Comité peut choisir, lui-même, d'étudier une question qu'il juge intéressante.
Notre réflexion consiste à trouver le langage commun grâce auquel les intervenants, aussi divers soient-ils, pourront élaborer ensemble une réflexion sur un sujet donné. Il faut « se penser soi-même comme un autre », disait Paul Ricoeur. Nous ne confrontons pas des points de vue établis ; nous essayons de dépasser les points de vue initiaux. Nous travaillons bien quand nous avons du temps. L'auto-saisine nous offre un grand confort car elle nous libère de l'obligation d'un calendrier. Je crois que les deux années et demie consacrées au débat sur la fin de vie ont contribué à ce que la société mesure mieux les enjeux de la question.
Pour ce qui est de la procédure, une section technique de douze membres est élue parmi les quarante de notre Comité qui élit en son sein un président. Elle a pour mission de recevoir et traiter les demandes. Nous décidons ensuite, collectivement, celles dont nous souhaitons nous saisir.
Ceux qui participent aux conférences de citoyens ne sont pas rémunérés mais indemnisés. L'Ifop a organisé ces conférences. Bien que nous n'atteignions pas le seuil de représentativité, les critères de choix sont définis à partir des statistiques de l'Insee (âge, répartition géographique, profession, etc.), de manière à travailler à partir de l'ensemble de la société française. Pour la conférence sur la fin de vie, nous avons ainsi sélectionné dix-huit personnes. Nous n'avons pas assisté aux réunions et notre rôle s'est limité à proposer dix intervenants reflétant au mieux les horizons et perspectives actuels sur le sujet de la fin de vie. Pour choisir ceux-ci, comme les avis restaient partagés au sein même du Comité, notamment sur la question de l'euthanasie et de l'assistance au suicide, nous avons cherché à représenter ces divergences - Jean Leonetti, d'un côté, le président d'une association pour le droit à mourir, de l'autre. Le président du comité d'éthique du Portugal, pays où la législation est la même qu'en France, et son homologue de Belgique, où la législation est différente, ont apporté une dimension internationale. Les participants ont ensuite eu la possibilité de choisir dix autres intervenants. Ils ont rendu, eux-mêmes, leur avis lors d'une conférence de presse où nous n'intervenions pas. L'expérience a été riche, bouleversant la vie de certains des participants. Elle a fait naître une intelligence collective.
Le Comité a rendu un avis, il y a trois ans, sur le don d'organes. Le croisement des problématiques de la fin de vie et du don d'organes est une question qui nous intéresse beaucoup. Si l'on pousse le paradoxe, la seule raison qui pourrait justifier une obstination déraisonnable à maintenir un patient en vie, serait la préservation de ses organes pour aider autrui. Ces deux approches pourraient être croisées dans le cadre d'un consentement ou d'une directive anticipée. Est-ce souhaitable ? Comment une personne non consciente ou morte cérébralement pourrait-elle décider de faire un don d'organes ? En France, il existe un registre du non, permettant de signifier son refus de faire l'objet d'un prélèvement d'organe. Peut-être faudrait-il mettre en place un registre du oui afin que le recours à la décision des familles n'ait lieu qu'en cas d'absence de choix.
Quant à la GPA, les comités d'éthique des différents pays devraient réfléchir ensemble à la question, quelle que soit la législation en cours. Cette réflexion altruiste bénéficiera à tous.