Intervention de Marylise Lebranchu

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 4 décembre 2014 : 1ère réunion
Nouvelle organisation territoriale de la république — Audition de Mme Marylise Lebranchu ministre de la décentralisation et de la fonction publique et de M. André Vallini secrétaire d'état à la réforme territoriale

Marylise Lebranchu, ministre :

Effectivement, le débat sur les départements est derrière nous. La rénovation de la politique économique se pose partout en Europe, nous en parlions avec d'autres États membres hier, puisque l'organisation actuelle n'a pas empêché la crise. L'Italie, elle, a choisi de supprimer les provinces pour créer des aires d'initiative territoriale. Le Premier ministre a dit le changement de cap du gouvernement sur les départements. Reconnaissez qu'il y a une certaine noblesse à modifier sa position pour tenir compte de l'avis du Parlement.

Nous connaîtrons évidemment des moments difficiles au cours de nos débats ; comptez cependant sur ma volonté de faire converger au maximum votre vision avec celle des députés. Eux aussi connaissent les départements ruraux à faible démographie, certains y ont été élus. Je connais également les territoires de France : l'agglomération où je vis mais dont je ne suis plus présidente n'est pas traversée par une voie rapide ; sa voisine, en revanche, l'est. Mais je suis tout autant attentive aux territoires urbains où se côtoient l'hyper-richesse et l'hyper-pauvreté. Nous avons beaucoup à apprendre les uns des autres. À l'un de vos collègues députés qui avait écrit un texte pour démontrer l'importance des départements en zone rurale, j'expliquais que l'existence de conseils généraux n'avait pas mis fin à la situation dramatique dans ces territoires.

L'effort doit porter sur les départements très ruraux et les départements urbains en grande difficulté. Qui finance la solidarité ? La péréquation n'y suffira pas. Faut-il une assiette fiscale territoriale très large, un système de ticket modérateur ou la faire porter sur les familles au moment de la succession, sur la solidarité nationale ? J'entends vos remarques sur l'article 40 de la Constitution. Nous devons y réfléchir en amont de la discussion. En tout cas, l'existence de départements ne règle pas le problème.

Comme vous le savez, j'ai nommé un sénateur et un député pour réfléchir à une réforme de la DGF. Je l'ai fait car le milieu rural ne peut plus vivre avec une DGF assise sur le bâti et la population. C'est primordial si nous ne voulons plus que l'équivalent d'un département de terres agricoles disparaisse tous les dix ans, si nous voulons conserver nos zones Natura 2 000 et nos périmètres de captage, si nous voulons continuer d'assurer notre indépendance alimentaire en 2035. Il faudra prendre en compte les mètres carrés agricoles et les mètres carrés nécessaires à la protection de nos espaces dans l'assiette de la DGF.

Les métropoles, abcès de fixation de la demande de solidarité, ont une responsabilité. Pour son territoire malade où le pourcentage de vote aux extrêmes est si élevé qu'il atteint presque la majorité, Jean-Pierre Balligand, président de l'Institut de la gouvernance territoriale et de la décentralisation, demande à la métropole des logements pour ses étudiants et ses jeunes en alternance, un accompagnement de leur mobilité. C'est aussi cela l'obligation de solidarité. M. Mézard marque qu'il trouve cette remarque idiote, il n'empêche, certains sujets sont communs aux départements urbains et ruraux. Je m'engage à examiner de près où l'article 40 pourrait provoquer des blocages.

Autres abcès de fixation, les Dreal. C'est affaire de contrôle. La difficulté ne tient pas à elles - qu'on ne reproche pas aux fonctionnaires d'appliquer la loi - mais aux populations et à notre procédure, qu'ils proposent d'ailleurs de simplifier. Actuellement, 90 % des projets ne voient jamais le jour à cause des recours et des contentieux ; il faut dix ans, en moyenne, pour mener à terme un gros chantier. Avec MM. Vallini et Mandon et Mme Royal, nous nous attelons à simplifier notre droit. Il faudrait également inclure dans ce débat les Direccte. Quels personnels mettre à disposition des régions ?

Vous n'êtes pas sans le savoir, nous procédons actuellement à une revue des missions de l'État. Ses résultats seront publiés en février prochain. À partir de là et de l'évaluation de politiques publiques telle que les 85 milliards d'euros d'aides aux entreprises, nous ferons des propositions et débattrons avec les commissions. Dans le même temps, M. Cazeneuve travaille sur l'administration territoriale de l'État. L'échelon départemental s'est détérioré du fait que la RéATE, pourtant une bonne idée, s'est heurtée à la RGPP. Il faut redonner de l'ingénierie aux départements, rehausser le rôle du préfet et l'interministérialité des services, nous en sommes tous d'accord.

Le contrôle ou plutôt la culture du contrôle, nous en avons besoin pour nos exportations et importations agricoles. Sans cachet, comment certifier la qualité d'une viande animale venant de l'étranger ? Une réécriture du contrôle est à mettre en oeuvre, le Parlement sera appelé à en débattre.

Le Gouvernement présentera avant nos débats un amendement perfectible sur Paris et Marseille, je m'y engage. Il s'agit de donner un statut à ces territoires, sans revenir à un syndicat d'EPCI qu'a rejeté le Sénat, lui qui est à l'origine de la métropole du Grand Paris. Développement économique, logement et transport étant largement liés, nous trouverons des solutions. À propos de la Grande couronne justement, nous avons tenu Roissy, Saclay ou encore le grand ensemble Val-d'Oise hors du Grand Paris. En effet, la mobilité des salariés est une vraie question : être obligé de passer par Paris pour rejoindre l'aéroport quand l'on vient de chez M. Delattre paraît incohérent. Le dire n'est pas mettre en cause le projet de Grand Paris Express décidé par l'ancienne majorité, nous y avons même mis quelques milliards d'euros. Nous devrons porter ce sujet avec les élus de la Grande couronne et la région Ile-de-France qui est la seule à détenir un outil opposable.

Monsieur Hyest, vous avez posé une fort bonne question sur le lien entre économie et formation professionnelle.

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