La commission entend Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique, et M. André Vallini, secrétaire d'État à la réforme territoriale, sur le projet de loi n° 636 (2013-2014) portant nouvelle organisation territoriale de la République.
Nous avons procédé à de très nombreuses auditions ouvertes à l'ensemble des sénateurs, en étendant le spectre des personnalités auditionnées à des représentants de la fonction publique territoriale et des grandes associations nationales d'élus, des personnalités étrangères et des universitaires. Nous nous sommes déplacés, comme vous, en région ; nous avons échangé avec des élus et interrogé les forces vives de nos territoires afin de bien mesurer ce qu'elles attendent de la réforme territoriale.
La commission des lois a désigné comme rapporteurs, au début de l'été, René Vandierendonck, membre du groupe socialiste et, au début du mois d'octobre, Jean-Jacques Hyest, du groupe UMP. La lisibilité politique de ce double choix est évidente : notre travail vise à atteindre un consensus.
André Vallini et moi-même avons participé, dans toute la France, à des débats républicains tenus à huis-clos afin de favoriser la libre expression des participants ; nous étions vendredi dernier à Caen. Le projet, enrichi, a évolué sur de nombreux points.
Le Président de la République et le Premier ministre souhaitent que ce texte atteigne sa forme définitive à partir d'accords trouvés en amont avec le Parlement, en particulier avec le Sénat. Le président du groupe UMP, retenu ce matin par une session budgétaire dans son département, m'a fait part de son souhait que nous fassions mieux, cette fois, que lors de l'établissement de la carte régionale. Nos échanges ont fait apparaître des divergences transpartisanes. On nous reproche d'avoir changé d'avis au sujet des départements : c'est vrai. Envisageant tout à la fois la question constitutionnelle, la nécessité d'avoir des majorités et la question des solidarités territoriales, le Président de la République et le Premier ministre ont tranché : nous avons un mandat devant nous pour nous poser ensemble la question du devenir des départements. Nous devons en revanche être attentifs dès maintenant aux compétences essentielles maintenues à cet échelon.
Le rapport Raffarin-Krattinger posait l'alternative de très grandes régions dans lesquelles les départements seraient conservés, ou de petites régions sans département. Nous avons réalisé un choix intermédiaire : les régions sont assez grandes pour que se pose la question de l'échelon de proximité et du lien entre la région et le bloc communal. Certains préconisent que cette fonction continue d'être celle des départements.
Ce texte fait suite à la loi de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles, qui a créé la conférence territoriale de l'action publique (CTAP), outil essentiel pour adapter la gestion des compétences à la réalité géographique et historique diverse des régions de France. Conscient de cette diversité, l'État est prêt à faire confiance aux élus pour trouver des accords dans chaque région.
Leurs compétences économiques doivent être renforcées, afin que chacune définisse une stratégie originale associant l'enseignement supérieur, la recherche et le développement, et les transferts de technologie : quel secteur privilégier ? Pour quelles créations d'emplois ? Notre pays est victime de l'antienne de la fin du XXème siècle selon laquelle l'économie des services allait substituer ses emplois à ceux perdus dans l'industrie. Il faut au contraire continuer à travailler sur ces deux piliers de l'économie, dans le cadre de stratégies élaborées par chaque région. Elles sont seules à pouvoir aider directement les entreprises, notamment par une entrée temporaire dans leur capital dans certains cas précisément définis - création, difficultés créées par de très gros marchés - qui requiert aujourd'hui de passer devant le Conseil d'État.
Nos échanges avec les deux commissaires européens compétents ont fait apparaître que les régions pourraient apporter leur garantie à des prêts bancaires de longue durée de la Banque européenne d'investissement (BEI), en particulier dans les secteurs présentant des risques en matière de technologie.
Les régions sont également confortées dans leurs fonctions relatives à la formation professionnelle. Espérons que cela contribue à mettre fin à la concurrence entre enseignement initial dans les lycées professionnels ou techniques et formations en apprentissage portées par les chambres des métiers, les chambres de commerce ou d'autres organisations. Nous ne sommes pas allés jusqu'à donner aux régions une compétence sur l'enseignement professionnel.
Les régions conduisent énormément de schémas, nécessitant beaucoup d'études, de recherches et, finalement, de dépenses publiques qui ne sont pas toujours utiles. Limitons-les au schéma régional de développement économique, d'innovation, d'internationalisation et au schéma régional d'aménagement et de développement durable du territoire, portant sur l'intermodalité et l'environnement. La nécessité d'un engagement des régions pour les infrastructures est manifeste : certains schémas de cohérence territoriale (SCoT) et plans locaux d'urbanisme (PLU), conçus en fonction de l'histoire locale, ont dû être entièrement repris après la création d'un pôle gare ou d'un dispositif d'intermodalité. La discussion est ouverte sur le contenu, l'opposabilité et la cohérence du schéma régional d'aménagement et de développement durable du territoire.
La question des instances exécutives et délibératives ne nous semble pas relever immédiatement de la définition des compétences.
Si la clause de compétence générale des départements est supprimée, vos débats et nos échanges nous ont conduits à créer à leur intention une compétence de solidarité territoriale : un projet structurant important pour une commune, une intercommunalité, ou toute autre organisation, qui ne se réaliserait pas faute d'aide du département, manquerait au pays. Beaucoup de zones rurales ou montagnardes en particulier connaissent de grandes difficultés d'ingénierie ; la compétence de solidarité territoriale pourra y remédier. Reconnaissons cependant que la réflexion à ce sujet est en cours : il faut le dire, nous ne sommes pas prêts.
La suppression des départements suppose la majorité nécessaire à une révision constitutionnelle. Nous avons cinq ans pour élaborer une solution, pendant lesquels les compétences sociales et de solidarité seront les plus observées par nos concitoyens.
Le débat se concentre sur les routes et les collèges. Est-il opportun de transférer l'ensemble des infrastructures de mobilité, pour plus de cohérence ? La question me semble relever de la CTAP. Dans certaines cités scolaires, les personnels non enseignants relèvent de trois employeurs différents : collège, région et État.
Nous discuterons le 15 décembre prochain de la proposition de loi de M. Pélissard et Mme Pires-Beaune sur les communes nouvelles. Ce sujet, qui n'existait pas il y a deux ans, suscite un intérêt croissant de la part de nos élus locaux : ils jugent avec raison que certaines communes ne pourront assumer les politiques publiques nouvelles demandées par nos concitoyens - pour la petite enfance, notamment - faute d'une assiette fiscale suffisante.
Si la clause de compétence générale nous semble indispensable pour les communes, nous souhaitons supprimer le maximum de syndicats intercommunaux, dont le périmètre est inférieur ou égal celui d'un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre. Cela représente 17 milliards d'euros de dépenses, 9 milliards d'euros en fonctionnement. Les syndicats départementaux qui fonctionnent bien, pour des frais modestes, seront évidemment conservés.
L'horizon de 20 000 habitants fera l'objet, comme le Premier ministre l'a promis avant l'été, d'adaptations. Les critères en seront la densité démographique et le temps nécessaire pour se rendre du centre de l'intercommunalité à sa frontière. La visioconférence ne saurait remplacer entièrement les rencontres entre élus, et j'ai pu me rendre compte moi-même que 20 000 habitants ne se trouvent pas aisément réunis dans nos régions de montagne. Une intercommunalité de 18 990 habitants en zone de vitalité démographique doit évidemment être conservée. Le seuil de 20 000 est un objectif fixé par souci des ressources fiscales. Si nous voulons préserver nos terres agricoles et nos espaces naturels, nous aurons à réformer la dotation globale de fonctionnement (DGF) en trouvant un autre critère que le seul bâti pour déterminer les dotations de l'État. Nous nous sommes donné jusqu'au mois de juin 2015 pour bâtir une proposition ; les préfets recevront d'ici-là des instructions simples.
Nombreux sont ceux qui souhaitent rouvrir le dossier des deux grandes métropoles de Paris et de Marseille. L'étude de l'OCDE sur l'évolution de leur PIB montre la nécessité de rationaliser la dépense publique dans ces grands ensembles, tout en y améliorant les conditions de logement et de transport. Marseille pose en outre des questions spécifiques en tant que grand port méditerranéen, qui perd de ses parts de marché par rapport à Gênes, Valence et Barcelone ; les équipements appellent une rationalisation. Nous sommes ouverts aux propositions de tous les groupes politiques et de tous les élus pour trouver un statut sui generis pour ces territoires, afin que leurs maires soient mieux entendus sur les plans d'urbanisme et sur leurs priorités d'investissement. Nous ne sommes pas favorables, en revanche, à leur donner la possibilité de lever l'impôt. La cotisation foncière des entreprises (CFE) varie de 5 à 30 sur l'aire de Paris, ce qui provoque beaucoup de dumping entre les territoires : seuls ceux qui peuvent la maintenir très bas continuent d'attirer des sièges sociaux. La concurrence n'est pas une valeur, mais un fait. Substituons-y la coopération en lissant la CFE, quel que soit le temps que cela doit prendre.
Le gouvernement attend beaucoup du débat parlementaire sur ce texte, qui concerne au premier chef la Haute assemblée, chambre des collectivités locales. Le Premier ministre vous l'a dit le 28 octobre dernier : nous souhaitons que ce débat soit le plus constructif possible.
Aux régions le développement économique, aux départements la solidarité, aux intercommunalités la proximité. Le débat s'engage sur le développement économique, et il est passionnant : il s'agit, à titre expérimental et dans les régions qui le souhaiteront, d'adjoindre à l'aide aux entreprises, à leur internationalisation et à l'innovation, le service public d'accompagnement vers l'emploi. Ce serait une oeuvre décentralisatrice que l'on inscrirait dans la loi.
Cette réforme vient accompagner toutes les réformes territoriales en cours. La crise des finances publiques provoquée par la crise économique et sociale entraîne une baisse des dotations, difficile à supporter pour les collectivités. Les élus sont contraints à des efforts considérables de rationalisation de leur gestion, partant à des réformes : mutualisations, agrandissement des intercommunalités, avant même le vote de la loi. Les départements eux-mêmes se rapprochent - le Loiret, le Loir-et-Cher, l'Eure-et-Loir ; la Drôme et l'Ardèche. D'autres veulent aller plus loin, comme la Savoie et la Haute-Savoie, dont les deux présidents, que j'ai reçus il y a quelques jours, se proposent de créer une collectivité unique à statut particulier. Les élus locaux, en général, font preuve de beaucoup de créativité pour faire face à leurs difficultés.
Nos relations de travail avec vous et vos services, comme la direction générale des collectivités locales (DGCL), sont excellentes.
La réforme globale de la DGF, qui devait initialement intervenir dans le projet de loi de finances pour 2015, est repoussée à celui de 2016. Nous ne débattons pas d'un texte de décentralisation, mais d'organisation ; la décentralisation suivra cependant incessamment sous peu. Des annonces en ce sens, concernant des services de l'État, interviendront-elles avant la seconde lecture au Sénat ? Il est de la plus haute importance, pour contrôler la dépense publique, d'unifier le régime des aides économiques en évitant les doubles emplois.
Il n'y aura pas de vraie décentralisation sans déconcentration. Les directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) ont pris un poids excessif, nombreux sont les préfets qui reconnaissent qu'elles ne rendent plus de compte qu'à leur ministère. Y aura-t-il un amendement gouvernemental sur Paris et Marseille ? Quand ?
Je vous remercie de nous avoir apporté quelques éclaircissements supplémentaires. Nous avons un texte datant de juin 2014, dont l'objectif clairement annoncé était la dévitalisation des départements.
Le gouvernement semble avoir reculé face aux difficultés constitutionnelles. Les solidarités territoriales continueraient à incomber aux départements.
Nous nous proposons de reprendre la philosophie de l'article 1er A que nous avions inscrit dans le projet de loi sur la délimitation des régions, les élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral. L'écoute que l'on nous avait promise s'est réduite à rien - le déroulement de la CMP a été caricatural. Nous préférerions être entendus !
Nous raisonnerons en fonction de la clarification des compétences - cessons de laisser tout le monde s'occuper de tout ! La région doit fixer certaines règles en matière de développement économique, tout le monde se tenant au schéma régional. Les régions, compétentes en matière de développement économique, le seront également en matière de formation professionnelle, ce qui ne manquera pas de poser problème : l'acquisition de l'emploi ne saurait se limiter à leur périmètre. Les lycées, qui échoient aux régions, assurent aussi les formations post-bac ; les régions doivent avoir un rôle plus important dans les domaines de l'enseignement supérieur et de la recherche. Compétentes en matière de développement économique et de formation professionnelle, les régions seront nécessairement associées au service public de l'emploi. Nous ferons des propositions en ce sens sans attendre la deuxième lecture.
Un effort considérable a été accompli dans notre pays : l'ensemble des communes participent désormais à un EPCI à fiscalité propre. Cessons de fixer des seuils qui n'ont pas de sens - en Seine-et-Marne, toutes les intercommunalités sauf une ont plus de 20 000 habitants, et tout n'y est pas cohérent pour autant.
Voulez-vous vraiment clarifier les choses ? Les centres d'action médico-sociale précoce (Camsp), financés à 80 % par l'État et 20 % par le département, devraient l'être entièrement par l'État. Article 40 ! Rapprocher les foyers d'accueil médicalisés, double tarification département-ARS et les maisons d'accueil spécialisées (MAS), simple tarification, et appliquer le principe « un seul décideur, un seul payeur » ? Article 40 ! Et article 40 encore si nous proposons, comme vous le faites, une avancée pour le service d'accompagnement à l'emploi, qui pourrait être décentralisé. Après l'accompagnement au travail viendra la globalisation de l'accompagnement social, remettant l'usager au centre du dispositif. L'insertion sociale aura dès lors pour complément l'insertion professionnelle incombant à la région. Voulons-nous simplifier ? Article 40... Tout mon travail de clarification du texte dans le domaine social se heurte à l'interdiction du transfert de charges.
L'article 23 confie aux métropoles certaines actions sociales. Quelle vision globale pour le reste du territoire ?
Votre article 24, supprimant la clause de compétence générale des départements, leur accorde cependant le droit de continuer à accompagner financièrement les communes. Où trouveront-ils les moyens pour cela ? Et comment contribueraient-ils « au financement d'opérations d'investissement en faveur d'entreprises de services marchands » ? Qu'entendez-vous par là ?
La région étant désormais porteuse de la compétence économique, les auditions conduites par la commission des affaires économiques ont fait apparaître que les interrogations actuelles portent plutôt sur la construction du schéma régional. Devra-t-il entrer dans les moindres détails ou définir seulement les grands enjeux stratégiques ? Il est censé veiller à ce que les aides ne contribuent pas à la délocalisation de l'activité économique au sein d'une région ou vers une région limitrophe. Or des schémas seront adoptés conjointement pour les métropoles, et, à défaut d'accord, les orientations adoptées par la métropole devront prendre en compte le schéma régional. Pouvez-vous nous donner des précisions sur ce point ? Comment imaginez-vous le pilotage et la coordination de l'ingénierie économique sur un territoire régional ?
Les propositions des élus de la métropole de Paris remettent en cause le schéma voulu par la loi du 27 janvier 2014 : qu'une capacité juridique soit reconnue aux conseils de territoire et qu'ils lèvent un impôt dynamique, la CFE. Si j'adhère entièrement à votre réponse, je souhaite que nous disposions très rapidement de l'amendement gouvernemental, le texte devant être débattu en séance à partir du 16 décembre prochain.
La démocratie dans ces conseils de territoires reste un sujet à traiter : les oppositions doivent y être représentées, ce que ne garantit pas le mode de scrutin actuel. Un cinquième échelon serait cause de paralysie. Comment les compétences du conseil de métropole s'articuleront-elles avec celles de la métropole ? Que deviendront, enfin, les départements de Paris et de la petite couronne, réunis dans le territoire de la métropole ? Vous vous étiez engagée à ce qu'une étude soit présentée au Parlement sur les conditions de leur suppression ou de leur fusion. Où en est votre réflexion ?
Quel est le dessein du Gouvernement ? Le fait est que ce débat a été marqué par des positions successives et changeantes. Nous pourrions faire valoir qu'elles témoignent d'une réflexion en cours. Et, après tout, la réalité est souvent ainsi : il n'existe pas de schéma a priori qu'on appliquerait ensuite.
Pour ma part, je rêve toujours d'une loi qui réorganiserait la France autour de régions et d'intercommunalités fortes. Cela suppose des évolutions autour des structures départementales sans aller jusqu'à décréter imprudemment leur disparition le jour J car je les crois nécessaires dans certaines circonstances - nous en avons beaucoup parlé à propos des zones rurales. Nous aimerions que le Gouvernement affiche une perspective claire sur ce sujet.
L'écoute des ministres se traduira dans le débat parlementaire qui s'engage. Au Sénat, si attaché aux collectivités territoriales et à l'extrême diversité des territoires, chacun est conscient que tout schéma général peut être contredit par la réalité locale. Le Gouvernement n'a pas, pour autant, renoncé à la réforme, ce dont je le remercie également car la tentation était grande de baisser les bras.
La réforme a pour thème la clarification des compétences des collectivités. Comment la mener sans éclaircir le sort de la clause de compétence générale ? Comment articuler la compétence économique des régions avec celle des métropoles ? L'article 3 du projet de loi ne répond pas entièrement à cette interrogation.
Les intercommunalités sont évidemment au centre de cette réforme comme elles sont au coeur du paysage administratif de notre pays depuis la loi « Chevènement » du 12 juillet 1999. Le passage du seuil de 5 000 à 20 000 habitants, qui a déjà fait couler beaucoup d'encre, inquiète. Vous avez annoncé un article d'adaptation reposant sur deux critères qui sont d'ailleurs parfois difficiles à combiner : la densité démographique et la distance en temps. En quoi le seuil de 20 000 est-il facteur d'efficacité ?
Qu'est devenue l'idée de réserver un sort particulier aux départements ruraux ? Enfin, l'article 33 du projet de loi prévoit une action récursoire de l'État à l'encontre de collectivités territoriales en cas de manquement aux obligations européennes. Cette disposition ne reflète-t-elle pas la faiblesse du contrôle de légalité ?
Je m'associe aux propos de M. Savary : une partie de cette réforme est conditionnée par les engagements de l'État en raison de l'article 40. Les réserves de Mme Lebranchu m'inquiètent : le succès de la réforme ne dépend pas des seules collectivités. Elle l'a d'ailleurs constaté aux quasi-applaudissements qui ont suivi les observations sur les Dreal.
Au sujet des regroupements de départements, j'ai cru comprendre que M. Vallini en soutenait certains dans ma région Rhône-Alpes. Il a même évoqué la Savoie et la Haute-Savoie.
Ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit !
Je n'ai pas parlé de la nouvelle collectivité... Que l'économie revienne aux régions, fort bien. À condition, toutefois, de ne pas oublier que son moteur est l'enseignement supérieur et la recherche, ce qui laisse entrevoir la complexité des articulations entre région et métropoles. Dans la région Rhône-Alpes, quid de Grenoble et de Lyon ?
Qu'adviendra-t-il des syndicats intercommunaux ? Ils constituent parfois un préalable aux regroupements. Pour preuve, un préfet très volontariste dans mon département, qui souhaitait atteindre le seuil de 20 000 habitants, a dû se résoudre à y avoir recours pour éviter une perte de compétences. L'on ne met pas en place une intercommunalité à marche forcée : on a souvent besoin de la souplesse des syndicats intercommunaux.
Qui fait quoi ? M. Hyest l'a bien dit, c'est la seule question qui vaille. Si nous voulons gagner en clarté, si nous voulons avancer, il faut y apporter une réponse nette.
Je suis un départementaliste convaincu. Le département est le bon échelon pour péréquer. Cela sera-t-il possible au sein des régions ? Le Gouvernement répond par la compétence relative à la solidarité territoriale. Encore faudrait-il la définir et, surtout, savoir sur quelles ressources il compte l'asseoir. La Drôme et l'Ardèche, dont M. Vallini a donné l'exemple, connaissent des situations très différentes : la Drôme a encore la capacité d'accompagner les territoires, l'Ardèche ne l'a plus.
La notion de proximité joue, même dans un État fédéral comme l'Allemagne ; c'est ce qui est ressorti de l'audition de la ministre-présidente de la Sarre la semaine dernière. C'est la raison pour laquelle le département en France a un sens profond. Des compétences structurantes telle que celle de la voirie doivent rester du ressort des conseils généraux.
Pardonnez mon insolence, si je dis avec le président Retailleau que la loi du nombre est celle de l'idiotie. Le seuil de 20 000 habitants n'a aucun sens sans un minimum d'ingénierie et de ressources. On ne pourra pas faire vivre l'intercommunalité en additionnant des communes pauvres dans certains territoires ruraux, il faut absolument repenser cette question.
Je caressais l'espoir que Mme la ministre ait eu une apparition, celle de la réalité de nos collectivités territoriales, s'étant rendue à Lourdes...
Pas à Lourdes ; mais dans les Hautes-Pyrénées, oui !
Ceci explique sans doute cela... Hélas ! Ce texte, je l'ai dit et le maintiens, est dévastateur pour nos territoires interstitiels. Contrairement à Mme Tasca, dont je partage les questionnements, je n'ai pas le sentiment que le Gouvernement soit à l'écoute du Sénat. Nous en avons eu la preuve absolue lors de l'examen du premier texte consacré à la carte des régions : nos propositions ont été systématiquement balayées. Vivrons-nous la même expérience ?
J'ai toujours été favorable à la clarification des compétences. Où en est-on sur la clause de compétence générale ?
Je lis dans l'exposé des motifs : « le débat pourra s'engager sereinement sur les modalités de suppression des conseils départementaux à l'horizon 2020 »... Est-ce encore à l'ordre du jour : oui ou non ? Si oui, dites-le clairement. Nous le sentons bien, il y a eu un « juste avant » le congrès des maires ; nous sommes désormais dans le « juste après »... Votre objectif demeure-t-il, comme cela est inscrit dans le texte, de transférer la compétence de la voirie, des collèges et du transport scolaire des départements aux régions ?
Autre question qui appelle une réponse par oui ou par non, maintiendrez-vous le seuil de 20 000 habitants pour une intercommunalité ? Au demeurant, le texte ayant pris beaucoup de retard, il faudra laisser du temps aux intercommunalités qui ne sont pas encore prêtes.
Mme Tasca l'a souligné, le texte prévoit des pénalités à l'encontre des collectivités en cas de manquement aux règles européennes. Si vous imaginez pouvoir en appliquer sur la question des nitrates, vous lèverez une révolution sur nos territoires. Au rang des curiosités de ce texte, citons également la mise sous tutelle des collectivités par les chambres régionales des comptes ou encore les conventions entre chambres régionales des comptes et collectivités.
Quelle est la volonté du Gouvernement ? Il aurait beau jeu de nous dire « Travaillez, construisez, ne rendez pas copie blanche » si notre texte fait l'objet d'une destruction systématique à l'Assemblée nationale. Que les choses soient dites clairement, et nous gagnerons beaucoup de temps.
Depuis quelques années, texte après texte, nous augmentons les seuils des intercommunalités. Celui de 5 000 habitants favorisait une intégration avancée des communes au sein des EPCI à fiscalité propre. En passant à 20 000 habitants, on court le risque d'une dilution. Je connais une intercommunalité de 13 400 habitants dans la Marne, elle regroupe 60 communes. Comment, dans ce genre de secteurs, aller plus loin ? Nous aurions un groupement s'étendant sur 80 kilomètres de longueur, dont les membres, hormis la commune-centre, ne se sentiraient plus partie prenante. L'intérêt de l'intercommunalité en perdrait tout son sens. On ne peut pas décréter à Paris le seuil d'une intercommunalité dans une France, et c'est l'un de ses charmes, aux territoires aussi variés.
Une question transpartisane : au fil des années, nous renforçons les intercommunalités mais quel est l'objectif au final ? S'agit-il, en s'inspirant de la loi Paris-Lyon-Marseille de 1982, d'inverser la logique actuelle ? Les communes ne seraient plus la base de l'intercommunalité, mais en procéderaient pour se transformer en sections. Les élus qui commencent sérieusement à se poser la question seraient heureux de savoir, quelle que soit la réponse, ce qui se cache derrière cette manie législative.
Où en est la réflexion sur les moyens financiers dont disposeront les collectivités pour mettre en oeuvre les compétences nouvelles qui leur seront attribuées ? L'état de nos finances publiques ne nous offre plus le luxe de légiférer en repoussant à demain la question des ressources, sauf à décevoir les élus et les territoires chargés de mettre en oeuvre cette loi.
La compétence économique aux régions, d'accord, mais on ne peut pas s'en tenir là. Si l'on veut un guichet unique, il faudra revoir l'architecture des services de l'État. La compétence formation professionnelle, qui est conforme à la vocation des régions, nécessitera un mariage à quatre : État, région, entreprises mais aussi régions voisines. Des passerelles interrégionales seront à aménager car chaque région n'offrira pas toutes les formations recherchées. Je le sais pour venir d'une région où le poids de l'industrie agro-alimentaire est très lourd.
Le Premier ministre, après le débat douloureux sur la carte des régions, a corrigé le tir par rapport au seuil de 20 000 habitants. Un point important à ne pas négliger dans cette discussion : la population et son adhésion à un projet intercommunal. Je ne suis pas certain que les critères de densité démographique et de distance en temps suffisent ; mieux vaudrait une approche plus fine, par bassin de vie.
Merci de donner la parole à un sénateur qui n'est pas membre de l'éminente commission des lois...
Les départements de la grande couronne sont pris entre le marteau et l'enclume, entre une belle métropole dont les contours approchent ceux de l'ancien département de Paris supprimé il y a cinquante ans et des régions environnantes qui se renforcent. Devons-nous ressusciter le département de la Seine-et-Oise avec Versailles pour capitale ?
Les enjeux sont de taille pour la grande couronne. Dans mon agglomération, trois communes ont déposé plus de permis de construire que Paris intra-muros. Or le logement ne peut pas se concevoir sans les transports, que la future métropole revendique. Comment fera-t-on ? Interrompra-t-on les trajets à hauteur d'Épinay ? Que deviendrons-nous, nous les petits astéroïdes gravitant autour du soleil métropolitain ? Le Premier ministre, avec sa bonne ville d'Évry, connait la situation ; il doit certainement avoir quelques idées que nous aimerions connaître car nous sommes totalement dans le brouillard. Je joins nos doléances à celles des territoires ruraux, que nous sommes à moitié dans la grande couronne. Je ne sais pas comment nous pourrons fonctionner sans conseils généraux, coincés entre une région de 12 millions d'habitants et le Grand Paris. Je plaide pour leur maintien dans les départements de plus d'un million d'habitants.
Le Premier ministre a indiqué que le destin des départements différerait selon qu'ils sont urbains, ruraux, voire très ruraux ou en déshérence. Quels critères retiendrez-vous pour les classer dans ces trois catégories ?
Les syndicats intercommunaux ont tendance à disparaître à mesure que progresse l'intercommunalité, c'est exact. En revanche, il y va différemment des syndicats départementaux. Ces émanations du bloc communal sont peu nombreuses, je n'en connais que deux dans les Côtes-d'Armor. L'article 14 du projet de loi les maintient, je m'en réjouis dès à présent, je serai vigilant pour la suite.
La compétence économique surdétermine l'avenir des territoires. Quelle sera la contribution effective des territoires ruraux à la création de valeur et d'emploi en lien avec la métropole ? Évitons la caricature de territoires ruraux sous perfusion de dotations, quand bien même leurs dotations seraient adaptées. Cela m'amène à la question du seuil des EPCI à fiscalité propre. Dans le Gers, le passage à 20 000 habitants aboutirait à des territoires longs de 80 kilomètres et larges de 30 kilomètres. Cependant, la question ne porte pas tant sur le seuil que sur les ressources dont disposeront ces groupements de collectivités pour faire face aux besoins des populations. Dans les territoires ruraux, c'est l'interrogation principale.
Si le texte a évolué entre juin et septembre, de nombreuses ambiguïtés demeurent, notamment sur la compétence de solidarité territoriale. Néanmoins, la faute originelle de ce projet de loi réside dans la fixation du seuil de 20 000 habitants. Mortifère pour les territoires ruraux, il diluera le sentiment d'appartenance. Quand la période est à la raréfaction des dotations publiques et à la dégradation des capacités d'autofinancement, on peine à imaginer comment cela fonctionnera avec des départements, affaiblis, dépouillés de leurs principales compétences et réduits au rôle de prestataire social. Abandonnons ce seuil pour retenir la notion de bassin de vie de l'Insee. C'est également la condition pour faire vivre la démocratie locale et la proximité amoindries par le nouveau mode d'élection des conseillers généraux.
Espérons que le Gouvernement revienne au moins sur ce point. Sinon, il ne nous restera qu'à allumer un cierge à Lourdes... Que le groupe RDSE, si attaché à la laïcité, s'autorise des invocations qu'il évite habituellement manifeste tout le désarroi des élus.
Le seuil de 20 000 habitants pose un problème de déficit démocratique. Imaginez-vous 90 maires regroupés dans une salle qui n'a ni les dimensions ni l'équipement de celle-ci. Aux places du fond, ils n'entendent pas l'orateur qui s'exprime sans micro. Ils en repartent sans avoir compris de quoi il retournait. Vous me direz que les documents peuvent leur être envoyés par internet, sauf que le très haut débit n'a pas atteint toutes les campagnes. Un changement de programme ? Impossible de joindre les élus sur leur portable car le réseau de téléphonie mobile est trop faible. Résultat, les communautés renvoient à leur bureau...
La réalité des élus ruraux n'a rien à voir avec celle des élus urbains. Durant la campagne sénatoriale, j'avais suggéré que les stagiaires de l'ENA effectuent tous le tour des communes de France pour modifier leur regard sur ce qui représente tout de même 85 % de notre territoire. Qu'on ne s'étonne pas du sentiment d'isolement des élus ruraux.
Sans être insolent, madame la Ministre, les intercommunalités de 80 communes traversées par une quatre voies sont rares. S'il y en a, aucune sortie n'a été aménagée pour elles ; elles doivent se contenter de regarder passer les voitures. Dans ces zones, ce sont des petites routes, de moins en moins entretenues parce que les dotations qui leur sont consacrées ont diminué de 50 % en l'espace de trois ans.
Enfin, concernant les Dreal et au risque de vous choquer, le dernier alinéa de l'article 72 de la Constitution dispose que les préfets sont les représentants de l'État dans leur département. Qu'ils fassent leur travail...
Certaines questions sont derrière nous. Le texte a évolué depuis son dépôt le 18 juin dernier. Le Gouvernement a mis à profit ces six mois pour écouter, discuter et prendre des positions sur les départements qui ne sont pas celles que l'on lit dans l'exposé des motifs. Le débat sur leur suppression était d'anticipation en juin, il est dorénavant rétrospectif. Que feront les départements demain ? Voilà la seule interrogation d'actualité.
Plusieurs collègues ont évoqué la transformation de ce projet en un texte de décentralisation sur les régions. On ne comprendrait pas que des grandes régions stratèges en matière d'économie n'aient pas la compétence de lutte contre le chômage et de reconversion des bassins d'emploi. À cette question majeure, le Gouvernement devra répondre.
Effectivement, le débat sur les départements est derrière nous. La rénovation de la politique économique se pose partout en Europe, nous en parlions avec d'autres États membres hier, puisque l'organisation actuelle n'a pas empêché la crise. L'Italie, elle, a choisi de supprimer les provinces pour créer des aires d'initiative territoriale. Le Premier ministre a dit le changement de cap du gouvernement sur les départements. Reconnaissez qu'il y a une certaine noblesse à modifier sa position pour tenir compte de l'avis du Parlement.
Nous connaîtrons évidemment des moments difficiles au cours de nos débats ; comptez cependant sur ma volonté de faire converger au maximum votre vision avec celle des députés. Eux aussi connaissent les départements ruraux à faible démographie, certains y ont été élus. Je connais également les territoires de France : l'agglomération où je vis mais dont je ne suis plus présidente n'est pas traversée par une voie rapide ; sa voisine, en revanche, l'est. Mais je suis tout autant attentive aux territoires urbains où se côtoient l'hyper-richesse et l'hyper-pauvreté. Nous avons beaucoup à apprendre les uns des autres. À l'un de vos collègues députés qui avait écrit un texte pour démontrer l'importance des départements en zone rurale, j'expliquais que l'existence de conseils généraux n'avait pas mis fin à la situation dramatique dans ces territoires.
L'effort doit porter sur les départements très ruraux et les départements urbains en grande difficulté. Qui finance la solidarité ? La péréquation n'y suffira pas. Faut-il une assiette fiscale territoriale très large, un système de ticket modérateur ou la faire porter sur les familles au moment de la succession, sur la solidarité nationale ? J'entends vos remarques sur l'article 40 de la Constitution. Nous devons y réfléchir en amont de la discussion. En tout cas, l'existence de départements ne règle pas le problème.
Comme vous le savez, j'ai nommé un sénateur et un député pour réfléchir à une réforme de la DGF. Je l'ai fait car le milieu rural ne peut plus vivre avec une DGF assise sur le bâti et la population. C'est primordial si nous ne voulons plus que l'équivalent d'un département de terres agricoles disparaisse tous les dix ans, si nous voulons conserver nos zones Natura 2 000 et nos périmètres de captage, si nous voulons continuer d'assurer notre indépendance alimentaire en 2035. Il faudra prendre en compte les mètres carrés agricoles et les mètres carrés nécessaires à la protection de nos espaces dans l'assiette de la DGF.
Les métropoles, abcès de fixation de la demande de solidarité, ont une responsabilité. Pour son territoire malade où le pourcentage de vote aux extrêmes est si élevé qu'il atteint presque la majorité, Jean-Pierre Balligand, président de l'Institut de la gouvernance territoriale et de la décentralisation, demande à la métropole des logements pour ses étudiants et ses jeunes en alternance, un accompagnement de leur mobilité. C'est aussi cela l'obligation de solidarité. M. Mézard marque qu'il trouve cette remarque idiote, il n'empêche, certains sujets sont communs aux départements urbains et ruraux. Je m'engage à examiner de près où l'article 40 pourrait provoquer des blocages.
Autres abcès de fixation, les Dreal. C'est affaire de contrôle. La difficulté ne tient pas à elles - qu'on ne reproche pas aux fonctionnaires d'appliquer la loi - mais aux populations et à notre procédure, qu'ils proposent d'ailleurs de simplifier. Actuellement, 90 % des projets ne voient jamais le jour à cause des recours et des contentieux ; il faut dix ans, en moyenne, pour mener à terme un gros chantier. Avec MM. Vallini et Mandon et Mme Royal, nous nous attelons à simplifier notre droit. Il faudrait également inclure dans ce débat les Direccte. Quels personnels mettre à disposition des régions ?
Vous n'êtes pas sans le savoir, nous procédons actuellement à une revue des missions de l'État. Ses résultats seront publiés en février prochain. À partir de là et de l'évaluation de politiques publiques telle que les 85 milliards d'euros d'aides aux entreprises, nous ferons des propositions et débattrons avec les commissions. Dans le même temps, M. Cazeneuve travaille sur l'administration territoriale de l'État. L'échelon départemental s'est détérioré du fait que la RéATE, pourtant une bonne idée, s'est heurtée à la RGPP. Il faut redonner de l'ingénierie aux départements, rehausser le rôle du préfet et l'interministérialité des services, nous en sommes tous d'accord.
Le contrôle ou plutôt la culture du contrôle, nous en avons besoin pour nos exportations et importations agricoles. Sans cachet, comment certifier la qualité d'une viande animale venant de l'étranger ? Une réécriture du contrôle est à mettre en oeuvre, le Parlement sera appelé à en débattre.
Le Gouvernement présentera avant nos débats un amendement perfectible sur Paris et Marseille, je m'y engage. Il s'agit de donner un statut à ces territoires, sans revenir à un syndicat d'EPCI qu'a rejeté le Sénat, lui qui est à l'origine de la métropole du Grand Paris. Développement économique, logement et transport étant largement liés, nous trouverons des solutions. À propos de la Grande couronne justement, nous avons tenu Roissy, Saclay ou encore le grand ensemble Val-d'Oise hors du Grand Paris. En effet, la mobilité des salariés est une vraie question : être obligé de passer par Paris pour rejoindre l'aéroport quand l'on vient de chez M. Delattre paraît incohérent. Le dire n'est pas mettre en cause le projet de Grand Paris Express décidé par l'ancienne majorité, nous y avons même mis quelques milliards d'euros. Nous devrons porter ce sujet avec les élus de la Grande couronne et la région Ile-de-France qui est la seule à détenir un outil opposable.
Monsieur Hyest, vous avez posé une fort bonne question sur le lien entre économie et formation professionnelle.
Le Gouvernement a ouvert la porte sur l'accompagnement vers l'emploi ; je l'ai dit à votre président, M. Larcher, qui est d'ailleurs l'initiateur du regroupement de l'ANPE et des Assedic au sein de Pôle emploi - l'idéal eût été de décentraliser les ANPE. Les parlementaires présenteront leurs amendements, je proposerai des expérimentations sous la forme de conventions d'objectifs et de moyens et d'un chef de filat. La plus forte opposition vient des missions locales.
D'autres pistes peuvent être explorées : la présence des régions au sein des conseils d'administration de Pôle emploi, le transfert aux régions de la tutelle des missions locales et des maisons de l'emploi, la fusion des structures d'accompagnement au niveau régional...
Monsieur Hyest, tout à fait d'accord sur le post-bac. Les BTS représentent parfois une voie de refuge pour des familles qui ne peuvent pas payer d'études longues à leurs enfants. Attention à l'égalité des possibles ! La discussion est ouverte sur les contenants, mais pas sur les contenus. Les centres de ressources technologiques sont de merveilleux outils au sein des lycées techniques.
Le seuil de 20 000 habitants pour les EPCI à fiscalité propre, mais M. Vallini y reviendra plus longuement, est documenté ; pour nous, il est le gage d'une intercommunalité qui fonctionne, d'une intercommunalité efficace. C'est la seule façon de sauver les communes, même si je ne suis pas certaine qu'il faille toujours laisser le choix : l'objectif n'est pas de les faire disparaître.
Madame Létard, si vous pouvez me résumer votre grand projet en trente lignes, je suis preneuse. Je n'ai qu'un dessein : redresser le pays, l'emploi. Nos concitoyens veulent aussi vivre correctement, ils attendent de plus en plus de services. Les territoires ne sont pas seulement des territoires de vie, ce sont aussi des facteurs de production. Certains créent moins de valeur qu'ils ne le pourraient parce qu'ils n'ont pas les outils, l'ingénierie. Disons les choses, un projet de communautés de communes ne peut pas aboutir si un assistant ne se charge pas de sa rédaction.
Nous devons absolument mentionner les services marchands, parce que la compétence économique est donnée aux régions ; ces services, ce sont le bureau de poste, la boulangerie ou encore le groupement de médecins qui doivent être accompagnés pour se maintenir.
Mon dessein est aussi de sortir de la logique de concurrence entre régions pour en venir à la coopération. C'est pourquoi j'ai défendu le transfert de la compétence voirie aux régions, le bon niveau pour la péréquation. Le Sénat pense différemment, soit. Nous en reparlerons mais n'oublions pas que des transferts en sens inverse peuvent être décidés au sein des conférences territoriales de l'action publique, ainsi pour les cités scolaires.
La clause de compétence générale, nécessaire durant la période transitoire, peut être supprimée de nouveau puisqu'il existe à présent des conférences territoriales et une clause de solidarité territoriale.
La gestion des fonds structurels européens étant désormais confiée aux régions, le texte prévoit logiquement qu'elles seront responsables en cas de manquement aux règles européennes. En revanche, l'État le restera pour sa part FSE. Nous éviterons ainsi des contentieux inutiles.
M. André Vallini, secrétaire d'État. - La certification des comptes des grandes collectivités territoriales garantit leur régularité et leur sincérité. Si certains élus sont réticents à s'engager dans ce processus, perçu comme suspicieux, lourd et coûteux, il est cependant facultatif et ne concerne que les collectivités dont les produits de fonctionnement sont supérieurs à 200 millions d'euros ; il est protecteur pour elles, puisque la convention précise le champ, le référentiel et les moyens du contrôle avec l'avis des ministres compétents ; il est progressif, enfin, avec un bilan intermédiaire après trois ans et définitif qu'après huit ans.
Les moyens nécessaires aux régions pour exercer leurs nouvelles compétences, provenant largement de la DGF et de la CVAE, seront en débat lors de la préparation du projet de loi de finances pour 2016. Il faudra non seulement rendre la DGF plus lisible, plus simple et plus équitable, notamment à l'égard du milieu rural, mais opérer des transferts de fiscalité, sans doute des départements vers les régions en fonction de leurs compétences respectives. Si les présidents de région ne souhaitent pas de transferts de compétences considérables, en dehors du domaine économique, ils prétendent néanmoins à d'importants transferts de CVAE.
Le débat aura lieu avec les associations d'élus, au sein du Comité des finances locales et au Sénat.
La seule solution pour sauver les communes françaises, c'est l'intercommunalité. Elles l'ont bien compris, et l'on assiste depuis vingt ans à une révolution silencieuse sur nos territoires : au 1er janvier 2013, 200 mouvements de fusion ou de rattachement de communes isolées avaient eu lieu depuis la loi de 2010 ; au 1er janvier 2014, 300. Une diminution de 2 600 à 2 150 intercommunalités en deux ans, c'est énorme ! Nous voulons aller encore plus loin, quitte à prévoir de multiples dérogations au seuil de 20 000 habitants, suivant des critères démographiques, géographiques, kilométriques... Prenons garde toutefois : une suppression complète de ce seuil ralentirait l'évolution.
La vraie question que les élus se posent, et que j'entends sur mon territoire, est celle de la stabilité : après la loi de 2010 et le redécoupage des cantons, nous proposons encore une nouvelle carte des intercommunalités. Nous en débattrons, et écouterons tout particulièrement le Sénat, monsieur Mézard.
Le conseil général de l'Isère discutait il y a quinze jours de la répartition de subventions. Une commune de 89 habitants s'est lancée dans un projet, très modeste à l'échelle du département, très important pour elle, de rénovation de sa salle des fêtes ; il est subventionné à 90 % par l'Europe, la région, le département et la communauté de communes ; manquent 10 %, que le maire nous demande.
C'est vous dire s'il y a lieu de se poser la question de la justification de communes de cette importance, et si la proposition de loi relative aux communes nouvelles est bienvenue. Elle suscite beaucoup d'intérêt : une dizaine de fusions sont envisagées rien que dans mon département.
Le Premier ministre a annoncé en avril dernier l'ouverture du débat, d'ici 2021, sur l'avenir des départements. S'il s'est déclaré favorable à leur suppression, il n'a jamais été question d'une date couperet. Les cartésiens que nous sommes voient l'organisation territoriale de la République comme un jardin à la française. Ce modèle est dépassé. Notre grand dessein, Jean-Pierre Sueur, est d'être utile aux territoires, de les aider à rendre le meilleur service aux citoyens. Oui, la loi a évolué, parce que le gouvernement a écouté le Parlement et les associations d'élus. Nous sommes pragmatiques : la France n'a plus besoin d'être administrée de la même façon de Lille à Perpignan ou de la Bretagne à l'Alsace. Il serait évidemment regrettable que les deux départements savoyards fassent sécession, mais l'administration territoriale de la République est capable de s'adapter à la réalité de ses différents territoires. Le rapport passionnant sur l'hyper-ruralité de votre collègue Alain Bertrand, que j'ai eu le plaisir de recevoir, dit à quel point il est important, notamment en milieu rural, que les intercommunalités aient une taille suffisante pour disposer d'ingénierie, rendre des services à la population.
Vous n'y pensez pas ! On me dit que 20 000, c'est parfois déjà trop.
Merci, monsieur le Ministre, nous sommes très sensibles au fait que Mme Lebranchu et vous ayez pris le temps de nous écouter et de nous répondre.
La réunion est levée à 12 h 15