Intervention de Hervé Maurey

Réunion du 3 décembre 2014 à 15h30
Loi de finances pour 2015 — Compte d'affectation spéciale : financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale

Photo de Hervé MaureyHervé Maurey :

Monsieur le président, madame la ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, Rémy Pointereau, rapporteur pour avis, n’ayant pu être là aujourd'hui, j’ai souhaité le remplacer en tant que président de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, pour vous faire part d’un certain nombre de réflexions, plus politiques que budgétaires, j’en conviens.

Sur l’aspect strictement budgétaire, vous le savez certainement, nous avons émis un avis défavorable sur les crédits proposés, parce que nous considérons que le budget n’est pas à la hauteur des enjeux.

Ce que nous critiquons, c’est non pas tant la baisse des crédits – même si 350 millions d’euros en moins sur trois ans, ce n’est pas rien –, mais bien davantage les choix effectués par le Gouvernement d’un point de vue qualitatif.

Il s’agit tout d’abord de la remise en cause de dispositifs qui, nous semble-t-il, ont fait leur preuve. Je veux parler des pôles de compétitivité, aucun nouvel appel à projets n’étant désormais envisagé, et des pôles d’excellence rurale, aucune reconduction de crédits n’étant prévue après 2016, car le Gouvernement évoque simplement une contractualisation encore très floue à ce stade.

C’est la même chose pour la politique des grappes d’entreprises, pour laquelle aucun financement opérationnel n’est prévu.

La suppression de ces dispositifs, lesquels, je le répète, ont largement fait leurs preuves, nous pose problème. Surtout, ce qui préoccupe notre commission, c’est que l’aménagement du territoire, rebaptisé par le Président de la République « égalité des territoires », est toujours le parent pauvre de l’action publique. Cette situation provoque, nous le voyons bien, une véritable désespérance de nos territoires et de leurs habitants, qu’ils traduisent dans leurs votes.

Les attentes des habitants de nos territoires sont pourtant connues. Ils veulent, on le sait, des services publics, un accès facilité aux soins, un accès à la téléphonie mobile et à l’internet, et même aux carburants. J’évoque ce dernier point, ce texte tendant à mettre à mal le dispositif d’installation des sociétés distributrices de carburant, alors même qu’une telle mesure aura un impact très fort sur l’attractivité commerciale d’un certain nombre de bourgs ruraux.

Je crois, madame la ministre, je le disais à l’instant, que les besoins de nos territoires et de leurs habitants sont largement connus. Il n’est donc plus temps de commander, comme vous le faites, une consultation nationale sur le numérique, des assises des ruralités ou un rapport sur la téléphonie mobile. Tout cela est déjà largement connu, et il est grand temps d’agir.

Je prendrai quelques exemples. Le plan France Très Haut Débit, c’est très bien, mais ce n’est pas cela qui donne un réseau de téléphonie mobile ou du haut débit aux territoires qui n’en ont pas ! Promettre du très haut débit à ces territoires, c’est pour le moins insuffisant. Notre collègue parlait voilà quelques instants du FACÉ : que ne mettons-nous en place un tel système pour financer le déploiement du très haut débit sur notre territoire !

Le Gouvernement évoque souvent le retour d’un État stratège. Celui-ci, à mes yeux, devrait se positionner pour suppléer les collectivités dans les domaines où elles n’interviennent pas. Surtout, il devrait se poser en régulateur, pour mettre fin à cette situation d’absence de régulation pour les opérateurs.

Nous avons le même problème de régulation pour ce qui concerne l’accès aux soins. Vous vous félicitez constamment de la réussite des maisons de santé pluridisciplinaires, mais combien de maisons ont-elles été installées, alors même qu’elles ne disposent pas de médecins ? Là aussi, comme le Sénat l’a proposé voilà un peu moins de deux ans dans un rapport adopté à l’unanimité, il faut envisager des dispositifs de régulation.

La régulation, madame la ministre, a un avantage énorme : elle ne coûte rien ! Cependant, elle nécessite, c’est vrai, du courage politique. Or force est de le constater, ce gouvernement en manque. La résultante, c’est que l’on a eu beau transformer le ministère de l’aménagement du territoire en ministère de l’égalité des territoires et la DATAR en Commissariat général à l’égalité des territoires, les inégalités territoriales se creusent, la réforme des rythmes scolaires n’ayant fait malheureusement qu’accroître une telle tendance.

Notre commission ne peut se résoudre à cette situation. C’est la raison pour laquelle nous serons extrêmement vigilants tout au long de l’année 2015. Nous souhaitons d'ailleurs profiter du vingtième anniversaire de la dernière loi d’aménagement du territoire pour proposer et mettre en œuvre des solutions fortes.

Vous nous avez annoncé voilà quelque temps la création d’un Comité interministériel pour l’égalité des territoires. Ce sera la première fois depuis le début de ce quinquennat. Nous observerons avec attention ce que le Gouvernement proposera pour montrer, enfin, qu’il se préoccupe vraiment de l’égalité des territoires.

Quoi qu’il en soit, soyez-en convaincue, madame la ministre, le Sénat, notamment la commission chargée de l’aménagement du territoire, sera extrêmement vigilant et déterminé en la matière. §

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