De quoi avons-nous besoin ? Et là je me fais l’interprète des territoires interstitiels. Il nous faut trois ingrédients essentiels : liberté, accessibilité à nos territoires et préservation de la matière grise qui peut exister dans nos territoires – et, si possible, en faire venir.
S’agissant de la liberté, nous la trouverons dans la clarification des compétences. Vous annoncez, madame la ministre, et le Gouvernement avec vous, vouloir faire la chasse aux normes. Mais nous devons aussi faire la chasse aux schémas, friandises préférées de nos technocrates nationaux et régionaux, et encore plus aux schémas directifs que le Gouvernement veut sacraliser dans la loi NOTRe, au mépris du principe constitutionnel de non-tutelle d’une collectivité sur une autre.
Nous avons des projets dans nos territoires. Nous les connaissons mieux que des technocrates à vision éloignée parfois de plusieurs centaines de kilomètres. D’ailleurs, il est déraisonnable que des régions continuent de nous imposer des usines à gaz pour obtenir tel ou tel financement. Cela engendre des surcoûts, des pertes de temps et les projets ne se réalisent pas, à commencer dans la région que je connais le mieux, mais cela peut se décliner dans nombre de régions.
Nous avons aussi besoin de matière grise. Nos territoires voient leur matière grise aspirée par les métropoles régionales : préfecture de région – j’ai bien entendu le discours du Premier ministre, il faut renforcer les préfectures des départements qui ne sont pas préfecture de région, et il a raison, mais on continue à ne pas le faire et à supprimer encore dans nos territoires gendarmerie, trésorerie, et j’en passe –, sièges de banque, de compagnie d’assurance et d’agences diverses. Nous avons des difficultés pour embaucher, nous connaissons des problèmes d’accessibilité à nos territoires, sans parler des régimes indemnitaires et des salaires.
Se pose aussi, en ce qui concerne la matière grise, la question fondamentale des formations post-bac hors des métropoles régionales. Et là, c’est un véritable chantier sur lequel il faut intervenir rapidement. L’autonomie des universités, c’est bien, mais quand elles sont en difficulté que font-elles ? Comme je l’ai dit ce matin, quand il y a le feu à la maison, on ne s’occupe plus de la grange. Or, pour nombre de ces universités, les pôles universitaires délocalisés, c’est la grange !
Tout cela est bien évidemment aggravé par les futurs projets de réforme territoriale.
Concernant l’accessibilité, l’injustice flagrante par rapport à l’enclavement de certains territoires s’est creusée : sur la route – les temps de trajet sont plus longs aujourd’hui qu’il y a vingt ans –, sur le rail – il en est de même –, sur les lignes à grande vitesse. À cet égard, j’ai lu dans la presse que le Conseil d’État s’apprêtait à annuler le projet de TGV Poitiers-Limoges. Ce sera une grande réussite s’ils y arrivent, alors que l’on a un besoin vital de ce type de lignes au milieu de la France ! Mais l’injustice s’est creusée aussi en matière de nouvelles techniques, par exemple la 4G.
J’ai là un document relatif à la couverture des services 4G par département métropolitain au 10 juillet 2014. §Je prendrai trois départements emblématiques : la Lozère voit 0, 5 % de sa surface et 15, 9 % de sa population couvertes ; la Creuse, 0 % de sa superficie couverte et 0 % de sa population ; enfin, le département que je connais le mieux, le mien, le Cantal, a 1, 3 % de sa superficie couverte et 22, 2 % de sa population.
Est-ce cela la justice ? Est-ce cela une politique d’aménagement du territoire ? Évidemment, ce n’est pas la faute du gouvernement au pouvoir depuis deux ans. §Cela vise surtout les territoires à faible démographie, mais il y a un lien de cause à effet.
Les dispositifs utilisés par les gouvernements successifs depuis des décennies pour pallier la fracture territoriale n’ont pas permis de la réduire. Il arrive même qu’ils l’aggravent