Intervention de Yves Pozzo di Borgo

Réunion du 3 décembre 2014 à 22h00
Loi de finances pour 2015 — Compte d'affectation spéciale : gestion et valorisation des ressources tirées de l'utilisation du spectre hertzien des systèmes et des infrastructures de télécommunications de l'état

Photo de Yves Pozzo di BorgoYves Pozzo di Borgo :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le programme 178 regroupe les crédits consacrés à la préparation et à l’emploi des forces. Ce programme occupe une place tout à fait particulière dans la mission « Défense ». Comme le disait le chef d’état-major des armées devant notre commission, la préparation opérationnelle est le gage de notre réactivité, de notre efficacité et de la sécurité des personnels.

Peut-être moins « visible » que le programme 146 relatif à l’équipement des forces, il pourrait aisément être négligé, comme il l’a d’ailleurs longtemps été. N’a-t-on pas tendance en France, comme certainement dans d’autres pays, à sacrifier la maintenance et l’entretien des matériels – c’est moins noble – au profit de projets « flambant neufs » plus mobilisateurs ? C’est justement ce qui s’est passé dans les années quatre-vingt-dix et deux mille. La Cour des comptes a ainsi publié, en 2004, un rapport accablant sur la crise de la disponibilité des matériels, qui était tombée à un niveau catastrophique. Le récent rapport de la Cour sur le même sujet est certes moins inquiétant, mais conclut aussi que les résultats obtenus en termes de disponibilité demeurent insuffisants au regard des besoins opérationnels. En effet, l’activité opérationnelle reste globalement inférieure aux objectifs et s’inscrit 15 % en deçà des normes reconnues par l’OTAN. Naturellement, les chiffres globaux peuvent regrouper des éléments disparates, mais ils donnent tout de même une orientation générale. En sens inverse, ils ne doivent pas masquer des insuffisances notables dans certains secteurs qui peuvent se révéler extrêmement importants en opérations extérieures. Il en est ainsi des hélicoptères.

Ce constat de l’insuffisance persistante de l’activité opérationnelle est unanimement partagé. C’est pour cette raison que la loi de programmation militaire a très légitimement fait de ce sujet un « objectif prioritaire ». En conséquence, l’entretien programmé des matériels doit progresser en moyenne de 4, 3 % par an en valeur sur la période 2014-2019, ce qui est très positif.

La commission salue le respect de cet engagement dans le projet de loi de finances pour 2015, qui prévoit que l’entretien programmé du matériel progressera de 4, 4 % en crédits de paiement. Qui plus est, les autorisations d’engagement connaissent une augmentation spectaculaire : elles progressent de 35 %, ce qui est un signal tout à fait positif pour les années à venir.

Pour autant, nous serons naturellement attentifs à ce que la gestion budgétaire concrétise cet effort. Les crédits de paiement devront être bien inscrits année après année, et les gels de crédits ne devront pas l’amputer à un niveau qui, en pratique, le remettrait en cause. En outre, la pratique subie des reports de charge doit être résorbée, car elle ne peut que déstabiliser la logistique, le calendrier, mais aussi les entreprises contractantes du ministère. Je sais que vous êtes attentif à ces questions dans vos discussions avec le ministère du budget. C’est là l’un de vos plus importants combats.

Pour conclure, je dirai quelques mots sur le service de santé des armées.

Prenant ses racines au XVIIe siècle, il fait pleinement partie de l’histoire de nos armées. À la croisée des mondes de la défense et de la santé, il a été profondément affecté par les bouleversements que ces derniers ont tous deux connus. Bien souvent, auparavant ces univers s’ignoraient et vivaient côte à côte.

La France est l’un des rares pays au monde, pour ne pas dire le seul avec les États-Unis, à encore disposer d’une chaîne complète de santé, allant de la prise en charge des blessés sur un théâtre d’opérations au rapatriement dans un hôpital militaire. Ce modèle est unique et doit être préservé, car il permet à notre pays d’entrer en premier, et rapidement, sur un théâtre d’opérations et rassure les soldats.

Le service de santé a adopté un nouveau projet pour mieux répondre aux besoins opérationnels des armées. Il va ainsi se moderniser pour renforcer la médecine de premier recours, consolider les hôpitaux militaires et se rapprocher des services civils. Ces orientations nécessaires doivent être mises en œuvre en concertation étroite avec les personnels et les acteurs locaux, laquelle est indispensable à la réussite de la réforme et à la préservation des compétences techniques au sein du service de santé des armées.

Dans ce dernier coexistent deux cultures : celle des armées qui n’est pas particulièrement tournée vers la négociation, et celle du service de santé qui est encore plus confidentielle. Vous le savez très bien, monsieur le ministre, eu égard au plan que vous menez, d’ici à six ou sept ans, sur les neuf hôpitaux existants, seuls quatre seront conservés, même si ceux-ci seront associés aux agences régionales de santé. Cependant, à la longue – il faut avoir le courage de le dire –, ils sont condamnés à la fermeture, sauf indication contraire de votre part. Quoi qu’il en soit, il est nécessaire que le personnel soit impliqué.

Le temps qui m’était imparti étant malheureusement écoulé, je n’en dirai pas plus.

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