Séance en hémicycle du 3 décembre 2014 à 22h00

Résumé de la séance

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  • LPM
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La séance

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La séance, suspendue à dix-neuf heures cinquante-cinq, est reprise à vingt-deux heures, sous la présidence de Mme Jacqueline Gourault.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Je rappelle au Sénat que le groupe Union pour un mouvement populaire a présenté une candidature pour la délégation sénatoriale aux entreprises.

Le délai prévu par l’article 8 du règlement est expiré.

La présidence n’a reçu aucune opposition.

En conséquence, je déclare cette candidature ratifiée, et je proclame M. Jean-Pierre Vial membre de la délégation sénatoriale aux entreprises, en remplacement de M. Alain Chatillon, démissionnaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Nous reprenons la discussion du projet de loi de finances pour 2015, adopté par l’Assemblée nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Défense » et du compte d’affectation spéciale « Gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien, des systèmes et des infrastructures de télécommunications de l’État ».

La parole est à M. le rapporteur spécial.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique de Legge

Madame la présidente, monsieur le ministre de la défense, mes chers collègues, en cet instant, 8 300 de nos soldats sont engagés sur neuf théâtres extérieurs. Le débat budgétaire de ce soir ne peut faire abstraction de cette réalité. Tout naturellement, nos pensées vont vers nos 210 000 militaires français et leurs familles. Les valeurs qu’ils portent, les responsabilités qui leur incombent, les attentes et interrogations qu’ils formulent doivent guider nos débats.

Au nom de la commission des finances, je me bornerai à poser une seule question : ce budget est-il sincère et crédible ? Pour répondre de façon très prosaïque, j’analyserai les recettes et les dépenses.

S’agissant des recettes, en 2014, les crédits budgétaires proprement dits étaient de 29, 6 milliards d’euros. Pour atteindre les 31, 4 milliards d’euros fixés par la loi de programmation militaire, la LPM, 1, 77 milliard d’euros de recettes exceptionnelles, dont 1, 5 milliard d’euros au titre du programme d’investissements d’avenir, le PIA, et 0, 27 milliard d’euros issu de ventes immobilières, viennent compléter cette somme. L’utilisation du PIA pour financer des dépenses payables en 2014 mais engagées depuis plusieurs années est contestable ; toutefois, il s’agit de recettes certaines.

Cette année, les crédits budgétaires passent de 29, 6 milliards à 29 milliards d’euros, soit une baisse de 600 millions d’euros. Dans le même temps, sont inscrits 600 millions d’euros de recettes exceptionnelles, soit 2, 3 milliards d’euros.

Je ne conteste pas la probabilité de la réalisation de la recette sur le compte d’affectation spéciale « Immobilier », mais chacun sait que la vente de fréquences est improbable. Vous-même en convenez, monsieur le ministre, lorsque vous déclarez devant la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat, le 14 octobre dernier, que « le produit de la vente de la bande des 700 mégahertz devait, dans la trajectoire budgétaire, intervenir dès 2015 : je sais que ce délai ne sera pas tenu, quoiqu’on m’en ait trop longtemps dit ». Ce matin, ici même, M. le secrétaire d’État chargé du budget, alors que nous évoquions ce sujet, nous disait que l’on pouvait bien évidemment encore compter sur la vente de ces fréquences. Vous poursuiviez vos propos en indiquant que vous vous orientiez vers des solutions alternatives, à savoir vers des sociétés de projet. Mais le texte soumis à notre approbation ne fait pas état d’un tel montage et prévoit toujours l’inscription au compte d’affectation spéciale « Fréquences » de 2, 2 milliards d’euros de crédits.

S’agissant de la constitution de sociétés de projet qui pourrait venir en substitution, nous n’avons pas d’objections idéologiques, même si ce montage semble plus guidé par le souci de trouver une solution technique à une impasse financière que par un choix stratégique pour améliorer l’efficacité de nos armées. Toutefois, le problème demeure entier, car nous n’avons aucune garantie sur la faisabilité technique de ce montage, et ce dans des délais respectueux de la LPM, c’est-à-dire dès cette année. Je ne doute pas que, si vous pouviez étayer ce montage et vous engager sur des délais, vous n’auriez pas manqué d’inscrire dès à présent ce scénario de remplacement dans le texte soumis à notre appréciation.

Vous avez commandé un rapport à l’IGF, l’Inspection générale des finances, et au CGA, le Contrôleur général des armées. Il vous a été remis. Tout comme nos collègues de l’Assemblée nationale, nous avons cherché à avoir accès à ce document, mais en vain. J’entends dire que l’IGF et Bercy s’opposeraient à sa diffusion et que vous n’y seriez pas hostile. Soit ! Mais, à ce banc, vous représentez le Gouvernement, et j’attends que le Gouvernement nous dise pourquoi, malgré les sollicitations répétées des deux assemblées, il s’obstine à refuser de communiquer ce rapport. Nous attendons une réponse. La diffusion de ce document participerait d’un souci de transparence et serait de nature à apaiser nos craintes ainsi que celles de la communauté militaire.

Certains invoquent la piste européenne pour boucler le budget des armées. Je ne la rejette pas, mais il appartient au Gouvernement d’ouvrir cette voie. Je le crains, tant que nous refuserons de nous conformer aux règles budgétaires communautaires, il nous sera d’autant plus difficile de solliciter la mobilisation de nos partenaires.

J’en viens aux dépenses.

Vous inscrivez 450 millions d’euros pour les OPEX, les opérations extérieures. Or, l’an passé, elles se sont élevées à 1, 1 milliard d’euros, soit un surcoût de 650 millions d’euros représentant un dépassement de 150 % des crédits inscrits.

Vous ne manquez pas d’invoquer qu’il s’agit d’une prévision, de surcroît conforme à la loi de programmation militaire. Mais, que je sache, lorsque la LPM a été votée, notre engagement en Centrafrique et en Irak n’était pas à l’ordre du jour, et le Mali ne devait nous mobiliser que quelques mois. Je ne vous ai pas entendu, pas plus que le Président de la République, nous annoncer un retrait du Mali, de Centrafrique ou d’Irak, pour ne citer que ces trois engagements majeurs. D’ores et déjà, nous savons que, les mêmes causes produisant les mêmes effets, nous aurons de nouveau un dépassement de 650 millions d’euros. Le problème, c’est que, contrairement à ce que certains laissent croire, le surcoût des OPEX est supporté par tous les ministères, le premier contributeur étant le ministère de la défense, lequel a vu ses crédits amputés de 400 millions d’euros au titre de la réserve générale et de la contribution au surcoût des OPEX. Dans ces conditions, comment peut-on dire qu’on met en œuvre toute la LPM, à l’euro près, avec des crédits « sacralisés », tandis que, dans le même temps, on ampute lesdits crédits ?

L’engagement de nos armées sollicite bien sûr les hommes, j’y reviendrai, mais aussi nos matériels. Les coûts de maintenance explosent, en raison non seulement de leur sollicitation, mais aussi de leur vétusté, qui rend de plus en plus aléatoire leur maintien en condition opérationnelle, à des coûts de plus en plus élevés.

La situation de vétusté de nos matériels rend encore plus prégnante la nécessité d’honorer le programme d’investissement. Or, aujourd’hui, les reports, en partie dus au financement des OPEX, s’élèvent à 3, 4 milliards d’euros et pourraient atteindre, au regard des annulations auxquelles procède le décret d’avance, 3, 8 milliards d’euros. Mes chers collègues, pour mesurer la gravité de la situation, songez que 3, 8 milliards d’euros représentent plus de 12 % du budget des armées et 50 % des crédits du titre V consacré aux investissements.

Enfin, le budget repose sur des économies dont les réalisations ne sont pas certaines.

Les dépenses de personnels hors OPEX sont en recul de 2, 4 %, avec une diminution escomptée de 7 500 effectifs. Je veux noter ici, pour dénoncer une telle situation, que c’est l’armée qui supportera, en 2015, 65 % des diminutions d’effectifs, tandis que le Gouvernement persiste à créer 60 000 postes dans l’éducation nationale, qu’il peine d’ailleurs à pourvoir. Quand l’idéologie l’emporte sur le pragmatisme, on en arrive à l’imposture. Cette exigence de baisse des moyens humains est d’autant plus insupportable qu’elle intervient à un moment où nos armées sont engagées sur plusieurs fronts et où l’actualité ne peut nous laisser espérer que les choses iront en s’améliorant. Le message envoyé n’est pas de nature à rassurer nos troupes, qui sont engagées actuellement sur plusieurs fronts. Et je n’évoque pas les questions de pyramidage ou de transmission des spécialités et des compétences, qui découleront de ces coups de rabot systématiques et précipités !

Concernant les économies escomptées des restructurations, elles se réaliseront d’autant mieux qu’elles seront connues assez tôt. Vous avez annoncé celles qui sont prévues pour 2015, monsieur le ministre. Quand comptez-vous communiquer celles de 2016 et 2017 ?

Mes chers collègues, le budget des armées est une illustration et un concentré de tous les défauts que peut receler un budget : trompe-l’œil, insincérité et fuite en avant.

Le trompe-l’œil, c’est de nous faire croire que la LPM est respectée, avec des inscriptions budgétaires irréalistes, à l’instar des 2, 2 milliards d’euros de vente de fréquences.

L’insincérité, c’est de refuser d’inscrire des dépenses certaines, tels les 650 millions d’euros destinés aux seules OPEX.

La fuite en avant, ce sont les 3, 8 milliards d’euros de reports. Cela consiste à payer nos fournisseurs avec retard. C’est aussi de faire miroiter d’hypothétiques créations de sociétés de projet, qui supposent de reporter l’investissement d’aujourd’hui sur des loyers de demain.

Il n’est pas dans la tradition de notre assemblée de rejeter les crédits de la défense. Cependant, la recherche d’un consensus suppose un minimum d’actes et de gestes qui donnent crédits aux bonnes paroles. Or trop de signaux alarmants sont venus étayer nos craintes ces dernières semaines concernant la volonté du Gouvernement d’apporter des réponses crédibles aux appels lancés par nos armées elles-mêmes, les experts et les parlementaires de toutes tendances.

Premier signal : l’amendement du Gouvernement voté à l’Assemblée nationale voilà quinze jours, qui prive l’armée de 100 millions d’euros de crédits budgétaires, au profit de 100 millions d’euros de recettes exceptionnelles improbables.

Deuxième signal : le refus de communiquer à la représentation nationale le rapport commandé par le Gouvernement sur la faisabilité des sociétés de projet, qui se substitueraient à la vente de fréquences.

Pis encore, la réponse en date du 26 novembre dernier du Président de la République, chef suprême des armées, aux courriers de MM. Gérard Larcher, président du Sénat, et Jean-Pierre Raffarin, président de la commission des affaires étrangères et de la défense, qui l’alertaient sur la situation. Non seulement le Président de la République maintient l’hypothèse de la vente de fréquences, laisse entendre qu’à défaut on travaillera sur les sociétés de projet, mais surtout, conscient de l’irréalisme de ces deux hypothèses, il écrit : « Dans le cas où les efforts des services de l’État ne permettraient pas de générer les ressources nécessaires, le Gouvernement prévoira de les compenser par l’ouverture au 1er janvier 2016 de crédits budgétaires supplémentaires ». De tels propos s’inscrivent en totale contradiction avec les objectifs et le calendrier de la LPM, dont il est le gardien.

Aussi, par respect pour nos armées, la commission des finances a-t-elle souhaité dénoncer ce qu’elle considère être un mensonge d’État. Elle refuse de cautionner une insincérité manifeste. Ce vote de refus n’est pas une attaque portée contre vous, monsieur le ministre, ni contre la communauté militaire. Cette prise de position est un cri d’alarme, un appel solennel au Président de la République, chef suprême des armées, afin qu’il ouvre les yeux sur les réalités financières d’un budget qui n’est pas compatible avec les ambitions qu’il affiche. Le moment est grave. Maintenant, il faut choisir : soit le budget est inchangé et il faut revoir l’engagement et la disponibilité de nos troupes, soit le maintien de nos troupes est confirmé, et il faut revoir le budget.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique de Legge

Je conclus, madame la présidente.

Monsieur le ministre, le vote final du budget interviendra le 9 décembre prochain au Sénat. Nous voulons croire que, d’ici là, nous aurons des réponses crédibles à nos interrogations et que la commission des finances, sur la base d’une copie revue et corrigée, pourra proposer un autre vote à notre assemblée. Dans l’immédiat, c’est un refus.

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Reiner

Vos applaudissements ne sont guère enthousiastes ! Il faut dire que ce qui est excessif est insignifiant !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. André Trillard, rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de André Trillard

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je vais faire écho aux propos tenus par notre collègue Dominique de Legge, rapporteur spécial, en constatant d’entrée de jeu que le compte n’y est pas.

Ne croyez pas que la situation nous satisfasse, bien au contraire. C’est un moment grave que nous vivons. Tous ceux qui ont travaillé sur la mission « Défense » pour 2015 l’ont fait avec la conscience de leurs responsabilités et animés de l’espoir de trouver des financements par le biais de déplacements de crédits à l’intérieur des programmes et d’entendre le Gouvernement nous annoncer une augmentation des crédits ou, au minimum, une sanctuarisation effective du budget.

Malgré la détermination des uns, la communication des autres, les chiffres restent les mêmes, et ils sont alarmants. Ce soir, nous avons dépassé le stade du constat amer pour entrevoir une double réalité : celle d’un budget aux recettes artificielles destinées à couvrir des dépenses, elles, bien réelles et totalement indispensables ; celle d’une loi de programmation militaire à l’agonie. Pourtant, depuis plus d’un an, les parlementaires ont alerté, les industriels ont informé, les responsables de la défense ont exprimé leurs inquiétudes.

Monsieur le ministre, depuis plus d’un an, le Président de la République et vous-même, vous vous êtes engagés à sanctuariser le budget de la défense. Or plus nous avançons dans l’année, plus les amputations et les reports de charges augmentent. Sur l’exercice 2015, ces reports devraient atteindre 3, 8 milliards d’euros.

Prenons-nous la mesure des enjeux ? En effet, cela signifie que les investissements sont menacés. Les emplois de notre industrie de défense et ceux de nos PME et TPE sous-traitantes ne sont pas délocalisables ; il y va donc de la sauvegarde de 400 000 emplois. Nous ne pouvons nous permettre ce luxe ! Cela signifie aussi que nous amorçons un décrochage capacitaire et technologique, alors que la France est l’un des leaders mondiaux de l’industrie de défense.

Plus nous avançons dans l’année, plus les OPEX se multiplient et se prolongent dans le temps, générant des coûts humains, matériels et financiers. De prime abord, la sous-dotation des OPEX pouvait sembler acceptable dans la mesure où un financement interministériel était mis place. Mais l’article 4 de la LPM est un piège pour le ministère de la défense puisque celui-ci contribue à ces dépenses à hauteur de 20 %.

La triste réalité, c’est que nos armées et notre outil de défense sont en surtension. Toujours plus loin, toujours plus longtemps, mais avec moins d’hommes et des équipements vieillissants : tel est l’axiome de la LPM.

Plus de 8 000 hommes ont été déployés dans plusieurs opérations. Rendons-nous compte de ce que cela implique, tant pour les hommes que pour le maintien en condition opérationnelle du matériel. Alors que les déflations de personnels se poursuivent, la défense devrait continuer d’assumer, sans moyen, une politique étrangère aux ambitions croissantes ?

La défense supporte à elle seule plus de 60 % des baisses totales des effectifs de la fonction publique. Quel autre ministère supporterait de telles compressions de personnels alors que ses missions s’accroissent ? Certainement pas celui de l’économie et des finances, toujours aussi prompt à imposer aux autres ce qu’il n’a jamais su s’imposer.

Mes chers collègues, serions-nous devenus schizophrènes ? Comment la France, membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies, peut-elle prétendre assurer une présence et une implication continues sur la scène internationale sans engager les moyens nécessaires ?

La première question que je pose est la suivante : jusqu’à quand et dans quelles conditions le ministère de la défense va-t-il pouvoir tenir ?

Est-il responsable d’affirmer dans le même temps que, pour être crédible, la LPM doit être exécutée à l’euro près alors que, sur 31, 4 milliards d’euros, seuls 29, 1 milliards d’euros seront disponibles à temps ? Certes, des pistes sont à l’étude, comme les abondements du programme d’investissements d’avenir ou encore les créations de sociétés de projet, mais les fondements juridiques de ces sociétés sont incertains et quasi inconnus – Dominique de Legge en a parlé –, alors que nous savons d’ores et déjà qu’elles représenteront une charge financière de plus en plus importante et qu’il est difficile de faire du leasing sur du matériel qui, par définition, est susceptible de disparaître du capital des sociétés qui l’utilisent.

Si l’heure n’était pas si grave, je serais tenté de dire que nous-mêmes, nos responsables militaires et nos soldats attendons les REX, les ressources exceptionnelles, comme d’autres attendaient Godot, et que nous sommes dans la situation de sœur Anne…

Derrière nos comptes et nos chiffres, il y a des hommes. Aussi, ma deuxième question tient-elle à notre responsabilité à tous, en tout premier lieu à celle, constitutionnelle, du chef des armées.

Aujourd’hui, le Président de la République doit assumer ses objectifs et avoir le courage de les imposer à son ministre du budget. S’il lui manque la volonté politique de donner les moyens d’équiper les troupes, il s’agit là d’un manquement grave à ses devoirs, en dépit de tous les efforts que vous déployez, monsieur le ministre, et que je reconnais bien volontiers.

Pour le groupe UMP, l’heure est à la responsabilité et à l’honnêteté envers nos soldats et nos concitoyens. Si la sincérité de ce budget réside dans ces efforts dérisoires de contournement de l’obstacle budgétaire, cela nous semble grave. Nous voulons mettre nos moyens en adéquation avec nos engagements diplomatiques. Ce soir, pour ceux qui risquent leur vie pour les idéaux de leur pays, pour la survie de notre outil de défense, notre groupe, majoritairement, votera contre ces crédits.

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. Jeanny Lorgeoux, rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Jeanny Lorgeoux

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, au sein des crédits du programme 144, je me concentrerai sur les crédits du renseignement – direction générale de la sécurité extérieure et direction de la protection et de la sécurité de la défense –, qui représentent 268 millions d’euros, soit 20 % du programme.

La force de la DGSE est d’être intégrée et de réunir renseignement humain, technique et moyens opérationnels, avec une capacité d’entrave directe que peu de ses homologues ont. C’est ce qui fait sa force, malgré la disproportion des moyens avec les « grands frères » anglo-saxons, puisque nous sommes, en termes de moyens, dans un rapport d’environ un à deux avec nos amis britanniques et d’au moins un à dix avec les services américains.

Ses missions sont connues : renseignement géopolitique, capacités de contre-espionnage – dont l’actualité nous rappelle l’importance –, lutte contre la prolifération. Nous l’avons vu lors de la crise des attaques chimiques du régime syrien en août 2013 : c’est sur renseignement de la DGSE que la France a pu disposer de moyens d’appréciation autonomes et particulièrement étayés, que vous étiez venu vous-même, monsieur le ministre, présenter à notre commission, ce dont nous vous remercions.

Enfin, la lutte contre le terrorisme est la grande priorité du moment, cela va de soi, et sur laquelle la DGSE travaille en lien extrêmement étroit avec la direction générale de la sécurité intérieure – foin de la guerre des polices –, qui est naturellement très concernée par le sujet.

Avec le phénomène des combattants français en Syrie et des filières djihadistes, dont les chiffres sans cesse croissants donnent le vertige, chacun comprend bien désormais que de notre capacité d’analyse et d’anticipation dépend la sécurité de nos concitoyens sur le territoire national. Nos services sont tous autant qu’ils sont pleinement mobilisés pour faire face à cette redoutable et désormais insaisissable menace.

La malédiction bien connue de ce service est qu’on ne parle que de ses échecs. Or, cette année, des sources de presse bien informées, qui n’ont pas été démenties, ont indiqué que c’est sur un renseignement de la DGSE qu’a pu être éliminé par une frappe américaine le chef des Shebab somaliens, Ahmed Abdi Godane, le 1er septembre dernier. Les Shebab étaient responsables de la mort de l’otage Denis Allex, que nous n’oublions pas, membre du service Action, et de deux de ses camarades venus le délivrer dans une opération tragique qui a beaucoup marqué le service.

Je veux rendre ici un hommage très appuyé aux agents de la DGSE, qui prennent des risques pour notre pays, qui savent ne pas devoir attendre de reconnaissance publique, et dont personne ne peut douter de l’accroissement de la charge de travail, les moyens augmentant sans aucun doute moins vite, malgré vos efforts, monsieur le ministre, que les crises.

Une cinquantaine de postes seront créés à la DGSE en 2015, au total 284 d’ici à 2019. La DPSD voit ses effectifs stabilisés. Les services de renseignement croissent et « repyramident », au rebours de tous les autres services du ministère de la défense. Cela mérite d’être salué.

En résumé, les moyens prévus pour la DGSE et la DPSD pour 2015 traduisent fidèlement la priorité prévue par le Livre blanc de 2013 et la loi de programmation militaire pour les services de renseignement. Cet effort, à saluer, doit être remis en perspective : c’est un rattrapage que nous avons collectivement jugé nécessaire et dont la commission des affaires étrangères et de la défense vous donne bien volontiers acte, monsieur le ministre. Continuez dans cette voie !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur plusieurs travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo, rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Pozzo di Borgo

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le programme 178 regroupe les crédits consacrés à la préparation et à l’emploi des forces. Ce programme occupe une place tout à fait particulière dans la mission « Défense ». Comme le disait le chef d’état-major des armées devant notre commission, la préparation opérationnelle est le gage de notre réactivité, de notre efficacité et de la sécurité des personnels.

Peut-être moins « visible » que le programme 146 relatif à l’équipement des forces, il pourrait aisément être négligé, comme il l’a d’ailleurs longtemps été. N’a-t-on pas tendance en France, comme certainement dans d’autres pays, à sacrifier la maintenance et l’entretien des matériels – c’est moins noble – au profit de projets « flambant neufs » plus mobilisateurs ? C’est justement ce qui s’est passé dans les années quatre-vingt-dix et deux mille. La Cour des comptes a ainsi publié, en 2004, un rapport accablant sur la crise de la disponibilité des matériels, qui était tombée à un niveau catastrophique. Le récent rapport de la Cour sur le même sujet est certes moins inquiétant, mais conclut aussi que les résultats obtenus en termes de disponibilité demeurent insuffisants au regard des besoins opérationnels. En effet, l’activité opérationnelle reste globalement inférieure aux objectifs et s’inscrit 15 % en deçà des normes reconnues par l’OTAN. Naturellement, les chiffres globaux peuvent regrouper des éléments disparates, mais ils donnent tout de même une orientation générale. En sens inverse, ils ne doivent pas masquer des insuffisances notables dans certains secteurs qui peuvent se révéler extrêmement importants en opérations extérieures. Il en est ainsi des hélicoptères.

Ce constat de l’insuffisance persistante de l’activité opérationnelle est unanimement partagé. C’est pour cette raison que la loi de programmation militaire a très légitimement fait de ce sujet un « objectif prioritaire ». En conséquence, l’entretien programmé des matériels doit progresser en moyenne de 4, 3 % par an en valeur sur la période 2014-2019, ce qui est très positif.

La commission salue le respect de cet engagement dans le projet de loi de finances pour 2015, qui prévoit que l’entretien programmé du matériel progressera de 4, 4 % en crédits de paiement. Qui plus est, les autorisations d’engagement connaissent une augmentation spectaculaire : elles progressent de 35 %, ce qui est un signal tout à fait positif pour les années à venir.

Pour autant, nous serons naturellement attentifs à ce que la gestion budgétaire concrétise cet effort. Les crédits de paiement devront être bien inscrits année après année, et les gels de crédits ne devront pas l’amputer à un niveau qui, en pratique, le remettrait en cause. En outre, la pratique subie des reports de charge doit être résorbée, car elle ne peut que déstabiliser la logistique, le calendrier, mais aussi les entreprises contractantes du ministère. Je sais que vous êtes attentif à ces questions dans vos discussions avec le ministère du budget. C’est là l’un de vos plus importants combats.

Pour conclure, je dirai quelques mots sur le service de santé des armées.

Prenant ses racines au XVIIe siècle, il fait pleinement partie de l’histoire de nos armées. À la croisée des mondes de la défense et de la santé, il a été profondément affecté par les bouleversements que ces derniers ont tous deux connus. Bien souvent, auparavant ces univers s’ignoraient et vivaient côte à côte.

La France est l’un des rares pays au monde, pour ne pas dire le seul avec les États-Unis, à encore disposer d’une chaîne complète de santé, allant de la prise en charge des blessés sur un théâtre d’opérations au rapatriement dans un hôpital militaire. Ce modèle est unique et doit être préservé, car il permet à notre pays d’entrer en premier, et rapidement, sur un théâtre d’opérations et rassure les soldats.

Le service de santé a adopté un nouveau projet pour mieux répondre aux besoins opérationnels des armées. Il va ainsi se moderniser pour renforcer la médecine de premier recours, consolider les hôpitaux militaires et se rapprocher des services civils. Ces orientations nécessaires doivent être mises en œuvre en concertation étroite avec les personnels et les acteurs locaux, laquelle est indispensable à la réussite de la réforme et à la préservation des compétences techniques au sein du service de santé des armées.

Dans ce dernier coexistent deux cultures : celle des armées qui n’est pas particulièrement tournée vers la négociation, et celle du service de santé qui est encore plus confidentielle. Vous le savez très bien, monsieur le ministre, eu égard au plan que vous menez, d’ici à six ou sept ans, sur les neuf hôpitaux existants, seuls quatre seront conservés, même si ceux-ci seront associés aux agences régionales de santé. Cependant, à la longue – il faut avoir le courage de le dire –, ils sont condamnés à la fermeture, sauf indication contraire de votre part. Quoi qu’il en soit, il est nécessaire que le personnel soit impliqué.

Le temps qui m’était imparti étant malheureusement écoulé, je n’en dirai pas plus.

Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP, ainsi que sur quelques travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à Mme Michelle Demessine, rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Michelle Demessine

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme vient de l’indiquer Yves Pozzo di Borgo, les crédits du programme 178 progressent en 2015, fait suffisamment rare pour être souligné en cette période de disette budgétaire !

Hors dépenses de personnel, qui sont transférées au programme 212, les crédits de paiement augmentent globalement de 2 % pour atteindre 7, 3 milliards d’euros et les autorisations d’engagement progressent très sensiblement, de 18 %, s’élevant à 8, 9 milliards d’euros. L’entretien programmé du matériel représente à lui seul 44 % des crédits du programme ; il est en hausse de 4, 4 %, ce qui est à la fois prometteur et conforme aux engagements de la loi de programmation militaire.

La priorité ainsi affirmée en faveur de l’entretien ne produira cependant ses fruits que lentement : le retard accumulé au cours des précédentes LPM doit être rattrapé et il existe toujours un décalage entre l’engagement d’un programme et la disponibilité effective des matériels. Je partage donc la remarque de M. le rapporteur sur la gestion budgétaire, qui doit correspondre réellement, et sur la durée, aux engagements.

En tout état de cause, les indicateurs d’activité devraient être simplement stabilisés à court terme. Sur ce point également, monsieur le ministre, comme pour ce qui concerne les REX, ce projet de budget est fragile, même s’il est nettement encourageant.

Il est d’autant plus fragile que les opérations extérieures sont nombreuses et intenses. Or ces OPEX ont une incidence parfois sous-estimée sur le maintien en condition opérationnelle et sur l’entraînement. Au-delà des dommages causés par les combats sur les matériels, l’usure de ces derniers est bien supérieure en OPEX, notamment lorsqu’ils sont déployés dans des milieux abrasifs, comme dans le Sahel. En outre, les OPEX, naturellement prioritaires, perturbent de facto les processus logistiques et les calendriers de travaux. Cela peut entraîner à la fois une augmentation des coûts et un décalage encore plus grand de l’entretien si les ateliers industriels ne sont plus disponibles le moment venu.

Qui plus est, et je souhaite insister sur ce point, les conséquences indirectes des OPEX, eu égard à la surutilisation et à l’usure des matériels et aux nombreuses perturbations qu’elles occasionnent, peut fragiliser les missions intérieures des armées, notamment la protection du territoire. Nous devons être très vigilants.

Aussi, même s’il est par nature difficile d’anticiper les OPEX, pouvez-vous, monsieur le ministre, nous préciser si le calcul de la LPM et l’engagement qu’elle comporte d’accroître l’entretien programmé des matériels de 4, 3 % par an tiennent bien compte de leurs effets sur les matériels ?

La disponibilité des matériels n’est pas une fin en soi ; elle est la condition d’une activité opérationnelle à même de répondre aux objectifs fixés par le Président de la République, chef des armées, et par le Parlement dans le cadre des différentes lois de programmation. Aujourd’hui, cette activité opérationnelle, on l’a dit, se situe encore en deçà des objectifs. Malgré ces indicateurs, nos armées nous ont prouvé qu’elles pouvaient être envoyées sur des théâtres d’opérations variés, connaître des conditions difficiles et néanmoins remplir pleinement leur mission. Jugée à l’aune des OPEX, la qualité de la préparation opérationnelle est donc tout à fait satisfaisante.

Par ailleurs, la disponibilité insuffisante des matériels a progressivement conduit à la mise en œuvre du principe de différenciation qui a été longuement débattu lors de l’élaboration du dernier Livre blanc sur la défense. S’il peut paraître légitime de spécialiser les compétences dans certains domaines, nous devons aussi être attentifs à ce que le nouveau format des armées et la densification des OPEX n’accroissent pas de manière démesurée le fossé entre les unités projetées et les autres. À moyen et long terme, il ne serait en effet pas pertinent de relâcher l’effort de préparation des troupes qui ne sont pas projetées ou qui le sont moins fréquemment.

Au regard du temps qui m’est imparti, je ne pourrai pas évoquer les autres lignes budgétaires du programme 178 ; elles regroupent pourtant de nombreux types de crédits qui contribuent également à l’activité opérationnelle. Je conclurai donc sur la nécessaire amélioration des conditions de vie quotidienne des armées.

Vous avez-vous-même constaté, monsieur le ministre, une détérioration de ces conditions de vie, et plusieurs membres de la commission des affaires étrangères ont été frappés par cette situation lors d’un déplacement effectué en République centrafricaine au mois d’avril dernier. En 2013, vous avez mis en place un plan d’urgence de 30 millions d’euros et fait réaliser l’année suivante une étude complète sur les défauts majeurs d’infrastructures : 700 points noirs ont alors été identifiés, pour un coût total de travaux de 560 millions d’euros.

Où en sont ces travaux, monsieur le ministre ? Selon quel calendrier seront-ils programmés ? Je vous remercie par avance de votre réponse. §

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. Robert del Picchia, rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert del Picchia

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, mon propos portera sur le titre 2 du programme 212 qui regroupe pour la première fois l’ensemble des crédits de personnel du ministère de la défense. Pour 2015, cette nouvelle architecture budgétaire s’accompagne d’avancées sur lesquelles je souhaite mettre l’accent. Constatez, monsieur le ministre, que je juge positifs certains points…

Debut de section - Permalien
Jean-Yves Le Drian, ministre de la défense

Mais il y a bien des choses positives !

Debut de section - PermalienPhoto de Robert del Picchia

Je citerai, tout d’abord, un nouveau pilotage de la masse salariale qui sera mis en place à compter du 1er janvier prochain.

Ainsi, les crédits de personnel seront confiés à treize responsables de budgets opérationnels de programme, et non plus aux employeurs que sont les chefs d’état-major et les directions du ministère. Ces nouveaux gestionnaires géreront à la fois la masse salariale destinée à leur personnel et tous les leviers leur permettant d’en contrôler l’évolution – recrutements, avancements, incitations au départ et autres. Ce pilotage rénové de la masse salariale, qui est assorti d’un certain nombre de mesures de contrôle et d’encadrement des processus, me paraît être le gage d’une gestion maîtrisée des effectifs, dont nous ne pouvons que nous féliciter. Il faudra cependant veiller à ce que les employeurs, désormais dépourvus d’effectifs propres, se voient bien attribuer les personnels dont ils ont besoin.

Deuxième point positif : les déflations d’effectifs seront au rendez-vous en 2015. Conformément à la loi de programmation militaire, 7 500 postes équivalents temps plein seront supprimés l’an prochain. Si les plus fortes baisses d’effectifs pèseront sur l’armée de terre, la plupart des corps du ministère de la défense seront néanmoins affectés. Quels que soient l’armée ou le service concernés, nous mesurons les difficultés et l’effort que ces déflations représentent, après celles qui ont déjà eu lieu ces dernières années. Comme l’a souligné le chef d’état-major des armées lors de son audition devant la commission des affaires étrangères, les effectifs de la défense auront diminué d’un quart entre 2009 et 2019. Le ministère de la défense enregistre à lui seul 66 % des suppressions d’emplois de l’État pour 2015 ! L’effort qu’il fournit est donc considérable.

Cette manœuvre de déflation comporte, je le rappelle, deux volets sensibles. Elle intègre, d’une part, un objectif de rééquilibrage en faveur des personnels civils qui conduit à faire porter la déflation davantage sur les personnels militaires dans une proportion plus forte – 85 % – que ne le prévoyait initialement la LPM. Elle répond, d’autre part, à un objectif de dépyramidage, qui implique la suppression de 1 000 postes d’officiers en 2015, cible particulièrement difficile à atteindre selon les propos qui ont été tenus au cours des auditions auxquelles la commission a procédé.

Troisième point, les déflations d’effectifs auront, bien sûr, une traduction budgétaire mécanique en 2015. Ainsi, les crédits de personnel diminueront de 374 millions d’euros, dont 270 millions d’euros au titre des dépenses de rémunérations et 106 millions d’euros au titre des pensions.

Par ailleurs, un point appelle à la vigilance : le risque de surcoût non budgété lié aux dysfonctionnements du système Louvois.

En 2014, ce dépassement a rendu nécessaire une rallonge de 160 millions d’euros des crédits du titre 2 dans le cadre du dernier collectif budgétaire. Comment pourrait-il en être autrement en 2015, alors que le problème n’est toujours pas résolu ? Le logiciel Louvois est une catastrophe, et ses effets dévastateurs n’ont malheureusement pas fini de se faire sentir.

Enfin, nous devons veiller au moral des personnels, notamment des personnels militaires, lequel subit année après année une lente érosion.

Quelle orientation retient le Gouvernement sur cette question sensible ? Quand auront lieu les prochaines annonces de modification des unités ? Nous espérons, en tout cas, qu’elles donneront non seulement aux personnels, mais aussi aux armées et aux territoires qui les accueillent la visibilité dont ils ont besoin. Les débats qui se sont déroulés en commission ont clairement montré, monsieur le ministre, que vous êtes bien au courant de ce sujet.

Enfin, mes chers collègues, je veux rendre en cet instant un hommage particulier à nos soldats, qui ont choisi de servir la France. En tant que représentant dans cette assemblée des Français de l’étranger, je voudrais en leur nom remercier aussi nos armées de leur engagement à assurer directement ou indirectement la sécurité de ces compatriotes, en particulier en Afrique, au Liban et dans tous les lieux sensibles. §

Debut de section - PermalienPhoto de Gilbert Roger

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, Robert del Picchia et moi-même nous sommes partagé le programme 212 et mon intervention portera sur les crédits hors titre 2.

Le programme « Soutien à la politique de la défense » regroupe, hors titre 2, les crédits affectés à des missions variées, qui vont de la politique immobilière à la gestion des musées, de la reconversion des personnels à la gestion du partenariat public-privé relatif au projet de Balard, de l’aide sociale au pilotage des systèmes d’information. Un inventaire à la Prévert, la poésie en moins. §

J’ai choisi de focaliser votre attention sur quelques points clefs pour l’exécution de la LPM et le bon fonctionnement de nos armées, sous forme de trois observations.

Tout d’abord, les crédits consacrés aux infrastructures immobilières progressent tant en autorisations de programme qu’en crédits de paiement ; les premières sont de 1, 81 milliard d’euros, en hausse de 10 % par rapport à 2014, les seconds atteignent 1, 18 milliard d’euros, marquant une hausse de 19 %. N’oublions pas les 230 millions d’euros de ressources exceptionnelles issues des cessions immobilières, les fameuses REX immobilières, qui sont bien au rendez-vous en 2015.

Les grands programmes d’infrastructure – Barracuda concernant les sous-marins nucléaires d’attaque, MRTT, Scorpion et Descartes – destinés à l’accueil des nouveaux équipements ont été lancés. De même, la modernisation des ports de Brest et de Toulon se poursuit.

Il est également réjouissant de voir enfin progresser les crédits consacrés à l’adaptation et à la maintenance des infrastructures courantes, celles qui sont liées aux conditions de vie et de travail des personnels et qui sont indispensables à la préparation et à l’entraînement des forces.

C’est une excellente nouvelle, car les ressources contraintes et le niveau élevé des besoins capacitaires qui doivent être satisfaits en priorité n’ont jamais permis, jusqu’à maintenant, d’y consacrer des moyens suffisants.

En outre, ces crédits ont depuis longtemps été des variables d’ajustement lors de l’exécution des lois de finances. Il en résulte une forte dégradation des locaux dans plus de 700 emprises dont la réparation a été estimée à environ 560 millions d’euros. Cette situation, vous le savez, monsieur le ministre, affecte le moral des personnels, militaires et civils.

Sur votre initiative, un plan d’urgence a été mis en place dont on trouve la traduction dans le projet de loi de finances. Ces efforts budgétaires sont considérables, mais le niveau atteint est tout juste suffisant eu égard au retard accumulé. On le sait, les dépenses d’infrastructure vont peser dans l’exécution de la loi de programmation militaire.

Une solution serait de procéder à des fermetures pures et simples et à une densification des emprises, mais je crois comprendre que cette perspective soulève des réticences, notamment dans l’armée de terre attachée à ses implantations territoriales qui constituent autant de points de contact pour sa politique de recrutement. Il faudra donc trouver le juste équilibre.

Je comprends qu’il faille se donner le temps de la réflexion, mais – cela a été dit – d’ici au début de l’année 2015, monsieur le ministre, il vous faudra annoncer vos décisions de restructurations jusqu’à la fin de la LPM : c’est indispensable pour les militaires et leur famille qui vivent dans l’incertitude, pour les chefs d’état-major qui doivent mettre en œuvre ces décisions, et pour les collectivités territoriales. Tous ont besoin de visibilité. Je ne doute pas que vous répondrez à cette attente, même si quelques décisions sont toujours douloureuses.

S’agissant des collectivités territoriales, il faudra naturellement que le dispositif d’accompagnement soit performant. Nous avons observé au cours de la précédente loi de programmation militaire des délais excessifs entre les restructurations et le décaissement des aides. Il faudra donc agir au plus vite.

Ma deuxième observation concerne le regroupement de l’ensemble des états-majors sur le site de Balard qui sera effectif en 2015. Pour des programmes d’une telle ampleur, les surcoûts sont fréquents ; en l’espèce, le dépassement atteindra 60 millions d’euros, mais celui-ci serait sans conséquence sur le montant de la redevance annuelle du partenariat public-privé. Pouvez-vous nous apporter quelques précisions, monsieur le ministre ?

Enfin, troisième et dernière observation, en 2013 et 2014, la commission des affaires étrangères avait mis en évidence des dysfonctionnements récurrents en matière de gestion des systèmes d’information d’administration et de gestion. Pour ce qui concerne les projets structurants, vous avez engagé une procédure plus rigoureuse de suivi. Nous souhaiterions en connaître les effets.

Je ne parlerai pas du système Louvois, faute de temps, …

Debut de section - PermalienPhoto de Gilbert Roger

Pour conclure, je vous invite, mes chers collègues, à voter les crédits de ce programme 212, hors titre 2. §

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. Jacques Gautier, rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Gautier

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, 2015 constituera la deuxième année de la mise en œuvre de la loi de programmation militaire et la première annuité du budget triennal. Ce sera surtout, selon la formule du chef d’état-major des armées, « l’année de vérité » pour la LPM. De sa réussite, sur le plan budgétaire, dépendent la crédibilité de cette loi et la réalisation des objectifs capacitaires et industriels majeurs qui lui sont attachés.

Le programme 146 de la mission « Défense » comprend d’importantes livraisons et commandes structurantes pour le format d’armée de la loi de programmation militaire.

Je citerai brièvement, pour les forces conventionnelles, les livraisons suivantes : onze Rafale, un nouveau centre de contrôle du système de commandement et de conduite des opérations aérospatiales, le SCCOA, quatre A 400M, des hélicoptères Tigre HAD, NH90, Cougar, la troisième frégate multi-missions, les premiers missiles de croisière navals, des bombes et des kits air-sol pour l’armement air-sol modulaire, des missiles Aster 15 et Aster 30, ou encore les vingt-cinq derniers véhicules blindés de combat d'infanterie, ou VBCI.

Je citerai aussi, pour les commandes, la rénovation de onze ATL2, les bâtiments de soutien et d’assistance hauturiers, le lancement de la rénovation à mi-vie des Mirage 2000D, un système de drone MALE supplémentaire indispensable sur les théâtres d’opérations, notamment au Sahel, huit avions MRTT Phénix, selon le nom de baptême que vous avez choisi, monsieur le ministre, le lancement du programme Scorpion, le programme d’avenir de l’armée de terre, des systèmes de drones tactiques et des véhicules terrestres pour les forces spéciales, dont je tiens à rappeler l’engagement exceptionnel et l’efficacité, tant au Sahel qu’au Moyen-Orient et dont le matériel roulant est usé jusqu’à la corde.

Daniel Reiner complètera ces éléments et Xavier Pintat évoquera la dissuasion et les satellites.

Toutefois, toutes ces livraisons et ces commandes pourraient ne pas voir le jour !

En effet, la difficulté, pour les rapporteurs pour avis, a été de savoir de quel budget nous parlions. Est-ce du budget d’affichage, l’officiel, le théorique, qui affiche 31, 4 milliards d’euros en crédits de paiement, dont 9, 9 milliards d’euros pour le programme 146, dont je rappelle qu’il est le premier budget d’investissement de l’État ? De manière « faciale », le budget est conforme à la trajectoire de la LPM.

Néanmoins, ces chiffres ne sont atteints, cela a été dit, qu’avec des ressources exceptionnelles à hauteur de 2, 3 milliards d’euros, dont 2, 1 milliards d’euros affectés au programme 146, soit 90 % des REX. Or c’est avec ces dernières que les difficultés commencent, car elles proviennent essentiellement de la cession de fréquences hertziennes, cession dont nous savons, depuis le mois de juillet dernier, qu’elle ne sera pas au rendez-vous en 2015, ni d’ailleurs en 2016.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Gautier

M. Jacques Gautier, rapporteur pour avis. Cependant, il continue, puisque, à l’Assemblée nationale, au travers de deux amendements du Gouvernement, les crédits de la mission « Défense » ont encore été amputés de 100 millions d’euros, au titre de la contribution au financement des mesures nouvelles votées par les députés, somme qui a bien sûr été compensée par 100 millions d’euros de REX qui n’existent pas ! Monsieur le ministre, nous avons par conséquent déposé un amendement tendant à réintégrer ces crédits.

Applaudissements

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Gautier

Les recettes de la mission « Défense » du projet de loi de finances ne sont donc en grande partie que virtuelles ! C’est la raison pour laquelle vous recherchez depuis plusieurs mois des solutions innovantes pour sortir de l’impasse. Pour ce faire, vous vous appuyez sur l’article 3 de la loi de programmation militaire aux termes duquel, grâce au Sénat, si les REX ne sont pas au rendez-vous, elles seront compensées par des crédits budgétaires ou par des cessions d’actifs.

L’abondement du programme d’investissements d’avenir, le PIA, son élargissement à des équipements et l’éligibilité de la direction générale de l’armement – la DGA – nous ont semblé être de bonnes pistes. Néanmoins, pour des raisons qui nous échappent, l’exécutif y a renoncé !

Depuis, vos services travaillent sur la création de sociétés de projet dont le montage est complexe et qui suscitent de nombreuses interrogations.

À quelle échéance le dispositif sera-t-il opérationnel si l’on s’oriente dans cette direction ? Quels équipements seraient concernés et qu’en serait-il de leur disponibilité ? Quel serait le coût global, compte tenu des coûts induits ?

Monsieur le ministre, il doit exister d’autres pistes plus simples.

En conclusion, alors que l’année 2015 est essentielle pour nos armées, nos équipements, nos industriels, les recettes ne sont pas garanties. À ce propos, la réponse du Président de la République à M. le président de la commission des affaires étrangères comporte trop d’hypothèses pour nous convaincre totalement.

En ma qualité de rapporteur pour avis, je ne peux voter contre le programme 146, qui devrait permettre de doter nos forces armées des équipements indispensables en 2015. Toutefois, monsieur le ministre, j’ai besoin de réponses claires et d’un engagement précis en ce qui concerne les recettes.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC . – M. Jeanny Lorgeoux applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Xavier Pintat

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je parlerai d’abord de notre force de dissuasion nucléaire, cette dissuasion qui fait aujourd’hui la crédibilité de la France sur la scène internationale et légitime son siège permanent au Conseil de sécurité des Nations unies.

Au total, cette action stratégique bénéficiera, l’an prochain, de près de 3, 8 milliards d’euros en autorisations d’engagement et de 4 milliards d’euros en crédits de paiement.

Lors de l’élaboration de la loi de programmation militaire pour les années 2014 à 2019, nous avions marqué notre satisfaction concernant la décision du Président de la République de maintenir les deux composantes – aéroportée et océanique – de la dissuasion et de les moderniser le moment venu, grâce au programme de simulation, avec notamment la mise en service récente du laser Mégajoule.

Néanmoins, nous avons aussi pris la mesure des conséquences de cette décision : sans les ressources exceptionnelles attendues, il risque de se produire un effet d’éviction évident sur les autres programmes, en particulier à l’égard de la partie conventionnelle de l’équipement des forces et du soutien.

C’est l’un des enjeux majeurs qui apparaît aujourd’hui.

Monsieur le ministre, je partage l’inquiétude de mon collègue Jacques Gautier sur les solutions dites « innovantes », annoncées par le Gouvernement pour pallier les incertitudes du calendrier des REX. Sans les ressources exceptionnelles prévues, on peut considérer que le respect de la loi de programmation militaire ne sera pas possible.

Nous avons besoin, comme les armées, d’être rassurés sur ce point, qui conditionne la crédibilité de votre budget, et donc de la parole du Président de la République.

Je dirai quelques mots, à présent, de l’espace militaire.

Les crédits en ce domaine sont maintenus à un niveau jugé acceptable ; ils connaissent d’ailleurs, d’une année sur l’autre, de fortes variations liées en grande partie au lancement des programmes.

Pour l’année prochaine, 152 millions d’euros sont prévus ; les trois quarts de ce budget bénéficieront au programme MUSIS, afin de réaliser le futur système européen d’observation spatiale militaire.

Je rappelle les priorités en la matière : d’une part, les télécommunications, avec le programme COMSAT NG ; d’autre part, le renseignement, avec le programme MUSIS pour l’imagerie optique et radar, l’écoute électromagnétique, notamment avec le programme CERES, et l’alerte avancée pour la défense antimissile, même si le calendrier peut sembler lointain après la loi de programmation militaire.

De manière générale, le secteur spatial est soutenu depuis plus de cinquante ans, et à raison, car il est considéré d’abord comme un enjeu de souveraineté, puis comme un enjeu scientifique, technologique et industriel de premier plan. En effet, le développement des technologies spatiales constitue un véritable laboratoire d’innovations pour la propulsion, la cryogénie, les moteurs, la connectique, les systèmes intelligents embarqués, etc.

La période actuelle devrait d’ailleurs inciter aux coopérations internationales. Monsieur le ministre, enregistre-t-on dans ce domaine des avancées ?

Je terminerai en parlant des drones, tout d’abord des drones MALE.

L’acquisition d’un premier système Reaper a été lancée à l’été 2013 ; la loi de programmation militaire 2014–2019 prévoit, sur la durée de la programmation, la livraison de quatre systèmes complets, comprenant chacun trois vecteurs.

Les deux premiers vecteurs du premier système ont été livrés et sont actuellement utilisés au Mali, comme l’a indiqué Jacques Gautier, où ils remplissent un rôle majeur pour la capacité opérationnelle de nos forces.

La livraison du troisième vecteur est attendue pour la fin de l’année en cours, et celle d’un deuxième système complet pour l’année prochaine.

Confirmez-vous cet échéancier, monsieur le ministre ?

Les études se poursuivent pour les drones aériens et de combat futurs, à l’horizon 2020 et au-delà ; leur conception devrait être le produit d’une coopération européenne, notamment avec le Royaume-Uni, comme cela a été annoncé pour les drones de combat du futur.

Ce chantier progresse-t-il comme nous le souhaitons, monsieur le ministre ?

Je serais tenté de vous poser la même question à propos du programme visant à doter l’armée de terre d’un système de drones tactiques, ou SDT, pérenne, dont la loi de programmation militaire prévoit la livraison de quatorze vecteurs.

La procédure d’appels d’offres lancée par la direction générale de l’armement, la DGA, répond au vœu que nous avions exprimé, tant au sein de la commission des affaires étrangères qu’en séance publique, en vue de préserver les intérêts financiers de l’État et de fournir à l’armée de terre le matériel répondant au mieux à ses besoins opérationnels.

Pouvez-vous nous confirmer, monsieur le ministre, que le lancement de la réalisation du SDT est bien prévu pour la fin de l’année 2015 ? Je vous remercie de vos réponses, qui seront, je l’espère, de nature à nous rassurer.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Reiner

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, les crédits du programme 146, « Équipement des forces », sont à hauteur de 80 % des crédits d’investissement. Ces investissements représentent, dans le présent projet de loi de finances, 6, 3 milliards d’euros sur les 15 à 16 milliards d’euros prévus pour les équipements en général. À eux seuls, ils concentrent plus de 60 % des investissements de l’État prévus l’an prochain.

En d’autres termes, ce programme, c’est essentiellement de l’argent pour nos industries et pour nos bureaux d’études. Il participe d’un effort de long terme destiné à remettre à niveau le matériel de nos armées, travail poursuivi via la loi de programmation militaire pour les années 2014 à 2019.

Dès lors, la question est la suivante : la LPM est-elle respectée ?

Mes collègues rapporteurs répondent : « De manière faciale, oui. » Pour ma part, je suis moins pessimiste qu’eux.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Reiner

Au reste, ils sont d’habitude plus optimistes que cela...

Oui, la LPM est respectée, puisque les 31, 4 milliards d’euros prévus par ce texte pour l’année prochaine au titre du budget de la défense sont bien inscrits dans le projet de loi de finances.

Certes, cette prévision repose sur des recettes exceptionnelles, les fameuses REX. La LPM évalue celles-ci, sur l’ensemble de la période considérée, à 6, 1 milliards d’euros.

On peut regretter que ces ressources extrabudgétaires tendent à augmenter à mesure que baissent les crédits budgétaires. Toutefois, grâce à ces REX, les crédits de la défense sont épargnés par les coupes budgétaires. Le niveau de financement prévu par la LPM est donc maintenu, et c’est déjà beaucoup dans le contexte actuel.

Dans cette situation financière tendue est apparu, entre autres solutions, le scénario des sociétés de projet. Je dois admettre qu’il n’est pas franchement enthousiasmant.

Monsieur le ministre, c’est, je pense, un exercice difficile pour le ministère de la défense, car ce dernier ne bénéficie pas spontanément de l’appui des services de Bercy.

Existait-il d’autres solutions ? La reconduction du PIA, comme l’année dernière, aurait pu en être une. Peut-être d’autres modes de financement pourraient-ils être envisagés par le biais de prêts, étant donné que les taux en vigueur sont particulièrement bas à l’heure actuelle.

Ce qui est certain, c’est que, si les crédits venaient à manquer, l’équipement des armées jouerait immanquablement le rôle de variable d’ajustement, dans la mesure où les autres dépenses sont, pour l’essentiel, obligatoires.

Comme vous, nous voulons éviter cette situation, qui reviendrait à quitter la trajectoire fixée au titre de la LPM. Mais le Président de la République a réitéré son engagement de sanctuariser les ressources prévues par cette loi de programmation. Il a écrit au président de la commission des affaires étrangères pour l’en assurer, ainsi qu’au président du Sénat. Vous me permettrez de faire crédit, à titre personnel, aux assurances ainsi données.

Au demeurant, je rappelle que la LPM comporte une clause de sauvegarde, introduite par le Sénat sur l’initiative de la commission dont je suis membre : si les recettes exceptionnelles prévues faisaient défaut, elles devraient être intégralement compensées. Le Gouvernement est aujourd’hui disposé à recourir, à ce titre, à des cessions de participations financières de l’État. Nous lui en donnons acte.

Parallèlement, il faudra contenir les reports de charges du budget de la défense, de 2014 vers 2015 et de 2015 vers 2016. Le report attendu cette année est stabilisé au niveau de l’année dernière. J’espère que vous pourrez assurer, au titre de la régulation budgétaire en préparation pour cette année, la levée de la réserve de précaution et le maintien du financement interministériel selon les principes intangibles. Cette opération devrait, cela va sans dire, être assortie d’une contribution du ministère de la défense, conformément aux règles en vigueur et dans la limite de la répartition.

Le coût total des OPEX sera de l’ordre de 1, 1 milliard d’euros.

Maîtriser ce report de charges permettra de mener à bien les commandes d’équipements programmées, que je ne rappellerai pas : Jacques Gautier s’en est chargé. Ces équipements sont attendus avec une vive impatience. On en parle depuis si longtemps qu’il faut bien que quelqu’un se décide un jour à lancer les commandes ! Je songe en particulier aux avions ravitailleurs MRTT, à la rénovation des Mirage 2000D, sur lesquels j’insisterai plus avant dans la discussion générale, à la livraison des avions de transport, de la troisième frégate, et à la dernière série de onze avions Rafale – seules quatre livraisons sont prévues en 2016.

Monsieur le ministre, pourriez-vous nous donner votre sentiment quant à l’exportation du Rafale ? Quelques articles viennent de paraître à ce sujet, et l’on a entendu que ce dossier avançait mieux qu’auparavant. Étant donné votre récent voyage officiel en Inde, peut-être pourrez-vous nous en dire un peu plus.

En conclusion, mon regard de rapporteur pour avis sur le programme « Équipement des forces » est globalement positif. Vous l’avez compris, la commission des affaires étrangères souhaite obtenir quelques clarifications au sujet des REX. J’espère que vous pourrez nous les apporter. Après tout, ces ressources exceptionnelles étaient déjà prévues au titre du budget pour 2014, et nous les avons obtenues intégralement. Dès lors, pourquoi ne pas être optimiste ? §

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, c’est pour moi un grand honneur que de présider la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat de la République.

J’hérite, dans cette fonction, de l’attitude particulièrement responsable suivie de longue date par la commission tout entière.

Monsieur le ministre, vous aurez remarqué que chacun des rapports remis par notre commission compte deux rapporteurs, l’un issu de la majorité, l’autre représentant l’opposition. De tels procédés ne sont pas si courants.

La commission tient réellement à être, dans la République, un lieu où l’on peut parler sobrement, sans jamais prendre en otage notre défense nationale, sans jamais obéir à d’autres intérêts qu’à ceux de la France. C’est ce que mes prédécesseurs ont fait, et c’est cette tradition que je me dois de suivre aujourd’hui avec l’ensemble de mes collègues.

Les divers rapporteurs pour avis ont pu présenter, les uns la bouteille à moitié vide, les autres la bouteille à moitié pleine. Cela étant, nous avons tous ce sentiment : notre responsabilité est mise en jeu par le travail mené au titre du Livre blanc, puis au titre de la LPM. Nous sommes tous engagés pour le respect de cette loi et pour ce chiffre global de 31, 4 milliards d’euros. Il s’agit, pour nous, de l’objectif essentiel à respecter. Il procède d’un accord unanime et traduit l’engagement des autorités de la République vis-à-vis de nos forces armées, auxquelles nous demandons aujourd’hui le meilleur.

Monsieur le ministre, dans ce contexte, vous comprendrez que ces 31, 4 milliards d’euros soient particulièrement importants pour nous, et que nous soyons très attentifs à leurs réalités financière et budgétaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

Voilà pourquoi, avec le président du Sénat, Gérard Larcher, nous avons voulu que le chef des armées puisse nous exposer sa position.

Je vous propose une brève explication du texte de la réponse écrite adressée par le Président de la République. Nous lui avons demandé de nous fournir diverses clarifications avant la séance d’aujourd’hui, et nous avons apprécié de les recevoir en temps et en heure.

Dans cette lettre, le Président de la République réaffirme qu’il veille personnellement à ce que soient appliquées les décisions arrêtées pour nos armées au terme d’« une concertation approfondie, à laquelle les commissions parlementaires, et celles du Sénat en particulier, ont contribué de manière éminente ».

Sauf erreur de ma part, le chef de l’État affirme pour la première fois par écrit cet engagement de 31, 4 milliards d’euros.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

Il s’agit là d’un acquis important. C’est une chose de tenir les engagements de la loi de programmation militaire ; c’en est une autre de s’engager sur un montant précis de 31, 4 milliards d’euros.

Le Président de la République poursuit en ces termes : « C’est pourquoi j’ai demandé au Gouvernement de tout mettre en œuvre pour dégager les ressources exceptionnelles qui permettront, en complément des crédits budgétaires alloués, d’atteindre les objectifs de la loi de programmation militaire. » La situation est claire : les crédits budgétaires ne sont pas suffisants, il faut donc les compléter par des ressources exceptionnelles.

Ici naissent nos inquiétudes, que les rapporteurs pour avis successifs ont, d’une manière ou d’une autre, tous exprimées, et qui appellent un certain nombre de clarifications.

Le Président de la République écrit ensuite : « Tout est fait dès à présent dans le respect des intérêts de l’État pour assurer dans les meilleurs délais la vente des fréquences de la bande 700 mégahertz, afin de dégager en 2015 les ressources exceptionnelles attribuées au ministère de la défense dans le projet de loi de finances initiale. »

Monsieur le ministre, vous m’avez signalé qu’il était important d’entendre mentionner, dans cet hémicycle, que ces recettes étaient spécifiquement destinées au ministère de la défense. Nous prenons cette précision comme un acquis et comme un des points positifs de la lettre signée par le chef de l’État. D’autres ministères ont pu nourrir des visées sur ces recettes, mais ces dernières sont désormais fléchées. §Reste à déterminer la date. À cet égard, l’échéance de 2015 est bien entendu très peu crédible. Ce constat fait aujourd’hui consensus, et l’on vise 2016 voire, plus sûrement, 2017.

Debut de section - Permalien
Jean-Yves Le Drian, ministre

Plutôt 2016…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

Ainsi, pour le budget qui nous occupe aujourd’hui, mieux vaut en toute vraisemblance ne pas compter sur ces recettes exceptionnelles.

Le paragraphe suivant laisse à penser que les recettes tirées de la vente des fréquences pourraient se révéler insuffisantes. Le Président de la République écrit en effet : « J’ai par ailleurs autorisé le ministre de la défense à travailler avec le ministre de l’économie sur une solution de sociétés de projet ». Il décrit ensuite le système envisagé.

La commission a longuement débattu de ce point. À titre personnel, j’ai jugé cette idée de société de projet assez innovante. Elle participe à mon sens du processus de diversification du financement. Au fond, il s’agirait d’un partenariat public-privé maîtrisé, présentant les avantages de cet outil sans en subir les inconvénients.

M. Aymeri de Montesquiou manifeste sa circonspection.

Debut de section - Permalien
Jean-Yves Le Drian, ministre

Avec une inflation zéro…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

… mais, pour un certain nombre d’équipements, le fait d’anticiper la livraison peut se révéler très avantageux. Tout dépend du prix que représente cette anticipation : dans un certain nombre de cas, ce facteur pèse sensiblement dans le coût total. Il peut même être déterminant.

Je le répète, je ne mets pas en cause, à titre personnel, la société de projet en tant que telle. Ce dispositif peut être bon, à condition bien sûr que les investissements anticipés soient d’une ampleur suffisante, et que la rentabilité, ou tout au moins l’efficacité qui en découle, justifie le surcoût assumé.

L’un des aspects de ce projet n’en est pas moins assez préoccupant : l’ingénierie de cette société dépendra avant tout de Bercy. Or, nous le savons bien, ce ministère n’est pas particulièrement bienveillant envers les crédits de la défense. En effet, quand il faut dégager des économies, quand il faut opérer des réductions de personnels, quand il faut obtenir des moyens financiers supplémentaires, c’est souvent vers le ministère de la défense que l’on se tourne, car, en général, il est silencieux.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

Les militaires ne défilent que le 14 Juillet…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

Les habitudes peuvent ainsi conduire à privilégier une certaine facilité. Je le comprends, il est difficile de mener à bien de grands plans d’économies, et la tentation est forte de concentrer les coupes budgétaires sur ceux qui ne grognent pas. Mais, pour nous, une telle politique est inacceptable.

Souvent, les positions de Bercy vis-à-vis du ministère de la défense nous paraissent excessives. Elles sont d’autant plus alarmantes quand on constate que le ministre le plus sévère vis-à-vis de la politique de défense pourrait être, un jour ou l’autre, chargé d’élaborer les outils par lesquels ladite politique sera financée.

Vous l’aurez compris, il s’agit pour nous d’un grand sujet d’inquiétude.

Parallèlement, et en définitive, le Président de la République laisse penser que ce dispositif est, dans l’ensemble, incertain puisqu’il achève sa lettre ainsi : « Dans le cas où les efforts des services de l’État ne permettraient pas de dégager les ressources nécessaires, le Gouvernement prévoira de les compenser par l’ouverture au 1er janvier 2016 de crédits budgétaires supplémentaires ». En d’autres termes, les factures de 2015 seraient acquittées en 2016, et le report de charges augmenterait d’autant. Ces perspectives sont des plus préoccupantes. Pis, elles sont graves, dans la mesure où elles illustrent le manque de crédibilité qui nous affecte sur le plan financier. En repoussant sans cesse le financement des crédits budgétaires, nous perpétuons ce que d’autres ont appelé la « bosse » de la défense, qui, je le sais, ne date pas d’aujourd’hui.

M. Philippe Bonnecarrère applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

Tels sont, monsieur le ministre, la lecture que je fais de la lettre du Président de la République et le commentaire que j’en tire.

Toutefois, si j’observe ces enjeux à la lumière de mon expérience passée, avec un regard politique, je ne suis pas trop inquiet. Le chef de l’État s’engage par écrit devant le Parlement, devant le président du Sénat, devant notre commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, quant aux 31, 4 milliards d’euros de crédits. Il sait que son chef d’état-major a dit, devant cette commission, que 2015 serait « l’année de la vérité », et qu’un certain nombre de ruptures étaient à craindre si les objectifs fixés n’étaient pas atteints.

Ainsi, je suis politiquement rassuré.

En revanche, financièrement, tel n’est pas le cas. En effet, comment trouver les moyens financiers ? Les trois solutions envisagées n’en sont pas vraiment, ce qui est extrêmement préoccupant.

Nous connaissons votre engagement, monsieur le ministre, à tenir les objectifs de la loi de programmation militaire. Nous savons que vous avez pris un certain nombre d’initiatives, afin d’anticiper. Des travaux sur les sociétés de projet sont d’ores et déjà en cours. Des résultats peuvent être attendus. Nous sommes néanmoins très inquiets et nous ne pouvons pas croire aujourd’hui à l’équation budgétaire qui nous est présentée.

Nous avons pris note de l’engagement politique, nous respectons la parole des plus hautes autorités de l’État, du chef des armées lui-même, mais nous craignons que l’équation financière du présent budget ne soit pas garantie.

J’espère que nous serons rassurés par les propos que vous tiendrez tout à l'heure. §

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.

Je vous rappelle également que, en application des décisions de la conférence des présidents, aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de vingt-cinq minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Leila Aïchi.

Debut de section - PermalienPhoto de Leila Aïchi

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des affaires étrangères, mes chers collègues, le Sénat est aujourd’hui appelé à se prononcer sur les crédits de la mission « Défense » dans le cadre du projet de loi de finances pour 2015. Force est de le constater, avec une baisse de ses crédits de près de 2 %, l’armée contribue dans une large mesure à l’effort budgétaire auquel nous sommes tous contraints.

Ce budget s’inscrit dans la continuité de la loi de programmation militaire 2014-2019, sur laquelle j’avais déjà exprimé quelques réserves, en particulier au sujet de la réduction drastique des effectifs qu’elle emportait. Le projet de loi de finances pour 2015 prévoit en effet une baisse de 7 500 ETPE, ou équivalents temps plein emploi, dont 85 % de militaires et 15 % de civils.

Ces choix sont difficiles, nous le concevons, monsieur le ministre. Nous sommes tous d’accord sur ce point, les hommes sont la première richesse de l’armée, et ils sont au cœur de notre vision écologique de la défense. La prévention des conflits et la gestion des crises passent, avant tout, par l’humain.

En effet, les difficultés croissantes d’accès aux ressources telles que l’eau, et par là même à l’alimentation, qui ont des causes climatiques mais aussi anthropiques, sont responsables d’une montée des tensions, qui ne fait que s’aggraver. Ces tensions, à l’échelle d’un village, d’une région, d’un voire de plusieurs pays, seront des facteurs de déstabilisation majeurs dans les années à venir. C’est pourquoi les missions des forces armées doivent être repensées. Les hommes sont indispensables pour répondre à ces défis. Je sais, monsieur le ministre, que c’est également votre conviction et je connais votre engagement en la matière.

La principale variable d’ajustement, selon nous, insuffisamment mise à contribution aujourd’hui, au détriment des hommes, est la dissuasion nucléaire. Comme vous connaissez la position des écologistes sur cette question, je me garderai donc de la développer en profondeur.

Notons tout de même que les crédits alloués à la dissuasion sont une nouvelle fois sanctuarisés dans le budget que vous nous soumettez. Dans le contexte international actuel, et compte tenu des contraintes budgétaires que nous connaissons, la modernisation de notre arsenal nucléaire est-elle une urgence ?

En l’absence de débat sur la réévaluation du dimensionnement et de la posture de notre dissuasion, nous nous ne disposons plus, aujourd’hui, que de marges de manœuvre budgétaires largement réduites. Le renouvellement automatique des programmes a vraisemblablement empêché la France, à l’inverse de certains de ces partenaires, de s’interroger sur la priorité donnée à la dissuasion.

Un autre poste particulièrement coûteux est celui des OPEX. Nous nous accordons tous sur leur coût exorbitant, même si elles apparaissent parfois légitimes. Malgré un dépassement de près de 650 millions d’euros en 2014, la provision OPEX pour 2015 demeure inchangée – 450 millions d’euros –, alors que les opérations dans la bande sahélo-saharienne, en République centrafricaine et en Irak se poursuivront.

Ces surcoûts ont une incidence regrettable sur les crédits d’équipement et sur les moyens alloués à la formation et à la préparation des forces. Or la formation en amont doit être au cœur de notre politique de prévention et d’accompagnement de nos partenaires.

Les multiples retards et reports subis par les programmes d’équipement affectent directement les troupes engagées à l’étranger. Il est également nécessaire de garder à l’esprit que l’armée française intervient dans des zones où les conditions climatiques et environnementales sont extrêmes et mettent à rude épreuve le matériel. Nous devons donc encourager la recherche pour adapter celui-ci. En ce sens, l’existence et le développement d’une flotte héliportée moderne, efficace, et facile à déployer doivent être une priorité.

En outre, si la baisse actuelle des cours du pétrole est une bonne nouvelle d’un point de vue budgétaire pour le ministère de la défense, elle ne doit pas nous empêcher de poursuivre nos efforts en faveur d’une transition énergétique de l’armée. Le chef d’état-major, le général de Villiers, déclarait encore voilà peu devant la commission des affaires étrangères que les coûts de l’énergie et des fluides représentaient 40 % des dépenses de défense. Il est clair, monsieur le ministre, que nous ne pouvons pas faire l’économie d’une transition énergétique de l’armée.

Plus globalement, l’ensemble des moyens techniques de projection doivent contribuer à renforcer nos capacités en matière de génie écologique. Ces outils sont essentiels dans la mesure où nos forces armées sont de plus en plus amenées à intervenir sur le terrain à des fins de protection des populations, lors de catastrophes naturelles, industrielles, ou encore humanitaires.

Mes chers collègues, il est essentiel de comprendre que les risques environnementaux vont devenir l’un des principaux postes d’intervention. La compétition internationale pour les ressources naturelles nous oblige en effet à adapter nos missions.

L’exemple de la marine est particulièrement révélateur. À l’heure actuelle, les moyens sont largement contraints et nous ne sommes plus en mesure de répondre aux objectifs que nous nous fixons. Dans leur rapport d’information de 2012 intitulé Maritimisation : la France face à la nouvelle géopolitique des océans, mes collègues Jeanny Lorgeoux et André Trillard affirment : « on assiste aujourd’hui avec la mondialisation et la raréfaction des ressources terrestres à une transformation de la géopolitique des océans. »

Notre pays dispose d’un espace maritime couvrant plus de onze millions de kilomètres carrés, soit le deuxième au monde. La présence maritime française est donc une priorité, afin de lutter contre la pêche illicite, non déclarée et non réglementée, contre la piraterie et contre le braconnage. Ces activités déstabilisent nos marchés locaux et contribuent à la dégradation de l’environnement.

La question environnementale n’est plus accessoire ; elle revêt même une dimension stratégique essentielle. C’est pourquoi il est indispensable de renforcer notre armée pour en tenir compte.

Monsieur le ministre, pour l’ensemble de ces raisons, le groupe écologiste s’abstiendra lors du vote des crédits de la mission « Défense », dans une démarche qui se veut constructive. §

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Esnol

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’examen des crédits de la mission « Défense » du projet de loi de finances pour 2015 auquel nous procédons ce soir revient en définitive à répondre à la question suivante : ce projet de budget donne-t-il à la France les moyens dont elle a besoin pour assurer sa défense ?

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Esnol

Autrement dit, lui permet-il non seulement de garantir l’intégrité de son territoire et la protection de sa population, mais aussi de contribuer à lutter contre toutes les menaces susceptibles de mettre en cause la sécurité nationale ?

Est-il à la fois conforme à la trajectoire financière fixée par la loi de programmation militaire 2014-2019, en adéquation avec les besoins opérationnels de nos forces armées, et suffisant pour faire face au tumulte du monde actuel ?

La réponse à ces interrogations est positive, car le budget de la défense pour 2015 est sanctuarisé. Avec plus de 30 milliards d’euros de crédits, la mission « Défense » représente près de 10 % du budget général et constitue, hors charge de la dette, le deuxième poste budgétaire de l’État, derrière la mission « Enseignement scolaire ».

Dans le contexte budgétaire contraint actuel, qui conduit chaque ministère à contribuer au redressement des finances publiques, cet effort en matière de défense est significatif.

Il témoigne également du fait que le Gouvernement a pris toute la mesure des menaces qui pèsent sur la sécurité des Français et tient sérieusement compte de la dégradation récente de la situation sécuritaire internationale. Je veux, bien entendu, faire référence à la crise ukrainienne, qui a surgi aux portes de l’Europe, aux guerres transnationales qui secouent la Syrie, l’Irak ou la Libye, aux actions des groupes terroristes tels que Al-Qaïda au Maghreb islamique, Boko Haram, ou encore Daech, désormais constitué en véritable armée, mais également à l’expansion des cybermenaces ou au risque de certaines pandémies.

Le besoin de protection est donc réel, et le projet de loi de finances pour 2015, qui correspond à la deuxième annuité d’application de la loi de programmation militaire, tient sa promesse en ce qu’il maintient les crédits de la mission « Défense » au niveau de ceux de 2014.

Ce texte permet ainsi de mettre en œuvre la vision stratégique exprimée dans le Livre blanc de 2013 et de financer le choix de modèle d’armée qui en a émergé. Cette vision stratégique entend, tout en maîtrisant les moyens de la défense et en les inscrivant dans la contrainte budgétaire, parvenir à protéger les Français, à assurer la crédibilité de nos armées et de notre dissuasion nucléaire et à conférer au pays la capacité de prendre l’initiative des actions conformes à ses intérêts et à ceux de la communauté internationale.

À cette fin, et pour préserver l’autonomie stratégique de la France – un concept qui signifie que notre pays doit disposer de l’outil militaire et de la capacité d’entraînement permettant d’agir seul –, la priorité fixée est d’avoir des forces bien entraînées, bien équipées et bien renseignées.

Cette priorité a bel et bien été traduite dans le budget de la défense pour 2015. En effet, les dépenses d’investissement y sont très importantes. En matière d’équipement des forces, par exemple, élément essentiel – vous en conviendrez, mes chers collègues – pour répondre aux besoins opérationnels et mettre à disposition des armées le matériel nécessaire au succès des opérations, les seuls crédits de paiement s’élèvent à 6, 3 milliards d’euros, soit plus de 60 % des investissements de l’État prévus pour 2015 pour la mission.

L’accent a également été mis sur la prospective de défense, dont le niveau est maintenu, plus particulièrement sur le renseignement, puisque les crédits qui sont affectés à ce poste progressent de 2, 2 % par rapport à 2014.

De même, les crédits, hors personnel, du programme « Soutien de la politique de défense » relatif à la politique immobilière, aux systèmes d’information d’administration et de gestion, à la politique des ressources humaines, aux restructurations, ainsi qu’à la politique culturelle et éducative permettant de renforcer le lien entre l’armée et la nation, augmentent quant à eux de 10 %.

Malgré tout, eu égard à certaines limites, nous devons demeurer vigilants. Si ce projet de budget pour 2015 suit le cap fixé par la loi de programmation militaire 2014–2019, il n’en demeure pas moins que les crédits baissent en réalité de 500 millions d’euros par rapport aux prévisions et que seule la compensation par des ressources exceptionnelles permet de réussir l’exercice et donc de parvenir à maintenir la stabilité du budget.

Ces ressources, portées à 2, 3 milliards d’euros, augmentent de 30 % par rapport à 2014. Elles sont pourtant bien incertaines. On le sait, elles ne seront pas au rendez-vous. En effet, il est établi que le produit de la cession des fréquences hertziennes, qui devait en constituer la majeure partie, ne sera pas disponible à temps.

Aussi, face à des recettes exceptionnelles aléatoires et afin de garantir la disponibilité des ressources nécessaires, le ministère de la défense a été contraint d’inventer en urgence une solution qui, si elle a le mérite d’exister, peut néanmoins laisser perplexe a bien des égards : la création de sociétés de projet capitalisées avec le produit de cessions de participations détenues par l’État, mais également ouvertes à des capitaux privés. Ces sociétés permettraient de réaliser l’achat de matériel militaire très coûteux, et concéderaient ensuite un droit d’usage au ministère de la défense moyennant le paiement d’un loyer.

S’il est fondamental, pour ne pas dire impératif, de pouvoir poursuivre la modernisation de nos forces armées, en particulier de leur équipement, la perspective que celui-ci, destiné à la défense nationale, puisse être détenu en partie par des investisseurs privés, y compris étrangers, conduit, ou devrait conduire, à s’interroger, même si l’État reste majoritaire. Ne l’oublions pas, la défense est une mission régalienne.

En outre, si ce choix est guidé par la seule logique budgétaire, une telle solution, présentant certes l’avantage d’une rentrée d’argent rapide, ne sera-t-elle pas plus coûteuse et donc contre-productive à long terme ? Notre expérience des partenariats publics-privés devrait nous amener à méditer….

Mon analyse serait incomplète si je ne mentionnais pas un autre enjeu résidant dans la maîtrise du report de charges résultant de la gestion effectuée en 2014 et estimé à 3, 45 milliards d’euros.

Enfin, il me paraît important de souligner que, si le présent projet de budget parvient aujourd’hui à répondre aux besoins opérationnels, s’il respecte les engagements pris, c’est grâce à la réalisation d’efforts considérables exigés du ministère de la défense et entrepris depuis plusieurs années, visant notamment à maîtriser sa masse salariale, à optimiser son fonctionnement, ainsi qu’à conduire de profondes restructurations. Il convient désormais d’admettre ensemble que les marges de manœuvre sont très limitées, pour ne pas dire inexistantes.

En effet, en 2015, la masse salariale diminuera pour la quatrième année consécutive : 7 500 emplois seront encore supprimés.

S’agissant du budget de fonctionnement, il s’élève à 2, 6 milliards d’euros et permet seulement aujourd’hui d’assurer des conditions de vie et de travail décentes, en répondant aux besoins les plus élémentaires des bases de défense.

Ainsi que j’ai eu l’occasion de le rappeler tout à l’heure, les programmes d’équipement et d’armement sont, quant à eux, considérés comme prioritaires, à juste titre, dans la mesure où ils visent au remplacement de matériels qu’il n’est plus possible d’utiliser davantage et non pas à franchir un saut technologique.

Quant à l’activité opérationnelle, c’est-à-dire l’entretien du matériel et les frais de fonctionnement liés à l’entraînement, on ne peut pas sérieusement envisager de s’y attaquer sans risquer de porter atteinte à la préparation opérationnelle, garantie de la réactivité de nos forces et de leur sécurité.

Pour conclure, les récents événements ont confirmé la pertinence de la vision stratégique qui a présidé à l’élaboration du Livre blanc et qui s’est traduite dans la loi de programmation militaire 2014–2019.

Le projet de budget pour 2015, sous réserve que les recettes exceptionnelles soient confirmées ou que des ressources de substitution soient garanties, respecte cette vision en sanctuarisant la mission « Défense », et montre ainsi l’importance qu’attache la France, malgré les tensions budgétaires qu’elle connaît, aux menaces actuelles et à ses responsabilités sur la scène internationale. C’est pourquoi les membres du groupe du RDSE voteront ces crédits. §

Debut de section - PermalienPhoto de David Rachline

Madame la présidente, monsieur le ministre, avant de commencer mon intervention, je souhaite saluer la mémoire de l’adjudant Samir Bajja décédé au cours de l’opération Barkhane la semaine dernière. Je rends également hommage à ses camarades blessés. Ainsi, derrière les chiffres dont nous parlons dans le cadre du présent projet de loi de finances, il y a des hommes et des femmes qui servent avec abnégation leur pays, parfois jusqu’au sacrifice suprême.

Le commandant de Saint Marc écrivait : « un soldat accepte de mourir pour que d’autres vivent et, plus grave encore, de tuer pour que d’autres ne soient pas tués. » Cette citation nous donne une responsabilité certaine alors que nous discutons des moyens que l’on va accorder à ces hommes et à ces femmes. Depuis de nombreuses années déjà, ce n’est pas du superflu que réclament nos armées, ce n’est pas du confort. Elles demandent, d’une part, de la reconnaissance et, d’autre part, les moyens pour s’entraîner et pour mener à bien leur mission.

Or notre rôle, à nous parlementaires, est de leur donner ces moyens, afin qu’elles puissent remplir les missions de plus en plus compliquées qui leur sont confiées par le chef des armées, le Président de la République. Nos armées font la fierté de la France et l’opération au Sahel est montrée comme un exemple dans de nombreux pays. Mais pour combien de temps encore ?

L’actualité géopolitique très riche souligne quotidiennement que, plus que jamais, nos armées sont indispensables à notre sécurité, et qu’elles ne doivent en aucun cas être la variable d’ajustement pour ceux qui sont chargés des finances publiques. Je sais, monsieur le ministre, toute l’énergie que vous mettez, ainsi que les grands chefs militaires, pour défendre notre outil de défense dans sa globalité, mais malgré cela on est loin du compte...

Tous les spécialistes s’accordent à dire que le budget de la défense, prétendument sanctuarisé, ne sera pas tenu, que les recettes exceptionnelles, notamment les ventes de fréquences, ne seront sans doute pas au rendez-vous l’an prochain. Une nouvelle fois, pour faire des économies, vous vous attaquez aux silencieux et au fondement même de notre pays à travers cette mission régalienne. Après avoir supporté 60 % des baisses d’effectifs de l’État en 2014, la défense sera une nouvelle fois mise à contribution en 2015 : les diminutions qu’elle supportera représenteront 66 % de ces baisses. Cela ne permettra pas d’améliorer le quotidien de nos forces et leur équipement.

Est-il normal que 44 % des militaires de l’armée de terre soient à l’indice plancher de la fonction publique, que 74 % soient sous contrat, alors que l’on recrute des fonctionnaires à tour de bras dans certains ministères ? Est-il également normal que le parc d’équipements de l’armée de terre ait globalement décru de 42 % en sept ans ?

Je vous plains, monsieur le ministre, car je connais votre souci de préserver nos capacités et votre volonté de défendre nos armées. Mais il faut le reconnaître, en d’autres lieux, on sacrifie notre défense pour maintenir notre déficit et faire plaisir aux bureaucrates bruxellois ! Vous parlez de l’Union européenne à tout bout de champ, mais où était-elle lorsqu’il s’est agi d’aller stopper les terroristes au Mali, opération protégeant l’ensemble des pays européens ? Vous cherchez de l’argent pour la mission « Défense », mission symbole de la souveraineté de la France et de sa capacité à être et à rester un pays qui compte dans le monde, alors commencez par arrêter de donner de l’argent à l’Union européenne, qui n’est d’aucun secours lorsqu’il s’agit de protéger ses citoyens !

J’ai bien compris que, dans le contexte actuel, c’est la foire aux idées pour limiter le naufrage. Outre le fait que, sur le plan technique, juridique et financier, elle n’apporte aucune garantie de réussite, l’idée des sociétés de projet ressemble fortement à un artifice pour faire taire les craintes, en particulier celles de nos militaires.

La défense n’est pas une variable d’ajustement ; elle est la première fonction régalienne de l’État. Nos armées participent au premier rang à la sécurité de notre pays, même si la menace n’est plus aussi visible qu’hier. Elles contribuent également au rayonnement de la France dans le monde et à la diffusion des valeurs de notre pays.

Monsieur le ministre, vous avez notre soutien pour votre combat afin de maintenir notre outil de défense. Malheureusement, le budget que l’on vous impose ne répond pas à la vision que nous avons de notre pays. Nous ne pourrons donc le voter en l’état !

Debut de section - PermalienPhoto de Jeanny Lorgeoux

L’essentiel national n’est pas le Front national !

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Reiner

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous examinons donc le budget de la défense pour 2015.

Il y a évidemment plusieurs manières d’aborder un budget.

Un budget, ce sont certes des nombres, des additions, parfois des soustractions, rarement des multiplications. On peut observer les données, les contempler, les éplucher même ; on peut aussi s’intéresser à ce qui s’y trouve, voire surtout à ce qui ne s’y trouve pas et à ce qui pourrait venir à manquer.

Mais un budget, ce sont surtout les moyens de faire, c’est-à-dire transformer une volonté, une orientation politique en action. Alors, derrière les chiffes, apparaissent les femmes et les hommes – en l’occurrence ceux du ministère de la défense –, les équipements qui doivent leur être fournis, les industries de la défense – les grandes comme les petites –, mais aussi et principalement les missions qui doivent être assurées par ces personnels, notamment protéger nos concitoyens et intervenir là où la France est appelée, afin d’apporter la sécurité et si possible la paix.

En cet instant, permettez-moi de saluer l’ensemble des forces armées françaises, ces femmes et ces hommes qui, au quotidien, sont sur les théâtres d’opérations ou se préparent à y aller. Permettez-moi également de rendre hommage aux sept militaires qui sont morts au combat pour la France cette année.

Je commencerai mon propos en présentant les grandes caractéristiques du budget de la mission « Défense » pour 2015. Dans un deuxième temps, je vous ferai part de quelques réflexions personnelles pour nuancer des propos tenus par M. le rapporteur spécial qui me paraissent excessifs. Je pense aux accusations de « mensonge d’État » ou d’« imposture », des expressions assez rarement employées dans cet hémicycle, surtout à l’occasion de l’examen du budget de la défense, qui plus est d’un budget sanctuarisé…

En effet, à hauteur de 31, 4 milliards d’euros, celui-ci respecte la loi de programmation militaire adoptée au mois de décembre dernier.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Reiner

Il maintient l’effort consacré par la nation à sa défense face à des risques et à des menaces, qui persistent et se multiplient, bien identifiés par le Livre blanc.

En termes d’effort, je relève d’abord celui qui est consenti à l’égard de l’équipement des forces. Les crédits qui sont consacrés à ce domaine progressent de quelques millions d’euros en 2015. Ce n’est pas si souvent, en ces temps difficiles, que des crédits augmentent. Alors, disons-le !

Derrière cette donnée, se trouvent les équipements qui seront livrés.

Au-delà de ces livraisons, seront enfin commandés les huit avions ravitailleurs que nous évoquons depuis dix ans. En parler pendant longtemps, soit, encore fallait-il que la commande fût un jour passée !

Seront également commandés, pour ne citer qu’eux, le système de drone MALE, pour lequel vous savez l’attachement de la commission des affaires étrangères, ainsi que le lancement de la rénovation à mi-vie des avions Mirage 2000D, programme auquel la commission est aussi très attachée, tout comme je le suis d’ailleurs à la base aérienne de Nancy où ces avions se trouvent. Est également prévue l’acquisition du système de drones tactiques successeurs des Sperwer. Sur ce point, monsieur le ministre, vous connaissez notre vigilante attention.

Par ailleurs, il faut le noter, l’entretien programmé des matériels bénéficiera dans ce budget pour 2015 d’un effort supplémentaire, avec une dotation en augmentation de 4, 5 %. Il s’agit d’une mesure de rattrapage eu égard à l’entretien insuffisant les années précédentes…

De même, s’agissant de la recherche et du développement, un effort continu sera poursuivi, avec plus de 3, 6 milliards d’euros de crédits.

Je souligne également le maintien des crédits au secteur des études amont qui est en augmentation de près de 20 % depuis l’année dernière. Chacun sait dans cette enceinte que ces études sont indispensables pour garder et améliorer nos compétences industrielles, ainsi que pour maîtriser les technologies clés du futur.

Enfin, la cyberdéfense et le renseignement bénéficieront de la poursuite de l’effort engagé en matière d’effectifs, d’acquisition d’équipements spécialisés et de développement des capacités de renseignement, comme l’a souligné tout à l’heure Jeanny Lorgeoux.

Il faut le dire, ce budget est fidèle à la trajectoire financière de la loi de programmation militaire. Il suit la déflation d’effectifs prévue – 7 500 emplois de moins en 2015 – et comporte des mesures de restructuration, en particulier un dispositif d’accompagnement à la fois pour les personnels militaires et civils, et pour les collectivités locales via les contrats de plan État-région.

Diminuer les effectifs est un exercice compliqué, d’autant plus qu’on avance dans la programmation. À cet exercice est associée une baisse salariale, ce qui ne devrait pas nous surprendre. Et pourtant, c’était loin d’être le cas auparavant, ainsi que l’a relevé la Cour des comptes. À cela s’ajoute, il faut également le répéter, le lourd héritage du logiciel de paiement des soldes Louvois : les pertes se comptent en centaines de millions d’euros !

Quoi qu’il en soit, la défense demeurera tout de même l’un des premiers recruteurs du pays.

Dans un contexte difficile, je voudrais vous faire partager quelques réflexions, mes chers collègues.

D’une part, l’environnement stratégique est devenu plus que jamais incertain avec la multiplication des foyers à nos portes.

D’autre part, nous devons poursuivre la nécessaire modernisation de nos équipements et améliorer leur disponibilité, alors que les moyens financiers sont comptés. Le présent projet de loi de finances concilie ambition stratégique et sérieux budgétaire : ça n’était pas simple !

Naturellement, des choix ont été opérés afin de relever ces défis. Néanmoins, cette démarche permet à la France de demeurer l’un des rares pays capables d’assumer simultanément les trois missions fondamentales que lui assigne le Livre blanc : la protection du territoire et de la population – nous le constatons chaque jour ; la dissuasion nucléaire appuyée sur deux composantes distinctes et complémentaires ; l’intervention sur des théâtres extérieurs, dans le cadre d’une mission soit de gestion de crise, soit de guerre.

Les armées françaises conservent toujours la capacité d’entrer en premier sur les théâtres d’opérations dans les trois milieux terrestre, naval et aérien, et de prévoir, de planifier et de conduire de tels engagements. On vient de le vérifier ces deux dernières années.

Cette aptitude maintient l’autonomie stratégique de notre pays et permet à la France non seulement d’apporter sa contribution à une défense européenne qui peine à s’organiser, mais aussi d’occuper toute sa place, désormais pleine et entière, au sein de l’Alliance atlantique.

Conformément aux engagements du Président de la République, les crédits que la France consacre à sa défense sont maintenus en 2015 au niveau prévu. Ce budget est donc sanctuarisé !

On le sait cependant, il devra trouver son équilibre grâce à des ressources exceptionnelles – cela n’est pas nouveau – et éviter un report de charges non négligeable.

Conscient de cette hypothèque, vous avez, monsieur le ministre, fait preuve d’imagination et de pugnacité. Vous avez recherché d’autres solutions. J’ai parlé tout à l’heure des sociétés de projet : elles ont fait couler beaucoup d’encre, plus encore de salive, y compris dans cet hémicycle ! Pourquoi pas également le recours au PIA ou à d’autres financements innovants ?

Comme vous nous l’avez dit, ces ressources sont nécessaires. Elles garantissent aux industries des flux de paiement conformes aux prévisions de la loi de programmation militaire. Elles assurent le maintien de la capacité de production, préservent l’outil industriel, voire, en fonction du choix des équipements qui seront concernés, elles permettent de conforter l’offre française à l’exportation, enjeu très important. Il est donc essentiel que ces ressources soient réellement prévues : la défense de notre pays, ainsi que les femmes et les hommes qui la servent chaque jour le méritent bien !

Monsieur le ministre, ce budget n’était pas simple à réaliser, mais vous avez relevé le défi. Il est conforme à la loi de programmation militaire, aux engagements qui ont été pris pour nos armées et devant elles. Il permet à la France de tenir toujours son rang et de poursuivre les objectifs du Livre blanc. Ce budget est donc celui de la parole tenue, de la vôtre, de celle du Gouvernement et de celle du Président de la République. Vous nous trouverez à vos côtés pour vous permettre de l’exécuter fidèlement ! §

Debut de section - PermalienPhoto de Michelle Demessine

Monsieur le ministre, les crédits que vous nous soumettez ce soir correspondent à la première année d’exécution d’une loi de programmation militaire que les membres de mon groupe n’ont pas votée.

Nous avions alors estimé qu’elle ne correspondait pas à une conception de la défense nationale qui permette de protéger efficacement notre territoire et nos concitoyens, de préserver les intérêts fondamentaux de notre pays et de son peuple, d’appuyer une politique étrangère et d’influence de la France au service d’un monde plus juste et plus solidaire, en privilégiant toujours la paix et le désarmement au sein des relations internationales.

Cela étant dit, je voudrais d’emblée préciser à l’attention des personnels militaires, auxquels je rends hommage pour leur professionnalisme et leur dévouement, en particulier sur les théâtres d’opérations extérieures, que, si nous n’approuvons pas ces crédits, ce n’est évidemment pas par refus de donner à nos forces armées les moyens nécessaires pour remplir leurs missions.

C’est bien en raison de nos désaccords avec les principales orientations stratégiques définies par le Gouvernement, avec le format et le modèle d’armée qu’il a choisis, ainsi qu’avec l’affectation des crédits qu’il propose.

Plus précisément, je pense que ce qui explique fondamentalement la définition de ce nouveau modèle d’armée, c’est avant tout la recherche d’économies, avec toutes les conséquences en termes de capacités, de compétences ou même de moral des personnels militaires et civils.

Comme l’ont affirmé les plus hautes autorités militaires, le maintien des engagements financiers de la LPM est impératif. À défaut, nos armées ne seront plus à même de remplir les missions qui leur ont été assignées, et le tissu de nos industries de défense serait lui aussi en danger.

Or, pour atteindre le seuil des 31, 4 milliards d’euros de dépenses fixé par la LPM jusqu’en 2016, vous faites appel à 2, 2 milliards de recettes exceptionnelles, aléatoires, qui devraient provenir pour l’essentiel de la vente de fréquences hertziennes et de biens immobiliers de la défense.

En conséquence, votre budget est fragile. De fait, sa sincérité et sa crédibilité sont mises en cause.

On sait trop à quel point sa réalisation repose sur ces recettes exceptionnelles, qui sont virtuelles et évaluées de façon très optimiste. Si ces ressources nous faisaient défaut en 2015, cela rendrait quasiment impossibles certains achats d’équipements qui sont indispensables pour remplacer des matériels, tels que les avions ravitailleurs ou les véhicules de l’avant blindés, les VAB, qui ont largement plus de trente ans d’âge.

En réponse à M. Raffarin, le Président de la République a demandé au Gouvernement de tout mettre en œuvre pour que ces recettes soient au rendez-vous, faute de quoi il garantirait l’ouverture de crédits supplémentaires pour 2016. Dont acte.

Mais, dans l’immédiat, faut-il en passer par ces financements « innovants » que sont les sociétés de projet ? Je ne le crois pas, car leur mise en place d’ici à 2015 paraît hasardeuse. Surtout, ces sociétés heurteraient un certain nombre de principes auxquels nous sommes attachés.

Leur montage s’apparente en effet à un bricolage financier, à une usine à gaz, dont le capital serait de surcroît alimenté par des cessions de participations de l’État. Serait-ce vraiment une opération financière intéressante pour l’État sur le long terme ?

Au vu de l’expérience dans d’autres secteurs – les coûts ont explosé –, les doutes sont permis.

Mais je m’élève surtout contre le principe même de la vente par l’État de certains matériels militaires – et non des moindres, puisque l’A 400M est en cause – à des sociétés de droit privé auxquelles il les louerait aussitôt.

Qu’une activité régalienne par excellence comme l’est la défense soit en partie dépendante du secteur privé soumis à la concurrence me semble être extrêmement dangereux pour l’autonomie stratégique de notre pays.

Comment ce système pourra-t-il réellement fonctionner avec un budget dont la stabilité, l’équilibre, repose sur de si grandes incertitudes ?

Certes, monsieur le ministre, votre projet de budget comporte quelques décisions positives, que je veux mentionner.

Je me félicite ainsi que les moyens en hommes et en crédits affectés aux services de renseignement et à la cyberdéfense aient été sensiblement augmentés. Je pense également à l’élévation du niveau d’exigence en matière d’entraînement et de maintien en condition opérationnelle.

Je pense aussi à plusieurs programmes d’équipement dans les domaines du transport, du ravitaillement en vol – en l’espèce, le programme a été concrétisé voilà dix jours par l’annonce d’une commande importante à Airbus, tandis que l’achat de Rafale par l’Inde semble en bonne voie –, ou encore du combat en milieu hostile. Ces équipements combleront utilement certaines lacunes, en particulier en matière de projection.

Par ailleurs, l’autre réponse que vous apportez aux difficultés à obtenir des ressources financières consiste en une réduction draconienne des effectifs, soit 26 000 suppressions de postes d’ici à 2019.

Suivant en cela une logique identique à celle des entreprises privées, vous optez pour une solution de facilité à court terme. Après les coupes opérées avec la précédente LPM – 54 000 suppressions d’effectifs entre 2009 et 2014 –, nos armées ont déjà été affaiblies, et leurs capacités en termes de réactivité, d’action dans la durée, de savoir-faire opérationnels sont largement entamées.

Sur la période des deux dernières lois de programmation, notre défense aura ainsi perdu la moitié de ses forces conventionnelles.

La disparition d’unités, de bases ou d’établissements – au mois de septembre, vous avez d’ailleurs poursuivi les restructurations –, outre les dommages sur le moral des personnels et de leurs familles, a aussi de lourdes répercussions sur la situation de nos territoires et des populations.

Au risque d’une grave crise dans nos armées, les réactions à l’égard de ce qui apparaît comme une injustice ne peuvent plus être traitées comme auparavant.

Il est urgent, monsieur le ministre, que, comme vous vous y êtes engagé, vous preniez des dispositions novatrices pour donner de nouvelles bases au dialogue, à la concertation et à l’expression des personnels au sein de l’institution.

Ce serait une évolution légitime dans une grande démocratie comme la nôtre, et qui ne serait pas uniquement justifiée par une récente décision de la Cour européenne.

Enfin, je m’interroge sur la cohérence capacitaire de nos armées, les grandes ambitions stratégiques affichées dans le Livre blanc, et les moyens dont vous disposez dans votre budget pour y répondre.

Vous prétendez mieux dépenser en réduisant de façon drastique le format de nos armées. Mais cette réduction vous permet surtout de payer fort cher des technologies qui, à mon avis, ne correspondent pas forcément au type de conflits ou d’opérations dans lesquels nos armées sont engagées.

Pour nommer les choses, je doute de l’efficacité et de la pertinence de l’arme nucléaire pour faire face aux conflits d’aujourd’hui ou aux nouvelles menaces.

Les règles stratégiques ont fondamentalement changé depuis la fin de la guerre froide et, malgré la surprise qu’a constituée l’annexion de la Crimée, on ne peut pas dire qu’il existe encore une menace nucléaire stratégique.

Si, en raison d’un contexte budgétaire contraint, l’importance des crédits consacrés au nucléaire en venait à affaiblir nos capacités conventionnelles, paradoxalement, ce serait toute la cohérence d’ensemble de notre défense qui serait menacée. Car nos forces conventionnelles sont indispensables à la crédibilité de toute la logique de dissuasion.

Conserver cette cohérence nécessite de réduire le coût de nos forces nucléaires.

Si l’on prend en compte les études, les opérations d’armement, l’entretien programmé du matériel et les infrastructures liées à la dissuasion, ce sont entre 3, 5 milliards d’euros et 4, 5 milliards d’euros par an, soit près de 10 millions d’euros par jour, c'est-à-dire plus de 10 % du budget total ou 20 % de sa partie relative aux équipements, qui sont consacrés à l’arme nucléaire d’une année sur l’autre.

Le coût et la puissance dévastatrice de cette arme ne se justifient plus de la même façon. J’ajouterai même que, avec l’apparition de nouveaux acteurs stratégiques au comportement irrationnel, cette arme crée maintenant une source d’instabilité menaçant l’ensemble de la planète.

Comme tous nos compatriotes, nous souhaitons que les relations internationales soient fondées sur des politiques de paix et de désarmement.

Nous ne voulons aucunement diminuer la capacité de notre pays et de son peuple à défendre leurs intérêts légitimes et les valeurs républicaines. En revanche, nous ne pensons pas que l’arme nucléaire soit cette « assurance vie » ni qu’elle représente la garantie ultime.

Monsieur le ministre, vous l’aurez compris, nous ne partageons pas les choix politiques et les grandes orientations stratégiques que traduit votre budget ; nous ne souscrivons pas à l’usage qui est prévu des crédits et nous nous inquiétons du financement des programmes à cause des incertitudes liées aux ressources exceptionnelles.

En conséquence, les membres du groupe communiste républicain et citoyen voteront contre les crédits de la mission « Défense ».

Debut de section - PermalienPhoto de Aymeri de Montesquiou

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’honneur et le courage de nos soldats, qui mettent leur vie au service de la défense de la nation, sont respectés par tous dans cet hémicycle.

Monsieur le ministre, nous rendons hommage à votre engagement sincère en faveur de la défense nationale, aux côtés de nos troupes, et à votre disponibilité envers les parlementaires.

Vous avez élaboré le Livre blanc de la défense et engagé la loi de programmation militaire en faisant, à juste titre, le choix de maintenir l’ensemble des capacités de notre pays dans un contexte d’économies nécessaires.

Mais c’est un choix qui a une incidence financière lourde.

L’équilibre de cette deuxième annuité de la LPM qui s’inscrit dans le projet de loi de finances pour 2015 est très fragile.

Le général de Villiers, chef d’état-major des armées, avec beaucoup de précautions oratoires liées à sa fonction, l’a répété tout au long de son audition par la commission des affaires étrangères : le budget est taillé au plus juste, il n’y a plus de marges, on ne peut aller plus loin sans risque de rupture de l’équilibre de la LPM.

Monsieur le ministre, vos choix budgétaires nous alarment. Vous avez reconnu avec honnêteté que le montant réel des actifs cessibles était probable mais non pas certain, et que le calendrier de la vente des fréquences de 700 mégahertz était hypothétique à la date prévue et pour un montant assuré.

Cette réalité nous inquiète fortement.

Vous sous-entendez donc vous-même que faire reposer le budget de la défense pour 2015, d’un montant total de 31, 4 milliards d'euros, sur 2, 3 milliards d'euros de ressources exceptionnelles est extrêmement périlleux. La Cour des comptes s’alarme des nombreux aléas qui affectent les montants prévus par la LPM ; elle déconseille – sans, hélas, réussir à dissuader – de recourir aux ressources exceptionnelles, surtout pour équilibrer les crédits de la défense, alors que nos forces sont engagées.

Des ressources aléatoires ne peuvent constituer un socle budgétaire ; elles doivent être remplacées par des ressources certaines. Si les cessions immobilières peuvent éventuellement être réalisées pour le montant prévu et dans les délais fixés – quoique ! –, la vente des fréquences de la bande des 700 mégahertz, pour un gain de l’ordre de 2, 1 milliards d'euros, soulève de multiples difficultés. En effet, elle est liée aux négociations internationales en cours qui rendent incertains le montant et la date de réalisation. Votre budget, fondé sur une perception du produit de la vente à la fin de l’année 2015, est dangereusement optimiste et rend le calendrier retenu trop aléatoire. Où trouverez-vous les ressources de substitution ?

Le montage des sociétés de projet, solution « innovante », permettra, certes, de répondre au besoin urgent de fonds. Mais qu’en sera-t-il sur le long terme ? Ces sociétés sont financées par le produit des cessions de participation d’entreprises publiques pour acquérir du matériel militaire auprès du ministère afin de le lui louer par la suite ! Constituent-elles une opération véritablement sûre et sage ? On peut émettre des doutes. Il s’agit d’une technique de débudgétisation appliquée à l’armement. Nous sommes déroutés par un mécanisme très innovant dans le contexte militaire, j’en conviens. Cependant, n’y a-t-il pas mélange inopportun des genres, car sont en cause des armes létales ?

En revanche, le programme d’investissements d’avenir a l’avantage d’assurer des ressources sûres ; il finance des projets du Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives, le CEA, et du Centre national d’études spatiales, le CNES. La direction générale de l’armement n’étant pas éligible, la question du changement de son statut a été avancée.

Ce sont les axes préconisés dans le rapport de l’Inspection générale des finances, l’IGF, et du Contrôle général des armées, le CGA, remis au ministère des finances au mois de juillet dernier, mais dont les députés et les sénateurs n’ont pas eu connaissance, malgré leurs demandes pressantes et répétées. Sont-ils l’objet d’un manque de confiance ou de considération ?

Par ailleurs, quelles seraient les implications de la transformation en établissement public à caractère industriel et commercial ? Les pistes de changement de statut évoquées sont-elles abandonnées ?

Cela étant, la sous-budgétisation chronique des OPEX atteint, cette année, un seuil inégalé et très inquiétant. Le coût prévu de 450 millions d’euros en loi de finances initiale pour 2014 fut loin du compte final, plus de un milliard d'euros ! Le nombre d’hommes déployés sur les théâtres extérieurs était alors environ de 10 000, il sera cette année de 20 000 ! Cette budgétisation est plus qu’imprudente, elle est insincère.

Faut-il être présent au Mali ? Faut-il être présent en Centrafrique ? Faut-il être un coupe-feu entre Israël et le Liban ? Faut-il être sur le front de la lutte contre Daech ? Oui, sans aucun doute, tant pour notre sécurité que pour celle de l’Union. Néanmoins, la France n’a pas les moyens d’être le gendarme européen. Il est impératif de définir et d’exiger une participation financière des autres membres de l’Union, afin de soutenir l’effort français de défense des intérêts européens et de maintien de la paix dans des régions du monde où se joue la sécurité de l’Union.

La construction européenne est minée par les interrogations. Proposons donc une mutualisation des moyens militaires européens ; défendons le projet d’un livre blanc de la défense européenne ; relançons cette Europe de la défense qui nous fait si cruellement défaut. Je ne peux pas croire que celle-ci soit illusoire. Ainsi, le partenariat franco-britannique a toujours été le moteur de la défense commune, et le traité de Lancaster House de 2010 souligne la nécessité de « faire face ensemble à de nouveaux défis » et d’avoir « des capacités de défense robustes, qui puissent être déployées rapidement et puissent agir ensemble et avec un grand nombre d’alliés ».

Nous devons absolument bâtir le socle d’une défense européenne renouvelée. Monsieur le ministre, quelle position défendrez-vous auprès de la nouvelle Commission ? Quelle devrait être l’articulation de la défense européenne avec l’OTAN et nos alliés américains ? Ces derniers, malgré quelques gesticulations pour exprimer leur mécontentement quant à la crise ukrainienne, déplacent le centre de gravité de leur défense vers l’Asie du Sud-Est. Il est temps que les Européens assument leur défense s’ils ne veulent pas demeurer dans l’alignement, voire même dans la sujétion.

Afin de ne pas subir les effets de l’incertitude, nous devons avoir la capacité d’anticiper, de réagir et de peser sur les évolutions mondiales. Cette ambition, la vôtre comme la nôtre, est traduite dans le stratégique programme 144 « Environnement et prospective de la politique de défense » et dans la fonction stratégique « connaissance et anticipation ».

Préparons l’avenir en préconisant de mutualiser, à l’échelle de l’Union européenne, la prospective et la recherche dans les domaines de l’aéronautique, du spatial ou de l’armement, en lien avec une industrie performante, car notre pays excelle dans ces domaines. La cybersécurité et le renseignement doivent devenir une priorité européenne ; l’absence de coopération et de coordination fragiliserait en effet considérablement leur fiabilité. Au mois de mars dernier, Jean-Louis Carrère s’alarmait et montrait à quel point notre défense était en danger. Il soulignait que « sans une diplomatie appuyée sur un outil militaire bien dimensionné, l’influence de la France et sa capacité à défendre sa place, ses intérêts et ses ressortissants connaîtraient un déclassement très significatif ». En deçà de 1, 5 % du PIB, la LPM est à la limite de mettre en danger notre défense nationale. Nous entrons dans l’incertitude dès le seuil de 1, 3 % franchi. Monsieur le ministre, ne nous faites pas partager le constat désabusé du doge de Venise au père de Desdémone : « Il vaut encore mieux se servir d’une arme brisée que de rester les mains nues. »

Il est de tradition de ne pas voter contre le budget de la défense. Le général de Villiers parlait d’une « année de vérité ». Or les crédits de votre ministère pour 2015 suscitent une inquiétude, hélas !, très justifiée.

Nous respectons votre action et nous sommes convaincus que, plus que tout autre, vous êtes soucieux de la vie de nos soldats.

Certains membres du groupe UDI-UC voteront ce budget ; certains s’abstiendront, notamment les rapporteurs pour avis ; d’autres, enfin, voteront contre pour manifester leur protestation à l’égard des incertitudes du budget. Mais nous avons tous comme objectif de vous aider à trouver les ressources nécessaires à la défense de notre pays. §

Debut de section - PermalienPhoto de Jeanny Lorgeoux

Madame la présidente, sénatrice émérite du Loir-et-Cher, monsieur le ministre, mes chers collègues, deux grandes lignes de force sillonnent le budget de la défense pour 2015 : la cohérence et l’intelligence.

Je commencerai par évoquer la cohérence.

Le projet de loi de finances fait le choix de la cohérence avec les trajectoires tracées par la loi de programmation militaire, que notre assemblée a approuvée, dans un consensus politique suffisamment rare pour qu’il soit relevé. Je salue tous mes collègues, quelles que soient les travées sur lesquelles ils siègent, qui y ont contribué. Nous n’ignorons pas les difficultés concernant la réalisation des ressources exceptionnelles ou la mise en place des sociétés de projet – les émérites rapporteurs du programme 146 nous les ont rappelées. Le président de la commission des affaires étrangères, Jean-Pierre Raffarin, en a d’ailleurs appelé au chef des armées lui-même, avec une grande honnêteté intellectuelle que je salue, pour que l’enveloppe sanctuarisée de 31, 4 milliards d’euros soit respectée. Tout cela est vrai, dura lex, sed lex

Mais il faut dire aussi que, dans ce budget, les priorités de la LPM sont respectées, mises en œuvre, déclinées. J’en donnerai quelques illustrations.

D’abord, 740 millions d’euros de crédits sont consacrés à la recherche et aux études, et les crédits d’acquisition atteindront 16, 7 milliards d’euros.

Ensuite, des équipements importants seront commandés ou livrés : Daniel Reiner et Jacques Gautier ont évoqué l’avion MRTT, le programme Scorpion, les quatre avions Phénix, les huit hélicoptères NH90, les Rafale, les hélicoptères Tigre, la frégate multi-missions, les vingt-cinq VBCI, véhicules blindés de combat d’infanterie…

Enfin, les crédits du maintien en condition opérationnelle, le MCO, si cher – à juste titre – à M. le ministre, progresseront, comme l’an passé d’ailleurs, de 4, 5 % en 2015, pour remonter vers les normes de l’OTAN.

J’en viens maintenant à la seconde ligne de force : l’intelligence, dans les deux acceptions du terme naturellement.

La montée en puissance des capacités en matière de cyberdéfense, de renseignement, de connaissance et d’anticipation se poursuit à un rythme rapide. Elle nous permettra de faire face à la menace quand terrorisme et révolution numérique se percutent pour donner ce que je pourrai appeler, par un raccourci réducteur, le « djihad 2.0 », un terme très moderniste.

Des exemples ? Je pense à l’acquisition prévue d’un troisième système de drone MALE, dénommé Reaper. Chacun sait les résultats considérables enregistrés avec l’acquisition de nos deux premiers drones positionnés à Niamey. Des dizaines de chefs terroristes ont ainsi pu être neutralisés.

Autre exemple, ce projet de budget pour 2015 ouvre une nouvelle phase pour le CERES – je vise non pas le centre d’études de Jean-Pierre Chevènement, mais le programme de satellites d’écoute électromagnétique pour la surveillance de certaines zones, comme, là encore, la bande sahélo-saharienne.

On peut citer également la montée en puissance des moyens des services de renseignement. Je parlerai à cet égard de la direction du renseignement militaire, la DRM, un service de renseignement de 1 600 personnes qui dépend du chef d’état-major des armées. Son rôle est d’offrir une appréciation autonome de la situation militaire et d’éclairer la décision pour la conduite des opérations. La DRM est mobilisée sur tous les fronts, de l’opération Barkhane à l’Irak et sans doute ailleurs aux frontières orientales de l’Europe. Elle a entrepris une mutation très importante, et son expertise se consolide, notamment dans le renseignement image.

Détecter les menaces d’ordre militaire, les surveiller, analyser et identifier les objectifs, recouper, analyser, valider, diffuser le renseignement d’intérêt militaire : on voit bien l’importance de ces missions dans le monde actuel, où les menaces de la force coexistent avec celles de la faiblesse, et où nous devons faire face à la fois à des États proliférants dans le domaine nucléaire et à des groupes terroristes qui savent se diluer, se recomposer, et qui disposent parfois de moyens militaires supérieurs à ceux de certains États.

Dernier exemple de cette priorité à l’intelligence, on peut noter la montée en puissance des capacités cyber au sein du ministère de la défense. Avec « l’état-major cyber », avec le CALID, le Centre d’analyse de lutte informatique défensive, avec la montée en puissance des capacités cyber à la direction générale de l’armement, avec un pôle qui se constitue en Bretagne, avec les exercices en grandeur et en temps réels, tels le récent exercice DEFNET, avec, surtout, son pacte « cyber », le ministère de la défense construit graduellement, patiemment, une réponse cohérente, sérieuse, adaptée, structurée à la cybermenace.

La cohérence et l’intelligence sont mises au service de l’efficacité des armes de la France et du renforcement de la fonction « connaissance anticipation » : autant de réelles raisons d’adopter ce projet de budget qui, n’en déplaise au Front national, préserve l’essentiel national. §

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Gautier

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, voilà tout juste un an, le Parlement adoptait la loi de programmation militaire qui affichait des ambitions fortes dans un cadre budgétaire contraint.

Monsieur le ministre, vous reconnaissiez alors que cette loi était fragile et que toutes les recettes devraient être au rendez-vous dans la durée.

À ce moment-là, la France envisageait de réduire très fortement sa présence militaire au Mali, attendait les contingents européens et onusiens pour alléger son dispositif en République centrafricaine, et n’envisageait pas de nouveaux théâtres d’opérations.

Un an plus tard, nous avons dû redéployer notre dispositif au Sahel avec l’opération Barkhane en vue de décloisonner notre action et couvrir le Mali, le Niger, le Burkina Faso, la Mauritanie et le Tchad face à la pression terroriste.

Mais nous avons dû intervenir de nouveau en force au nord du Mali pour arrêter des regroupements djihadistes.

Nous sommes toujours présents en République centrafricaine où, comme au Mali, la faiblesse des contingents onusiens nous oblige à ne pas baisser la garde et à maintenir un dispositif important. Depuis l’été dernier, nous sommes également présents au Moyen-Orient dans le cadre d’une coalition pour stopper puis réduire Daech, qui menace la stabilité de la région et de nos pays.

Voilà deux semaines, pour la première fois depuis près de cinquante ans, nos avions ont frappé le même jour des cibles distantes de plusieurs milliers de kilomètres au nord du Mali et en Irak. Nos troupes, avec professionnalisme, efficacité et volontarisme, sont présentes sur de nombreux théâtres ou prépositionnements, souvent en surtension, avec, parallèlement, une surutilisation et une usure de nos matériels et une consommation importante de missiles, bombes et munitions dont les stocks se réduisent.

Pourtant, dans le même temps, les crédits de la défense sont fragilisés par des incertitudes ; certains parlent même d’insincérité.

Le Président de la République est le chef des armées. Il ne peut, chaque jour, demander plus aux hommes et aux femmes de la défense sans leur donner les moyens pour accomplir leurs missions.

Le budget des OPEX, on le sait, sera dépassé ; la défense contribuera à financer ce surcoût à hauteur de 20 %. Monsieur le ministre, c'est satisfaisant au regard de ce que nous aurions pu avoir à payer.

Les reports de charges en fin d’exercice s’aggravent légèrement par rapport à l’année 2013, dépassant les 3, 5 milliards d’euros. Cette pratique, qui perdure depuis des années, n’est pas – reconnaissons-le ! – de bonne gestion.

Nous en avons longuement parlé, les REX risquent surtout de ne pas être au rendez-vous.

Face à ces réalités, les hauts responsables français, le Président de la République et le Premier ministre, ont qualifié la défense de « priorité ». Il convient donc de donner des instructions à Bercy pour que ce ministère cesse d’utiliser la défense comme variable d’ajustement.

Pour 2015, l’enjeu principal, au-delà de la difficile réduction supplémentaire des effectifs, reste la réalisation des programmes d’investissement. Je l’ai dit, je regrette l’absence des crédits pour un programme d’études amont en vue de la réalisation d’un drone MALE européen à l’échéance 2020–2025, alors que les industriels sont prêts à travailler ensemble. La défense doit disposer, en temps et en volume, de la totalité des ressources, y compris la compensation des 2, 1 milliards d’euros de REX. En l’absence de celle-ci, la solution du PIA nous semblait intéressante. J’ai indiqué, en revanche, les réserves que m’inspirait la complexité de la mise en œuvre des sociétés de projet.

Monsieur le ministre, pourquoi ne pas faire simple et ne pas étudier, comme cela a été proposé, une alternative strictement financière reposant sur une convention de mandat, c’est-à-dire un prêt de la part d’un établissement financier pour bénéficier des taux d’intérêts actuellement très bas ?

La réponse du Président de la République au président de la commission des affaires étrangères, Jean-Pierre Raffarin, a apporté un point positif. Celui-ci l’a dit, le montant de 31, 4 milliards d’euros a été écrit noir sur blanc. En revanche, le Président de la République évoque encore les cessions des fréquences, le montage des sociétés de projet. Pis, il envisage un report des financements au début de l’année 2016, c’est-à-dire trop tard pour commander en temps et en heure les équipements, en pratiquant une forme de cavalerie budgétaire.

Monsieur le ministre, dans cette enceinte, nous connaissons tous votre engagement. Nous vous demandons d’étudier toutes les pistes, y compris les plus simples, et d’être le rempart de la défense face aux coups successifs de Bercy.

Parce que ces équipements correspondent à un besoin urgent de nos armées, parce que les hommes et les femmes de la défense s’engagent sans réserve et risquent leur vie, parce que la France doit être présente auprès des nations amies agressées et faire face au terrorisme, je ne peux voter contre les crédits de la mission « Défense ». Néanmoins, compte tenu des faiblesses et des incertitudes que je viens d’évoquer, à titre personnel, je m’abstiendrai.

Monsieur le ministre, les hommes et les femmes de la défense vous font et nous font confiance. Alors, ne les décevons pas et donnons à nos armées les moyens dont elles ont besoin ! §

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Madame la présidente, monsieur le président du Sénat, monsieur le ministre, mes chers collègues, parce que des militaires risquent leur vie tous les jours au combat pour notre sécurité et celle de nos partenaires, l’armée doit avoir les moyens d’exercer sa mission, ce que le présent budget lui assure.

Ces femmes et ces hommes, je veux les saluer ici pour leur dévouement, leur professionnalisme et les sacrifices qu’ils font dans le cadre de la réalisation de leur mission, que ce soit au Mali, au Liban, en République centrafricaine, en Irak, ou ailleurs dans le monde, mais aussi, ne l’oublions pas, sur le territoire national.

Je veux également rendre un hommage appuyé à celles et ceux qui ont disparu en accomplissant leur devoir. La nation leur doit beaucoup et notre mémoire est là pour conserver le souvenir de leurs actes.

C’est pour ces raisons que ce budget est singulier. Il l’est de par les enjeux auxquels il répond et parce qu’il permet de financer les missions accomplies ; il l’est aussi parce qu’il permet de garantir la sécurité de nos concitoyens, d’assumer nos responsabilités internationales et de participer au redressement des comptes publics. Le budget de la défense, c’est tout cela à la fois.

Telle est l’ambition affichée et constante du Président de la République, qui se veut le garant de l’indépendance nationale. D’ailleurs, lors de la réception au ministère de la défense pour la fête nationale de 2012, ne déclarait-il pas : « Je veillerai particulièrement à la pérennité, à la continuité, à l’avenir de nos capacités militaires. » Nous y sommes !

Cette ambition fait écho à un environnement international et sécuritaire de plus en plus incertain et dégradé. Les crises se sont multipliées, accompagnées de leur lot de déstabilisations.

Ainsi, au Mali, la France est intervenue au mois de janvier 2013 à la demande des autorités politiques légitimes, afin d’empêcher l’émergence d’une entité terroriste qui menaçait l’existence même de l’État malien. Outre un sanctuaire terroriste, dont il fallait empêcher la constitution, c’est toute la stabilité de la sous-région qui était l’enjeu de notre intervention.

Cette année, l’opération Barkhane a pris la suite de l’opération Serval, afin de contrer la menace terroriste avec l’aide de nos partenaires africains. La déstabilisation de la bande sahélo-saharienne ayant des répercussions sur les ressortissants européens, nous avons l’espoir que ces deux opérations fassent évoluer les perceptions de nos alliés à propos de notre stratégie en Afrique.

Plus près de nous, la crise ukrainienne rappelle, quant à elle, combien la paix est fragile, y compris sur notre continent. Les frontières de l’Ukraine sont aujourd’hui remises en cause, et la Russie, par les tensions qu’elle génère, éprouve tout le système de sécurité continental. Le Président de la République a donc eu raison de suspendre la livraison des bâtiments Mistral, et je veux en cet instant saluer une décision pleine de sagesse. §

Imaginez un seul instant que ce bâtiment, dédié à la projection de forces, soit déployé au large de la Crimée ! Qu’en penseraient nos partenaires européens et nos alliés américains ? Quelle crédibilité aurait notre politique extérieure si nous l’orientions sur de simples impulsions mercantiles ?

Si la crise ukrainienne met en danger les fondements sur lesquels reposait le système de sécurité sur le continent européen, Daech est un signal d’alarme adressé à nos démocraties. Lutter contre cette organisation, tout en respectant la légalité internationale, constitue pour la France et ses alliés un défi qu’il faut relever. Tout comme AQMI dans le Sahel, Daech véhicule une idéologie totalitaire vouant à la destruction ses opposants. Ce sont les valeurs sur lesquelles sont adossées nos sociétés libres et démocratiques qui sont en jeu.

Ce bref état des lieux confirme le diagnostic posé par le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale de 2013. Dès lors, maintenir notre effort de défense est une impérieuse nécessité, afin que soit assurée la sécurité tant de nos concitoyens que de nos intérêts vitaux. Il s’agit de permettre à la France de tenir son rang sur la scène internationale.

C’est donc en responsabilité que le Président de la République, dès le début de son quinquennat, a souhaité sanctuariser les efforts consentis par notre pays en matière de défense, malgré la contraction budgétaire. Nous le constatons aujourd’hui.

Cette volonté a pris corps non seulement avec la démarche instaurée par le Livre blanc, mais aussi, depuis 2012, au travers des différents budgets, qui ont respecté les projections de la loi de programmation militaire. Cette dernière, je le rappelle, a recueilli un large assentiment au sein de cet hémicycle et a permis de préciser les éléments matériels et budgétaires de cette nouvelle stratégie pour cinq ans, à savoir le maintien de notre dissuasion nucléaire avec ses deux composantes et notre capacité à entrer en premier sur un théâtre d’opérations, ce qui suppose de conserver notre force pré-positionnée.

Avec 31, 4 milliards d’euros, dont 17 milliards d’euros en investissement, ce budget permet à notre pays de continuer à conserver ses capacités militaires. Les choix effectués préservent également les capacités et les perspectives de l’industrie de la défense.

Ce budget respecte aussi la perspective de long terme qui a guidé la rédaction de la loi de programmation militaire. En effet, il traduit la priorité accordée à la préservation de l’industrie de défense, gage d’autonomie stratégique et de dynamisme économique, et à la recherche, en prévoyant un effort marqué en faveur des études en amont.

Maintenir les moyens de la France pour assumer son ambition de puissance et de paix, tel est le credo de cette démarche qu’incarne encore cette année le budget de la mission « Défense ».

Dans L’Armée nouvelle, Jean Jaurès posait le principe suivant : « Tout ce que la France fera pour ajouter à sa puissance défensive accroîtra les chances de paix dans le monde. Tout ce que la France fera dans le monde pour organiser juridiquement la paix et la fonder immuablement sur l’arbitrage et le droit ajoutera à sa puissance défensive. » Je veux croire que notre politique de défense participe de cette pensée.

Enfin, je veux livrer une perspective européenne. La crise ukrainienne, que j’ai évoquée, vient rappeler les limites de la politique européenne, notamment en matière de défense. Alors que le monde réarme, l’Europe désarme, et les dépenses militaires asiatiques dépassent désormais celles de notre continent. Aussi, les efforts de la France en matière de défense paraissent singuliers, voire isolés, mais ils sont indispensables.

La défense ne peut demeurer le rocher de Sisyphe de la construction européenne.

Alors, monsieur le ministre, face à tous les enjeux qui se trouvent devant nous, le groupe socialiste soutient l’engagement du Président de la République et du Premier ministre, que vous relayez ici, de donner les moyens à notre armée d’assurer ses missions au service de la paix et de la liberté, en France et dans le monde.

Oui, monsieur le ministre, sans surprise, nous soutiendrons votre budget. §

Debut de section - PermalienPhoto de Christiane Kammermann

Madame la présidente, monsieur le président du Sénat, monsieur le ministre, mes chers collègues, après les interventions exhaustives des différents rapporteurs, je souhaiterais attirer votre attention sur des sujets moins chiffrés, mais plus spécifiques.

Avant d’aller plus loin dans mon propos, je tiens à rendre hommage à toutes les femmes et à tous les hommes de la défense, qui font la fierté de notre pays. Vous comprendrez également que, en cet instant, j’ai également une pensée particulière pour tous les soldats français engagés depuis des années dans la FINUL, au Liban. En de nombreuses occasions, et encore tout récemment, j’ai pu les rencontrer au Sud-Liban. Leur courage et leur professionnalisme honorent la France.

Monsieur le ministre, dans un premier temps, je veux vous faire part de mes plus profondes inquiétudes quant à la situation de l’armée en tant qu’institution.

Combien de fois, à l’occasion de l’examen de la loi de programmation militaire ou des crédits budgétaires, n’avons-nous pas entendu dire que notre défense était « à l’os » ? Cette expression témoigne d’une certaine ingratitude au regard des efforts consentis par cette institution.

Peu de corps d’état ont été capables d’une telle adaptation, face tant aux menaces qu’aux contraintes budgétaires, qui ont fortement ébranlé leurs conditions de travail. Cela n’a pas pour autant altéré l’adhésion des hommes et des femmes du ministère, qui restent prêts au sacrifice ultime pour leur patrie.

Du fait de la professionnalisation, les armées doivent s’adapter à un turn over, ce qui nécessite une politique de gestion des ressources humaines reposant sur l’anticipation et la réactivité. Cette politique doit être adaptée aux besoins des hommes et au ministère. Par ailleurs, les contrats courts supposent que l’armée puisse encore être attractive pour attirer les jeunes recrues dont elle a besoin.

Nous le savons, l’un des défis en matière de ressources humaines tient autant au dépyramidage qu’à la fidélisation des engagés.

Alors, face aux difficultés inhérentes à la condition des soldats, face aux problèmes de gestion des soldes, qui, n’ayons pas peur de le dire, sont peu attractives par rapport à l’engagement, et, enfin, face à un certain manque de considération de la part de la société civile, il est à craindre que l’armée française ne peine à séduire.

Parallèlement, le moral de nos armées est en berne et la confiance vis-à-vis de leur institution s’étiole. Nos soldats s’interrogent et doutent quelque peu de leur avenir.

M. Pêcheur, nouveau président du Haut comité d’évaluation de la condition militaire, se dit très préoccupé de l’incidence du rythme des réformes, qui ont eu des conséquences parfois brutales sur les vies personnelles des militaires.

Monsieur le ministre, un nouveau pilotage des ressources humaines sera développé à partir du mois de janvier prochain. Le programme 212 crée treize budgets opérationnels de programme qui seront confiés à des gestionnaires de personnel, lesquels disposeront des ressources dont ils ont besoin, d’un point de vue tant quantitatif que qualitatif.

Ce dispositif semble positif, mais au vu de l’échec du système Louvois, il importe de tirer les leçons des erreurs du passé et d’anticiper d’ores et déjà de potentielles failles qui déstabiliseraient encore plus les personnels. Par ailleurs, plutôt que de parler du système Louvois, il serait plus adapté de parler de « l’écosystème Louvois ». Ces ratés en séries témoignent en tout cas du retard de la modernisation du mécanisme de gestion de l’armée française.

Il n’est point de défense sans ressources humaines : ce principe est essentiel. Pourtant, la poursuite des suppressions de postes me semble inquiétante, voire incohérente face à l’augmentation du nombre d’OPEX, ce qui implique de nombreuses rotations et un maintien en condition opérationnelle des hommes et des matériels.

Je vous rappelle que, au mois de juillet 2012, un rapport de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, adopté à l’unanimité, était intitulé : « Forces armées : peut-on encore réduire un format juste insuffisant ? » Monsieur le ministre, il est à croire que ce rapport ne vous a pas inspiré, ou alors peu …

Avant de conclure, mes chers collègues, je veux insister sur conditions de nos militaires en OPEX.

Certains retours d’expérience sont saisissants et alarmants. Au Mali, l’un des problèmes logistiques est celui de l’acheminement et du rationnement de l’eau pour nos soldats. Près de 200 militaires ont été victimes de coups de chaleur. Les fortes températures ont mis en évidence le fait que les fournitures et les équipements semblaient être de bien mauvaise facture. D’ailleurs, on le sait, avant chaque départ en OPEX, les soldats se fournissent dans les surplus spécialisés et payent avec leurs propres deniers leur paquetage.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Sido

C’est dommage, car c’est intéressant !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Certes, mais Mme Kammermann a déjà dépassé son temps de parole d’une minute et demie !

Debut de section - PermalienPhoto de Christiane Kammermann

Je conclus donc.

La France se doit de créer les conditions optimales pour que ses soldats puissent exercer leur mission en toute sécurité, mais aussi dans la dignité. Pour ma part, je pense que le compte n’y est pas, ce qui n’est pas acceptable. Pour cette raison, je voterai contre ce budget. §

Debut de section - Permalien
Jean-Yves Le Drian, ministre de la défense

Madame la présidente, monsieur le président du Sénat, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens tout d’abord à remercier les rapporteurs et les intervenants de la qualité de leur rapport ou de leurs propos. C’est une habitude pour le budget de la défense, et je le constate de nouveau avec beaucoup de considération.

Je voudrais vous faire partager d’emblée ma conviction que le projet de loi de finances pour 2015 permettra, pour le ministère de la défense, l’application intégrale de la loi de programmation militaire votée, ici même, en décembre dernier.

J’ai bien pris note des interrogations de plusieurs orateurs et de certains rapporteurs et je vais essayer de leur répondre de manière circonstanciée. Mais, auparavant, je rappellerai rapidement le contexte dans lequel cet examen intervient.

Plusieurs d’entre vous l’ont dit, en ce moment même, nos armées, avec le professionnalisme et le dévouement que nous leur connaissons, interviennent sur plusieurs théâtres difficiles pour des missions essentielles à notre sécurité. J’ai pu apprécier et constater l’unanimité sur l’ensemble des travées pour reconnaître cette action, ce courage et pour assurer le soutien de la Nation à nos soldats engagés à l’heure où nous parlons.

L’actualité de ces derniers mois, en particulier, a été marquée par une aggravation inédite des menaces pesant sur nos intérêts de sécurité et par une amplification de nos engagements extérieurs. Tout cela met en lumière l’importance du vote qui nous rassemble ce soir.

Je ne pourrai pas répondre à l’ensemble des intervenants, mais la manière dont nous travaillons avec la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées me permet d’entretenir avec vous, mesdames, messieurs les sénateurs, un dialogue régulier et extrêmement fécond.

Je me limiterai à un certain nombre de points.

D’abord, je reviens rapidement sur la gestion 2014, puisque vous avez eu transmission du bilan semestriel détaillé en application de l’article 8 de la loi de programmation militaire, article 8 que vous aviez vous-mêmes suggéré.

La trajectoire de la loi de programmation militaire en 2014 a été respectée, en totalité.

Elle est respectée en matière de ressources humaines, puisque la cible de déflation pour 2014 de 7 881 emplois a été atteinte. Cela s’est traduit par une réduction significative de la masse salariale, désormais maîtrisée, comme certains d’entre vous ont bien voulu le reconnaître, puisqu’elle diminue en 2014 de près de 400 millions d’euros, conformément à la loi de finances initiale. La persistance des dysfonctionnements du logiciel Louvois sur laquelle je reviendrai a toutefois entraîné, M. del Picchia l’a rappelé, un surcoût de l’ordre de 160 millions d’euros, mais la masse salariale exécutée en 2014 diminuera de 240 millions d’euros.

La loi de programmation militaire en 2014 a été respectée aussi au plan capacitaire et industriel. Vous avez rappelé, monsieur Pozzo di Borgo, madame Demessine, l’importance qui s’attache au maintien du niveau de la préparation et de l’activité opérationnelles. J’avais dit, ici, à plusieurs reprises, la nécessité de maintenir l’entretien, le MCO, un élément stratégique qu’il faut reconnaître davantage. Pendant de nombreuses années, on a joué beaucoup sur la facilité qui consiste à réduire le MCO à la fois par des ponctions sur les stocks et par des baisses de crédits affectés. J’ai décidé de stopper et d’inverser cette tendance.

C’est ainsi que les crédits progressent de 4, 3 % par an en moyenne. Cet effort a été respecté en 2014, et le sera aussi en 2015, et j’ai pour objectif de tout mettre en œuvre pour retrouver, à la fin de la loi de programmation militaire, les normes d’activité OTAN. Cela suppose une permanence de l’effort et une très grande vigilance, ce à quoi je m’emploie.

La trajectoire de la LPM est également respectée pour ce qui est des programmes d’armement. Tous les programmes ont été évoqués par les uns et par les autres pour l’année 2014 ou pour les engagements 2015, je n’y reviens pas. Relevons toutefois la notification de la commande de 12 avions MRTT, qui était attendue depuis très longtemps, ainsi que l’engagement sur le programme Scorpion. Je serai après-demain à Varces, auprès de la 27e brigade d'infanterie de montagne, et je pourrai annoncer officiellement la notification de la commande du programme Scorpion, dont chacun sait ici l’importance, cruciale, pour notre armée de terre.

En réalité, et c’est pourquoi je disais que la loi de programmation militaire est totalement respectée, tous les programmes d’armement en 2014 et tous les programmes d’armement en 2015 seront engagés conformément à la loi de programmation, bien que, en 2014 et en 2015, nous garantissions l’augmentation des crédits affectés au maintien en condition opérationnelle.

La trajectoire est donc parfaitement respectée.

Debut de section - Permalien
Jean-Yves Le Drian, ministre

Elle l’est aussi en ce qui concerne les OPEX, mais j’y reviendrai.

On m’interrogeait régulièrement sur le surcoût qui, au-delà du socle des 450 millions d’euros inscrits, pouvait éventuellement ne pas être au rendez-vous. Ce surcoût s’élève à 605 millions d’euros. Il est au rendez-vous parce que ce surplus a été intégralement ouvert par le décret d’avance publié ce jour au Journal officiel sur le programme 178.

Donc, l’ensemble de la trajectoire est respecté. Il reste une interrogation, une préoccupation, que vous avez relevée, et que je partage, s’agissant du report de charges. Les annulations de crédits en fin de gestion devraient le dégrader transitoirement en fin d’année. Mais, d’une part, cette situation ne met pas en péril les trésoreries des fournisseurs, au prix d’une attention très forte de mes services, notamment au profit des PME ; d’autre part, en tenant compte des crédits dont la consommation n’interviendra qu’en 2015, le report de charges du ministère devrait globalement, dès le début de l’année 2015, se stabiliser globalement à son niveau de la fin de 2013.

Cela étant, il ne faut pas obligatoirement s’en réjouir, mais on sait que le report de charges est une vieille histoire, une bosse que, année après année, les différents ministres de la défense poussent avec plus ou moins de force et de bonheur. En tout cas, je partage les observations qui ont été faites au cours du débat sur ce point, et j’ai vraiment la conviction que l’objectif reste de résorber progressivement ce report de charges.

Mesdames, messieurs les sénateurs, nous sommes totalement dans la trajectoire et nous le serons totalement aussi en 2015.

Je suis totalement déterminé à faire en sorte que la sanctuarisation des 31, 4 milliards d’euros en crédits de paiement pour 2015 soit totalement respectée, conformément aux vœux et aux engagements du Président de la République.

J’entends bien que le budget et la loi de programmation militaire avec ses annuités sont difficiles à tenir, mais nous sommes au même niveau de montants et dans la même logique financière que lors des exercices précédents : nous aurons 31, 4 milliards d’euros en 2015 ; nous avions 31, 4 milliards d’euros en 2014 et 31, 4 milliards en 2013, ainsi qu’en 2012. Il faut remonter à 2011 pour constater qu’il y avait moins.

Donc, il y a là une permanence de l’effort de la Nation pour sa défense que je tiens à saluer et qui sera aussi au rendez-vous de 2015.

M. Daniel Reiner acquiesce.

Debut de section - Permalien
Jean-Yves Le Drian, ministre

Sur le budget de la défense pour 2015, j’ai entendu les observations du rapporteur spécial, M. Dominique de Legge, j’ai entendu les remarques des uns et des autres, et les observations du président de votre commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, M. Jean-Pierre Raffarin.

Pour ce qui est des ressources exceptionnelles, les REX, nous sommes parfaitement en harmonie avec l’application de la loi de programmation, article 3, annexe 5, paragraphe 1. Quelle que soit la ressource exceptionnelle que nous mobilisons, nous sommes dans cette logique qui a été validée par le Parlement.

En l’occurrence, en 2015, il était prévu de mobiliser les recettes issues de la cession de la bande des 700 mégahertz. Comme le Président de la République l’a confirmé dans la lettre qu’il a adressée au président de votre commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, le Premier ministre a lancé la procédure destinée à concrétiser le plus rapidement possible cette cession.

Mais les versements financiers dès 2015 me paraissent aléatoires. Le Gouvernement entend donc se prémunir contre ces aléas et le Président de la République m’a autorisé à lancer une opération innovante d’acquisition de matériels militaires à travers les sociétés de projet.

Cette solution est déjà inscrite dans la loi de programmation militaire, puisqu’il est prévu la possibilité de mobiliser des cessions d’actifs pour contribuer aux ressources exceptionnelles tout au long de l’exécution. La difficulté en la matière, qui peut aussi être une chance, tient au fait que les cessions d’actifs ne peuvent être mobilisées que si elles restent des opérations en capital. Or le seul moyen de se saisir de cette chance, en application de l’article 21 de la LOLF, c’est précisément la société de projet.

Nous sommes donc dans l’application stricte de la loi de programmation militaire et de la loi organique relative aux lois de finances. Maintenant, il faut réussir ! Mais, à tous ceux qui ont fait part de leur inquiétude, j’indique que nous sommes mus par une vraie volonté d’aboutir dans les plus brefs délais. Ce n’est pas une illusion budgétaire. C’est une volonté de mettre en œuvre immédiatement ces possibilités qui s’offrent à nous.

C’est la raison pour laquelle j’ai mobilisé un groupe de travail de haut niveau regroupant à la fois des hauts fonctionnaires du ministère de l’économie, du ministère de la défense, les industriels eux-mêmes ainsi que des juristes qui accompagnent cette démarche afin d’aboutir à un résultat opérationnel à la mi-2015, pour que ce dispositif, effectivement, puisse couvrir éventuellement, si les 700 mégahertz ne sont pas au rendez-vous, les financements d’acquisitions de matériels en bonne et due forme.

J’ai annoncé devant votre commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées que j’étais disponible pour évoquer toutes ces questions avec vous et que je mènerai ces opérations dans la plus grande transparence. Au fur et à mesure des étapes de la mise en œuvre de cette société de projet, j’informerai, pour débat et pour confrontation éventuelle, la commission des affaires étrangères, parce que je sais votre attachement à la bonne réussite de cette opération. Mesdames, messieurs les sénateurs, sachez que je m’engage personnellement sur ce dossier.

Monsieur Raffarin, vous avez apprécié l’engagement politique, mais vous doutez de l’efficacité financière. Permettez-moi donc modestement d’ajouter, à vos critères d’analyse, la ténacité inébranlable du ministre de la défense sur ce sujet !

Sur le financement des surcoûts OPEX, mettons-nous bien d’accord sur le fait qu’il est utile, pour le budget de la défense, que nous restions au socle de 450 millions d’euros en investissement de départ et en loi de finances initiale. L’enjeu, en effet, est de préserver les crédits d’investissement du ministère, à la condition évidemment que les surcoûts OPEX soient totalement reversés au budget de la défense en fin d’exercice. Cela a été le cas en fin d’année 2013, c’est le cas en fin d’année 2014 et tout me laisse à penser que ce sera le cas à la fin de 2015. De toute façon, c’est la loi et vous avez veillé, mesdames, messieurs les sénateurs, à faire en sorte qu’il y ait une clause de sauvegarde permettant de la mettre en œuvre de manière incontournable.

Le socle de 450 millions d’euros n’a pas été inscrit au hasard. Il était le résultat de la situation telle qu’on la connaissait au moment du débat sur la loi de programmation militaire, c'est-à-dire avant l’intervention en RCA et au moment où nous sortions d’Afghanistan et du Kosovo, au moment aussi où nous relativisions notre présence dans la Corne de l’Afrique.

Les autres opérations sont intervenues après, et il est logique que, devant des menaces, devant des risques, des décisions soient prises par le Président de la République, qu’elles fassent l’objet d’un débat devant les assemblées et que le financement des OPEX vienne s’ajouter pour permettre le financement de ces missions supplémentaires liées à la situation internationale.

Après ces observations sur les REX et les OPEX, je voudrais souligner la solidité du projet de loi de finances pour 2015. Les crédits de la mission « Défense » seront au rendez-vous, ce qui nous permettra de poursuivre l’exécution de la loi de programmation telle qu’elle a été engagée ; soyez assurés de mon extrême vigilance à cet égard.

Je voudrais maintenant revenir rapidement sur les observations que m’ont faites certains rapporteurs, en m’excusant de ne pas pouvoir répondre à tous.

Mmes Demessine et Kammermann se sont préoccupées de la situation de nos armées et de la vie quotidienne de nos militaires. J’ai mis en place un dispositif qui devrait permettre de traiter, d’ici à la fin de l’année 2015, la plus grande partie des 700 points noirs identifiés, après enquête, et nécessitant un plan d’urgence pour les infrastructures. D’autres points noirs resteront à résoudre progressivement tout au long de la loi de programmation militaire.

Je suis très attentif aux conditions de vie des soldats en opération comme en garnison. Il importe que la réforme du soutien, d’une part, et la mise en œuvre des plans d’urgence notamment pour les infrastructures, d’autre part, soient opérationnelles rapidement. J’ai bien intégré cette préoccupation.

Concernant le Service de santé des armées, monsieur Pozzo di Borgo, il est nécessaire d’assurer la pérennisation de l’excellence médicale dont bénéficient nos armées, en particulier les blessés en opération. Cela passe par une évolution de notre dispositif, qui permettra de garder huit hôpitaux sur neuf.

La programmation de la fermeture de l’hôpital du Val-de-Grâce est due à un certain nombre de nécessités opérationnelles. La rénovation de cet hôpital impliquant d’énormes investissements, nous avons été amenés à faire des choix. Il reste suffisamment de disponibilités dans les hôpitaux de Percy et de Bégin pour que la plateforme majeure de la région parisienne puisse être réalisée sans l’hôpital du Val-de-Grâce. En tout cas, monsieur. Pozzo di Borgo, nous sommes très attentifs à la pérennité du service de santé des armées, qui se modifie et se modernise dans le cadre du programme SSA 2020, lequel permettra d’en préserver le niveau d’excellence.

M. Pintat m’a interrogé sur le secteur spatial militaire. La loi de programmation militaire y consacre des moyens considérables. Là aussi, les engagements seront respectés, puisqu’une dizaine de satellites sont prévus, soit en décision, soit en développement, au cours de la LPM. Vous les avez cités, je n’y reviendrai pas. J’en profite pour me réjouir avec vous que la nouvelle feuille de route d’Ariane 6 ait été validée. Cette décision a des conséquences directes sur notre sécurité. Vous savez que la base industrielle dans le domaine des lanceurs est duale et concerne directement la dissuasion nucléaire. Cette avancée est donc tout à fait positive.

J’indique à MM. Reiner et Gautier, spécialistes des drones, que j’ai mis en place une stratégie complète d’acquisition de drones de toutes catégories. Dès ma prise de fonctions, devant l’urgence de la situation et l’absence de choix clairs depuis trop longtemps, j’ai pris la décision d’acquérir au plus vite ce qui se fait de mieux en matière de drone MALE, à savoir les drones américains Reaper. La suite a montré que c’était le bon choix.

Nos deux premiers vecteurs ont été immédiatement engagés au Sahel. Ils font aujourd'hui la preuve de toute leur efficacité.

Je vous confirme, monsieur Gautier, l’acquisition, dans quelques semaines, d’un troisième vecteur pour l’année 2014. Je commanderai en 2015 un deuxième système complet de trois drones supplémentaires.

Sur le long terme, j’ai la volonté de lancer, avec nos partenaires allemands et italiens, la réalisation d’un drone MALE entièrement européen à l’horizon 2025.

Sur le drone tactique de l’armée de terre, le processus sera également bouclé en 2015. C’est une nécessité, mais nous sommes obligés de passer par un appel d’offres. Nous avons souhaité une mise en œuvre dans les plus brefs délais, dès 2015, conformément à la loi de programmation militaire.

Toujours conformément à la loi de programmation militaire, nous avons décidé de lancer une coopération spécifique avec nos amis britanniques pour la définition du drone de combat futur. Nous avons programmé les financements nécessaires pour ce successeur lointain de l’avion de combat. C’est une vraie anticipation, mais c’est aussi un engagement pour l’avenir que nous prenons en liaison avec la Grande-Bretagne.

Vous m’avez interrogé sur le calendrier et la méthode des prochaines restructurations. À cet égard, ma méthode est celle du pragmatisme et non celle du dogmatisme. La question n’est donc pas de savoir s’il faut privilégier les dissolutions ou l’échenillage. Il ne s’agit pas non plus de dissoudre les unes après les autres des formations opérationnelles pour faire du chiffre dans une logique financière visant exclusivement la réduction de la masse salariale ; il s’agit de conduire une réflexion de fond, tenant compte de toutes les contraintes, opérationnelles et budgétaires au premier chef, pour garantir in fine la tenue des contrats opérationnels.

Le choix des restructurations prend du temps. Se déterminer trop vite risque de nous engager prématurément dans des décisions que nous regretterions ou même que nous ne pourrions mettre en œuvre le moment venu.

L’expérience de ces deux dernières années me montre qu’il faut peser très précisément tous ces choix. Ainsi, alors qu’il était initialement prévu de fermer la base de Luxeuil, nous y avons d’abord maintenu l’escadron de Mirages 2000-5, parce que c’était indispensable, puis nous avons décidé d’installer, en 2015, l’unité d’instruction Mirages 2000.

Il convient donc d’étudier avec la plus grande attention les mesures de restructuration. Je souhaite aboutir à un plan d’ensemble rapidement, mais je ne veux pas anticiper, pour éviter les malentendus ou les choix inopportuns. Dans ces conditions, je prends le temps nécessaire pour finaliser les études, en sachant que chacun est pressé de connaître le plan général ; j’espère pouvoir y parvenir rapidement.

M. del Picchia m’a interrogé sur le logiciel Louvois.

D’une part, je n’ai jamais polémiqué sur ce dossier et ne le ferai jamais.

Debut de section - Permalien
Jean-Yves Le Drian, ministre

Il faut tirer les conséquences de ce qui s’est passé sur le dispositif de paie des soldats, mais aussi sur la chaîne de décisions qui, par son caractère peu lisible, a permis une situation aussi aberrante.

Debut de section - Permalien
Jean-Yves Le Drian, ministre

C'est la raison pour laquelle j’ai modifié les processus de décision interne en tenant compte des leçons que l’on pouvait tirer de ce désastre – j’emploie le terme à dessein - et d’une irresponsabilité collective à l’égard de nos propres soldats. Je suis donc revenu sur ce dispositif, au risque d’être parfois perçu comme autoritaire.

D’autre part, j’ai pris la décision, l’année dernière, d’arrêter définitivement le dispositif Louvois et de repartir sur la base d’un nouveau processus que je souhaite mener à la manière d’un programme d’armement. Je serai demain à la Direction générale de l’armement pour constater l’avancement de ce travail de remplacement.

Trois prototypes sont désormais livrés, parmi lesquels nous allons sélectionner un nouveau système au milieu de l’année 2015. Les deux systèmes fonctionneront en parallèle sur l’exercice 2016, en double commande, en quelque sorte, afin d’éviter toute nouvelle perturbation. À la fin de l’année 2016, il ne devrait plus y avoir qu’un seul système qui, je l’espère, sera extrêmement performant et généralisé à l’ensemble des forces.

Debut de section - Permalien
Jean-Yves Le Drian, ministre

J’aborderai enfin brièvement la question du renseignement, en vous priant de m’excuser de ne pas reprendre tous les sujets évoqués ; nous y reviendrons en commission.

Plusieurs d’entre vous, je pense en particulier à M. Lorgeoux, ont fait référence au renseignement. Il s’agit de l’une des priorités de la loi de programmation militaire, et elle est totalement respectée. Elle repose sur un équilibre entre, d’une part, un accroissement réel des moyens techniques, humains et juridiques des services et, d’autre part, le renforcement du contrôle de leurs activités, souhaité par le Gouvernement comme par vos commissions.

Les crédits affectés au renseignement ont crû, à ma demande, de plus de 17 % depuis 2012. Je considère que c’est un choix de souveraineté. En 2015, 242 postes seront créés dans ce domaine, concernant à la fois la cyberdéfense, les sciences, les langues, l’analyse. Il nous paraît indispensable que notre pays ait les moyens d’assurer l’autonomie de ses décisions. Nous en mesurons toute l’importance dans les circonstances actuelles.

Madame la présidente, monsieur le président du Sénat, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis conscient des difficultés, mais l’année 2015 est une année pivot, essentielle, déterminante pour la pérennité de la loi de programmation militaire. Je sais que l’équation est délicate, mais je sais aussi que la présente loi de programmation militaire est celle qui convient à nos armées en ce qu’elle concilie l’équilibre entre le maintien d’un effort de défense important et une contribution structurelle de la défense au redressement des comptes publics, c'est-à-dire qu’elle permet, sur le long terme, l’autonomie stratégique et la souveraineté budgétaire.

Ce budget est ambitieux. Il comporte un grand nombre de priorités pour l’équipement des forces, la recherche, l’activité opérationnelle, la cyberdéfense ou encore le renseignement. Grâce à ce budget et à l’engagement de tous derrière elles, nos armées continueront en 2015 de faire la fierté des Français en garantissant leur souveraineté et leur sécurité. Vous m’avez assuré de votre vigilance quant à ma détermination : si j’ai l’honneur de solliciter de votre part un vote favorable, c’est précisément pour mener à bien cette mission au service de notre pays !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE, de l'UDI-UC et de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Défense », figurant à l’état B.

En euros

Mission

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Défense

Environnement et prospective de la politique de défense

Préparation et emploi des forces

Soutien de la politique de la défense

Dont titre 2

18 721 819 581

18 721 819 581

Équipement des forces

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

L'amendement n° II-129, présenté par MM. J. Gautier, Reiner et Pintat, au nom de la commission des affaires étrangères, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

En euros

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Environnement et prospective de la politique de défense

Préparation et emploi des forces

Soutien de la politique de la défense

Dont titre 2

Équipement des forces

Total

Solde

La parole est à M. Jacques Gautier, rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Gautier

Dans les limites posées par l’article 40 de la Constitution et la loi organique relative aux lois de finances, la LOLF, cet amendement, adopté à l’unanimité par la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, tend à rétablir les crédits de la mission « Défense » au niveau inscrit dans le projet de loi de finances pour 2015 avant l’examen par l’Assemblée nationale et l’adoption, en seconde délibération, de l’amendement du Gouvernement réduisant de 100 millions d'euros les crédits du programme 146 pour contribuer au financement des mesures nouvelles votées par les députés.

Ces 100 millions d'euros avaient été compensés à l’Assemblée nationale par un deuxième amendement du Gouvernement faisant appel à des recettes exceptionnelles. Nous vous avons dit les craintes que celles-ci nous inspirent.

Dans ces conditions, nous proposons de rétablir ces 100 millions d'euros.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique de Legge

La commission des finances n’a pas été formellement saisie de cet amendement.

Je souscris totalement à l’objet de l’amendement : il n’est pas très correct de remplacer des recettes budgétaires certaines par des recettes exceptionnelles, dont chacun, au long de la soirée, a pu mesurer qu’elles étaient pour le moins incertaines ; M. le ministre l’a confirmé.

En même temps, je serais tenté de dire à nos collègues qui soutiennent cet amendement que la question ne porte pas, hélas, sur 100 millions d'euros, mais sur 2, 2 milliards d'euros.

Autant donc je peux être d’accord avec l’intention de nos collègues, autant je suis dubitatif quant à la réponse apportée, à la faveur de cet amendement, à la question de fond qui nous est posée.

En conséquence, je me propose de m’en remettre à la sagesse du Sénat.

Debut de section - Permalien
Jean-Yves Le Drian, ministre

M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Le Gouvernement comprend, mais ne partage pas.

Sourires.

Debut de section - Permalien
Jean-Yves Le Drian, ministre

J’ai expliqué il y a quelques instants les raisons pour lesquelles j’étais tout à fait convaincu de la justesse des choix que je proposais et de la sanctuarisation des crédits du ministère de la défense.

Encore une fois, je comprends vos interrogations, sans les partager.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. Daniel Reiner, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Reiner

Cet amendement a été adopté à l’unanimité par la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Rien d’étonnant, du reste, à ce que l’amendement soit signé par les rapporteurs pour avis du programme 146 : dans cette affaire, il s’agit de la variable d’ajustement.

Parce que c’est aussi une façon de répondre à une mauvaise manière que l’on nous a faite en touchant, au dernier moment, à un budget dont on affirmait par ailleurs le caractère quasi sacré, le groupe socialiste votera cet amendement.

Cela étant, les assurances que le ministre vient de donner au sujet de l’ensemble des REX devraient lever les derniers doutes et redonner confiance au Sénat, dont je ne comprendrais pas qu’il ne vote pas ce budget, globalement amendé. Ce serait bien étrange, et cela n’aurait pas grande signification…

Je m’adresse donc à nos collègues de la majorité : le doute est maintenant levé, alors votons cet amendement pour permettre l’adoption du budget de la défense. Cette adoption aurait une forte signification pour nos forces armées, qui attendent le soutien de l’ensemble de la représentation nationale et donc du Sénat.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. le président de de la commission des affaires étrangères.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

M. Jean-Pierre Raffarin, président de la commission des affaires étrangères. Il est clair que les forces armées ont le soutien de l’ensemble du Sénat. Chacun de nos votes est un soutien aux armées.

Marques d’approbation sur les travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

Nous comprenons votre position, monsieur le ministre, mais nous avons été assez irrités qu’en seconde délibération Bercy fasse voter une réduction de 100 millions d’euros d’un budget « sanctuarisé »… Nous avons confiance en votre parole et en votre capacité, mais nous ne pouvons pas en dire autant d’autres partenaires, cher Daniel Reiner, qui ne jouissent pas forcément d’une égale crédibilité à nos yeux.

Nous faire ce coup-là, à l’Assemblée nationale, en seconde délibération, et par un amendement déposé sur l’initiative du Gouvernement, c’est montrer que ce budget, inscrit dans une loi de programmation et sanctuarisé, est finalement aussi manœuvrable que n’importe quel autre.

Or c’est cela que nous contestons. Ce budget n’est pas manœuvrable, il est sanctuarisé : le Président de la République l’a dit et l’a écrit, ce qui est très important pour nous.

Notre vision des armées n’est pas du tout remise en cause, non plus que la détermination que nous vous connaissons, monsieur le ministre. Nous doutons simplement de la capacité du ministère du budget à appliquer les décisions du Président de la République. C’est là notre grande inquiétude.

Nous imaginons aisément que les sociétés de projet ne sont pas faisables dans notre République sans la participation de Bercy, notamment pour le montage de ce genre de dossier. Il y a donc tout lieu d’être inquiet de devoir s’adresser à un ministère qui n’est pas des plus favorables au respect de la sanctuarisation.

C’est la raison pour laquelle nous voterons cet amendement. Le fait que la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées l’ait adopté à l’unanimité montre que tous les ministères ne sont pas égaux dans notre affection !

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

L'amendement n° II-303, présenté par M. Pozzo di Borgo, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

En euros

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Environnement et prospective de la politique de défense

Préparation et emploi des forces

Soutien de la politique de la défense

Dont Titre 2

Équipement des forces

Total

Solde

La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Pozzo di Borgo

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous avons déjà beaucoup parlé du logiciel Louvois. Si l’objet et la forme de cet amendement sont symboliques, l’intention de son auteur ne l’est pas.

À l’occasion de la défense du présent amendement, je souhaite dénoncer – après M. le ministre et beaucoup de nos collègues –, dans cet hémicycle, l’absurdité de ce système informatique de versement des soldes de nos concitoyens engagés dans la carrière militaire.

Cette situation pourrait d’autant plus prêter à sourire – ce serait de l’humour noir – que ce logiciel porte le nom d’un ministre de la guerre de Louis XIV qui a marqué l’histoire militaire par son souci de modernisation…

L’échec de Louvois I, en 2003, aurait dû nous alerter collectivement sur les risques existants. Le déploiement de Louvois III, dès 2011, s’est en effet révélé catastrophique : pour la seule année 2012, le montant des erreurs de calcul du logiciel est estimé par la Cour des comptes à plus de 465 millions d’euros. Que de difficultés concrètes pour nos militaires !

Au total, cette errance de nos politiques publiques aura coûté plus de 470 millions d’euros, du moins si l’on ne retient que le prix d’achat et le coût des dysfonctionnements du logiciel, sans tenir compte de son remplacement. Si la solitude dans laquelle se trouvent de nombreuses familles de soldats est déjà un scandale en soi, cette gabegie financière l’est tout autant !

Pourquoi cet amendement, monsieur le ministre ? Vous avez dit dans votre intervention ne pas vouloir polémiquer. Vous avez ajouté qu’il n’y avait pas de responsables. Je suis désolé, mais vous êtes trop centriste ! §Il faut marquer beaucoup plus d’autorité dans cette affaire.

Je suis choqué que les responsabilités ne soient pas déterminées. On pourrait accuser les politiques, mais ce ne sont pas les ministres qui ont développé le logiciel !

J’ai été inspecteur général de l’administration de l’éducation nationale : nous savions toujours où étaient les responsabilités. Je regrette que l’on ne cherche pas à savoir comment les choses ont été organisées pendant quatre, cinq, six ou sept ans afin de déterminer quels sont les responsables.

Les militaires sont « carrés » : avec eux, c’est oui ou c’est non. Mais ce sont eux qui supportent cette gabegie, sans que les responsables soient identifiés. Ce n’est pas normal et cet amendement symbolique n’a d’autre ambition que de le dire haut et fort.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique de Legge

La commission des finances n’a pas pu examiner cet amendement, pas plus que le précédent.

J’ai entendu M. le ministre nous dire qu’il ne souhaitait pas polémiquer sur cette affaire. Je ne suis pas certain en effet qu’une telle polémique soit de nature, dans le contexte actuel, à améliorer le moral de nos armées. Nous avons d’autres choses à faire, en témoigne le débat de ce soir.

Par ailleurs, je ne vois pas en quoi le déplacement d’un euro dans le budget est de nature à régler le problème que vous soulevez, mon cher collègue.

Enfin, il me semble que cet amendement est totalement satisfait, puisqu’il n’avait d’autre objectif que de vous permettre de prendre la parole.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Monsieur Pozzo di Borgo, l'amendement n° II-303 est-il maintenu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Pozzo di Borgo

Je vais retirer cet amendement, même s’il doit être bien évident pour tous que je n’allais pas ruiner la défense en lui ôtant un euro de financement !

Il ne s’agit pas de polémiquer, monsieur le rapporteur spécial, mais d’assumer ses responsabilités. Toute société dans laquelle les responsabilités ne sont pas assumées est dysfonctionnelle. Je le redis : il faut que les responsabilités soient assumées.

Cela étant, je retire l’amendement, madame la présidente.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

L'amendement n° II-303 est retiré.

La parole est à M. le ministre.

Debut de section - Permalien
Jean-Yves Le Drian, ministre

J’ai bien senti, monsieur le sénateur, que vous aviez déposé cet amendement pour parler du logiciel Louvois. Je crois avoir traité de cette question dans mon intervention.

J’ai deux interrogations : comment se fait-il que j’aie connu si tard l’ampleur du problème et qu’il ait fallu que je me rende dans deux ou trois garnisons pour prendre la mesure de ce gigantesque désastre ? Et comment se fait-il que la chaîne de responsabilité ait abouti à de telles aberrations ?

Je m’efforce aujourd’hui de répondre à ces deux questions, tout d’abord en établissant une relation différente avec l’ensemble du système hiérarchique pour être mieux informé des problèmes lorsqu’ils se posent. J’ai pu vérifier l’efficacité de ce nouveau mode de fonctionnement à l’occasion de différents dossiers, notamment s’agissant des conditions de vie dans telle ou telle garnison

J’ai donc pu répondre à la première question assez rapidement. Il aurait fallu anticiper et réagir immédiatement, mais je vous rappelle que le problème est apparu avant que je ne prenne la tête de ce ministère, et que je ne disposais pas alors des moyens d’information idoines.

Enfin, une certaine opacité sur l’ensemble de la chaîne de responsabilité a conduit à une irresponsabilité collective, laquelle a abouti à ce désastre. Mais, monsieur Pozzo di Borgo, je puis vous assurer que c’est fini !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Défense », figurant à l’état B.

J’ai été saisie, dans le délai limite, d’une demande d’explication de vote.

La parole est donc à Mme Catherine Deroche, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Deroche

Après les débats intenses de ce soir, mon intervention sera brève, mes chers collègues. Au-delà d’un vote budgétaire, il s’agit, on le voit bien, d’un sujet majeur : l’avenir de nos armées.

Si le groupe UMP respecte la volonté du Président de la République, chef des armées, d’honorer les engagements de la France, il y met cependant une condition essentielle : nos armées doivent disposer des moyens adaptés et suffisants pour ce faire. En effet, comment projeter nos troupes de plus en plus loin, de plus en plus longtemps, si elles ne disposent pas des moyens et des effectifs nécessaires ? Cette situation pourrait en effet se traduire par un état de « surtension » des hommes comme des équipements.

Notre vote contre les crédits de la mission n’est donc pas un vote contre nos armées et nos soldats ; c’est au contraire la preuve de notre soutien à ces hommes qui risquent leur vie pour leur idéal et les valeurs de la France. C’est aussi un appel au chef des armées, afin qu’il trouve le courage politique et économique de doter la défense des moyens à la hauteur des ambitions qu’il affiche.

Applaudissements sur les travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Je mets aux voix, modifiés, les crédits de la mission « Défense ».

J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe UMP.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

Il est procédé au dépouillement du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 61 :

Le Sénat n’a pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Nous allons procéder au vote des crédits du compte d’affectation spéciale « Gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien, des systèmes et des infrastructures de télécommunications de l’État », figurant à l’état D.

En euros

Mission

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien, des systèmes et des infrastructures de télécommunications de l’État

Désendettement de l’État

Optimisation de l’usage du spectre hertzien et interception et traitement des émissions électromagnétiques (ministère de la défense)

Optimisation de l’usage du spectre hertzien et des infrastructures du réseau physique de télécommunications du ministère de l’intérieur

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits.

Ces crédits sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Défense » et du compte d’affectation spéciale « Gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien, des systèmes et des infrastructures de télécommunications de l’État ».

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, jeudi 4 décembre 2014 :

À dix heures vingt :

1. Suite du projet de loi de finances pour 2015, adopté par l’Assemblée nationale (107, 2014-2015).

Examen des missions :

- Enseignement scolaire (et article 55)

MM. Gérard Longuet et Thierry Foucaud, rapporteurs spéciaux (rapport n° 108, tome III, annexe 14) ;

M. Jean-Claude Carle et Mme Françoise Férat, rapporteurs pour avis de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication (avis n° 112, tome III).

- Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales (et article 47)

Compte spécial : Développement agricole et rural

MM. Alain Houpert et Yannick Botrel, rapporteurs spéciaux (rapport n° 108, tome III, annexe 3) ;

MM. Gérard César, Jean-Jacques Lasserre et Mme Frédérique Espagnac, rapporteurs pour avis de la commission des affaires économiques (avis n° 109, tome I).

- Médias, livre et industries culturelles (et articles 56 quinquies et 56 sexies)

Compte spécial : Avances à l’audiovisuel public

M. François Baroin, rapporteur spécial (rapport n° 108, tome III, annexe 19) ;

Mme Joëlle Garriaud-Maylam et M. Philippe Esnol, rapporteurs pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (avis n° 110, tome X) ;

M. Pierre Laurent, Mme Colette Mélot et M. Jean-Pierre Leleux, rapporteurs pour avis de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication (avis n° 112, tome IV).

De quinze heures à quinze heures quarante-cinq :

2. Questions cribles thématiques sur l’industrie du tourisme.

À seize heures et le soir :

3. Suite de l’ordre du jour du matin.

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

La séance est levée le jeudi 4 décembre 2014, à une heure vingt.