Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme vient de l’indiquer Yves Pozzo di Borgo, les crédits du programme 178 progressent en 2015, fait suffisamment rare pour être souligné en cette période de disette budgétaire !
Hors dépenses de personnel, qui sont transférées au programme 212, les crédits de paiement augmentent globalement de 2 % pour atteindre 7, 3 milliards d’euros et les autorisations d’engagement progressent très sensiblement, de 18 %, s’élevant à 8, 9 milliards d’euros. L’entretien programmé du matériel représente à lui seul 44 % des crédits du programme ; il est en hausse de 4, 4 %, ce qui est à la fois prometteur et conforme aux engagements de la loi de programmation militaire.
La priorité ainsi affirmée en faveur de l’entretien ne produira cependant ses fruits que lentement : le retard accumulé au cours des précédentes LPM doit être rattrapé et il existe toujours un décalage entre l’engagement d’un programme et la disponibilité effective des matériels. Je partage donc la remarque de M. le rapporteur sur la gestion budgétaire, qui doit correspondre réellement, et sur la durée, aux engagements.
En tout état de cause, les indicateurs d’activité devraient être simplement stabilisés à court terme. Sur ce point également, monsieur le ministre, comme pour ce qui concerne les REX, ce projet de budget est fragile, même s’il est nettement encourageant.
Il est d’autant plus fragile que les opérations extérieures sont nombreuses et intenses. Or ces OPEX ont une incidence parfois sous-estimée sur le maintien en condition opérationnelle et sur l’entraînement. Au-delà des dommages causés par les combats sur les matériels, l’usure de ces derniers est bien supérieure en OPEX, notamment lorsqu’ils sont déployés dans des milieux abrasifs, comme dans le Sahel. En outre, les OPEX, naturellement prioritaires, perturbent de facto les processus logistiques et les calendriers de travaux. Cela peut entraîner à la fois une augmentation des coûts et un décalage encore plus grand de l’entretien si les ateliers industriels ne sont plus disponibles le moment venu.
Qui plus est, et je souhaite insister sur ce point, les conséquences indirectes des OPEX, eu égard à la surutilisation et à l’usure des matériels et aux nombreuses perturbations qu’elles occasionnent, peut fragiliser les missions intérieures des armées, notamment la protection du territoire. Nous devons être très vigilants.
Aussi, même s’il est par nature difficile d’anticiper les OPEX, pouvez-vous, monsieur le ministre, nous préciser si le calcul de la LPM et l’engagement qu’elle comporte d’accroître l’entretien programmé des matériels de 4, 3 % par an tiennent bien compte de leurs effets sur les matériels ?
La disponibilité des matériels n’est pas une fin en soi ; elle est la condition d’une activité opérationnelle à même de répondre aux objectifs fixés par le Président de la République, chef des armées, et par le Parlement dans le cadre des différentes lois de programmation. Aujourd’hui, cette activité opérationnelle, on l’a dit, se situe encore en deçà des objectifs. Malgré ces indicateurs, nos armées nous ont prouvé qu’elles pouvaient être envoyées sur des théâtres d’opérations variés, connaître des conditions difficiles et néanmoins remplir pleinement leur mission. Jugée à l’aune des OPEX, la qualité de la préparation opérationnelle est donc tout à fait satisfaisante.
Par ailleurs, la disponibilité insuffisante des matériels a progressivement conduit à la mise en œuvre du principe de différenciation qui a été longuement débattu lors de l’élaboration du dernier Livre blanc sur la défense. S’il peut paraître légitime de spécialiser les compétences dans certains domaines, nous devons aussi être attentifs à ce que le nouveau format des armées et la densification des OPEX n’accroissent pas de manière démesurée le fossé entre les unités projetées et les autres. À moyen et long terme, il ne serait en effet pas pertinent de relâcher l’effort de préparation des troupes qui ne sont pas projetées ou qui le sont moins fréquemment.
Au regard du temps qui m’est imparti, je ne pourrai pas évoquer les autres lignes budgétaires du programme 178 ; elles regroupent pourtant de nombreux types de crédits qui contribuent également à l’activité opérationnelle. Je conclurai donc sur la nécessaire amélioration des conditions de vie quotidienne des armées.
Vous avez-vous-même constaté, monsieur le ministre, une détérioration de ces conditions de vie, et plusieurs membres de la commission des affaires étrangères ont été frappés par cette situation lors d’un déplacement effectué en République centrafricaine au mois d’avril dernier. En 2013, vous avez mis en place un plan d’urgence de 30 millions d’euros et fait réaliser l’année suivante une étude complète sur les défauts majeurs d’infrastructures : 700 points noirs ont alors été identifiés, pour un coût total de travaux de 560 millions d’euros.
Où en sont ces travaux, monsieur le ministre ? Selon quel calendrier seront-ils programmés ? Je vous remercie par avance de votre réponse. §