Intervention de Christiane Kammermann

Réunion du 3 décembre 2014 à 22h00
Loi de finances pour 2015 — Compte d'affectation spéciale : gestion et valorisation des ressources tirées de l'utilisation du spectre hertzien des systèmes et des infrastructures de télécommunications de l'état

Photo de Christiane KammermannChristiane Kammermann :

Madame la présidente, monsieur le président du Sénat, monsieur le ministre, mes chers collègues, après les interventions exhaustives des différents rapporteurs, je souhaiterais attirer votre attention sur des sujets moins chiffrés, mais plus spécifiques.

Avant d’aller plus loin dans mon propos, je tiens à rendre hommage à toutes les femmes et à tous les hommes de la défense, qui font la fierté de notre pays. Vous comprendrez également que, en cet instant, j’ai également une pensée particulière pour tous les soldats français engagés depuis des années dans la FINUL, au Liban. En de nombreuses occasions, et encore tout récemment, j’ai pu les rencontrer au Sud-Liban. Leur courage et leur professionnalisme honorent la France.

Monsieur le ministre, dans un premier temps, je veux vous faire part de mes plus profondes inquiétudes quant à la situation de l’armée en tant qu’institution.

Combien de fois, à l’occasion de l’examen de la loi de programmation militaire ou des crédits budgétaires, n’avons-nous pas entendu dire que notre défense était « à l’os » ? Cette expression témoigne d’une certaine ingratitude au regard des efforts consentis par cette institution.

Peu de corps d’état ont été capables d’une telle adaptation, face tant aux menaces qu’aux contraintes budgétaires, qui ont fortement ébranlé leurs conditions de travail. Cela n’a pas pour autant altéré l’adhésion des hommes et des femmes du ministère, qui restent prêts au sacrifice ultime pour leur patrie.

Du fait de la professionnalisation, les armées doivent s’adapter à un turn over, ce qui nécessite une politique de gestion des ressources humaines reposant sur l’anticipation et la réactivité. Cette politique doit être adaptée aux besoins des hommes et au ministère. Par ailleurs, les contrats courts supposent que l’armée puisse encore être attractive pour attirer les jeunes recrues dont elle a besoin.

Nous le savons, l’un des défis en matière de ressources humaines tient autant au dépyramidage qu’à la fidélisation des engagés.

Alors, face aux difficultés inhérentes à la condition des soldats, face aux problèmes de gestion des soldes, qui, n’ayons pas peur de le dire, sont peu attractives par rapport à l’engagement, et, enfin, face à un certain manque de considération de la part de la société civile, il est à craindre que l’armée française ne peine à séduire.

Parallèlement, le moral de nos armées est en berne et la confiance vis-à-vis de leur institution s’étiole. Nos soldats s’interrogent et doutent quelque peu de leur avenir.

M. Pêcheur, nouveau président du Haut comité d’évaluation de la condition militaire, se dit très préoccupé de l’incidence du rythme des réformes, qui ont eu des conséquences parfois brutales sur les vies personnelles des militaires.

Monsieur le ministre, un nouveau pilotage des ressources humaines sera développé à partir du mois de janvier prochain. Le programme 212 crée treize budgets opérationnels de programme qui seront confiés à des gestionnaires de personnel, lesquels disposeront des ressources dont ils ont besoin, d’un point de vue tant quantitatif que qualitatif.

Ce dispositif semble positif, mais au vu de l’échec du système Louvois, il importe de tirer les leçons des erreurs du passé et d’anticiper d’ores et déjà de potentielles failles qui déstabiliseraient encore plus les personnels. Par ailleurs, plutôt que de parler du système Louvois, il serait plus adapté de parler de « l’écosystème Louvois ». Ces ratés en séries témoignent en tout cas du retard de la modernisation du mécanisme de gestion de l’armée française.

Il n’est point de défense sans ressources humaines : ce principe est essentiel. Pourtant, la poursuite des suppressions de postes me semble inquiétante, voire incohérente face à l’augmentation du nombre d’OPEX, ce qui implique de nombreuses rotations et un maintien en condition opérationnelle des hommes et des matériels.

Je vous rappelle que, au mois de juillet 2012, un rapport de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, adopté à l’unanimité, était intitulé : « Forces armées : peut-on encore réduire un format juste insuffisant ? » Monsieur le ministre, il est à croire que ce rapport ne vous a pas inspiré, ou alors peu …

Avant de conclure, mes chers collègues, je veux insister sur conditions de nos militaires en OPEX.

Certains retours d’expérience sont saisissants et alarmants. Au Mali, l’un des problèmes logistiques est celui de l’acheminement et du rationnement de l’eau pour nos soldats. Près de 200 militaires ont été victimes de coups de chaleur. Les fortes températures ont mis en évidence le fait que les fournitures et les équipements semblaient être de bien mauvaise facture. D’ailleurs, on le sait, avant chaque départ en OPEX, les soldats se fournissent dans les surplus spécialisés et payent avec leurs propres deniers leur paquetage.

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