Sur le budget de la défense pour 2015, j’ai entendu les observations du rapporteur spécial, M. Dominique de Legge, j’ai entendu les remarques des uns et des autres, et les observations du président de votre commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, M. Jean-Pierre Raffarin.
Pour ce qui est des ressources exceptionnelles, les REX, nous sommes parfaitement en harmonie avec l’application de la loi de programmation, article 3, annexe 5, paragraphe 1. Quelle que soit la ressource exceptionnelle que nous mobilisons, nous sommes dans cette logique qui a été validée par le Parlement.
En l’occurrence, en 2015, il était prévu de mobiliser les recettes issues de la cession de la bande des 700 mégahertz. Comme le Président de la République l’a confirmé dans la lettre qu’il a adressée au président de votre commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, le Premier ministre a lancé la procédure destinée à concrétiser le plus rapidement possible cette cession.
Mais les versements financiers dès 2015 me paraissent aléatoires. Le Gouvernement entend donc se prémunir contre ces aléas et le Président de la République m’a autorisé à lancer une opération innovante d’acquisition de matériels militaires à travers les sociétés de projet.
Cette solution est déjà inscrite dans la loi de programmation militaire, puisqu’il est prévu la possibilité de mobiliser des cessions d’actifs pour contribuer aux ressources exceptionnelles tout au long de l’exécution. La difficulté en la matière, qui peut aussi être une chance, tient au fait que les cessions d’actifs ne peuvent être mobilisées que si elles restent des opérations en capital. Or le seul moyen de se saisir de cette chance, en application de l’article 21 de la LOLF, c’est précisément la société de projet.
Nous sommes donc dans l’application stricte de la loi de programmation militaire et de la loi organique relative aux lois de finances. Maintenant, il faut réussir ! Mais, à tous ceux qui ont fait part de leur inquiétude, j’indique que nous sommes mus par une vraie volonté d’aboutir dans les plus brefs délais. Ce n’est pas une illusion budgétaire. C’est une volonté de mettre en œuvre immédiatement ces possibilités qui s’offrent à nous.
C’est la raison pour laquelle j’ai mobilisé un groupe de travail de haut niveau regroupant à la fois des hauts fonctionnaires du ministère de l’économie, du ministère de la défense, les industriels eux-mêmes ainsi que des juristes qui accompagnent cette démarche afin d’aboutir à un résultat opérationnel à la mi-2015, pour que ce dispositif, effectivement, puisse couvrir éventuellement, si les 700 mégahertz ne sont pas au rendez-vous, les financements d’acquisitions de matériels en bonne et due forme.
J’ai annoncé devant votre commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées que j’étais disponible pour évoquer toutes ces questions avec vous et que je mènerai ces opérations dans la plus grande transparence. Au fur et à mesure des étapes de la mise en œuvre de cette société de projet, j’informerai, pour débat et pour confrontation éventuelle, la commission des affaires étrangères, parce que je sais votre attachement à la bonne réussite de cette opération. Mesdames, messieurs les sénateurs, sachez que je m’engage personnellement sur ce dossier.
Monsieur Raffarin, vous avez apprécié l’engagement politique, mais vous doutez de l’efficacité financière. Permettez-moi donc modestement d’ajouter, à vos critères d’analyse, la ténacité inébranlable du ministre de la défense sur ce sujet !
Sur le financement des surcoûts OPEX, mettons-nous bien d’accord sur le fait qu’il est utile, pour le budget de la défense, que nous restions au socle de 450 millions d’euros en investissement de départ et en loi de finances initiale. L’enjeu, en effet, est de préserver les crédits d’investissement du ministère, à la condition évidemment que les surcoûts OPEX soient totalement reversés au budget de la défense en fin d’exercice. Cela a été le cas en fin d’année 2013, c’est le cas en fin d’année 2014 et tout me laisse à penser que ce sera le cas à la fin de 2015. De toute façon, c’est la loi et vous avez veillé, mesdames, messieurs les sénateurs, à faire en sorte qu’il y ait une clause de sauvegarde permettant de la mettre en œuvre de manière incontournable.
Le socle de 450 millions d’euros n’a pas été inscrit au hasard. Il était le résultat de la situation telle qu’on la connaissait au moment du débat sur la loi de programmation militaire, c'est-à-dire avant l’intervention en RCA et au moment où nous sortions d’Afghanistan et du Kosovo, au moment aussi où nous relativisions notre présence dans la Corne de l’Afrique.
Les autres opérations sont intervenues après, et il est logique que, devant des menaces, devant des risques, des décisions soient prises par le Président de la République, qu’elles fassent l’objet d’un débat devant les assemblées et que le financement des OPEX vienne s’ajouter pour permettre le financement de ces missions supplémentaires liées à la situation internationale.
Après ces observations sur les REX et les OPEX, je voudrais souligner la solidité du projet de loi de finances pour 2015. Les crédits de la mission « Défense » seront au rendez-vous, ce qui nous permettra de poursuivre l’exécution de la loi de programmation telle qu’elle a été engagée ; soyez assurés de mon extrême vigilance à cet égard.
Je voudrais maintenant revenir rapidement sur les observations que m’ont faites certains rapporteurs, en m’excusant de ne pas pouvoir répondre à tous.
Mmes Demessine et Kammermann se sont préoccupées de la situation de nos armées et de la vie quotidienne de nos militaires. J’ai mis en place un dispositif qui devrait permettre de traiter, d’ici à la fin de l’année 2015, la plus grande partie des 700 points noirs identifiés, après enquête, et nécessitant un plan d’urgence pour les infrastructures. D’autres points noirs resteront à résoudre progressivement tout au long de la loi de programmation militaire.
Je suis très attentif aux conditions de vie des soldats en opération comme en garnison. Il importe que la réforme du soutien, d’une part, et la mise en œuvre des plans d’urgence notamment pour les infrastructures, d’autre part, soient opérationnelles rapidement. J’ai bien intégré cette préoccupation.
Concernant le Service de santé des armées, monsieur Pozzo di Borgo, il est nécessaire d’assurer la pérennisation de l’excellence médicale dont bénéficient nos armées, en particulier les blessés en opération. Cela passe par une évolution de notre dispositif, qui permettra de garder huit hôpitaux sur neuf.
La programmation de la fermeture de l’hôpital du Val-de-Grâce est due à un certain nombre de nécessités opérationnelles. La rénovation de cet hôpital impliquant d’énormes investissements, nous avons été amenés à faire des choix. Il reste suffisamment de disponibilités dans les hôpitaux de Percy et de Bégin pour que la plateforme majeure de la région parisienne puisse être réalisée sans l’hôpital du Val-de-Grâce. En tout cas, monsieur. Pozzo di Borgo, nous sommes très attentifs à la pérennité du service de santé des armées, qui se modifie et se modernise dans le cadre du programme SSA 2020, lequel permettra d’en préserver le niveau d’excellence.
M. Pintat m’a interrogé sur le secteur spatial militaire. La loi de programmation militaire y consacre des moyens considérables. Là aussi, les engagements seront respectés, puisqu’une dizaine de satellites sont prévus, soit en décision, soit en développement, au cours de la LPM. Vous les avez cités, je n’y reviendrai pas. J’en profite pour me réjouir avec vous que la nouvelle feuille de route d’Ariane 6 ait été validée. Cette décision a des conséquences directes sur notre sécurité. Vous savez que la base industrielle dans le domaine des lanceurs est duale et concerne directement la dissuasion nucléaire. Cette avancée est donc tout à fait positive.
J’indique à MM. Reiner et Gautier, spécialistes des drones, que j’ai mis en place une stratégie complète d’acquisition de drones de toutes catégories. Dès ma prise de fonctions, devant l’urgence de la situation et l’absence de choix clairs depuis trop longtemps, j’ai pris la décision d’acquérir au plus vite ce qui se fait de mieux en matière de drone MALE, à savoir les drones américains Reaper. La suite a montré que c’était le bon choix.
Nos deux premiers vecteurs ont été immédiatement engagés au Sahel. Ils font aujourd'hui la preuve de toute leur efficacité.
Je vous confirme, monsieur Gautier, l’acquisition, dans quelques semaines, d’un troisième vecteur pour l’année 2014. Je commanderai en 2015 un deuxième système complet de trois drones supplémentaires.
Sur le long terme, j’ai la volonté de lancer, avec nos partenaires allemands et italiens, la réalisation d’un drone MALE entièrement européen à l’horizon 2025.
Sur le drone tactique de l’armée de terre, le processus sera également bouclé en 2015. C’est une nécessité, mais nous sommes obligés de passer par un appel d’offres. Nous avons souhaité une mise en œuvre dans les plus brefs délais, dès 2015, conformément à la loi de programmation militaire.
Toujours conformément à la loi de programmation militaire, nous avons décidé de lancer une coopération spécifique avec nos amis britanniques pour la définition du drone de combat futur. Nous avons programmé les financements nécessaires pour ce successeur lointain de l’avion de combat. C’est une vraie anticipation, mais c’est aussi un engagement pour l’avenir que nous prenons en liaison avec la Grande-Bretagne.
Vous m’avez interrogé sur le calendrier et la méthode des prochaines restructurations. À cet égard, ma méthode est celle du pragmatisme et non celle du dogmatisme. La question n’est donc pas de savoir s’il faut privilégier les dissolutions ou l’échenillage. Il ne s’agit pas non plus de dissoudre les unes après les autres des formations opérationnelles pour faire du chiffre dans une logique financière visant exclusivement la réduction de la masse salariale ; il s’agit de conduire une réflexion de fond, tenant compte de toutes les contraintes, opérationnelles et budgétaires au premier chef, pour garantir in fine la tenue des contrats opérationnels.
Le choix des restructurations prend du temps. Se déterminer trop vite risque de nous engager prématurément dans des décisions que nous regretterions ou même que nous ne pourrions mettre en œuvre le moment venu.
L’expérience de ces deux dernières années me montre qu’il faut peser très précisément tous ces choix. Ainsi, alors qu’il était initialement prévu de fermer la base de Luxeuil, nous y avons d’abord maintenu l’escadron de Mirages 2000-5, parce que c’était indispensable, puis nous avons décidé d’installer, en 2015, l’unité d’instruction Mirages 2000.
Il convient donc d’étudier avec la plus grande attention les mesures de restructuration. Je souhaite aboutir à un plan d’ensemble rapidement, mais je ne veux pas anticiper, pour éviter les malentendus ou les choix inopportuns. Dans ces conditions, je prends le temps nécessaire pour finaliser les études, en sachant que chacun est pressé de connaître le plan général ; j’espère pouvoir y parvenir rapidement.
M. del Picchia m’a interrogé sur le logiciel Louvois.
D’une part, je n’ai jamais polémiqué sur ce dossier et ne le ferai jamais.