Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les crédits de l’agriculture connaîtront une baisse importante en 2015 : plus de 8 % pour l’ensemble de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » ; presque 13 % pour le seul programme 154, qui porte l’essentiel des crédits d’intervention en faveur de l’économie agricole. Cela fait donc, au total, 260 millions d’euros de moins, et le budget passe, pour la première fois, en dessous de 3 milliards d’euros.
Les crédits de la PAC aideront néanmoins à maintenir les principales priorités de la politique agricole : l’installation ou encore le soutien aux territoires défavorisés. Je voudrais cependant exprimer mon inquiétude sur plusieurs points.
Premièrement, s’agissant du soutien à l’investissement et à la promotion des produits agricoles, les crédits de FranceAgriMer baissent considérablement. Cette baisse est en partie compensée, mais pas intégralement. D’ores et déjà, FranceAgriMer annonce qu’il ne soutiendra plus la promotion sur son budget propre. Il faudra donc se reposer sur les crédits européens pour le secteur viticole et celui des fruits et légumes, et sur les moyens des interprofessions pour les autres secteurs.
Deuxièmement, en ce qui concerne le soutien à l’assurance-récolte, j’observe que la progression du taux d’assurance reste faible. On n’est pas encore à 50 % pour les grandes cultures et à 25 % pour la viticulture, les deux secteurs les plus avancés. Dans le secteur des fruits et légumes, l’objectif est d’atteindre 2, 5 %, alors que seulement 1, 6 % des producteurs sont assurés.
L’assurance, en elle-même, ne fait pas gagner d’argent aux agriculteurs. Elle leur permet simplement de survivre en cas d’événement climatique très grave. C’est un filet de sécurité. Si l’on n’encourage pas les agriculteurs à s’en doter, on leur fait courir de graves dangers.
Le budget pour 2015 apporte une rallonge de 5 millions d’euros pour l’assurance. Elle ne permettra pas de couvrir l’ensemble des besoins, estimés à plus de 100 millions d’euros. Nous proposons, par voie d’amendement, d’ajouter 2 millions d’euros, ce qui permettra, avec le cofinancement communautaire, d’apporter réellement – j’insiste sur ce terme – un soutien à 65 %.
En ce qui concerne l’assurance, la mise en place du contrat socle est repoussée à la mi-2015. Nous serons vigilants sur l’instauration de ce nouvel outil, afin qu’il apporte vraiment la protection que les agriculteurs attendent face aux aléas climatiques, une protection de moins en moins assurée par le fonds des calamités agricoles.
Enfin, nous souhaitons des évolutions s’agissant de la déduction pour aléas, la DPA, qui est trop peu pratiquée et qui constitue pourtant un mécanisme d’auto-assurance indispensable.
Troisièmement, en matière de gestion des risques budgétaires, les refus d’apurement communautaires pourraient être très élevés cette année et l’année prochaine, de l’ordre de plusieurs centaines de millions d’euros.
Le Gouvernement devrait nous rassurer sur la manière de prendre en compte cette dépense budgétaire supplémentaire. Concrètement, je souhaiterais que les crédits de l’agriculture, qui sont déjà faibles, ne fassent pas l’objet en cours d’année d’une nouvelle ponction pour faire face aux refus d’apurement.
Quatrièmement, en ce qui concerne l’installation, la dotation jeunes agriculteurs et les prêts aux jeunes agriculteurs conservent les mêmes enveloppes, avec moins de crédits nationaux et plus de crédits européens. En revanche, les crédits d’accompagnement disparaissent du budget pour 2015.
Le relais financier doit être pris par la taxe sur la cession des terrains agricoles rendus constructibles, mais nous souhaiterions que l’intégralité du produit de cette taxe, et pas seulement 12 millions d’euros, soit consacrée à l’aide à l’installation.
Je souhaite à présent évoquer les chambres d’agriculture. Le sujet a déjà été abordé lors de l’examen de la première partie du projet de loi de finances.
Avec 7 800 salariés, les chambres d’agriculture assurent un service irremplaçable et, le plus souvent, gratuit pour les agriculteurs. En les privant de 90 millions d'euros sur trois ans, ce qui représente près de 5 % de leur budget annuel, le projet de loi de finances fait prendre d’énormes risques au tissu de l’animation agricole dans nos territoires. Si, à l’arrivée, les chambres d’agriculture suppriment 300 emplois de technicien, cela ne sera pas indolore !
Les amendements que nous avons déjà fait adopter reviennent en partie sur le mauvais coup porté aux chambres d’agriculture. Je souhaite que ces modifications restent dans le texte final et que le Gouvernement ne cherche pas à faire le bonheur du monde agricole contre son gré, en baissant la taxe additionnelle à la taxe foncière sur les propriétés non bâties. Les agriculteurs ont indiqué, par la voix de leurs élus au sein des chambres d’agriculture, qu’ils ne voulaient pas d’une telle mesure.
À l’instar de mon collègue Alain Houpert, j’aimerais dire quelques mots du « contrat vendanges ». §Il est prévu à l’article 47 de mettre fin aux exonérations totales de cotisations salariales, qui présenteraient, nous dit-on, un risque d’inconstitutionnalité. Or le Conseil constitutionnel n’avait pas censuré le dispositif lors de sa création, en 2002. En outre, comme les bénéficiaires ne sont pas dans la même situation que les autres salariés, l’exonération ne semble pas mettre à mal le principe d’égalité.