Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens tout d’abord à souligner la qualité des interventions.
Ne disposant que de quarante minutes, je m'attacherai tout de suite à répondre aux très nombreuses questions qui m'ont été posées, faute de quoi il me faudrait deux heures, comme d’habitude ! §
Je commencerai par le contexte général, que beaucoup d’orateurs ont évoqué.
Les marchés pèsent sur les prix agricoles, qui ne sont pas bons. Par conséquent, le moral des agriculteurs n’est pas bon non plus. Ce constat renvoie à un questionnement plus général, à la fois sur les éléments de l’offre, les éléments de structuration entre l'offre et la demande, et les efforts que l’on doit poursuivre.
À cet égard, je me permets de souligner que je n’ai jamais été sollicité par quiconque pour lancer « Viande de France » juste après la crise des lasagnes à la viande de cheval. De même, j’ai mis en œuvre un processus qui aboutit à « Lait de France » et que j’ai récemment lancé une charte sur les fleurs de France. J’ajoute que je cherche à avancer sur le dossier des miels de France…
Pour offrir des débouchés à l’agriculture au niveau national et local, l’origine et la traçabilité des produits continuent de constituer à mes yeux un axe stratégique.
De fait, l'agriculture française a une dimension internationale. Elle a incontestablement un rôle en Europe et dans le monde au regard des grands défis alimentaires. Parallèlement, l’image de la France dans le monde est en grande partie liée à son agriculture et à sa gastronomie. Si l’agriculture française est reconnue comme la première agriculture en Europe et comme une grande agriculture dans le monde, elle est aussi réputée pour la qualité de ses produits ; il n’est que de citer l’exemple de notre viticulture et de sa part dans nos exportations.
L’internationalisation est patente : l’agriculture européenne et, donc l’agriculture française subissent de plus en plus les effets des marchés internationaux, et cela indépendamment de tout mécanisme de régulation de la production susceptible d'être mis en place à l’intérieur de l'Europe.
Je prendrai l’exemple du lait : si une baisse des prix est anticipée pour le début de l’année prochaine, c'est parce que l’on a constaté que le prix de la poudre de lait baissait sur le marché de Nouvelle-Zélande ! Certains considéreront que ce n’est pas un problème, mais cet impact par anticipation me désole. Dès lors, je veux tout faire pour éviter les effets de volatilité ou une brusque baisse du prix du lait, notamment au début de l’année prochaine. Nous y travaillons, et des contacts ont été pris.
Quoi qu'il en soit, les composantes du monde de l’alimentation et de l’agriculture sont de plus en plus interdépendantes.
J’ai bien entendu la solution que, face à cette situation, certains d’entre vous ont avancée : il suffirait de fermer les frontières ! Or se fermer au monde implique en particulier de se fermer à l'Europe, et donc à des pays voisins. Cela signifie qu’on ne peut plus continuer à exporter et à valoriser des pans entiers de cette formidable histoire de l’agriculture française et de la gastronomie française ! C'est toujours le même dilemme : certains trouvent une solution, mais elle posera beaucoup plus de problèmes qu’elle n’en résoudra… De fait, tout ministre de l’agriculture – à commencer par moi – cherche à tenir les fils de cette histoire, à la fois au niveau européen et au niveau mondial.
C'est pourquoi la bataille sur le budget de l'Europe a été conduite sur la base de cette considération stratégique : l'Europe ne peut pas se désintéresser de la question agricole et alimentaire, car elle fait partie des grands équilibres du monde de demain. La bataille sur le budget a été menée avec cette idée toute simple, mais, je le rappelle au passage, ce qui a été obtenu n’est pas ce qui était prévu.