Intervention de Michel Le Scouarnec

Réunion du 10 décembre 2014 à 14h30
Expulsion des squatteurs de domicile — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Michel Le ScouarnecMichel Le Scouarnec :

Certes, celles-ci sont réelles, mais les solutions avancées ne sont malheureusement pas à la hauteur des enjeux. Cette question sensible aurait mérité mieux, à commencer par la prise en compte de l’ensemble des problématiques liées au logement des plus précaires. Les bonnes intentions ne suffisent pas, et la stigmatisation de cette population va crescendo.

Je salue néanmoins le travail de M. le rapporteur, qui a introduit une réelle rigueur juridique en réécrivant le texte en commission.

Il était nécessaire de supprimer l’article 2, véritable cadeau empoisonné pour les maires. De même, la réécriture de l’article 1er était bienvenue : alourdir l’arsenal répressif de manière imprécise et surtout contreproductive était une aberration. Je pense au délai de flagrance qui aurait été figé dans la loi, alors que, aujourd’hui, la rédaction de l’article 53 du code de procédure pénale permet une certaine souplesse.

Le phénomène d’occupation illicite de domicile, en particulier à Calais, où la situation est certes très complexe et très grave, est la conséquence de la fermeture de centres d’accueil de migrants, de la destruction systématique des campements plus petits, mais surtout d’une politique d’asile et de coopération frontalière insuffisante, voire inhumaine. Le présent texte propose de renforcer les mesures répressives, plaçant les réfugiés sous la pression policière permanente.

À cet égard, l’annonce de l’ouverture d’un nouveau centre de jour et d’un accord financier entre la France et la Grande-Bretagne de l’ordre de 15 millions d’euros nous laisse sceptiques. Rien n’est dit sur la question fondamentale du droit d’asile. Nous devons prendre la mesure de notre responsabilité, ce qui serait tout à notre honneur.

Pour faire face à cette réalité, nous avons besoin d’une réponse européenne, même si un réel effort national serait un signal déterminant. Comme le souligne justement le GISTI, le Groupe d’informations et de soutien des immigrés, au fil du temps, l’Europe a évolué négativement en repoussant les personnes migrantes, y compris celles qu’elle a l’obligation de protéger des persécutions. Pour les bénéficiaires du droit d’asile, c’est le brouillard administratif, tant les procédures sont longues, peu lisibles, bref, faites pour décourager celles et ceux qu’elles devraient protéger.

C’est une révision du règlement Dublin III qu’il faut promouvoir, afin que chaque demandeur d’asile en Europe puisse aller déposer son dossier dans le pays de son choix. C’est une orientation immédiate vers un centre d’accueil qu’il faut mettre en place pour les personnes qui souhaitent demander une protection à la France. C’est au renforcement de la protection des mineurs que nous devons travailler. Enfin, et surtout, c’est l’inconditionnalité de l’hébergement qui doit être la règle, ce qui ne peut se traduire que par la création de dispositifs d’accueil et d’orientation adaptés et en nombre suffisant.

Ces quelques propositions sont soutenues par de nombreuses associations qui ne sont pas forcément radicales, mais qui connaissent le terrain et gèrent tous les jours ces situations de détresse extrême.

La répression n’est pas la solution pour des personnes qui ont tout abandonné, qui ont connu des situations inhumaines de violence ou de privation de la dignité la plus élémentaire. Le constat est accablant : ce sont des personnes démunies, affligées, craintives, soumises au regard d’autrui et à la merci des réactions des autres.

Il y a urgence à faire preuve de réalisme dans la construction de solutions durables qui permettraient de prévenir les drames, mais aussi les situations de squats illicites, objet de la présente proposition de loi.

Sortons de la problématique de Calais, car la loi a vocation à s’appliquer sur tout le territoire national.

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