L'analyse que France Nature Environnement fait de ce texte peut se résumer ainsi : les objectifs à long terme sont les bons - et il est bon d'avoir des objectifs à long terme pour la transition énergétique -, mais l'étape qu'il fixe à 2030 est sous-dimensionnée et les mesures de court terme sont insuffisantes pour atteindre même cette étape. Dès lors, nous vous suggèrerons trois modifications et je ferai deux remarques d'ensemble.
Les députés ont prévu que les bâtiments « énergétivores », c'est-à-dire consommant plus de 330 kWh d'équivalent primaire par mètre carré, devront avoir été rénovés d'ici à 2030, mais ils n'ont assorti cette obligation d'aucune sanction ; nous vous proposons que cette rénovation devienne une condition pour la vente du bien à partir de 2030 : les propriétaires auraient ainsi une quinzaine d'années pour s'organiser et ils sauraient en avance que s'ils veulent vendre leur bien, il leur faudra l'avoir mis aux normes.
Deuxième proposition, celle qu'un débat public national soit organisé pour autoriser le prolongement de fonctionnement de toute centrale nucléaire au-delà de quarante années de service. Les cuves de nos centrales ont été conçues pour cette durée d'exploitation, elles sont de conception homogène, ce qui est un atout pour notre production - en particulier pour les coûts -, mais qui peut devenir une grande faiblesse en cas de problème technique lié au vieillissement. L'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) reconnait elle-même que le passage des quarante ans d'exploitation est sensible, des études en profondeur sont conduites pour voir comment rénover les installations en toute sécurité. Nous savons que nous n'aurons pas les moyens de les rénover toutes, qu'il nous faudra faire des choix si nous ne voulons pas sacrifier la sécurité. Dès lors, un débat public national, sous la houlette de l'ASN et de l'IRSN, aurait toute sa justification et donnerait aux commissions locales d'information (CLI) les éléments nécessaires au choix publics.
Troisième proposition, le rétablissement d'un débat public pour toute ligne à très haute tension ; le Gouvernement nous assure que le texte nous donne satisfaction, mais nous savons bien qu'il n'en est rien dès lors que le porteur de projet se voit confier l'organisation du débat public.
Ma première remarque, ensuite, portera sur l'ouverture du capital des porteurs de projet en matière d'énergie renouvelable. Le projet de loi précise que le porteur de projet « peut » ouvrir son capital : précision inutile, puisque c'est déjà le cas ; en revanche, la loi pourrait utilement prévoir que le porteur de projet doive chercher des partenaires, avant de monter effectivement son projet.
Enfin, je crois que le passage des énergies renouvelables au système européen de la vente au « marché plus prime » requiert toute notre vigilance ; parce que si des industriels sont prêts à un tel système dans des pays où les énergies renouvelables ont atteint une certaine maturité et représentent déjà une bonne part de la production électrique, comme en Allemagne, ce n'est pas le cas chez nous, où elles plafonnent, hors hydroélectricité, à 4 % de notre production électrique : nous avons déjà perdu, sans qu'on en parle nulle part, des milliers d'emploi dans le photovoltaïque, attention à ce que nous allons faire en la matière !