Intervention de Armelle Le Comte

Commission des affaires économiques — Réunion du 10 décembre 2014 : 1ère réunion
Transition énergétique pour la croissance verte — Table ronde avec des représentants d'organisations non gouvernementales

Armelle Le Comte, chargée de plaidoyer climat et énergies fossiles à Oxfam France :

A Oxfam France, où nous travaillons beaucoup sur le financement de la transition énergétique - au Nord comme au Sud -, nous partageons l'analyse qui vient de vous être présentée : les objectifs de moyen terme fixés par ce projet de loi ne permettent pas d'atteindre ceux qui sont affichés pour 2050. La transition énergétique demanderait 20 à 30 milliards d'euros par an et, selon l'Agence internationale de l'énergie, 500 milliards de dollars à l'échelle mondiale pour tenir l'objectif d'un réchauffement limité à 2 degrés. Or, ce projet de loi ne comporte guère de volet financier, hormis le fonds prévu à hauteur de 1,5 milliard d'euros. Pire, ce texte n'entreprend rien pour limiter le financement des énergies polluantes par le secteur privé : entre 2005 et 2014, les investissements bancaires français dans le charbon ont bondi de 218 %, alors qu'il reste le plus polluant, avec 43 % des émissions de CO2, devant le pétrole et le gaz. Il faudra également bien plus de transparence sur les investissements, publics comme privés, pour piloter la transition énergétique, ou bien nous ne ferons que suivre les évolutions du marché, sans pouvoir orienter les milliards d'euros nécessaires à la transition. Les investisseurs privés sont prêts à des actions d'envergure : à New-York, en septembre dernier, 350 investisseurs institutionnels et bancaires, représentant une capitalisation de quelque 24 000 milliards de dollars, se sont prononcés pour la « décarbonisation » de leurs investissements et ont appelé les gouvernements à légiférer dans ce sens pour réduire l'empreinte carbone globale. L'ONU et la Commission européenne vont dans le même sens - cependant, sans action concrète des États, ces engagements manquent d'effectivité, les acteurs se mobilisent sans disposer de standards communs.

Oxfam France proposera quatre améliorations de ce projet de loi. Deux concernent, au titre VIII, l'empreinte carbone : d'abord rendre obligatoire, pour chaque investisseur, l'évaluation de l'empreinte carbone de ses investissements, c'est-à-dire leurs émissions de gaz à effet de serre, mais aussi leur « part verte », c'est-à-dire les investissements qui diminuent ces émissions ; ensuite, étendre les obligations de reporting environnemental liées à la transition énergétique. Deux autres concernent la prise en compte du risque climatique : nous souhaitons que les entreprises prennent explicitement en compte les risques de long terme de leur activité : aucune information n'apparaît aujourd'hui sur ces risques, alors qu'ils sont bien souvent connus, identifiables, en particulier les risques physiques liés au changement climatique ; nous souhaitons que ces risques soient également pris en compte par les banques, parmi les critères de leurs activités.

Ce texte peut apporter bien plus de transparence, indispensable à la transition énergétique. La France peut cesser de soutenir le charbon, François Hollande, lors de la conférence environnementale, a dit son intention que les crédits à l'exportation ne soutiennent plus le charbon : nous demandons que cette mesure de bon sens soit effective dès l'an prochain, ce sera un gage d'exemplarité pour la France, qui organisera en décembre la Conférence mondiale sur le climat.

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