L'objet de notre étude était d'examiner les freins réglementaires à l'innovation en matière d'économies d'énergie dans le bâtiment.
Si nous prenons un peu de recul à l'égard des dispositifs complexes qui régulent l'insertion sur les marchés des composants de la construction, qu'il s'agisse des matériaux ou des équipements, on s'aperçoit que les procédures d'évaluation de la sécurité et de la qualité des produits, en France, sont gérées dans la perspective de la responsabilité décennale mise en place par la loi « Spinetta » de 1978. C'est un régime de présomption de responsabilité de tous les acteurs de la construction vis-à-vis du maître d'ouvrage. Les procédures de contrôle interviennent à plusieurs étapes du cycle de vie du produit, depuis les premiers contrôles techniques jusqu'au repérage des sinistres qui surviennent a posteriori, une fois le produit en place dans la construction. Elles sont prises en charge successivement par le Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB), les organismes de certification, comme, par exemple, l'ACERMI pour les isolants, et l'Assurance Qualité Construction (AQC).
Le deuxième domaine pouvant produire des freins réglementaires à l'innovation est celui des aides publiques. Cela peut paraître paradoxal de considérer les aides comme un frein, mais la mise en place d'aides s'accompagne de la fixation des règles définissant leurs conditions d'octroi. Or, par définition, les innovations ne sont pas connues au moment où ces règles sont fixées. Les produits innovants sont donc naturellement désavantagés par rapport aux produits mûrs. De plus, les industriels fabriquant des produits mûrs font tout, nous l'avons constaté, pour conserver leurs aides et empêcher les nouveaux venus d'en obtenir. Nous avons décompté 14 aides nationales et 347 aides locales ; personne, dans l'administration, n'a une vision globale de cette « jungle ».
Enfin, le troisième domaine d'apparition potentielle de freins à l'innovation touche aux règles de la construction en général et à la réglementation thermique en particulier, aujourd'hui la RT 2012. Les prescriptions quantitatives de cette réglementation sont intégrées dans un outil de simulation appelé le « moteur de calcul ». La conception de toute nouvelle construction doit être soumise à un test de validation permettant de vérifier, dès sa conception, si le bâtiment pourra se conformer à la RT 2012. Or, tout composant nouveau doit être préalablement référencé puis techniquement décrit dans le « moteur de calcul » pour pouvoir ensuite être utilisé. La procédure à suivre pour l'intégration dans le « moteur de calcul » est dite procédure du « titre V ». Elle est gérée formellement par la Direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages (DHUP) mais, en réalité, c'est le CSTB qui a la main sur le « moteur de calcul ».
Ce sera sans doute un apport important de notre étude d'avoir essayé de mettre un peu de lumière sur cet univers complexe. Dans leurs plaintes, les industriels mélangent les différents aspects et sont de ce fait difficilement compréhensibles.
Ce n'est plus possible de continuer à fonctionner ainsi, car le sujet des économies d'énergie est devenu trop important. C'est pourquoi nos recommandations sont ambitieuses.