... car la présence physique d'une équipe de juges pendant une journée ou une demi-journée peut, d'un point de vue psychologique, être d'un très grand effet sans pour autant constituer une gêne réelle pour le fonctionnement de la justice ou représenter un coût excessif.
Par les temps qui courent, quand on ne sait pas trop quoi dire, on dit : « Ah ! Ce projet est intéressant, vous avez de bonnes raisons. Tout cela n'est pas mal, mais cela manque de concertation. » Cela manque toujours de concertation, l'argument est commode !
Disons les choses clairement : pour analyser le passé ou la situation actuelle, la concertation ne sert à rien ! Les chiffres sont là, nous les connaissons. Il n'est nul besoin de concertation pour s'apercevoir qu'un tribunal traite quatre fois plus ou moins d'affaires qu'un autre.
En revanche, la concertation a toute sa raison d'être s'agissant de la restructuration.
Pour l'avenir, il faut se garder du mythe des très grandes juridictions, comme du mythe de tout ce qui est très grand, en général. Il faut préserver un niveau moyen, où les gens se connaissent encore, où les responsables de juridiction peuvent assumer leurs responsabilités parce qu'ils connaissent leur monde.
Au-dessous de ce niveau moyen, il ne peut pas y avoir de spécialisation. On n'obtient pas l'efficacité voulue. Au-dessus de ce niveau moyen, on se retrouve avec de grandes juridictions, de vastes machines et, là où l'on pensait réaliser des économies d'échelle, on aboutit à une très grande déperdition en termes de qualité.
Madame le garde des sceaux, il faut s'attacher à trouver le bon niveau, la bonne dimension, afin de répondre aux conditions techniques actuelles. Il ne faut pas aller trop au-delà de ce niveau, sous peine de risquer une massification qui ne serait pas favorable à ce qui me paraît devoir être le point central de nos préoccupations : la restauration dans les juridictions, particulièrement de la part des chefs de juridiction et des chefs de cour, du sens de la responsabilité.