D’abord, ce projet de loi de finances rectificative comporte une dimension très classique : celle du constat dressé à la fin de chaque année.
Ensuite, derrière ce classicisme, quelques singularités conduisent à s’interroger, de manière parfois positive, mais souvent négative, notamment eu égard à ce trop-plein de taxes et de mesures nouvelles.
Enfin, le présent projet de loi de finances rectificative ne parvient pas à masquer une réalité qui s’impose au Gouvernement, comme à tous les parlementaires : notre difficulté collective à adapter notre pays pour le mettre sur le chemin vertueux de l’orthodoxie économique et budgétaire.
Ce collectif budgétaire est donc, d’abord, très classique. Chaque projet de loi de finances rectificative contient, nous le savons, sa part d’ajustement à la croissance, à l’inflation, à la dérive positive ou négative des recettes, des dépenses et, par conséquent, du solde.
Vous ne l’éviterez pas, monsieur le secrétaire d’État ; et, autant le dire, dans le contexte actuel de morosité économique, les indicateurs se dégradent. C’est logique ! Mais ces indicateurs montrent également que vous ne maîtrisez pas la situation, qui, à bien des égards, vous échappe. C’est donc le constat d’un échec, ou d’une absence de contrôle de la situation.
Nous remarquons malheureusement que le déficit budgétaire dépassera cette année de 13 milliards d’euros celui de l’an dernier, et qu’il sera supérieur de 6 milliards d’euros à la prévision qui a présidé à l’élaboration de la loi de finances initiale. La France est le seul pays important en Europe dont les finances publiques se sont dégradées autant entre 2013 et 2014 : son déficit passera de 4, 1 % du PIB à 4, 4 % cette année. Ce simple rappel contredit l’enthousiasme et la satisfaction du Gouvernement relatifs à l’exécution du budget de 2014. Cette situation, en effet, met directement en cause la souveraineté budgétaire de notre pays.
Nous notons aussi la dégradation des rentrées fiscales, qui connaissent une baisse de 12 milliards d’euros, dont 6 milliards d’euros pour le seul impôt sur le revenu. Certes, l’absence de croissance explique en partie ce phénomène, mais force est de le constater, plus la pression fiscale augmente, plus le produit réellement perçu chute par rapport à la prévision. Il faut sans doute y voir la conséquence des mesures fiscales adoptées par la majorité à l’Assemblée nationale.
L’impôt sur les sociétés a, quant à lui, rapporté 4 milliards d’euros de moins que prévu, conséquence tant de la baisse d’activité que du mitage dont il est l’objet, du fait des multiples dispositifs, de plus en plus complexes, de crédits d’impôt.
Mais, me direz-vous, il y a bien sûr des signaux positifs : le recul du prix du baril de pétrole, les taux d’intérêt bas, l’euro faible. Or ces faits ne sont pas dus à notre action. Ensuite, si ces signaux doivent annoncer des lendemains meilleurs, ils n’ont pas de traduction positive dans le présent projet de loi de finances rectificative ; vous nous avez habitués, monsieur le secrétaire d’État, aux annonces et aux paris non tenus !
On le constate, derrière les éléments classiques d’ajustement de crédits de fin d’année, la noirceur du diagnostic sur l’état de l’économie et sur les résultats de votre politique apparaît.
Mais, me direz-vous encore, ce projet de loi de finances rectificative comporte des mesures nouvelles. Il y en a même trop ! Je pense notamment aux taxes diverses et variées qu’il contient : en réalité, vous faites le plein avant 2015 !
Je relève par ailleurs – tous les gouvernements procèdent ainsi – des surprises, quelques singularités, qui auraient pu ou dû être exposées dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances initiale, mais qui se trouvent curieusement inscrites dans le présent projet de loi de finances rectificative, avec une caractéristique : taxes et nouveautés comprises, on frise l’overdose !
Cela étant, les dispositions nouvelles sont parfois positives ; je pense aux mesures de soutien à l’aviation civile. Elles sont néanmoins souvent négatives ou apparaissent comme bricolées, en tout cas impossibles à expertiser aussi rapidement ; je pense au financement du pass navigo en Île-de-France, à la fin de la prime pour l’emploi, ou encore aux dispositions relatives aux casinos. Je ne développerai pas mon propos sur ce point, faute de temps. Mme la présidente de la commission des finances et M. le rapporteur général, d’ailleurs, l’ont fort bien indiqué : trop de mesures ajoutées à l’Assemblée nationale, et pilotées par le Gouvernement, …