Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, plus de trente ans après les lois de décentralisation de 1982, nous attendions un nouvel acte de la décentralisation. Le projet de loi NOTRe se contente finalement de « rebattre les cartes », sans nouveaux transferts, même si les travaux de la commission des lois ont déjà permis d’aller plus loin.
Je voudrais dire que, au moment où vous-même, monsieur le président du Sénat, et le bureau de notre assemblée veulent renforcer le rôle de notre délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation, il ne me paraît pas aberrant que nous disposions d’un temps de parole sur des textes comme celui-ci, comme cela se pratiquait par le passé, d’autant qu’il s’agit de questions sur lesquelles nous avons beaucoup travaillé – nombre de collègues qui siègent depuis longtemps au sein de cette délégation peuvent en témoigner.
Je voudrais brièvement évoquer quelques principes qui me paraissent être des préalables indispensables à la réussite de cette réforme.
Premier principe : il est important de procéder à une clarification précise des compétences, tout en poursuivant le mouvement de décentralisation. À cet égard, la suppression de la clause de compétence générale, après plusieurs revirements du Gouvernement, est une sage décision. Les différentes collectivités ne demandent pas un élargissement massif de leurs compétences ; elles souhaitent seulement que ces compétences soient précisément définies et qu’on les accompagne des ressources nécessaires. Les régions se voient ainsi confier la responsabilité de définir une stratégie en matière de développement économique. J’y suis favorable. C’est là un enjeu majeur pour permettre à nos territoires de déployer tout leur potentiel ; la création du schéma régional de développement économique accélérera cette dynamique.
Deuxième principe : il me semble indispensable de ne pas instaurer de tutelle d’une collectivité territoriale sur une autre. Certes, il est nécessaire d’avoir, sur un territoire donné et pour une compétence donnée, une direction, mais les collectivités doivent travailler ensemble en tant que partenaires, et non comme sous-traitants. Les acteurs locaux devraient donc être associés à l’élaboration du schéma régional de développement économique à travers la conférence territoriale de l’action publique, comme nous le proposons avec mes collègues centristes.
Troisième principe : cette réforme doit être conduite dans le respect des collectivités existantes et du principe de libre administration. La création de grandes régions, dont certaines le sont trop – on le disait hier –, a redonné aux départements toute leur place en tant qu’échelon de proximité. Si la réflexion sur les départements « d’après 2020 » reste à mener, rien ne justifie à ce stade le siphonnage de leurs compétences. Je salue donc les amendements proposés à la suite des travaux en commission.
Dans un contexte budgétaire difficile, l’objectif de cette réforme est de réduire les déficits publics. Nous connaissons les chiffres pour les années à venir, de même que le risque d’un effet récessif sur l’investissement. À cet égard, je voudrais saluer le travail effectué par plusieurs de nos collègues de la délégation, qui ont récemment déposé la première partie d’un rapport sur les effets de ces baisses de dotations.
Aussi, avant d’asphyxier les collectivités, je considère – il s’agit du quatrième principe, peut-être le plus important – que la mère de toutes les réformes reste celle de l’État. Je suis convaincu que, dans son organisation propre, l’État peut encore trouver des sources d’économies. Pourquoi ne pas s’attaquer, par exemple, au poids écrasant de la fonction publique ? La question de la réglementation de l’État applicable aux collectivités territoriales, du poids des normes – elles sont à l’origine, en 2013, de 1, 2 milliard d’euros de dépenses nouvelles non compensées –, doit aussi être posée. Notre délégation, dotée d’un nouveau pouvoir d’avis législatif, entend s’y atteler. Le premier vice-président de la délégation, M. Pointereau, va d’ailleurs animer un groupe de travail sur ce sujet.
Cinquième et dernier principe : il convient de favoriser les progrès de l’intercommunalité tout en prenant davantage en compte la diversité des situations locales.
Je souscris à la montée en puissance des intercommunalités et à leur élargissement progressif vers la notion de « bassins de vie ». Cependant, alors que la France vient tout juste d’achever sa carte intercommunale, il faut s’adapter à la diversité de nos territoires. L’approche purement quantitative, avec le relèvement du seuil à 20 000 habitants, n’est pas tenable, et je salue la suppression de celui-ci.