Intervention de Alain Fouché

Réunion du 16 décembre 2014 à 21h45
Nouvelle organisation territoriale de la république — Suite de la discussion en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Alain FouchéAlain Fouché :

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, comme à mon habitude, j’userai de ma liberté de parole pour attirer votre attention sur plusieurs points.

Dans ce contexte de big bang territorial, il est une certitude, comme de nombreux collègues de tous horizons l’ont rappelé : les conseils départementaux formeront l’indispensable relais entre les futures grandes régions, les communes et les intercommunalités.

Le département est représenté par des élus locaux très proches de leur territoire, à l’inverse des élus régionaux, qui, pour leur grande majorité, sont inconnus des habitants et souvent éloignés de la base. Pour avoir siégé aux deux niveaux de collectivité, je sais de quoi je parle.

C’est pourquoi la commission des lois du Sénat a profondément modifié ce texte, redonnant ainsi certains rôles aux départements, notamment celui d’aménageur du territoire et d’acteur de proximité.

Après qu’elle fut revenue sur les transferts des collèges aux régions, elle a vidé de sa substance la notion de « chef de file » sur l’économie, puis sur le tourisme.

Pour ce qui concerne la gestion des collèges et lycées, je me permets de vous faire part de mon opinion personnelle : compte tenu de nombreux doublons, je pense qu’il aurait été plus sage de la confier soit aux régions, soit aux départements.

S’agissant des routes, les régions seront chargées des grandes infrastructures, et il était prévu de leur transférer la gestion de la voirie départementale. La commission a choisi de conserver cette dernière aux départements, ce dont je me félicite.

En revanche, madame la ministre, il aurait fallu confier aux régions toute la voirie nationale que l’État avait transférée aux départements ces dernières années, car les coûts de réfection sont exorbitants. J’entendais Mme la présidente du conseil général de la Haute-Vienne : nous partageons une même route, sans connotation politique aucune, je veux parler de la nationale 147. §

Naturellement, les départements ne peuvent pas financer à eux seuls l’entretien de ces voies. Aussi, il aurait été préférable que cette compétence, qui avait été transférée aux départements par l’État, soit reprise par les régions.

J’en viens à la politique du tourisme. Mon département, la Vienne, fera partie de la future grande région Aquitaine-Limousin-Poitou-Charentes. Il est bien évident que la compétence « tourisme » doit être gérée par chaque département. En effet, quel peut être, dans cette grande région, le lien en matière de communication touristique entre Saint-Jean-de-Luz, d’une part, et Châtellerault ou Loudun, d’autre part, distantes de plus de 300 kilomètres ?

Le tourisme doit évidemment relever de l’échelon de proximité, et il ne faut pas le recentraliser, comme il est proposé.

Enfin, arrêtons-nous un instant sur la compétence économique.

Pour mon département, le rattachement à l’Aquitaine et au Limousin va avoir des conséquences pour l’élaboration des schémas économiques sur les territoires.

À cet égard, la proposition de la commission visant à permettre aux régions de contractualiser avec les départements et les collectivités s’agissant de projets économiques locaux me paraît d’une grande sagesse.

En effet, ce n’est pas de Bordeaux qu’aurait pu être gérée l’implantation, en cours, d’un Center Parcs dans le nord de la Vienne, à plus de 300 kilomètres, ou encore de la technopole du Futuroscope de Poitiers, avec 10 000 emplois à la clé. Ne rêvons pas, les choses ne se seraient pas aussi bien passées, car la réussite économique de ces équipements n’a été possible que grâce au concours des élus et des responsables de proximité. Un tel succès ne sera plus envisageable si nous recentralisons.

Aujourd’hui, nos conseils départementaux ont deux grandes priorités : l’aménagement du territoire, avec les aides aux communes, aux services publics en milieu rural et aux projets structurants, ainsi que la solidarité, avec les sommes importantes que cela représente.

Qui pourrait prendre le relais dans ces domaines ? Les régions n’en veulent pas et l’État n’en a pas les moyens, puisqu’il se décharge constamment sur les collectivités.

Madame la ministre, le Premier ministre, Manuel Valls, a précisé, devant l’Assemblée des départements de France réunie en congrès, qu’il tiendrait compte de l’avis du Sénat. Je souhaite que vous nous entendiez ! Nous voulons une France équilibrée, qui tienne compte des territoires et de la ruralité ; nous voulons un pouvoir géré par les élus de terrain, et non par quelques responsables administratifs qui, comme cela se voit aujourd’hui dans les départements, parce qu’ils n’ont plus de moyens humains pour mener ou accompagner les politiques des territoires, passent leur temps à imposer des normes, à contrôler, à sanctionner, bref, à freiner le développement de notre pays.

Hélas, aujourd’hui, la France a tendance à prendre cette direction. Alors, oui, j’espère, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, que vous nous écouterez !

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