Séance en hémicycle du 16 décembre 2014 à 21h45

Résumé de la séance

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  • décentralisation

La séance

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La séance, suspendue à dix-neuf heures quarante-cinq, est reprise à vingt et une heures cinquante.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Nous reprenons la discussion, après engagement de la procédure accélérée, du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République.

Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. François-Noël Buffet.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Je voudrais vous faire part d’un regret et d’une inquiétude.

Je regrette tout d’abord que nous soyons amenés à légiférer sur le présent projet de loi dans des conditions qui ne sont tout de même pas à la hauteur des enjeux.

Nous voilà au troisième texte de la réforme territoriale.

Après avoir voté la loi MAPTAM et à l’issue de la nouvelle lecture du projet de loi relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral, nous entamons aujourd’hui l’examen du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République et qui concerne les compétences des collectivités.

Nous nous heurtons à une difficulté qu’il convient de relever : le texte relatif aux régions s’inscrit dans une logique différente de celle qui était voulue à l’origine par le Gouvernement.

Ce dernier avait pour objectif de réduire le nombre de régions sans toucher les limites de celles-ci et de réorganiser nos collectivités locales en s’appuyant, non sur les départements mais sur les intercommunalités. Or, au cours des débats, la volonté a été réaffirmée de ne pas négliger le département, notamment par des membres de mon groupe. Depuis, la situation a quelque peu évolué.

La ligne de la réduction du nombre des régions sans toucher aux limites de celles-ci a été maintenue, alors que le respect des bassins de vie est une nécessité. Un certain nombre de choix ont été opérés qui ne satisfont pas les élus, voire qui laissent entendre que les interventions des uns ou des autres ont été plus ou moins privilégiées…

En définitive, le texte relatif à la délimitation des régions a évolué d’une façon qui n’est pas satisfaisante – elle est en tout cas la moins pire possible grâce au travail du Sénat – et qui, manifestement, ne correspond pas à notre souhait d’une grande vision de l’aménagement de notre territoire.

Quant au texte qui nous est aujourd’hui soumis relatif aux compétences – nous aurions aimé qu’il clarifie la situation –, il a lui-même évolué. Au début de l’année, au travers de la loi MAPTAM, on a voulu redonner la clause de compétence générale aux régions et, ce jour, l’on en revient à une spécialisation des différents échelons, qui n’est d’ailleurs pas tout à fait complète, contrairement à ce que j’appelais de mes vœux. Or, c’est grâce à celle-ci que l’on pouvait réellement à la fois clarifier la situation à l’égard des différents interlocuteurs et obtenir de véritables économies.

In fine, un changement de pied s’est produit en cours de route : non seulement on a rétabli le département comme structure de base des futures grandes régions, mais encore on en est revenu à une espèce de spécialisation.

Comme l’a dit tout à l’heure M. Mercier…

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

En tout cas, notre collègue a dit une chose qui me paraît essentielle : si l’on avait voulu afficher au travers ces textes une véritable vision de l’organisation territoriale de notre pays et vraiment réaliser notre objectif, à savoir aboutir à une simplification, voire trouver une source d’économies, il aurait été de bon ton de revenir au principe du conseiller territorial. §Certes, nous aurions pu y apporter des améliorations, mais cette solution avait l’avantage de la clarté, de la simplification.

Si une position dogmatique n’avait pas prévalu voilà quelques mois, ce système serait en place et fonctionnerait.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

J’en viens maintenant à mon inquiétude.

Le présent texte tend à confier la spécificité de la compétence économique à l’échelon régional.

Je le répète, je ne suis pas du tout hostile, bien au contraire, à la spécialisation des compétences. Je ne suis pas non plus dogmatique sur le sujet. Le caractère prescriptif du schéma proposé par le Gouvernement, et qui sera corrigé par le Sénat, me paraît absolument essentiel.

Or les collectivités locales qui composent le territoire – c’est singulièrement le cas de la métropole de Lyon, mais ce n’est pas le seul exemple, car il est d’autres collectivités locales qui s’inscrivent dans cette logique ou qui tentent de le faire – sont source de richesse économique et de développement. Elles ont donc besoin de pouvoir exercer aussi cette compétence économique.

Personnellement, je soutiendrai la démarche de Mme Létard, qui déposera sans doute un amendement – la commission des lois l’étudiera –, de manière à laisser place à la discussion, à la négociation et à l’accord des acteurs de terrain sur ce schéma dit « prescriptif », acteurs de terrain qui sont porteurs de cet aménagement du territoire auquel les élus locaux que nous sommes sont très attachés.

Tels sont, madame la présidente, mes chers collègues, les éléments que je souhaitais vous livrer en ce début de soirée. §

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Haut

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous commençons aujourd’hui l’examen du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, texte qui devra modifier notre organisation territoriale pour donner à l’action publique locale la plus grande efficacité.

Toutefois, le sujet inquiète un grand nombre d’élus locaux et il est parfaitement légitime que de nombreux débats soient engagés avant le vote du présent texte.

Nous avons d’ailleurs apprécié que le Gouvernement, à la demande du président du Sénat, ait accepté, le 28 octobre dernier, d’organiser un débat d’orientation générale sur sa vision de la réforme territoriale.

En effet, il est évident que nous avions besoin d’obtenir les éclaircissements nécessaires. Sans faire de procès à quiconque, nous avons pu constater que, depuis le début de l’année, la position du Gouvernement a évolué sur le devenir de notre organisation territoriale, tout particulièrement sur celui de l’institution départementale.

Vous connaissez, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, le sentiment majoritaire de cette assemblée : nous sommes partisans du maintien du département, non pas simplement comme entité géographique, mais comme territoire de l’action publique.

En ce sens, nous n’avons pas une vision pessimiste et conservatrice de l’organisation territoriale de notre pays, mais nous avons la ferme conviction d’œuvrer à ce qui donne au projet de réforme tout son sens : la lisibilité et l’efficacité de l’action publique locale.

Le Premier ministre s’est exprimé cette année à quatre reprises sur la réforme territoriale : le 8 avril à l’Assemblée nationale, les 16 et 28 octobre dans cette enceinte même, enfin le 6 novembre lors du congrès de l’Assemblée des départements de France à Pau.

Nous avons été nombreux à remarquer le chemin parcouru et à saluer l’évolution du discours.

Debut de section - Permalien
Marylise Lebranchu, ministre

C’est vrai !

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Haut

Aujourd’hui, la situation est plus claire et si nous sommes en partie rassurés sur le rôle et le devenir des conseils départementaux, du moins jusqu’en 2021, n’hésitez pas, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, à nous tranquilliser encore davantage.

Tout le monde en est d’accord : une réforme des territoires est nécessaire. Le débat sur l’organisation territoriale doit avoir lieu dans une logique constructive et innovante, tout en prenant compte des spécificités territoriales et en approfondissant la dynamique de décentralisation engagée en 1982.

Il n’y a pas d’un côté les tenants d’un conservatisme désuet, ne voulant, par principe, rien changer à notre organisation territoriale, et de l’autre, ceux qui veulent tout chambouler. Il y a l’immense majorité des élus, mais aussi de nos concitoyens, qui souhaitent une plus grande clarté de l’action publique locale. Toutefois, pour cela, il faut distinguer les compétences de proximité, des compétences plus stratégiques et moins directement liées à la vie quotidienne.

Les régions doivent en effet être renforcées dans leur rôle de pilotage stratégique de l’aménagement et du développement économique des territoires. Elles doivent donc piloter le développement économique de leur territoire et, à cette fin, obtenir tous les moyens – y compris une partie de ceux de l’État –, afin d’encourager l’emploi, ce qui passe à la fois par la formation professionnelle, l’orientation et l’accompagnement à l’emploi.

Les intercommunalités ont vocation à assurer les services publics de proximité qui leur ont été transférés par les communes et, souvent, en lien avec les départements qui peuvent leur apporter l’ingénierie nécessaire : nous souscrivons à ce point de vue. Néanmoins, un grand nombre d’entre elles n’a pas la capacité à organiser à une petite échelle toutes les solidarités humaines ou territoriales.

Il est, me semble-t-il, tout à fait logique que ces solidarités incombent aux départements – l’échelon intermédiaire –, qui permettront d’optimiser le fonctionnement de la nouvelle organisation territoriale.

En période de crise économique, qui songerait à nier l’importance de la solidarité sociale, dont je rappelle qu’elle représente 38 milliards d’euros sur les 71 milliards d’euros de l’ensemble des budgets départementaux et qu’elle ne peut malheureusement que croître à l’heure actuelle ?

Au demeurant, c’est sans doute la raison pour laquelle nombre de ceux qui souhaitaient confier la compétence sociale à d’autres niveaux de collectivités ont prudemment fait marche arrière.

De plus, le présent projet de loi nous fournit l’opportunité de donner un contenu à la notion de solidarité territoriale. Il doit également permettre de clarifier les compétences de chaque niveau de collectivités.

Le département est un espace de dialogue entre les villes et les campagnes ; il est le chef de file des politiques sociales maillant le territoire de services de proximité que sont les services sociaux, les collèges ou les transports scolaires. À ce propos, quelles seraient la plus-value ou les économies résultant d’un transfert du réseau routier du niveau départemental à l’échelon régional ? Tous ces enjeux relèvent d’une proximité que les départements assument et revendiquent.

De même, le département reste le premier interlocuteur des communes et des intercommunalités pour la réalisation de leurs projets d’investissements et de développement. Il est donc reconnu comme le garant des solidarités humaines et territoriales et du développement local dans les limites de son ressort. Ce rôle de chef de filat lui a été reconnu par la loi MAPTAM. Il doit être confirmé par ce projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République.

Il est nécessaire de renforcer cette vocation du département, alors même que le présent texte prévoit la suppression de la clause générale de compétences.

À cela s’ajoute la question des moyens.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Haut

Comme les autres niveaux de collectivités, les départements subiront de plein fouet la baisse annuelle de 3, 7 milliards d’euros qui va affecter les dotations entre 2015 et 2017. Ils supportent une part non négligeable de l’effort, 31, 3 %, cependant que les dépenses sociales explosent.

C’est pourquoi nous avons accueilli avec satisfaction l’annonce de la pérennisation des dispositions dont les départements ont pu bénéficier en 2014. Je songe à la faculté qui leur est accordée de porter à 4, 5 % leur taux des droits de mutation à titre onéreux, les DMTO. Je pense également au fonds de solidarité alimenté par un prélèvement sur ces mêmes DMTO. Toutefois, cet effort devra encore être poursuivi.

En outre, nous appelons de nos vœux l’application du critère du potentiel fiscal corrigé, c’est-à-dire d’un potentiel calculé sur la base des recettes fiscales réelles. Ce mode de calcul devrait enfin mettre un terme aux injustices en matière de classement des richesses, lesquelles pénalisent nombre de départements depuis plusieurs années.

J’alerte de nouveau le Gouvernement sur le problème du financement du RSA.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Haut

Je rappelle que, contrairement à l’allocation personnalisée d’autonomie, l’APA, ou à la prestation de compensation du handicap, la PCH, le conseil départemental n’a aucune marge de manœuvre pour le RSA. Il faut aller très vite vers une meilleure cohérence entre les minima sociaux et s’attaquer à la question du financement du RSA à long terme.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Haut

En matière de solidarité, l’État et les départements travaillent sur les mêmes sujets. Ce sont les départements qui construisent les politiques sociales, qui les mettent en œuvre, qui ont la connaissance des territoires et des populations.

Madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, revenons-en à l’essentiel : la décentralisation n’a certes jamais été évaluée, elle a surtout été critiquée, mais, malgré ses imperfections, elle nous apparaît comme un succès, d’abord et avant tout pour la démocratie.

Tous ensemble, dans cet hémicycle, nous devons rechercher et définir les conditions d’une plus grande efficacité de l’action publique. Nos concitoyens nous le demandent. Ils veulent plus de clarté, plus de transparence et une gestion optimale des deniers publics.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Lasserre

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, tout a été dit sur la méthode : procédure accélérée, changement de stratégie et d’orientation, absence manifeste de discussion avec les élus de la République... De l’épisode imposé du redécoupage des cantons aux débats sur ce projet de loi NOTRe, les erreurs, les empressements et les hésitations ont abouti à certaines propositions qui sont à nos yeux inacceptables.

Certains constats sont insupportables. À chaque appel au bon sens, à chaque demande de débat et de concertation, à chaque requête tendant à compenser l’absence totale d’analyses financières, les réponses sont toujours les mêmes : on nous accuse d’immobilisme, de conservatisme et même souvent de ringardise. §

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Lasserre

En vérité – c’est notre sentiment –, l’organisation de la France est actuellement pensée en dehors des élus, dans les limites du périphérique parisien, fréquemment sur la base d’affirmations infondées ou non vérifiées, notamment au sujet des financements et surtout quant aux véritables coûts de fonctionnement des collectivités.

La réalité est la suivante : la réforme territoriale est divisée par petits paquets, via une succession de textes normatifs, ce qui rend bien entendu très difficile la cohérence d’ensemble.

Il existe une véritable interconnexion entre le découpage et les compétences des régions, le rôle futur des départements et des communautés, les futures attributions financières des uns et des autres. La parcellisation des débats ne relève pas d’une bonne méthode.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Lasserre

Madame le ministre, monsieur le secrétaire d’État, gardons-nous de construire une maison sans en assurer les fondations. L’avenir sanctionnera les malfaçons.

Disons quelques mots de ces fondations.

À l’évidence, le réseau communal est une grande richesse pour la France. Aucun système démocratique ne remplacera l’initiative locale, incarnée par les maires et leur conseil municipal. Or la nécessité de s’adapter prend aujourd’hui la forme d’une disparition programmée.

Les départements, salués par M. le Premier ministre lors de sa venue à Pau, seront terriblement affaiblis par cette réforme, menée sous la responsabilité du même Premier ministre. Or vous ne trouverez pas d’instance pour se substituer aux départements dans le domaine des solidarités humaine et territoriale.

La France est un bel exemple d’aménagement. Qu’il s’agisse des réseaux, des équipements publics ou des moyens de communication, notre pays porte la marque d’une véritable volonté d’aménagement. Nous devons cette spécificité à une authentique culture politique française. Nous la devons notamment au couple formé par la commune et le département, principal artisan, jusqu’à l’époque actuelle, de cet aménagement.

Aussi, le débat sur les compétences sera fondamental, ne serait-ce que dans le domaine du très haut débit – je reviendrai très brièvement sur cet exemple au terme de mon intervention.

N’oublions jamais que les citoyens ne sont pas des matricules et que certains dossiers, notamment celui des transports scolaires, exigeront toujours de la proximité et de la sensibilité locale.

Construire des fondations, c’est aussi engager le débat. Lorsque le plus grand nombre ne s’est pas approprié les changements, ces derniers ne peuvent produire rien bon.

J’espère que cette réforme donnera aux différentes collectivités, aux divers territoires, des possibilités d’adaptation, assurant ainsi de la logique, de la cohérence et de la signification aux futures architectures.

Construire des fondations, c’est également se donner le temps de vérifier la pertinence de concepts d’organisation : les regroupements imposés sont-ils nécessairement une source d’économies ? Réfléchissons-y. Je suis sûr qu’un examen attentif des situations financières des collectivités et de leurs coûts de fonctionnement réserverait de très grandes surprises.

La métropolisation généralisée à tout prix est-elle réellement une conception moderne ? Je suis de ceux aux yeux desquels le génie français est à même de produire des idées d’une autre force. Après l’achèvement de cette nouvelle carte, la seule solution est la conclusion d’un accord quant aux principes de progressivité et d’expérimentation.

Plusieurs avancées ont été examinées voire votées par la commission des lois, notamment sur l’initiative du groupe auquel j’appartiens. J’espère que nous ne nous arrêterons pas là. Ce rendez-vous est si important pour la France ! L’ensemble des élus de notre pays nous regardent et nous observent. Ils espèrent beaucoup de ce débat parlementaire.

Nous attendons avec impatience de connaître le sort qui sera réservé à nos multiples propositions.

Nous attendons notamment le débat sur la préparation et l’application de schémas régionaux prescriptifs – quel est, d’ailleurs, le sens exact de ce dernier terme ? – en matière économique et d’aménagement du territoire. Ces documents méritent bien entendu d’être précisés, particulièrement quant au rôle des départements et des communautés de communes. La commission des lois a déjà bien avancé au sujet des transports scolaires, de la voirie départementale et des collèges.

Enfin et surtout, nous souhaitons que le seuil de population des intercommunalités fasse l’objet d’une décision adaptée. Il faut que ce débat débouche sur des propositions réalistes.

Mes chers collègues, libérons-nous des contraintes que nous nous imposons : nous le savons tous, le chiffrage suggéré en la matière est arbitraire, théorique et très éloigné des réalités. Assouplissons cette règle et mettons en avant la volonté des élus, les conditions naturelles et historiques nécessaires à un bon travail collectif.

Madame la présidente, en veillant à ne pas trop dépasser mon temps de parole, je dirai quelques mots de l’aménagement numérique du territoire.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Lasserre

Si la désignation de la collectivité responsable ne fait pas très rapidement l’objet d’un fléchage en matière d’équipement, la nature reprendra ses droits.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Lasserre

Aussi, seules seront équipées les zones rentables et celles qui seront soutenues par des collectivités disposant d’un fort potentiel financier et fiscal. Dès lors, nous verrons les inégalités territoriales se creuser.

Tel est le débat que nous souhaitons engager, en comptant, bien entendu, sur le travail parlementaire ! §

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Grand

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, l’esprit et l’architecture de la grande réforme engagée en 1982 avec les premières lois de décentralisation étaient, à l’origine, cohérents. L’État transférait aux collectivités territoriales des compétences et déconcentrait des moyens ; les élus locaux ont relevé le défi de l’aménagement et de la gestion du territoire sous toutes ses formes, qu’il s’agisse des équipements ou des services publics.

Plus de trente ans plus tard, dans un monde qui bouge, face une mondialisation qui s’impose, dans le double cadre d’une Europe qui peine à s’accomplir et d’une France toujours conservatrice et bloquée, nous pouvions espérer que l’État proposerait une nouvelle étape de décentralisation, de déconcentration et de confiance.

L’enjeu est simple : c’est celui de la compétitivité économique, de l’attractivité de nos régions et de l’aménagement de notre territoire.

J’en suis convaincu, la création de grandes régions, le maintien des départements, le renforcement de l’intercommunalité impliquant l’émergence des métropoles et la sacralisation des communes sont l’architecture d’une réorganisation territoriale qui aurait pu servir de base à une ambitieuse évolution institutionnelle de la décentralisation.

Dans ce contexte, le seul cap qui vaille, c’est de donner à ces grandes régions les moyens de faire face à deux impératifs prioritaires : le développement économique et la création d’emploi.

Ces deux missions cardinales doivent guider les secteurs de la formation et de la recherche, ainsi que l’orientation de grandes infrastructures routières, ferroviaires, portuaires et aéroportuaires qui leur sont liées.

Le but politique n’est pas de s’interroger sur le nom des futures capitales régionales et encore moins sur celui des futurs candidats aux élections. Notre objectif, c’est de créer une collectivité disposant de tous les moyens pour relever les défis qu’impose la réalité économique et sociale de nos régions.

Je songe ainsi à mon territoire, le Languedoc-Roussillon, qui fusionne avec Midi-Pyrénées. J’étais favorable à la création de cet ensemble.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Grand

Ces deux régions présentent aujourd’hui des populations, des budgets, des volumes de demandeurs d’emploi et même des PIB par habitant quasiment identiques.

Or, cette future grande région, c’est seulement 2, 3 milliards d’euros de budgets cumulés pour plus de 500 000 demandeurs d’emploi et une économie faible dans la plus grande partie de son territoire. §Qui peut imaginer sérieusement qu’elle aura les moyens de relever les seuls défis qui comptent, l’industrialisation et l’implantation d’entreprises ? Ce sont là les seules réelles solutions pour faire baisser le chômage. Qui peut affirmer que cette future région, parce qu’elle est plus grande que les précédentes, sera plus attractive et plus compétitive qu’elles ? Aucune personne sérieuse ne s’y risquerait.

Telle est l’incontournable réalité face à laquelle j’entends aujourd’hui formuler des propositions.

Au fil des dossiers d’implantation ou de création d’entreprises, nous déplorons toujours les mêmes freins qui aboutissent trop souvent à l’abandon des projets ou à leur délocalisation.

Madame le ministre, lors des prochaines élections régionales, les métropoles et les régions verront leurs avenirs liés. Je ne puis imaginer que dans les hémicycles des conseils régionaux et métropolitains, des hommes et des femmes s’affrontent. Je forme de grands espoirs pour que des élus raisonnables, animés d’une certaine idée de la République, conscients de la situation à laquelle notre pays fait face en matière économique et sur le front de l’emploi, se rassemblent pour dépasser leurs ambitions au profit d’une nouvelle force économique.

À cette fin, il faut que nos régions et leurs métropoles disposent d’outils financiers pour combattre la concurrence d’autres régions extérieures à la France. Ces dernières sont parfois très proches de notre territoire. Je songe, pour la région dont je suis l’élu, à l’Espagne et au Maghreb.

Une réforme institutionnelle, traduisant une vision et une volonté politiques, pourrait par exemple conduire à déconcentrer une partie de la fiscalité de l’État.

Ne vous figurez pas que je n’ai pas envisagé toutes les conséquences et les mesures d’accompagnement nécessaires à une telle évolution, y compris la réaffectation aux régions d’une part de la dette de l’État.

Je propose également l’extension des zones franches à de larges secteurs géographiques au titre de dossiers économiquement stratégiques. Notre pays bénéficie déjà de tels dispositifs.

J’ajouterai que des mesures sociales spécifiques à nos territoires doivent être étudiées. C’est à ce prix que nous gagnerons la bataille de la compétitivité.

Les élus locaux sont responsables, compétents et conscients que la gestion de ces grandes régions et celle de l’État sont liées. Aussi, pour avancer d’un même pas, pour coordonner et assurer la concertation, une autre réforme institutionnelle créant un conseil des présidents de régions qui organiserait régulièrement des réunions avec le Président de la République et les ministres concernés par l’ordre du jour serait, selon moi, fort utile au fonctionnement de la République.

L’action économique de nos régions à l’international conduit très souvent leurs présidents à se déplacer : leur accorder un rang protocolaire rétablirait une forme d’égalité par rapport à d’autres pays.

Il me semble également que l’État pourrait déléguer d’office aux régions certaines compétences réglementaires ne nécessitant pas une harmonisation nationale absolue.

Chacun comprendra que ces grandes régions ne sont pas des collectivités de proximité et ne jouissent pas des compétences que les départements, en particulier, doivent continuer à exercer.

Les grandes régions n’ont de sens que si leur réalité s’accompagne d’une déconcentration de moyens institutionnels, réglementaires et fiscaux pour qu’elles deviennent économiquement compétitives et attractives.

Madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le chômage ronge nos territoires et finira par déstabiliser la République. Renforcer nos collectivités locales, c’est renforcer la compétitivité de la France et préserver la République. C’est un gaulliste qui vous le dit ! §

Debut de section - PermalienPhoto de Odette Herviaux

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, mon discours sera un peu différent !

Régionaliste convaincue, j’avais placé beaucoup d’espoir dans votre projet de loi, que j’ai accueilli avec enthousiasme, madame la ministre. Autant le dire : je ne suis pas satisfaite du texte issu des travaux de la commission des lois.

La présente réforme de notre organisation territoriale donne à voir l’archétype des contradictions françaises, où se mêlent notre propension à l’autodénigrement, l’ambition d’une modernisation revendiquée par tous mais toujours critiquée et reportée, la confirmation de conservatismes archaïques et le poids d’habitudes souvent obsolètes. C’est pourquoi, madame la ministre, je souhaite saluer votre écoute et votre ténacité, et j’espère que dans quelques semaines, à la fin de ces débats, nous disposerons d’une véritable réforme qui fasse prévaloir, vous l’avez dit, le seul intérêt général.

Debut de section - PermalienPhoto de Odette Herviaux

J’interviendrai sur un seul thème, essentiel à mes yeux pour l’avenir de notre pays mais au sujet duquel, étonnamment, les voix se font beaucoup plus discrètes : le destin maritime de la France eu égard à ses territoires littoraux et ultramarins.

De discours en colloques, les déclarations d’intention se multiplient pour réaffirmer son importance et sa transversalité. Toutefois, les traductions concrètes de ces paroles tardent à se faire sentir, en particulier dans les textes structurants pour l’action publique.

Je tiens ainsi à vous remercier très sincèrement, madame la ministre, de votre engagement et de celui de vos collaborateurs dans ces problématiques littorales et maritimes qui se heurtent trop souvent à la méconnaissance ou à l’indifférence de beaucoup. Vous avez en particulier pris en compte les conclusions de rapports sénatoriaux concernant ces sujets.

Pourtant, comme l’a rappelé le Premier ministre lors des assises de l’économie maritime, la réalité est bien différente de ces déclarations d’intention.

En effet, la mer et les territoires littoraux nous offrent de formidables leviers de croissance durable, mais à condition de se donner les moyens de les actionner, d’accompagner efficacement les collectivités concernées et de ne pas oublier les gens qui y vivent au quotidien. Et je sais que vous y êtes particulièrement sensible.

Quelques questions ont retenu mon attention : l’aménagement littoral, la continuité territoriale, le développement portuaire, l’avenir de la Société nationale de sauvetage en mer, la SNSM, et le droit à l’expérimentation sur l’eau pour ma région.

Concernant le premier sujet, nous ne pouvons plus laisser les élus et les citoyens face à une justice administrative dont la jurisprudence n’est ni équitable ni stabilisée. En cohérence avec la mission d’information sur la loi Littoral, que j’ai conduite avec Jean Bizet, l’étude d’impact du présent projet de loi rappelle que les mesures issues du texte de 1986 destinées à favoriser son application au plus près des réalités territoriales n’ont jamais été mises en œuvre.

C’est pour y remédier que j’ai déposé un amendement visant à préciser le périmètre du schéma régional d’aménagement et de développement durable du territoire, le SRADDT, dans les régions littorales, ainsi que les modalités d’intervention en matière d’aménagement littoral, lesquelles resteront facultatives et devraient permettre de responsabiliser les élus locaux. Ces derniers seront alors eux-mêmes chargés de dialoguer et de proposer une réponse équilibrée aux difficultés qu’ils rencontrent.

Dans le même esprit, la desserte des îles métropolitaines ne doit plus être l’angle mort de l’action publique et de la compétence en matière de transports visée à l’article 8 du présent projet de loi.

Le transfert aux régions, désormais autorités de gestion pour les programmes européens, permettrait d’optimiser les moyens déployés dans le cadre des contrats de plan État-région pour garantir l’accessibilité sociale et économique de ces transports.

J’ai également déposé un amendement en ce sens, afin d’affirmer le principe républicain de continuité territoriale et, partant, la place des îles et la reconnaissance dans notre pays des acteurs insulaires.

S’agissant du développement portuaire, je regrette la suppression de l’article 11 du projet de loi lors des travaux de la commission, même si ce texte pouvait encore être affiné. J’espère que nous aurons l’occasion d’y revenir au cours de la discussion qui se déroulera après les vacances parlementaires. J’en proposerai alors une réécriture.

Comme je l’avais indiqué dans le rapport parlementaire que j’ai remis à M. le secrétaire d’État Frédéric Cuvillier au mois de mars dernier, de nombreuses autorités portuaires appellent à un renforcement de la place des intercommunalités et du rôle de chef de file des régions, dans la continuité de la loi du 27 janvier 2014 et en cohérence avec le schéma régional de développement économique, d’innovation et d’internationalisation, dont elles ont la responsabilité.

Quant à l’avenir de la SNSM, de nouvelles modalités de financement devront rapidement être mises en place pour garantir la pérennité des actions de cette société absolument indispensables à la sécurisation de nos espaces littoraux. Même si le tourisme n’est pas toujours considéré comme partie intégrante de l’économie, le sauvetage en mer est bien l’une de nos préoccupations.

En conclusion, malgré mes réserves sur le texte de la commission, je forme le vœu que notre assemblée se hisse à la hauteur des enjeux et remplisse efficacement sa mission, au service des collectivités, des élus locaux, certes, mais surtout de nos concitoyens, dans l’intérêt général de notre pays.

Pour rester fidèle à mon souhait de régions fortes et au droit à l’expérimentation, je déposerai enfin un amendement tendant à une expérimentation relative à la gestion de l’eau dans une région que nous connaissons bien, madame la ministre. C’est un sujet sur lequel nous travaillons depuis déjà fort longtemps ! §

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, chaque membre de cette assemblée, quelles que soient les travées sur lesquelles il siège, a en tête le feuilleton compliqué et plein de rebondissements de la réforme territoriale tentée depuis 2012.

Au cours de cette seule année 2014, nous avons assisté à la promulgation de la loi MAPTAM, puis au tracé, dans l’improvisation et sans concertation, d’une nouvelle carte régionale dont l’encre n’est pas encore sèche, et nous finissons avec la discussion générale du projet de loi NOTRe. Quelle effervescence normative !

Nous voilà donc en train de discuter, après engagement de procédure accélérée, des compétences, c’est-à-dire du « pour quoi faire ? ». Il était plus que temps !

Mais nous devons débattre sans rien savoir du « avec quoi ? », puisque, selon les annonces, la réforme de la dotation globale de fonctionnement sera examinée au moment de la discussion du projet de loi de finances pour 2016, sans rien savoir non plus du « avec qui ? », puisque la réforme de l’administration territoriale de l’État est en cours de réflexion, que les décisions sont annoncées pour le mois de février ou de mars prochain et que, si l’on en croit le Gouvernement, elles pourraient peut-être – ou peut-être pas – inclure quelques transferts de compétences, qui pourraient être insérés dans le texte par voie d’amendements. Ubu n’est jamais loin !

Tout cela n’est vraiment pas de nature à permettre à nos concitoyens de s’y retrouver. La démocratie locale en souffre.

La future loi NOTRe serait une loi de régionalisation, plutôt que de décentralisation, mais pas une loi de recentralisation. Après tout, la décentralisation est un principe constitutionnel depuis 2003 et le Gouvernement ne peut pas l’ignorer ! Ce dessein justifierait les dispositions du texte relatives aux départements et aux intercommunalités, censés évoluer pour s’adapter à un fait régional renforcé.

À ce stade, l’absence de bon sens est une constance de la démarche gouvernementale. L’exposé des motifs du projet de loi déposé le 18 juin affirme qu’il s’agit de préparer la suppression des départements à l’horizon 2020. Dans cette perspective, le texte engage le transfert aux régions de certaines de leurs compétences, et non des moindres.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

Mais le 4 décembre dernier, devant la commission des lois, vous avez dit, madame la ministre : « nous avons un mandat devant nous pour nous poser ensemble la question du devenir des départements. »

Pourquoi persistez-vous alors à nous présenter un texte non remanié ? Pourquoi priver les assemblées départementales des compétences qui leur permettent d’exprimer ces solidarités territoriales et sociales que vous avez aussi pris soin de célébrer ?

La question du devenir des départements se pose au regard du principe, lui aussi constitutionnel, de subsidiarité : à quel niveau peut-on le mieux gérer, demain, les compétences en matière de collèges, de transports scolaires ou de routes départementales ? Tant que cette question n’est pas résolue, pourquoi toucher à la mise en œuvre des compétences, qu’il s’agisse d’un transfert vers les régions ou vers les métropoles ? Cela relève du bon sens !

Le renforcement des compétences économiques des régions peut être approuvé, même si le périmètre peut se discuter, par exemple le chef de filat en matière de tourisme. Mais la logique implique que les régions, pour être efficientes dans cette mission capitale pour l’emploi, ne soient pas lestées de compétences dont ceux qui les gèrent – nous sommes nombreux dans cet hémicycle – savent bien qu’elles imposent la proximité du quotidien.

Enfin, renoncer à ces transferts se justifie par le fait que le mandat à venir sera caractérisé par l’organisation de nombre de régions dans un nouveau périmètre. Une tâche lourde et complexe.

On déplore le même manque de bon sens du Gouvernement pour ce qui est des intercommunalités. À peine les nouveaux conseils communautaires installés, il faudrait rebattre les cartes et construire des communautés de communes à 20 000 habitants, au nom, toujours, de la régionalisation. Découper pour créer l’illusion du changement, c’est une sorte de manie un peu primaire de ce pouvoir : les cantons, les régions, les intercommunalités, les circonscriptions législatives peut-être aussi demain… Mais le découpage, entre vos mains, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, est trop souvent dévastateur pour nos territoires !

Imaginer des dérogations multiples pour les secteurs à faible densité n’est pas une réponse palliative acceptable. Attendons que la question de l’avenir de l’échelon départemental soit effectivement résolue pour définir, si cela s’imposait vraiment – ce n’est pas certain – un seuil relevé, qui, en milieu rural, créerait de l’éloignement, toujours facteur d’exclusion et d’atonie. Laissons les territoires et leurs représentants respirer. Ils savent évoluer plus que vous ne semblez le croire et l’attention réelle qu’ils portent aujourd’hui aux communes nouvelles en est un signe.

Travaillons en revanche sur le tissu syndical. Le texte le prévoit, j’y souscris dans le principe et je crois même que le département peut jouer un rôle majeur dans une réduction intelligente du nombre de syndicats.

Voilà plus de deux siècles, un philosophe et homme politique irlandais, Edmund Burke, énonçait : « Les lois, comme les maisons, s’appuient les unes sur les autres. »

Comment ne pas avoir ces mots en tête aujourd’hui ? Comment ne pas s’interroger sur la solidité – c’est bien cela qui est en question – d’une construction législative censée permettre à nos collectivités de résister face à ce qui est bien plus qu’une tempête économique et financière et de réaliser des économies que les auteurs du présent texte peinent eux-mêmes à chiffrer aujourd’hui ? Le doute est là, lancinant.

La commission des lois, dans sa grande sagesse, a déposé sur le texte du Gouvernement des amendements qui visent à rendre de la cohérence et de la logique à une réforme qui en manque gravement. Puissent le Gouvernement et sa majorité y souscrire. Puisse le Sénat enfin être entendu ! §

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, lorsque j’ai demandé à mon groupe de m’attribuer un temps de parole dans cette discussion générale, je n’imaginais pas un instant monter à la tribune sans rien savoir des intentions du Gouvernement sur le sujet que je souhaite évoquer : la métropole du Grand Paris.

Voilà donc un cas bien singulier, et un orateur quelque peu embarrassé, qui se voit contraint, au moment où nous devrions déjà pouvoir débattre du fond du texte, de bâtir son propos sur des hypothèses ou sur des silences, puisque l’amendement du Gouvernement, que l’on nous annonce depuis des mois et des mois, n’a toujours pas été déposé !

Madame la ministre, une telle situation n’est pas acceptable, et je vois là, outre une bien mauvaise méthode, un manque de respect pour le Sénat qui, en vertu du rôle que lui confère la Constitution, examine en premier ce texte sans même savoir, avant la date limite de dépôt des amendements parlementaires, quelles sont les intentions réelles du Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

Madame la ministre, ce n’est pas à vous que j’adresse ce reproche, car je connais votre position. Ce reproche – rendons à César ce qui appartient à César – est destiné à M. le Premier ministre qui, manifestement, a quelque peine à trancher ce nœud gordien que constitue la métropole du Grand Paris.

Pis, il a, volontairement ou non, par tactique ou par indécision, je ne sais, laissé penser aux plus farouches opposants à cette métropole qu’il les avait non seulement entendus mais compris.

Ainsi, sortant de son bureau de Matignon, ceux-là mêmes qui, en juin 2013 et en janvier 2014, se disaient scandalisés, rien de moins, par l’article 12 de la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, dite « loi MAPAM », criaient victoire.

Certes, cet article 12 n’est pas parfait, et il faut y revenir, mais il a un mérite, madame la ministre : il crée une véritable métropole du Grand Paris.

Trop intégratrice ? Peut-être, au goût de certains. Trop compliquée à mettre en œuvre ? Sûrement, quand on pense au fameux mécanisme dit « de l’ascenseur » imaginé pour absorber les compétences et les personnels des EPCI existants.

À ce point près, sur lequel nous devons revenir en conférant la personnalité juridique aux territoires, nous avons là une métropole puissante et potentiellement capable de régler deux problèmes majeurs : d’une part, le comblement du fossé, qui continue toujours à se creuser, entre l’est et l’ouest de ce territoire et, d’autre part, le manque criant de logements.

Debut de section - Permalien
Marylise Lebranchu, ministre

Eh oui !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

Toute la question est maintenant de savoir si ce cap va être maintenu ou bien si nous allons tout simplement lui tourner le dos.

Depuis près d’un an, le Gouvernement sait, puisqu’il en a pris l’engagement pour tenter de calmer les élus locaux mécontents, qu’il doit revenir devant le Parlement. Nous devons le faire, nous avait-on dit, à l’occasion de l’examen de ce texte ; pourtant, nous ne savons toujours rien des choix du Gouvernement !

Je le répète, c’est un vrai problème de méthode, et il ne sera sans doute pas sans conséquence sur l’état d’esprit des élus locaux qui devront mettre en œuvre le texte que nous adopterons, selon le résultat auquel nous serons parvenus. En effet, depuis juin dernier, conformément à votre souhait, madame la ministre, sous la double présidence du préfet de la région d’Île-de-France et du président du syndicat mixte Paris-Métropole, les élus locaux ont été réunis, et on leur a laissé penser qu’ils pouvaient faire la loi, en lieu et place du Parlement. Mes chers collègues, au cours de ces réunions, j’ai entendu bien des noms d’oiseaux adressés aux parlementaires qui avaient voté le texte, ce qui en dit long sur l’état d’esprit de certains élus…

On leur a donc fait croire qu’ils pouvaient voter la loi à notre place, et ils ont eu la faiblesse de le croire. Peut-on le leur reprocher ?

Alors, maintenant, de deux choses l’une : soit, au terme de l’examen de ce texte, nous aurons complètement détricoté le travail accompli lors de l’examen du projet de loi MAPAM par l’Assemblée nationale et par le Sénat, sous la précédente majorité sénatoriale, car il y avait une majorité ici – c’est ce que demande la majorité des élus locaux – soit nous aurons assisté à un remake de la fameuse journée des dupes !

Détricoter l’article 12, c’est plus ou moins ce qui est proposé dans deux amendements d’origine différente, mais fondés tous deux sur les travaux du conseil des élus de la mission de préfiguration de la métropole du Grand Paris.

Néanmoins, paradoxalement, alors qu’un accord entre ces élus aurait été trouvé à 94 %, les amendements de nos collègues Roger Karoutchi et Jean-Pierre Caffet, pour ne pas les nommer, sont assez différents, signe évident qu’il n’y a pas vraiment d’accord sur le fond, mais plutôt, et je me permets de le dire, un accord de façade plein de sous-entendus et d’abord destiné à retarder une échéance dont beaucoup ne veulent pas.

Ces deux propositions présentent toutefois un point commun. L’adoption de l’un ou l’autre amendement en l’état reviendrait à créer non pas une véritable métropole, mais plutôt un « super syndicat » d’EPCI, avec tout de même une particularité, chers collègues de province, puisque, écoutez bien, il s’agit d’autoriser les communes d’Île-de-France à être membres de deux EPCI à fiscalité propre distincts, un établissement public territorial, d’un côté, et la métropole, de l’autre. On n’a jamais vu cela ailleurs, et c’est qu’on vous demande de voter !

Pour le reste, les uns proposent une métropole extra light, où chaque territoire ferait à peu près ce que bon lui semble, le soin étant confié aux élus de choisir les compétences exercées ou de les renvoyer aux communes, y compris dans le domaine de l’élaboration du PLU. Les autres sont un peu plus intégrateurs, mais, mes chers collègues, guère plus.

Surtout, et c’est un point essentiel auquel je ne peux souscrire, les deux propositions prévoient un partage de la richesse issue de l’impôt économique entre les territoires, qui garderaient la CFE, la contribution foncière des entreprises, et la métropole, qui ne disposerait que de la CVAE, la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises – et encore, ne s’agit-il que de la simple progression de cette cotisation, puisqu’il faudrait garantir à chacun ce qu’il a aujourd’hui.

Mais, pour ne pas avoir l’air de ne rien vouloir partager du tout – cela ferait mauvais genre -, nos collègues, grands seigneurs, proposent la création d’un fonds d’investissement, généreusement alimenté par la Ville de Paris, qui ferait ainsi cadeau à la banlieue – c’est décidément Noël ! – des 75 millions d’euros de la dotation d’intercommunalité dont elle pourrait bénéficier en devenant un établissement public territorial, et ce alors même que Paris est déjà une commune et un département !

Voilà, cas unique en France, un même territoire qui bénéficierait d’un triple statut et des dotations correspondantes, et c’est dans l’enveloppe normée de la DGF, mes chers collègues, que l’on puiserait les fonds destinés à cette pseudo-métropole.

Comment mieux dire, mes chers collègues, que ce Grand Paris ne serait que l’ombre d’une véritable métropole capable de régler ses problèmes les plus importants et de rivaliser avec les autres villes-mondes ?

Alors, que faire, madame la ministre ? Eh bien, voyez-vous, avec l’âge, j’apprends à mettre de l’eau dans mon vin.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

Je répondrai donc à cette question en disant qu’il faut, bien sûr, trouver un compromis, tout en conservant l’objectif d’une métropole puissante, ainsi que le chemin pour y parvenir, même s’il faut pour cela passer par plusieurs étapes – à la condition, toutefois, que celles-ci soient suffisamment rapprochées. Toutes ces évolutions dépendent du Gouvernement, dont nous attendons toujours de connaître les intentions.

Je souhaite que nous parvenions à ce compromis, car l’enjeu est tel que nous ne pouvons plus nous payer le luxe de perdre encore dix ou quinze ans avant de nous résoudre à prendre les mesures nécessaires, même au prix de la perte, pour tous, d’un peu de pouvoir et, pour certains, d’un peu de moyens.

Pour ceux qui ont cru, après le long silence du Gouvernement, que le détricotage de l’article 12 était acquis, un tel compromis sera peut-être vécu, oui, comme la journée des dupes, mais je suis persuadé que c’est l’intérêt national, l’intérêt de la France.

Je terminerai, chers collègues de province, en vous priant de vous intéresser à cette question de la métropole du Grand Paris : ne laissez pas les élus locaux et les parlementaires de ce territoire en décider seuls, parce que l’avenir de notre ville-monde, c’est l’avenir de la France !

Applaudissements sur les travées de l'UMP et sur certaines travées de l'UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Cécile Cukierman

Construisez l’avenir de la ville-centre avec la population au lieu de vous occuper de nous !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Françoise Perol-Dumont.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Françoise Perol-Dumont

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, c’est un objectif louable que de vouloir faire évoluer notre architecture territoriale pour tendre vers une action publique plus lisible, plus efficiente, au coût maîtrisé et au plus près des besoins de nos concitoyens.

Telle est bien l’essence même de cette grande avancée démocratique voulue par la gauche qu’est la décentralisation : définir ce qui doit rester du ressort de l’État et ce qui peut être utilement confié à tel ou tel niveau de collectivité pour une mise en œuvre plus pertinente.

Oublier ce principe serait contrevenir à l’esprit même de décentralisation, même si le projet de loi qui nous réunit ce soir est davantage un texte de clarification, et elle est nécessaire, qu’un nouvel acte de décentralisation.

Le regroupement des régions s’impose désormais à tous, et la question de leur taille n’est qu’un élément, l’essentiel étant bien les missions et les moyens attribués pour les exercer, ce qui pose la question fondamentale de leur autonomie fiscale.

Il nous faut des régions stratèges chargées de l’attractivité des territoires, de l’économie, de la recherche, de la formation professionnelle, des régions chargées de l’établissement des grands schémas d’avenir, bref, des régions en capacité de jouer leur partition dans l’incontournable compétition européenne et mondiale.

Dès lors, la seule question à se poser est la suivante : quel serait leur gain en leur transférant des compétences sans incidence sur cette ambition ?

Ainsi, quelle serait la plus-value d’une gestion des collèges au niveau régional ? Le lien collège-lycée, répondront certains. Mais nombre d‘enseignants répliqueront que le lien n’est pas là, mais bien plutôt entre le primaire et le collège, comme l’a de facto acté la loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République, …

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Françoise Perol-Dumont

… puis entre le lycée et l’université.

La réalisation d’économies, répondront les autres. Mais quid, par exemple, de l’harmonisation des différents régimes indemnitaires des personnels TOS, techniciens, ouvriers et de service, dont chacun sait qu’ils sont très différents d’une collectivité à l’autre et qu’il faudra nécessairement les harmoniser par le haut ?

En matière d’éducation, la vraie clarification serait de transférer les gestionnaires des collèges aux départements et ceux des lycées aux régions, la loi Raffarin étant restée au milieu du gué…

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Françoise Perol-Dumont

… en transférant les personnels TOS sans les gestionnaires, avec les difficultés que cela engendre au quotidien.

Quant aux voiries départementales, en quoi leur gestion conférerait-elle plus de poids aux régions et en quoi seraient-elles mieux entretenues ? Le déneigement des routes départementales de la montagne limousine serait-il plus rapide s’il était coordonné depuis Bordeaux et non depuis Limoges ? Le coût en serait-il moindre ?

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Françoise Perol-Dumont

Faudrait-il moins d’agents et moins d’argent ? Faudrait-il moins de matériel ? Gérer les plus de 4 000 kilomètres de routes départementales haut-viennoises donnerait-il à la grande région Aquitaine-Poitou-Charentes-Limousin, dont je salue la création, une force de frappe supplémentaire ?

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Françoise Perol-Dumont

À l’évidence, la gestion des collèges, des routes départementales et des transports scolaires nécessite une mise en œuvre de proximité, qu’assument parfaitement les conseils généraux.

À cet égard, on ne peut que se féliciter de la décision de M. le Premier ministre de les confirmer comme échelon indispensable des politiques de proximité et de solidarité entre les nouvelles grandes régions et le bloc local, solidarité entre les hommes, leur cœur de métier depuis toujours, mais aussi solidarité entre les territoires.

En effet, pas une commune, pas une communauté de communes aujourd’hui ne peut s’équiper sans l’aide du département, qui intervient souvent aux côtés de l’État et parfois de la région, mais qui est aussi souvent leur seul partenaire.

Sur ce point, et puisque l’objectif est de réaliser des économies tout en étant plus efficace, n’aurait-il pas été judicieux de transférer aux départements la gestion de la DETR, la dotation d’équipement des territoires ruraux ?

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Françoise Perol-Dumont

Ce transfert aurait eu pour effet de supprimer en préfecture un service qui existe déjà dans les départements et aurait permis aux maires et aux présidents de communauté de communes de n’avoir qu’un dossier à présenter tout en connaissant clairement les règles d’attribution, ce qui n’est pas toujours le cas avec la DETR.

Mais le soutien des départements au bloc communal n’est pas seulement financier : face au désengagement de l’État en matière d’aide à l’ingénierie communale à partir de 2010, nombre de départements se sont dotés d’agences techniques à disposition des communes et communautés de communes pour l’assistance à maîtrise d’ouvrage, parfois à maîtrise d’œuvre, mais aussi pour des conseils juridiques et de l’assistance informatique.

La notion de « solidarité territoriale », que le Gouvernement a opportunément choisie de faire figurer dans la loi, mérite d’être affinée : elle inclut aussi, me semble-t-il, la notion de « service au public ». Nombreux sont aujourd’hui les endroits où les seuls services publics restants sont ceux qu’ont mis en place les départements.

Pour prendre l’exemple de mon département – mais il y en a tellement d’autres –, pas un habitant ne se trouve à plus de quinze minutes d’une maison du département, véritable porte d’entrée sur tous les services départementaux et bien au-delà via des permanences qui sont tenues par les chambres consulaires, par la MSA, la CAF, Pôle emploi, etc.

Conforter les départements dans ce domaine est donc bien une nécessité, et tel est, me semble-t-il, l’esprit des maisons de services au public inscrites dans le texte.

Quant aux intercommunalités qui montent et vont continuer naturellement à monter en puissance, vouloir imposer uniformément un seuil minimal de population de 20 000 habitants serait une erreur : ne pas tenir compte de la diversité des situations contribuerait inévitablement à nourrir le sentiment de méfiance développé par ceux qui craignent une perte de substance de la réalité communale, cellule de base de notre vivre ensemble démocratique à laquelle ils sont à juste titre attachés.

Madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, les élus viennent juste d’absorber les regroupements de 2011, et ils aspirent légitimement à un peu de stabilité pour conduire leurs projets. C’est pourquoi, si un seuil minimum peut être posé comme un but à atteindre, il ne doit pas devenir une doxa à laquelle les élus devraient se conformer sur l’heure.

Pour conclure, dans le contexte de crise qui frappe notre pays comme beaucoup d’autres, chaque politique publique doit contribuer à redresser la France et à redonner confiance à nos concitoyens. Comme nombre de mes collègues, je souhaite que ce projet de loi de clarification des rôles – nécessaire, je le répète – participe, une fois amendé par les parlementaires, à l’amélioration de l’action publique, tout en tenant compte des spécificités de chaque territoire.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées de l’UDI-UC et de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Vaspart

M. Michel Vaspart. Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission, mes chers collègues, élu des Côtes-d’Armor, je commencerai par dire un mot de la Bretagne, ma région aux contours inchangés, pour regretter profondément que le droit d’option n’ait pas connu l’assouplissement que nous étions plusieurs à réclamer.

Mme Françoise Gatel ainsi que MM. Ronan Dantec et Michel Canevet applaudissent.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Vaspart

Je n’entrerai pas dans le détail technique de ce texte, de nombreux collègues l’ayant fait avant moi. Je situerai plutôt mon propos sur un terrain plus pragmatique, en pensant à nos élus, à nos concitoyens et aux forces économiques du pays.

Je ne serai pas le premier à le dire, force est de constater que cette réforme n’est pas une vraie réforme : elle n’est ni une réforme d’organisation des compétences entre collectivités territoriales ni une forme de décentralisation. On attendait pourtant beaucoup du président Hollande, qui promettait, souvenez-vous, le big bang territorial.

Madame la ministre, non, cette réforme n’est pas courageuse et, en cela, elle décevra nos concitoyens qui, scrutin après scrutin, sondage après consultation, appellent sans ambiguïté de leurs vœux des économies, de la simplification, de la rationalisation, et même la suppression d’un échelon !

Cette réforme déçoit aussi les élus, qui attendaient au minimum une clarification des blocs de compétences. Même cette clarification, nous ne sommes pas certains de la trouver dans ce texte !

Sur le fond, une véritable réforme aurait consisté à supprimer un échelon, bien entendu dans la douceur et dans le temps. Alors, évidemment, chacun prêchant pour son pré carré, il aurait fallu un certain courage pour trancher.

Dans un premier temps, et surtout, c’est le Gouvernement, madame la ministre, qui n’a pas eu le courage de trancher.

En effet, en décidant de créer de grandes régions, tout en préservant certaines régions dans leurs limites actuelles, le Gouvernement n’avait déjà pas vraiment tranché. Car, si l’on avait eu de très grandes régions partout, alors l’échelon départemental aurait conservé, peut-être, un sens pour préserver le lien de proximité. C’était l’option proposée dans le rapport Raffarin-Krattinger.

Mais l’improvisation et la confusion ont continué de sévir dans la définition des compétences respectives des collectivités, puisque le Gouvernement, dans son texte initial, n’a, là encore, pas tranché, confortant le poids des régions et maintenant une structure départementale.

Mais au fait, quelle vraie réforme alternative proposez-vous ?

La mutualisation est bien entendu une très bonne pratique ; elle est d’ailleurs mise en œuvre par de nombreuses collectivités, comme cela a été dit à l’occasion des auditions sur ce texte. Elle doit être réalisée chaque fois qu’elle est utile et plus économique. Pour la pratiquer, en tout cas, nul besoin de loi supplémentaire !

Un mot sur la logique du consensus. Une réforme n’est-elle pas bonne si elle est juste ? En quoi devrait-elle être consensuelle, même si le consensus est toujours préférable ? En quoi surtout le consensus recherché devrait-il l’être parmi les élus ? Il y a bien un consensus chez les Français pour réformer notre millefeuille administratif, pourtant toujours aussi invariablement plus épais.

Finalement, il y a bel et bien un consensus, et il dépasse les clivages, pour ne pas réformer en profondeur. Le courage a manqué au Gouvernement, mais il manque aussi souvent aux élus, qui ont bien du mal à se réformer eux-mêmes. Notre pays est pourtant suradministré, mais sous-organisé.

Mes chers collègues, je siège dans cette assemblée depuis seulement trois mois, avec l’expérience de nombreuses années de mandat de maire, de vice-président de communauté et de conseiller général. Je suis arrivé au Sénat avec, non pas des certitudes, mais un souci de bien faire et, surtout, d’entendre, quoi qu’il en coûte, les attentes de nos concitoyens et, à travers eux, des élus locaux et du monde économique.

Nous sortons d’élections municipales et sénatoriales, nous sommes en permanence les uns et les autres en contact avec nos concitoyens. Nous entendons la même chose, nous partageons de nombreux constats. Pris individuellement, le constat, l’analyse, voire les solutions, nous les avons. Alors, pourquoi sommes-nous incapables collectivement d’aller jusqu’au bout des réformes tant attendues ?

À force de ne pas écouter, de ne pas entendre nos concitoyens et nos élus, à force de n’écouter que la technocratie, qui pourra être surpris de voir à nouveau monter le populisme et l’extrémisme ? Il y a danger, il y a urgence, madame la ministre !

Je regrette profondément que la création du conseiller territorial, au terme de la réforme conduite par le gouvernement précédent, en 2010 – curieusement, il s’agissait de la loi du 16 décembre 2010 –, ait été supprimée dès l’arrivée du président Hollande, par idéologie, avec la promesse de faire mieux. §Qui peut penser aujourd’hui que vous nous proposez mieux ?

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Vous avez eu dix ans pour faire cette réforme et vous n’avez rien fait !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Vaspart

La réforme Sarkozy-Fillon avait le mérite de rapprocher sans heurt région et département et d’organiser la cohérence des politiques publiques de ces deux collectivités. Elle avait aussi le mérite de diminuer quasiment de moitié les élus territoriaux.

Je suis convaincu qu’il y a trop de strates et trop d’élus dans la gestion des territoires de la République française ; c’est même l’une des sources de blocage des dossiers de nos collectivités. La montée en puissance de l’intercommunalité me semble contradictoire avec le maintien de tous les échelons du millefeuille.

La réduction du nombre d’élus est aussi une demande récurrente des Français.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Vaspart

Encore une fois, en décevant les attentes, on inspire le poujadisme chez l’électeur, avec toutes ses conséquences.

Il faudra attendre encore et encore. Et pourtant, les Français sont prêts à des réformes. Nous devons aussi, nous, élus, être prêts à toutes les réformes qui sont indispensables pour notre pays, même si elles remettent en cause jusqu’à l’existence de nos mandats. Le monde bouge autour de nous et il ne nous attend pas !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Vaspart

Les conservatismes et les frilosités sont trop nombreux. Meilleure efficacité de l’action publique locale, meilleure répartition des compétences, simplification administrative, baisse de la dépense publique, plus grande proximité avec les citoyens, dynamisation et ouverture des territoires : dans un contexte financier de plus en plus difficile et contraint, pour l’État comme pour les collectivités, tels seraient les enjeux réels d’une réforme des collectivités si l’on voulait qu’elle soit porteuse de vrais changements.

Madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la France et les Français nous attendent, ne les décevons pas une fois de plus : ce serait une fois de trop !

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Kaltenbach

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, élu de la banlieue parisienne, je centrerai mon propos sur la situation de la métropole de Paris.

S’il est vrai que la Haute Assemblée n’a pas encore pu prendre connaissance de l’amendement sur la métropole du Grand Paris promis par le Gouvernement, ceux qui suivent ces débats savent quels en sont les tenants et les aboutissants, et il me semble que nous pouvons en parler même sans l’avoir sous les yeux.

Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Kaltenbach

J’en parlerai en rappelant que le Sénat, l’an dernier, a pleinement joué son rôle dans l’élaboration d’une métropole à Paris. Le 1er janvier 2016, un unique EPCI se substituera aux 17 intercommunalités existantes, et nous pouvons en être fiers.

Dotée de compétences et de ressources financières importantes, cette future métropole aura les moyens de relever le défi de l’aménagement de la zone la plus dense d’Île-de-France, notamment en matière de logements, où les attentes des habitants sont extrêmement fortes.

Lors du débat parlementaire, les opposants au projet ont il est vrai tenté de l’affaiblir et d’en faire une simple fédération d’intercommunalités.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Kaltenbach

En vain ! Une majorité transpartisane s’est heureusement dégagée – je salue notamment la position de notre collègue Philippe Dallier – en faveur d’une véritable métropole intégrée qui refuse le « chacun chez soi ».

Le Gouvernement, soucieux de demeurer à l’écoute des futurs acteurs de l’institution, a demandé aux élus membres de la mission de préfiguration de faire des propositions d’évolution, mais bien évidemment sans remettre en cause le principe même d’une métropole solidaire.

En effet, le Gouvernement a raison d’être à l’écoute des élus locaux lorsqu’ils demandent que les conseils de territoire puissent mieux gérer, au plus près des habitants, les équipements publics et leurs personnels.

Il faut également les écouter quand ils suggèrent que le PLU soit élaboré à l’échelle des conseils de territoire et s’intègre dans le cadre d’un SCOT métropolitain suffisamment prescriptif.

Toutefois, nous devons impérativement nous garder de franchir la ligne rouge en dotant ces conseils de territoire d’un statut de véritable EPCI. Une même commune serait alors membre de deux EPCI et, surtout, ces conseils de territoire seraient dotés d’un levier fiscal. On se retrouverait alors avec des conseils de territoire qui pourraient voter des taux et lever l’impôt. Au sein de la même métropole coexisteraient alors des territoires aux taux d’imposition et aux richesses très variables. À l’échelle de la métropole de Paris, on ne ferait que maintenir des inégalités qui, aujourd’hui, sont criantes.

La région parisienne est la plus riche de France, voire la plus riche d’Europe, mais c’est aussi celle où les inégalités sont les plus grandes, avec des territoires extrêmement riches, au-delà même de la décence parfois, et d’autres extrêmement pauvres. Ces écarts de richesses sont bien entendu inacceptables, et nous devons faire en sorte de réduire les inégalités à l’échelle de la métropole.

Si nous accordions aux conseils de territoire un statut d’EPCI et un pouvoir fiscal, ce que demandent certains élus locaux, nous irions à l’encontre de l’idée même que nous nous faisons d’une métropole et de la solidarité qu’elle implique. Les inégalités seraient encore plus criantes, et, en tant que sénateur du département le plus riche de France, j’estime que cette situation n’est pas viable à long terme : il doit y avoir plus d’égalité entre territoires, au sein de la métropole de Paris comme à l’échelle du pays.

Nous devons être prudents. Si, in fine, nous en venions à autoriser la double appartenance à un EPCI et la possibilité pour les conseils de territoire de lever l’impôt, il pourrait y avoir d’autres demandes émanant d’autres métropoles, comme Marseille ou Lyon, et l’on détricoterait ce qui a été si difficile à construire.

J’attire également votre attention, madame la ministre, sur le risque d’’anéantissement de nos efforts de simplification du millefeuille territorial si nous créions un échelon de décision supplémentaire à Paris et en petite couronne. Nous aurions alors cinq échelons de décision : la commune, le conseil de territoire, le département, la métropole, la région. Ce serait impensable, absurde ! Nous serions la risée de nos concitoyens si nous nous engagions dans cette voie.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Kaltenbach

Aussi, je fais confiance au Gouvernement et à la majorité du Sénat et de l’Assemblée nationale pour écouter les élus locaux, certes, sans toutefois écrire la loi sous leur dictée. Il faut tenir compte des bonnes idées, mais aussi être en mesure de réguler les demandes extravagantes. Je sais que c’est votre position, madame la ministre, et je vous soutiendrai totalement dans votre défense d’une solution raisonnable pour le Grand Paris.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Kaltenbach

M. Philippe Kaltenbach. Pour conclure tout à fait

Exclamations sur les travées de l’UMP et de l’UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Kaltenbach

, je dis oui à une véritable métropole, oui à la solidarité, oui à la lutte contre les inégalités territoriales !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Fouché

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, comme à mon habitude, j’userai de ma liberté de parole pour attirer votre attention sur plusieurs points.

Dans ce contexte de big bang territorial, il est une certitude, comme de nombreux collègues de tous horizons l’ont rappelé : les conseils départementaux formeront l’indispensable relais entre les futures grandes régions, les communes et les intercommunalités.

Le département est représenté par des élus locaux très proches de leur territoire, à l’inverse des élus régionaux, qui, pour leur grande majorité, sont inconnus des habitants et souvent éloignés de la base. Pour avoir siégé aux deux niveaux de collectivité, je sais de quoi je parle.

C’est pourquoi la commission des lois du Sénat a profondément modifié ce texte, redonnant ainsi certains rôles aux départements, notamment celui d’aménageur du territoire et d’acteur de proximité.

Après qu’elle fut revenue sur les transferts des collèges aux régions, elle a vidé de sa substance la notion de « chef de file » sur l’économie, puis sur le tourisme.

Pour ce qui concerne la gestion des collèges et lycées, je me permets de vous faire part de mon opinion personnelle : compte tenu de nombreux doublons, je pense qu’il aurait été plus sage de la confier soit aux régions, soit aux départements.

S’agissant des routes, les régions seront chargées des grandes infrastructures, et il était prévu de leur transférer la gestion de la voirie départementale. La commission a choisi de conserver cette dernière aux départements, ce dont je me félicite.

En revanche, madame la ministre, il aurait fallu confier aux régions toute la voirie nationale que l’État avait transférée aux départements ces dernières années, car les coûts de réfection sont exorbitants. J’entendais Mme la présidente du conseil général de la Haute-Vienne : nous partageons une même route, sans connotation politique aucune, je veux parler de la nationale 147. §

Naturellement, les départements ne peuvent pas financer à eux seuls l’entretien de ces voies. Aussi, il aurait été préférable que cette compétence, qui avait été transférée aux départements par l’État, soit reprise par les régions.

J’en viens à la politique du tourisme. Mon département, la Vienne, fera partie de la future grande région Aquitaine-Limousin-Poitou-Charentes. Il est bien évident que la compétence « tourisme » doit être gérée par chaque département. En effet, quel peut être, dans cette grande région, le lien en matière de communication touristique entre Saint-Jean-de-Luz, d’une part, et Châtellerault ou Loudun, d’autre part, distantes de plus de 300 kilomètres ?

Le tourisme doit évidemment relever de l’échelon de proximité, et il ne faut pas le recentraliser, comme il est proposé.

Enfin, arrêtons-nous un instant sur la compétence économique.

Pour mon département, le rattachement à l’Aquitaine et au Limousin va avoir des conséquences pour l’élaboration des schémas économiques sur les territoires.

À cet égard, la proposition de la commission visant à permettre aux régions de contractualiser avec les départements et les collectivités s’agissant de projets économiques locaux me paraît d’une grande sagesse.

En effet, ce n’est pas de Bordeaux qu’aurait pu être gérée l’implantation, en cours, d’un Center Parcs dans le nord de la Vienne, à plus de 300 kilomètres, ou encore de la technopole du Futuroscope de Poitiers, avec 10 000 emplois à la clé. Ne rêvons pas, les choses ne se seraient pas aussi bien passées, car la réussite économique de ces équipements n’a été possible que grâce au concours des élus et des responsables de proximité. Un tel succès ne sera plus envisageable si nous recentralisons.

Aujourd’hui, nos conseils départementaux ont deux grandes priorités : l’aménagement du territoire, avec les aides aux communes, aux services publics en milieu rural et aux projets structurants, ainsi que la solidarité, avec les sommes importantes que cela représente.

Qui pourrait prendre le relais dans ces domaines ? Les régions n’en veulent pas et l’État n’en a pas les moyens, puisqu’il se décharge constamment sur les collectivités.

Madame la ministre, le Premier ministre, Manuel Valls, a précisé, devant l’Assemblée des départements de France réunie en congrès, qu’il tiendrait compte de l’avis du Sénat. Je souhaite que vous nous entendiez ! Nous voulons une France équilibrée, qui tienne compte des territoires et de la ruralité ; nous voulons un pouvoir géré par les élus de terrain, et non par quelques responsables administratifs qui, comme cela se voit aujourd’hui dans les départements, parce qu’ils n’ont plus de moyens humains pour mener ou accompagner les politiques des territoires, passent leur temps à imposer des normes, à contrôler, à sanctionner, bref, à freiner le développement de notre pays.

Hélas, aujourd’hui, la France a tendance à prendre cette direction. Alors, oui, j’espère, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, que vous nous écouterez !

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Roux

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nos territoires sont riches de leur diversité, ce qui nécessite un projet de réorganisation territoriale de notre pays précis, mais sans raideur.

Pour ma part, je porte les problématiques d’un territoire de montagne, rural, connaissant certes des difficultés, mais plein de vitalité. Je tenais à souligner ce point dès le début de mon intervention.

Les potentiels de ce territoire rural sont réels : les femmes et les hommes qui y vivent et y travaillent, quelles que soient leurs activités, nous en apportent la preuve tous les jours dans les villes, les villages et les campagnes.

Les Français demandent de nouvelles perspectives pour l’emploi et la croissance, pour un mieux vivre ensemble. Ils ont besoin d’engagements forts. C’est ce que le Gouvernement a entrepris avec ce projet de réorganisation territoriale de notre pays.

Le projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République que nous commençons à examiner aujourd’hui finalise la redéfinition de notre pays pour les cinquante prochaines années. Il prévoit une réforme structurelle qui permettra de renforcer l’efficacité de l’action des collectivités territoriales en proposant une clarification des compétences pour que chaque collectivité devienne un moteur de croissance.

De même que je ne suis pas revenu sur les deux premiers volets de la réforme territoriale déjà discutés et adoptés par la Parlement, je n’entrerai pas dans un autre débat sur la pertinence du nouveau périmètre des régions. Nous soutenons le Gouvernement dans sa volonté de renforcer leur rôle en matière de stratégie, d’innovation et pour tout ce qui concourt au développement économique.

Cette évolution des régions rend d’autant plus indispensable le renforcement des solidarités de proximité, auquel aspirent nos concitoyens dans un contexte où le risque de délitement du pacte républicain est bien réel.

Ces solidarités de proximité s’expriment naturellement au niveau des communes, des intercommunalités et des départements. S’agissant de ces derniers, je me félicite que le Gouvernement, dans un esprit de dialogue, se soit finalement rallié aux arguments de tous ceux qui considèrent que l’échelon départemental, en particulier dans les territoires ruraux, est le niveau le plus efficient pour la mise en œuvre des solidarités humaines et territoriales.

J’insisterai donc sur deux points qui me semblent essentiels.

Tout d’abord, il m’apparaît nécessaire de renforcer le rôle des départements en matière de soutien aux communes.

Cela suppose d’abord de donner clairement aux départements une compétence en matière d’assistance technique et d’en définir le plus précisément possible le contenu, c’est-à-dire, selon moi, l’eau, l’assainissement, les milieux aquatiques, mais aussi la voirie, l’aménagement et l’habitat. Cette définition est d’autant plus nécessaire que l’État a mis fin à l’assistance technique fournie pour des raisons de solidarité et d'aménagement du territoire, l’ATESAT.

Conforter le rôle des départements en matière de soutien aux communes suppose aussi le maintien de l’intervention des départements en faveur des projets d’équipement des communes, ce qui permettrait de pérenniser les nombreux dispositifs d’aide créés depuis de très nombreuses années, leur rôle étant essentiel pour soutenir l’investissement, et donc l’emploi, en particulier dans le secteur du bâtiment et des travaux publics.

Dans cet ordre d’idées, il serait certainement opportun d’envisager le transfert aux départements de la dotation d’équipement des territoires ruraux, la DETR.

Ensuite, je voudrais insister sur la nécessité de préserver la compétence des départements en matière d’infrastructures routières, ce qui est étroitement lié à l’affirmation du rôle des départements en matière d’assistance technique et découle d’une évidence : la très grande majorité des routes départementales ne présente aucun caractère stratégique d’importance régionale et relève, en conséquence, d’une gestion de proximité qui a largement fait la preuve de son efficacité.

Peut-être pourrait-on envisager un transfert des routes nationales aux régions, ce qui paraîtrait logique, compte tenu de l’importance de ces régions pour le développement économique et les transports.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Roux

Le Gouvernement, par ce texte, propose que l’architecture territoriale soit donc recentrée. Il a travaillé dans un dialogue dense mais réel, et je ne doute pas que l’expression législative proposera une organisation territoriale nouvelle, mais concrète et pertinente, à l’issue de nos débats.

Madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, respecter la promesse républicaine d’égalité, c’est ce que nous voulons tous. Le travail réalisé ici, au Sénat, permettra, je le souhaite, d’offrir les mêmes chances à tous, que ce soit en ville ou en milieu rural, a fortiori en zone de montagne. Renforcer les possibilités d’action des territoires, leur proposer des outils d’ingénierie et de développement, tout en conservant un échelon de proximité efficace et à l’écoute : tels sont les axes de travail sur lesquels nous allons nous concentrer lors des débats à venir.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.- Mme Hermeline Malherbe applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de François Bonhomme

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, ce projet de loi aura été l’un des plus longs à se concrétiser, puisqu’il vient en discussion deux ans après son annonce par François Hollande, en octobre 2012, lors des états généraux de la démocratie territoriale.

L’objectif se voulait ambitieux : écrire l’acte III de la décentralisation.

Debut de section - Permalien
Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique

Nous n’avons jamais dit cela !

Debut de section - PermalienPhoto de François Bonhomme

Le diagnostic, lui, était largement partagé et connu depuis bien longtemps : empilement des structures, enchevêtrement des compétences, efficacité moindre et, plus grave encore, incompréhension de l’action publique locale par nos concitoyens.

Cet acte III était donc annoncé dans un but de simplification institutionnelle et de clarification de notre organisation territoriale. En somme, il s’agissait d’améliorer le fonctionnement de notre administration décentralisée.

Qu’en est-il aujourd’hui ?

Depuis sa présentation en conseil des ministres, les atermoiements et les volte-face n’ont pas manqué, jusqu’à nous donner un peu le tournis En fait, le malentendu était initial, car cette loi n’est pas une véritable loi de décentralisation.

Debut de section - Permalien
Marylise Lebranchu, ministre

Exactement !

Debut de section - PermalienPhoto de François Bonhomme

En effet, il n’y a pas de transfert de nouvelles compétences de l’État, et les transferts de compétences entre niveaux décentralisés n’en font pas pour autant un approfondissement de la décentralisation.

Par ailleurs, je note que les quatre niveaux de décentralisation demeurent. Du reste, qu’aurait-on pu attendre de l’État, et pas seulement de ce seul gouvernement ?

Face aux visions locales, qui sont par nature fragmentées, face à ceux qui sont rétifs à tout changement, l’État se doit d’avoir un rôle de chef d’orchestre. Lui seul peut penser la décentralisation de manière globale et s’extraire de l’influence des seuls intérêts « localistes ».

Cette vision existe-t-elle ? L’État s’est-il élevé au-dessus de ces considérations ? Je crains que non ! Faute de fil directeur, cette réforme n’est qu’une collection d’idées qui s’entrecroisent et s’entrechoquent, au risque du statu quo. J’en veux pour preuve le traitement de la clause générale de compétence, d’abord supprimée, puis rétablie, puis de nouveau supprimée, ou encore du conseiller territorial, qui semble suivre le même mouvement, incompréhensible.

Plus ennuyeux, le Gouvernement a procédé à des revirements à contretemps, et il a fait preuve d’un autoritarisme inopportun en imposant une nouvelle carte régionale ou en renonçant brutalement à la suppression du département. À ce sujet, il a fait la démonstration de son impréparation, s’apercevant, mais un peu tard, de l’impasse politique et juridique qui se profilait s’il s’entêtait à concrétiser cette annonce tonitruante.

Tous ces changements de pied intervenus depuis le mois de mai, avec des modifications importantes, voire contradictoires, ont forcément changé l’architecture globale, laquelle est devenue aujourd’hui une véritable construction byzantine. Que reste-t-il donc de ce projet désarticulé ?

La région se voit indiscutablement renforcée. Ce projet tend à promouvoir le niveau régional par la concentration des compétences entre les mains d’acteurs régionaux moins nombreux. En combinant gigantisme et octroi de nouveaux pouvoirs, le Gouvernement souhaite créer des « super-régions ».

C’est du moins ce qu’il annonce, mais, s’il est bien question de transférer de nouvelles compétences et d’affirmer un renforcement de la compétence de développement économique en érigeant les régions en chefs de file et en leur donnant mission d’élaborer certains schémas, en revanche, aucun pouvoir fiscal ne leur est accordé, ce qui peut paraître paradoxal au regard du rôle nouveau qu’on entend leur faire jouer.

Concernant les intercommunalités, le projet de relever leur seuil de 5 000 habitants à 20 000 habitants est effectivement étonnant. Multiplier la taille des intercommunalités par quatre au minimum est irréaliste, car seul le seuil choisi prête à discussion, mais il ne correspond à rien, sinon à un fétichisme du chiffre. Certes, ce relèvement ne posera pas de difficulté majeure dans les zones urbaines, mais, en zone rurale, il aboutira, en l’état, à un regroupement artificiel de territoires, très ou trop étendus du fait de la faiblesse démographique.

La géographie des territoires est ici totalement ignorée, la réalité des bassins de vie s’en trouve véritablement négligée. En conséquence, on s’achemine vers une intercommunalité imposée qui continuera à cohabiter avec une myriade de communes de petite taille.

Concernant les économies affichées, on peut douter de la réduction des dépenses publiques, tout au moins dans les premières années, notamment parce que l’harmonisation des traitements des personnels, en cas de fusion et de mutualisation, se fera sur la base du régime le plus avantageux.

Enfin, pour les départements, chacun se souvient que le projet initial consistait à les supprimer par évaporation, selon une méthode sournoise. Puis, faisant machine arrière, le Gouvernement a opté pour la strangulation, alors même que beaucoup de départements sont déjà affaiblis par une compétence sociale qui en fait des pachydermes, situation aggravée par la disette financière que vous imposez aux collectivités locales avec la baisse brutale des dotations.

À cela s’ajoute un facteur aggravant, le nouveau mode d’élection des conseillers départementaux dans des cantons binominaux, redécoupés à rebours de la carte et de la réalité intercommunales, ce qui aura inévitablement pour effet d’accélérer et d’achever le processus de décomposition.

Enfin, cette réforme présente un risque accru de disparité entre les différents types de collectivités locales, car la seule existence des métropoles aboutira à une organisation hétérogène de la carte, du fait de leur taille ou de l’ampleur de leurs compétences. Nous aurons, d’un côté, les territoires « métropolisés », urbains, disposant d’une nouvelle organisation plus dynamique, intégrée, dans laquelle les métropoles viendront inévitablement concurrencer les régions et, de l’autre, des territoires « interstitiels », ruraux, avec une organisation plus classique et nécessairement moins dynamique.

En conclusion, ce projet de loi laisse une impression d’improvisation et même d’incohérence. Plus préoccupant, les collectivités vont connaître une forme d’insécurité, inadaptée à un fonctionnement serein et finalement bien éloignée des objectifs initiaux.

Au total, après l’acte I de la décentralisation, qui se voulait à l’époque édificateur, l’acte II, qui se voulait consolidateur, l’acte III, qui se voulait refondateur, risque, au fond, de n’être que bredouilleur et même, l’avenir le dira peut-être, fossoyeur d’une certaine France des territoires.

Bravo ! et applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Yannick Botrel

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, s’il faut se féliciter de l’intérêt que nous portons collectivement à ce projet de loi, nous devons constater que c’est là un des seuls points sur lequel se rejoignent les différents orateurs.

Depuis de nombreuses années, rapport après rapport, le Sénat estime qu’il y a lieu de repenser l’organisation territoriale de notre République, pour la rendre plus claire, plus efficace, plus proche de nos concitoyens. Il y a eu le rapport Balladur et, plus récemment, le rapport Krattinger-Raffarin qui, une fois encore, a abouti à ce constat, alors assez partagé, au-delà des sensibilités politiques de chacun.

Le Gouvernement nous a présenté un texte que nous attendions tous et nous avons beaucoup débattu ces derniers mois de son contenu. Le texte gouvernemental qui a été soumis à la commission des lois, probablement perfectible et amendable, avait le mérite de mettre sur la table un certain nombre de propositions.

Le groupe socialiste a fait le choix de formuler des propositions concrètes pour améliorer ce texte. Il a déposé des amendements, dont malheureusement un très petit nombre a été repris par la commission des lois – je le regrette, bien entendu.

Je ne prendrai qu’un exemple, qui concerne l’article 14.

Nous avons tous estimé, et différents orateurs sont intervenus sur ce sujet, que le chiffre de 20 000 habitants qui est proposé par le Gouvernement comme seuil de population des intercommunalités pouvait être parfois, mais pas toujours, trop élevé. Les sénateurs socialistes ont proposé d’abaisser ce seuil à 15 000 habitants avec de larges modulations possibles, afin de s’adapter à la réalité des territoires, avec la possibilité laissée aux commissions départementales de la coopération intercommunale de le faire varier, en cas de nécessité. Il me semble qu’il s’agissait là d’une proposition concrète, équilibrée et constructive.

La nouvelle majorité sénatoriale a fait le choix de la facilité et du dogmatisme, d’une certaine manière, en supprimant purement et simplement l’alinéa concerné à l’article 14. Selon moi, c’est une erreur. Une fois encore, nos collègues députés passeront par-dessus nos têtes en faisant prévaloir leur version, et elle seule. Personnellement, je trouve cette situation regrettable.

Elle est d’autant plus regrettable que M. le président du Sénat souhaite, nous a-t-il dit, illustrer la rénovation de notre Haute Assemblée par un investissement accru – et, j’imagine, positif –, dans l’élaboration des lois. Nous n’en prenons pas le chemin !

Sur l’article 14 toujours, je rejoins la volonté exprimée par le Gouvernement de rationaliser la carte de la coopération intercommunale par la réduction du nombre de syndicats primaires qui auront vocation, à l’avenir, à rejoindre les EPCI. Cela se produit déjà en Bretagne, madame la ministre, région qui doit à son antériorité en termes de coopération intercommunale d’avoir été précurseur sur ces sujets, sans que cela pose de problème aujourd’hui.

Dans le même temps, je me félicite également de la position que vous avez exprimée, madame la ministre, lors de votre audition au Sénat, au sujet du maintien des grands syndicats constitués à l’échelle supra-communautaire ou départementale et exerçant un certain nombre de compétences techniques, dans les domaines de l’eau ou de l’énergie en particulier. L’intention du Gouvernement de les conserver est conforme à la prise en compte de la subsidiarité territoriale, synonyme d’efficacité ; or, à cet égard, ces structures donnent aujourd’hui pleinement satisfaction.

Je vois dans les propos que vous avez tenus, madame la ministre, la confirmation de la prise en considération du bloc communal dont ces syndicats sont l’expression et l’émanation. Leur suppression par absorption au profit d’un autre niveau de collectivité – comme cela a pu être évoqué – serait, pour les maires et les présidents d’EPCI, inacceptable et ils le disent, d’autant que les compétences dont il est question continueront localement à relever de leur responsabilité. Il ne peut donc y avoir, sur ces compétences, de mise sous tutelle du bloc communal.

Dans un tel débat, le Sénat, assemblée des collectivités locales, ne devrait pas s’enfermer dans une logique réductrice, partisane et, in fine, improductive sur des sujets de cette importance, car cela reviendrait, aux yeux des observateurs, à remettre en cause son utilité même. Si tel doit être le cas, il appartiendra à la majorité sénatoriale d’en porter la responsabilité !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des lois, mesdames, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, nous commençons l’examen de ce projet de loi relatif à la nouvelle organisation territoriale de la République, mais l’on ne peut séparer ce texte de son contexte.

Premier élément de contexte, la création de grandes régions ne va pas sans susciter la crainte, légitime, d’un éloignement des décisions. Dans la pensée actuelle prévaut l’idée selon laquelle tout ce qui est grand serait plus efficient. Ainsi, le texte du Gouvernement prévoit de nombreux transferts de compétences du département vers ces super-régions.

Tel est le cas de la compétence en matière de transport scolaire. Cependant, madame la ministre, lorsqu’il s’agit de régler le problème de la création d’un arrêt dans tel ou tel hameau, en référer au lointain service basé à Dijon, Dôle ou Besançon n’a que peu de sens vu du Gâtinais ou de la Puisaye, par exemple. Vous me direz que vous prévoyez la possibilité de conventionnements avec le département, mais pourquoi faire compliqué lorsque l’on peut faire simple ?

La création des grandes régions justifie d’autant plus le maintien d’un échelon départemental, comme Jean-Pierre Raffarin et Yves Krattinger en ont excellemment fait la démonstration dans leur rapport. Du coup, la commission des lois a effectué un travail très intéressant de mise en cohérence du texte, sous la houlette de son président, Philippe Bas, et de notre éminent collègue rapporteur, Jean-Jacques Hyest.

Il revient aux régions d’assumer la vision stratégique, bien sûr, et aux départements d’assurer la proximité, la réactivité, si tant est que l’État consente à dénouer le nœud coulant qui est en train de les asphyxier et qui, de fait, les condamne sans que cela ait à être écrit noir sur blanc dans la loi.

Pour en finir avec cette doxa sur la taille des régions, je constate que ce qui fait la force d’un certain nombre de collectivités en Europe, ce n’est pas tant leur taille que leur relative cohésion territoriale, sociale et culturelle, ainsi que leur capacité à agir et à se gérer selon leurs propres règles. Nous avons tous en tête, même s’il s’inscrit dans un autre système, l’exemple des cantons suisses qui, en dépit d’une taille souvent modeste, ont une efficacité avérée. Alors, vive la subsidiarité !

Le deuxième élément de contexte est la mise en place, au niveau des départements, d’un scrutin unique au monde, à l’exception du Chili, me semble-t-il, avec l’élection de deux conseillers départementaux dans une même circonscription électorale. Tout ce déploiement d’ingéniosité est censé mettre fin au conseiller territorial, qui aurait pourtant permis des synergies naturelles entre le département et la région, puisque les mêmes élus y auraient siégé.

Mme Cécile Cukierman proteste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

Emporté dans votre élan abrogatif, le conseiller territorial aura fait long feu. Vous avez procédé à un gigantesque chambardement des territoires pour diviser le nombre de cantons par deux. Au passage, vous allez accroître les dépenses. Un conseiller général m’a fait part de ses calculs, que je tiens à votre disposition : avec le nouveau scrutin et les comptes de campagne généralisés, alors qu’ils n’existaient pas auparavant dans les cantons de moins de 9 000 habitants, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

M. Jean-Baptiste Lemoyne. … l’organisation du scrutin coûtera 50 millions d’euros de plus, ce qui n’est pas rien !

Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

Troisième élément de contexte, des menaces planent, depuis plusieurs années déjà, je vous le concède, sur la collectivité de proximité par excellence qu’est la commune. Celles et ceux d’entre nous qui ont eu le bonheur de sillonner cet été leur département ont entendu un cri de détresse de la part de nombreux élus locaux, ruraux en particulier.

Ces élus expriment la crainte d’être en bout de chaîne, par exemple en matière d’urbanisme. Avec la nouvelle version du SRADDT, le schéma régional d’aménagement et de développement durable du territoire, proposée dans ce texte, les SCOT, les schémas de cohérence territoriale, et les PLU, ces plans locaux d’urbanisme dont on a bien compris qu’ils devraient être intercommunaux à brève échéance ou ne pas être, les maires se demandent s’ils auront toujours une véritable capacité d’action, d’impulsion pour bâtir, avec le conseil municipal et les habitants, la commune de demain.

Ils expriment également la crainte de devoir retravailler les schémas d’intercommunalité. Alors que l’encre de la réforme de 2010 était à peine sèche, voilà que votre texte prévoyait ce fameux seuil de 20 000 habitants pour les intercommunalités. Or nous savons que, dans les zones rurales – voyez en Bretagne ou dans l’Isère -, son adoption condamnerait les élus à passer tout un mandat sur un nouveau meccano institutionnel. Pendant ce temps, les projets attendent !

Les élus locaux ne demandent qu’une chose : qu’on leur laisse le temps de digérer les précédentes réformes – un conseiller général issu de vos rangs me le confiait hier soir. Le dire n’a rien d’insultant ou de rétrograde, car il faut mesurer le chemin d’ores et déjà parcouru depuis la loi Chevènement, qui remonte à quinze ans seulement. En quinze ans, le paysage a considérablement évolué. En outre, que représentent quinze ans à l’échelle de nos institutions et de l’histoire de notre pays ?

Lors des réunions de travail que j’ai pu conduire depuis deux semaines avec eux, j’ai entendus les élus icaunais réclamer de la confiance et non de la défiance.

Debut de section - Permalien
Marylise Lebranchu, ministre

Absolument !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

Il me revient le mot d’un maire de l’Auxerrois qui s’interrogeait à voix haute : « À quand la disparition des élus ? » En effet, à force de vider petit à petit les communes de leur substance ou de les garroter financièrement, nous devons affronter une crise des vocations. Car il faut avoir la vocation pour gérer les affaires communales, en étant souvent le réceptacle de nombreux mécontentements, voire le paillasson de certains inspecteurs des travaux finis…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

D’ailleurs, combien a-t-on recensé de listes uniques dans les communes de nos départements aux dernières élections municipales ? Un très grand nombre ! Un tel constat devrait nous faire réagir.

Il me revient le propos d’un élu qui, bien que président d’intercommunalité, reconnaissait le rôle que peuvent jouer des syndicats que vous brocardez pourtant à l’article 14 sous le prétexte de « double emploi ». Imaginez-vous des SIVOS scolaires à l’échelle d’un arrondissement ? Le mammouth, cher à Claude Allègre, c’est de la petite bière à côté !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

Il me revient aussi l’interrogation d’un élu de l’Avallonnais qui se demandait si la multiplication des schémas, donc des études à financer, n’allait pas être source de dépenses plus que de rationalisation.

Bref, qu’il est loin ce fameux discours de Dijon, celui dans lequel François Hollande s’adressait aux élus locaux en disant qu’il y aurait des règles stables pour les financements de l’État, que la commune était une chance…

Je pense, pour ma part, qu’une autre réforme est possible, une réforme fondée sur la subsidiarité, un principe tout de même d’une grande sagesse pour que se soient penchés sur son berceau tout à la fois Pierre-Joseph Proudhon et le pape Léon XIII !

Oui, nous pouvons bâtir sur ce principe de subsidiarité une nouvelle organisation territoriale adaptée à la société horizontale qui est celle que nous connaissons, une société qui demande de la réactivité, de la proximité.

Face au sentiment d’abandon qu’éprouvent parfois un certain nombre de nos concitoyens ruraux, rurbains ou des quartiers, qui se sentent oubliés, nous devons conforter les échelons dans lesquels la confiance des Français est encore la plus forte.

Vous l’avez compris, la tâche est immense. Bâtissons néanmoins cette France des énergies locales, une France subsidiaire !

Je m’en remets, pour conclure, à l’écrivain Alexandre Jardin, qui diagnostiquait : « Chez nous autres Français, nous sommes voyageurs d’un temps présent résigné et raidi, nous avons une inaptitude à conjuguer le verbe oser ».

Alors, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je vous le dis, osons !

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Samia Ghali

Mme Samia Ghali. Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission, mes chers collègues, j’en suis désolée pour vous, nous allons parler de Marseille !

Sourires.

Nouveaux sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Samia Ghali

Alors que nous procédons à l’examen du texte portant nouvelle organisation territoriale de la République, mon intervention sera donc centrée sur la métropole d’Aix-Marseille-Provence.

La métropole est à l’origine de nombreuses controverses et a suscité bien des inquiétudes dans l’ensemble des Bouches-du-Rhône.

Notre pays, vous le savez, traverse une période particulièrement difficile sur les plans économique et social mais aussi sur le plan moral.

Dans ce tumulte, qui n’épargne pas la représentation politique, les maires ont su préserver une réelle proximité avec leurs administrés. Cette proximité est précieuse. Elle est souvent le dernier lien entre nos concitoyens et celles et ceux qui les gouvernent.

Notre devoir, à nous sénateurs représentant les territoires de France, est d’être plus attentifs encore que d’autres à ce rouage essentiel de notre République.

J’ai partagé, vous le savez, le combat de cent treize maires - sur les cent dix-neuf du département des Bouches-du-Rhône - qui se sont, depuis deux ans, opposés à la métropole technocratique qui leur était proposée.

Nos élus, comme l’immense majorité des élus locaux, trop souvent injustement décriés, sont animés de l’esprit de responsabilité. Ils aiment leurs villes, leurs villages. Ils n’ont pas d’autre préoccupation que de les préserver.

La création de la métropole nécessitait plus qu’ailleurs progressivité et dialogue avec les élus locaux. C’est qu’ils ont une compréhension fine des enjeux locaux et la légitimité du suffrage universel pour les promouvoir.

Comme je l’avais dit dans cet hémicycle, sans moyens à la hauteur des enjeux propres à notre territoire, cette métropole, censée venir en aide à Marseille, ne pouvait pas être le remède miracle. Il fallait, avant toute chose, un projet et une vision partagés par l’ensemble des communes du territoire métropolitain.

Je crois que nous avons eu raison de résister et d’être aussi – je veux le souligner – force de proposition.

Madame la ministre, j’ai porté, au cours du mois de juillet, une série de propositions qui allaient toutes dans le même sens : celui d’un consensus enfin trouvé entre le Gouvernement et les élus locaux.

Ce consensus s’articule autour de trois impératifs sur lesquels, je l’espère, le Gouvernement peut encore évoluer.

Il s’agirait, d’abord, d’accepter que les plans locaux d’urbanisme soient élaborés « en accord avec les communes ».

Il s’agirait, ensuite, d’accompagner la mise en œuvre de la réforme sur la base d’un pacte financier et fiscal.

Il s’agirait, enfin, d’accepter que cette mise en œuvre se fasse de manière progressive, de 2016 à 2020. C’est dans cette optique que j’ai déposé une série d’amendements, au-delà de toute préoccupation partisane.

Ces amendements, élaborés en concertation avec les maires et les élus locaux de tous bords, auraient utilement contribué à faire évoluer la structure métropolitaine sur la question fiscale et sur celle des compétences.

Ces premiers pas vers les maires, madame la ministre, sont nécessaires à la création d’une métropole de projet mais aussi de consensus. Il est de la responsabilité du Gouvernement de le comprendre et de se saisir de cette chance. C’est aussi à cette condition que nous ferons gagner du temps à Marseille.

Pour réussir, la métropole Aix-Marseille-Provence doit en effet se consacrer aux grands enjeux structurants qui sont acceptés par tous : les transports, la coordination économique, l’environnement, l’enseignement supérieur, les schémas de cohérence territoriale.

J’évoquais, il y a un instant, une métropole territoire de projet. Je compléterai ce propos en disant qu’elle doit être aussi un territoire d’échanges et de concertation.

La dernière conférence métropolitaine a été boudée par les élus, qui n’avaient pas le sentiment d’être entendus comme ils le devaient.

Je crois que cet organe doit redevenir une instance de coordination, de concertation et de décision entre toutes les parties prenantes du territoire métropolitain, mais des parties respectées dans leurs missions comme dans leurs mandats.

Je reste convaincue que, si nous autorisions les communes à appartenir à deux EPCI au sein d’une métropole de projet jusqu’en 2020, l’émergence d’une organisation métropolitaine se ferait plus sereinement.

Cette disposition nous permettrait également de respecter le suffrage des électeurs, qui ont élu des conseillers communautaires en mars dernier.

Une organisation territoriale équilibrée, pertinente et lisible doit être fondée sur trois niveaux d’administration, dotés chacun de la personnalité juridique et d’une autonomie de décision : premièrement, les communes ; deuxièmement, les établissements publics de coopération intercommunale existants jusqu’en 2020, puis, les conseils de territoire après 2020 ; troisièmement, la métropole.

Debut de section - PermalienPhoto de Samia Ghali

Des engagements ont été pris en amont et à l’occasion de ce débat. Je veillerai à ce qu’ils soient suivis par des actes.

Il reste beaucoup de chemin à parcourir et ce textedemeure à bien des égards insatisfaisant.

Je veux néanmoins croire qu’il est encore possible deamendements de séance.

Debut de section - PermalienPhoto de Samia Ghali

Mme Samia Ghali. Le dialogue républicain avec les élus, la progressivité dans la mise en place du dispositif métropolitain, le réalisme et l’acceptation du réel, voilà, mes chers collègues, les conditions de la réussite de ce projet.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. - Mme Sophie Joissains et M. Jean-Marc Gabouty applaudissent également.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous voici au troisième volet de la réforme territoriale : après la loi MAPAM sur les métropoles, après la loi sur les régions, nous sommes saisis du texte sans doute le plus important, celui qui traite des compétences. En effet, c’est finalement de lui que tout découlera pour la suite.

Madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, je vais vous faire une confidence : je n’aurais pas été candidat en septembre s’il n’y avait pas eu la réforme territoriale.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

Car le projet de loi tel qu’il était initialement conçu, qui prévoyait la disparition des départements, emportait, pour le Savoyard que je suis, des conséquences que nous avons beaucoup de peine à imaginer et qui étaient, pour tout dire, insupportables !

La disparition des départements, c’était la fin de mille ans d’histoire, la fin de ce qui a fait l’autonomie de la Savoie, de ce qui a porté les projets de la Savoie, et pas seulement depuis les lois de décentralisation.

Le département, chez nous, n’est pas seulement l’héritier d’une histoire. Ce n’est pas l’occasion d’un repli identitaire. C’est une collectivité de modernité qui a porté tous les grands projets d’aménagement.

Je citerai Pierre de La Gontrie, qui a siégé ici même – « le baron rouge », comme il était surnommé en Savoie – créateur de la station de Courchevel, financée avec les impôts des Savoyards dans une Savoie en reconstruction.

Je citerai aussi Joseph Fontanet, à l’origine de l’aménagement de la vallée des Belleville, faisant, après Pierre de La Gontrie, de la Savoie la première destination touristique des sports d’hiver dans le monde et offrant ce cadeau à la République française.

Le département, c’est aussi la modernité des initiatives prises par Louis Besson pour le doter, avant même les lois de décentralisation, de structures d’autonomie. Depuis les lois de décentralisation, c’est l’appropriation de la totalité des compétences.

Je n’oublie pas que nous avions, avec Michel Barnier, invité François Mitterrand au conseil général pour lui dire notre adhésion à la démarche de la décentralisation. C’était quasiment un acte de rupture dans une France qui sortait à peine de l’élection présidentielle de 1981, une France dans laquelle le dialogue républicain n’avait rien à voir avec ce qu’il est aujourd’hui. (

Nous avons assumé toutes les compétences. Les départements savoyards ont créé les parcs d’activités, Archan, Savoie Technolac, Alpespace.

Ils ont porté les investissements dans les énergies nouvelles : 60 millions d’investissements sont allés dans l’Institut national de l’énergie solaire, aux côtés du Commissariat à l’énergie atomique.

Ils ont porté le développement des stations de sport d’hiver, mais aussi la solidarité entre les territoires de montagne. En effet, les bénéfices de Val Thorens, les bénéfices de Courchevel, sont réinvestis dans le développement des stations moyennes, ils sont réinvestis dans le renouvellement des clientèles, ils sont réinvestis dans l’accueil de classes de découverte. Ils permettent que des stations de niveaux différents pour des publics différents puissent toutes continuer à fonctionner.

Ce sont les départements qui ont porté le développement universitaire. Ils ont créé l’université de Savoie. Mes collègues de Haute-Savoie qui siègent ici le savent bien : cette université, qui rassemble 13 000 étudiants, est la première en France pour le nombre des échanges avec les universités étrangères par étudiant ; elle est aussi la première pour le nombre d’étudiants boursiers en proportion des effectifs. Cette université a permis l’accès aux jeunes à l’enseignement supérieur.

Ces départements ont-ils fait leur temps ?

Nous avons déposé une proposition de loi, avec l’ensemble des sénateurs haut-savoyards, comme avec six des huit députés savoyards, réunis autour d’Hervé Gaymard et de Christian Monteil. Transformée en amendements dans la discussion de ce texte, elle vise à créer une collectivité spécifique et à continuer à avoir un modèle de développement autonome. Ce modèle est justifié par les études de la DATAR, qui sont reprises avec beaucoup d’honnêteté dans la plaquette de l’Association des régions de France intitulée Dix propositions pour la réforme territoriale.

Que voit-on ? Les échanges, le caractère autonome de l’organisation économique de ce territoire, qui ne peut accepter d’être, demain, sous tutelle, qui ne peut accepter de voir les centres de décision partir et un SRADDT dire où l’on doit construire en montagne !

Nous nous sommes battus pendant quatre ans contre la directive territoriale d’aménagement des Alpes. Ce n’est pas pour avoir un document prescriptif au-dessus des SCOT, à côté des directives territoriales d’aménagement ! Ce n’est pas pour conserver dans la loi des prescriptions particulières de massif, jamais abrogées ! Alors, les SCOT au sommet de la pyramide, le PLU en bas ?…

Qu’en sera-t-il demain des compétences en matière de tourisme ? La région sera-t-elle le chef de file ? Le texte donne une primauté sans établir clairement les responsabilités.

Comment les deux départements qui portent 80 % du tourisme de la région Rhône-Alpes pourraient-ils accepter que la politique régionale du tourisme soit définie sans aucune concertation ? Ce n’est pas imaginable ! Or les outils de concertation prévus dans la loi ne sont pas suffisants.

Mes chers collègues, ce combat, nous ne le menons pas pour les seuls Savoyards, mais pour l’ensemble des territoires de montagne.

Madame le ministre, monsieur le secrétaire d’État, à l’occasion de précédentes lois de décentralisation – loi du 4 février 1995 d’orientation pour l’aménagement et le développement du territoire, dite « loi Pasqua » ; loi Raffarin ; loi du 25 juin 1999 d’orientation pour l’aménagement et le développement durable du territoire, dite « loi Voynet » –, nous avons construit, en concertation entre les acteurs économiques, les élus et les acteurs associatifs, des outils pour la montagne : les comités de massif, les schémas régionaux de massif, les conventions interrégionales de massifs.

Aucun de ces outils ne réapparaît dans le texte qui nous est présenté aujourd’hui !

Nous souhaitons également que les amendements déposés par les parlementaires qui sont membres de l’Association nationale des élus de la montagne, l’ANEM, soient repris et intégrés dans le texte, afin de nous prémunir contre la superposition des normes et des hiérarchies, et contre la complexification de la vie territoriale.

L’égalité suppose la respiration des territoires. L’efficacité de l’action et du développement économiques a besoin de la même respiration, mais aussi d’une adaptation des textes aux réalités de chaque territoire.

Ce n’est pas dans une France uniforme que nous gagnerons en efficacité et que nous ferons des économies, mais dans une France qui saura gérer ses différences. C’est ce que nous souhaitons voir dans ce texte.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Lozach

Madame la présidente, mes chers collègues, nous sommes aujourd’hui réunis pour l’examen d’un texte qui nous touche particulièrement dans notre fonction constitutionnelle de représentants des collectivités territoriales.

La réforme territoriale que le Gouvernement a préparée depuis sa prise de fonction répond à une nécessité qui fait l’objet d’un large consensus quant à ses objectifs. Néanmoins, le processus législatif et la communication relative à ces sujets posent un certain nombre de problèmes.

Il y a un peu moins d’un an, la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, dite « loi MAPAM », rétablissait la clause de compétence générale, laquelle est censée être à nouveau supprimée. De même, la réforme de la carte régionale est intervenue avant la discussion sur les compétences, qui est pourtant le point nodal pour tous les élus de nos territoires et les acteurs, au quotidien, de la mise en œuvre de nos politiques publiques.

Comme l’a souligné lors des auditions le président de la commission des lois du Sénat, le projet de loi vise à transférer des compétences des départements aux régions, alors même, si j’en crois les propos du président de l’ARF, que celles-ci ne semblaient pas les désirer. À l’inverse, je considère que la véritable simplification devrait prioritairement s’effectuer entre les régions et les services de l’État, car un vivier important d’économies y est possible : notre collègue et corapporteur de ce texte, René Vandierendonck, évoquait en commission un contrôle de la chambre régionale des comptes de Rouen recensant près de 19 organismes chargés du développement économique !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Lozach

Une nouvelle loi de décentralisation reste d’actualité, ou du moins une loi aux termes de laquelle l’État, quand il souhaite confier de nouvelles responsabilités aux collectivités, ne peut pas conserver ses propres services.

Très souvent, nous sommes restés au milieu du gué. Plus de trente ans d’âge, n’est-ce pas suffisant pour que nous, élus locaux, soyons traités en adultes ?

De même, on a pu se focaliser sur le sort de la clause de compétence générale. Or ne sont-ce pas plutôt les compétences partagées qui charrient ce maquis largement décrié des financements croisés ? J’aime ainsi l’idée, défendue par notre ancien collègue Yves Krattinger, d’un « guichet unique », dont la possibilité est offerte par l’article 29 du projet de loi pour les compétences qui demeurent partagées. Mais, avant de pouvoir en parler, ne fallait-il pas se mettre d’accord sur les missions respectives de chacun ?

Par ailleurs, n’oublions pas que, sans cette clause de compétence générale, certains projets n’auraient pas pu voir le jour. C’est le cas de l’intervention des départements visant à réduire la fracture numérique : sans elle, nous n’aurions pas pu apporter notre concours, et les investissements nécessaires auraient tardé ou n’auraient jamais vu le jour.

La création de grandes régions est une initiative intéressante, parce qu’elle est en cohérence avec le fait de confier aux régions les orientations stratégiques. Mais que vient faire le transfert des collèges et des routes départementales dans la version initiale du texte ?

Ce type de transfert ne concourt certainement pas à la recherche d’une meilleure efficience de nos politiques publiques et risque de provoquer le chaos au niveau régional. Quelle est la plus-value visible d’une gestion des collèges du département de la Creuse à Bordeaux ? Je note, par ailleurs, que le Conseil supérieur de l’éducation se déclare favorable au maintien d’une véritable continuité entre écoles et collèges.

La solidarité sociale et territoriale, la proximité et la démocratie locale caractérisent le département. La région constitue l’échelon pertinent pour la réflexion prospective, la programmation des grandes infrastructures, la structuration de filières économiques d’excellence ou la promotion de l’innovation technologique.

C’est pourquoi les schémas régionaux de développement économique, d’innovation et d’internationalisation à valeur prescriptive sont les bienvenus. La consultation, dans le cadre des comités territoriaux de l’action publique, permettra à tous de s’exprimer et de discuter sereinement.

Sur le volet visant à renforcer l’intercommunalité, je trouve très peu pertinent, en particulier pour les territoires ruraux, le seuil minimal fixé à 20 000 habitants. Je serais beaucoup plus favorable à une modulation du seuil, même si le projet de loi prévoit déjà une exception pour les territoires de montagne.

Un seuil à 15 000 habitants semble plus judicieux, avec des modulations possibles, sous réserve de délibérations concordantes prenant en compte la densité de population et le nombre de communes concernées, afin de circonscrire les difficultés de gouvernance qui ne manqueraient pas de survenir.

Par ailleurs, je ne peux faire abstraction, en tant que membre fondateur des « Nouvelles ruralités », avec les présidents des conseils généraux de l’Allier, du Cher et de la Nièvre, du rôle que nous concevons pour le département. Le Premier ministre nous a rassurés après nous avoir inquiétés, affirmant que « le rôle des départements en matière de protection des populations les plus fragiles et de soutien aux communes est indispensable ».

Je salue cette évolution. Malgré la suppression de la clause de compétence générale, la possibilité sera laissée aux départements, notamment par le biais de l’ingénierie territoriale, de soutenir le bloc communal. Il pourra également copiloter la modernisation du schéma départemental d’accessibilité des services au public.

Ces deux éléments traduisent notre vision de ce que doit être un conseil général, particulièrement en zone rurale : une instance de cohérence, de mutualisation, de péréquation, assurant aussi une action publique locale suffisante pour que l’équité entre nos concitoyens et entre nos territoires soit préservée et approfondie.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Lozach

Lors du congrès de l’Assemblée des départements de France, le Premier ministre a confirmé sa volonté de procéder à de nouveaux transferts de l’État vers les collectivités territoriales. Le texte soumis à notre examen aujourd’hui ne peut être qu’une étape dans un processus encore loin d’être achevé.

Par ailleurs, il me paraît essentiel d’appréhender très concrètement les nouvelles régions à travers des problématiques majeures, comme les relations entre villes et campagnes, métropole et espaces interstitiels, centre et périphérie, ou bien encore l’équilibre entre politiques d’infrastructures et politiques territoriales.

De même, une évolution de la fiscalité locale et des dotations de l’État ne pourra pas être éternellement retardée, tant pour les régions, en raison de leurs nouvelles prérogatives, que pour des départements, aux finances particulièrement malmenées.

Enfin, qu’il me soit permis de rappeler ces quelques mots de René Char : « Toute l’autorité, la tactique et l’ingéniosité ne remplacent pas une parcelle de conviction [...]. » Cette conviction, c’est celle d’une République décentralisée !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste . – Mme Cécile Cukierman applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Chasseing

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, ce projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République a déjà fait beaucoup parler : ce soir, dans cet hémicycle – je suis le quarantième orateur ! –, mais aussi dans de nombreuses collectivités, en particulier lors de la campagne pour les élections sénatoriales.

Cela montre que son impact dans la vie de la Nation est bien réel, et non fictif. En effet, malgré les évolutions technologiques des dernières années, les notions de « région », de « département » et de « terroir » ont conservé leur signification profonde, et profondément ressentie. Il suffit pour s’en convaincre de se rappeler les récentes réticences épidermiques de certaines régions face aux modifications proposées par l’État.

Et c’est encore plus vrai dans notre assemblée, comme l’a fort bien dit notre collègue Alain Bertrand voilà quelques semaines, lors du débat sur la ruralité. De nombreux sénateurs sont, en effet d’abord des élus locaux issus de ces territoires ruraux, confrontés chaque jour, et depuis des années, à la réalité du terrain et à la complexité du fameux « millefeuille territorial ». Je note d’ailleurs que cette dernière expression manifeste un préjugé quelque peu condescendant à l’égard d’une organisation territoriale jugée désormais inutile, budgétivore, obsolète et, comme telle, destinée à disparaître, au nom d’une présumée « modernité » devenue le prétexte commun, et même facile, justifiant tous les abandons.

C’est dire si beaucoup d’entre nous ont été surpris par ce texte – le troisième en deux ans ! –, lequel comporte, malgré les effets d’annonce et les inévitables slogans, un certain nombre d’ambiguïtés ou d’imprécisions qui font que l’on n’en comprend pas toujours exactement l’esprit et la substance.

Loin de transférer des compétences de l’État vers les collectivités territoriales, ce projet de loi a pour but, finalement assez flou, de faire adopter une organisation et une carte régionales, sans que l’on sache véritablement quelles seront les compétences régionales et jusqu’où ira l’État dans la mise en œuvre d’une décentralisation toujours annoncée et sans cesse remise à plus tard.

Ce texte arrive au terme de revirements dont la compréhension nécessiterait un effort pédagogique.

Je citerai un seul exemple : au mois de janvier de cette année, le Président de la République a annoncé publiquement dans le chef-lieu de mon département, à Tulle, que les départements demeuraient utiles pour assurer la cohésion sociale et la solidarité nationale. « Je ne suis donc pas favorable à leur suppression », avait-il alors affirmé, sous les applaudissements.

Trois mois plus tard, la fin des départements était actée par le Gouvernement. Vous-même, monsieur le secrétaire d’État, annonciez votre intention de les dévitaliser.

Debut de section - Permalien
Marylise Lebranchu, ministre

Il n’a jamais dit ça !

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Chasseing

Puis, en ces derniers jours d’une année pour le moins fertile en rebondissements, les départements retrouveraient, si j’en crois les déclarations du Premier ministre devant le Sénat, un certain lustre, en particulier en matière de protection des populations les plus fragiles et de soutien aux communes.

Loin de moi l’idée de faire un procès d’intention : tout le monde peut changer d’avis... Mais on aurait pu demander leur sentiment aux élus territoriaux. Ceux-ci ne sont nullement des mineurs placés sous tutelle pour gérer les affaires locales, comme certains le croient, mais bien les acteurs d’une gestion qui représente tout de même 70 % de l’investissement public en France !

J’ai toujours défendu, pour ma part, le maintien de cet échelon départemental que vient de redécouper le Gouvernement.

Le département est en effet considéré, au même titre que les communes et les communautés de communes, comme l’incontournable garant du développement territorial, de la solidarité et de la cohésion sociale sur son territoire. Plus de neuf élus sur dix sont foncièrement favorables à son maintien !

Cette conviction n’est pas fondée sur une nostalgie passéiste, mais bien sur la constatation que le département est indispensable au maintien de la cohésion sociale, de l’aide aux communes et de l’exercice harmonieux d’une véritable administration de proximité – à condition que l’État ne l’abandonne pas ! –, et ce surtout en milieu rural, soit une grande partie du territoire de la Nation. Je signale, à cet égard, que la Corrèze, dont je suis l’élu, va se retrouver intégrée dans la très grande région d’Aquitaine, à plusieurs heures de route de la capitale régionale !

L’hyper-ruralité, soit 30 % du territoire national, est, hélas ! la grande absente de ce texte. Je le regrette. Je constate en effet, comme d’autres collègues, qu’il n’y a jamais eu de politique spécifique du monde rural, contrairement à ce qui existe pour la ville.

Je souhaite donc qu’un volet spécifique en faveur de l’hyper-ruralité soit introduit dans ce projet de loi et que soit établi, s’il le faut, un pacte national garanti par l’État. Cela pourrait passer par le schéma régional d’aménagement et de développement durable du territoire, élaboré par la région, mais avec l’implication forte de l’État.

Cela pourrait passer, aussi, par l’établissement d’un guichet unique au niveau des préfectures ou des sous-préfectures, selon les cas, sur ces territoires concernés. Ce guichet serait chargé de l’accueil, de l’information, de l’expertise, de la recherche de financements et de la mise en œuvre des projets élaborés par les acteurs du développement local : communes, communautés de communes et même opérateurs privés. Seul l’État, en effet, est en mesure de jouer ce rôle.

Si une conférence territoriale, présidée par M. le préfet, doit être prévue dans chaque département, il est impératif que l’État ait le poids suffisant pour faire en sorte que la région n’oublie pas les territoires ruraux, notamment en lui permettant de réduire la fracture numérique et en apportant une aide économique efficace et adaptée.

Changer l’espace politique français sans tenir compte de l’impérieux besoin d’aménagement du territoire et du développement social et économique ne revient-il pas à mettre la charrue devant les bœufs, comme dit l’adage populaire ? « Un habit mal coupé se corrige difficilement à l’habillage », a récemment écrit Bruno Rémond, professeur à Sciences Po, parlant de cette réforme.

Chacun le sait sur ces travées, nous sommes tous confrontés depuis quelques années non seulement à l’effet de ciseaux - des dépenses qui augmentent, des recettes qui baissent -, mais aussi au coût croissant des normes et des nouvelles charges pesant sur les collectivités, ainsi qu’à la réduction drastique – 25 milliards d’euros en quatre ans, soit la moitié du pacte de responsabilité ! – des enveloppes annuelles des concours de l’État aux collectivités.

L’État doit se ressaisir pour permettre l’aménagement du territoire, de tous les territoires. C’est la raison pour laquelle je souhaite que les départements continuent d’exister, qu’ils soient soutenus par l’État pour pouvoir jouer leur rôle et exister au-delà de 2020, que leur soient toujours confiées les questions sociales d’aide aux communes, les missions de service public et au public, notamment les SDIS, ces services d’incendie et de secours garants de la sécurité des personnes dans les territoires très ruraux, ou la gestion des routes départementales. Le plateau de Millevaches, qui jouxte la « petite Montagne limousine », est tout de même beaucoup mieux géré par Tulle que par Bordeaux !

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Chasseing

Il paraît logique qu’il en soit de même pour les lycées et collèges, de même que pour tout ce qui relève du tourisme, la région ayant des compétences économiques - emploi, formation professionnelle, etc.

Enfin, je souhaite que les communautés de communes ne se voient pas imposer un seuil de 20 000 habitants, mais puissent privilégier une communauté de communes de projets, de bassins de vie et de proximité, les services publics et le développement économique étant partagés avec le département, la région, l’État. Il faut un relais pour permettre des investissements adaptés.

Enfin, le bloc communal – communes et communautés de communes – doit conserver l’ensemble de ses compétences.

En conclusion, je souhaite que ces propositions soient prises en compte. Une clarification nette des compétences s’impose, avec une présence forte de l’État, dans le cadre de principes républicains d’égalité et de solidarité. Ce sont des éléments indispensables au maintien de la vie dans nos territoires, notamment les plus fragiles.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Duran

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’état, monsieur le président de la commission, mes chers collègues, je veux profiter de l’occasion qui nous est aujourd’hui donnée de débattre de l’organisation territoriale de la République pour témoigner, en tant qu’élu d’un département rural et de montagne, l’Ariège, de la nécessité de tenir compte des spécificités de ces territoires. La rationalisation de la carte intercommunale constitue en cela un aspect essentiel du texte.

Les élus de nos territoires très ruraux sont convaincus de l’intérêt d’une montée en puissance et en taille des regroupements de communes. Un changement de braquet doit nous permettre de répondre aux attentes légitimes de nos administrés et, ainsi, conforter l’attractivité de nos territoires.

À cet égard, je ne souscris pas à la décision qui a été prise en commission des lois d’entériner le statu quo sur les seuils appliqués aux intercommunalités. L’écueil dont nous devons nous garder, au cours de la discussion de ce texte, serait de ne considérer que le critère démographique. Celui-ci doit, en effet, être pondéré par la prise en compte d’un autre critère, lié à d’espace, celui-là.

L’éloignement est une caractéristique essentielle de nos territoires de montagne : éloignement vis-à-vis des services publics, des zones d’activité économique, des équipements, éloignement, tout simplement, des citoyens entre eux... C’est précisément cet éloignement qui coûte cher.

Les routes et les câbles doivent être plus étendus pour relier les habitations et les entreprises ; les collectivités doivent suppléer les opérateurs, qui n’assument plus de réelle couverture internet ou mobile lorsque la densité démographique s’affaiblit ; les établissements scolaires doivent avoir des effectifs plus resserrés qu’ailleurs pour ne pas contraindre les élèves à des temps de trajet trop élevés ou, pis, à résider en internat...

Dès lors que la décision publique et le travail des élus sont à ce point structurés par la géographie humaine, il est indispensable de laisser à ces derniers la faculté d’en tenir compte pour bâtir des intercommunalités qui coïncident avec les bassins de vie. L’évolution des schémas régionaux doit, de même, être l’occasion d’y organiser une meilleure prise en compte des territoires hyper-ruraux.

La seule affirmation du principe d’égalité des territoires, madame la ministre, dans ce texte comme dans l’ensemble des lois relatives à l’organisation territoriale, n’est pas un rempart suffisant face au creusement, toujours plus profond, de la fracture avec les territoires urbains et plus densément peuplés. Les retards s’accumulent en termes de mobilité, d’accès aux soins, de couverture en téléphonie mobile et numérique...

Cette situation tend à condamner un grand nombre de territoires à perdre tout attrait, pour les habitants comme pour les entreprises. Elle est renforcée par la faible représentation dont disposent les zones démographiquement faibles, représentation qui accentue l’abandon dans les projets politiques, et ce dans le contexte de concurrence forte entre territoires que nous connaissons tous.

C’est pourquoi, avec le soutien du groupe socialiste, je défendrai un amendement visant à assurer que les schémas régionaux d’aménagement et de développement durable des territoires intègrent un volet d’orientations spécifiques en matière de désenclavement et d’amélioration de l’offre de services dans les territoires qui en sont insuffisamment pourvus.

Le caractère prescriptif des schémas doit être utilisé comme un levier majeur pour assurer un juste rééquilibrage de l’action publique en leur direction. Il peut être utilisé comme un outil efficace de péréquation, en conduisant l’ensemble des parties associées au schéma à prendre leurs responsabilités, tout en laissant la coordination de l’exécution à l’échelon de proximité.

Bien que ce texte fasse, depuis le début, l’objet d’âpres discussions, et nous en avons encore la preuve aujourd’hui, je suis convaincu que, en raison de la vocation institutionnelle qui est la sienne, cette assemblée, que j’ai rejointe le 1er octobre dernier, sera en mesure de converger vers une meilleure considération de territoires habituellement délaissés, pour que nous puissions construire ensemble une véritable solidarité des hommes et des territoires de notre pays.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Raison

M. Michel Raison. Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’état, monsieur le président de la commission, mes chers collègues, le Gouvernement a raison.

Applaudissements amusés sur quelques travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Raison

Oui, il a raison de vouloir réformer la gouvernance de notre pays.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Raison

En effet, nous déplorons tous la situation : trop de complexité, trop de croisements de compétences entre les collectivités, mais aussi avec l’État.

Cependant, le Gouvernement, par ses revirements successifs dans une confusion et un désordre inégalés jusqu’alors, risque de rater cette réforme décisive pour les décennies à venir.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Raison

M. Michel Raison. J’ai même parfois eu du mal, lorsque je suis devenu sénateur, à m’endormir lorsque je pensais aux difficultés de cette réforme des collectivités territoriales.

Exclamations amusées sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Raison

Dans l’exposé des motifs, il est précisé à juste titre que le périmètre des régions est né d’un aménagement administratif en 1950 et qu’il est incohérent. Pourtant, on n’a fait que fusionner les incohérences, dans la précipitation d’ailleurs, et en les aggravant. Il semble aussi que les grands penseurs de notre haute administration parisienne, grâce à leur influence grandissante, tentent, par le biais de ce texte, d’exaucer un vieux rêve, supprimer les communes.

Debut de section - Permalien
Marylise Lebranchu, ministre

Ah non !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Raison

Lorsque je lis que « la légitimité des communautés de communes devra s’exercer », je suis en droit de me faire un peu de souci…

Au-delà de l’attachement identitaire aux communes, ces collectivités, un certain nombre d’entre vous le savent bien, sont une addition incroyable d’actions bénévoles permanentes. Au moment où le peuple doute des femmes et des hommes politiques, il ne doute que très rarement de ses élus municipaux, parce que nos concitoyens savent que ces élus ont, eux, la compétence pour gérer la proximité. Combien de maires de petites communes vont eux-mêmes faucher le cimetière en cas de décès inopiné, tondre la pelouse pour remplacer un employé municipal, ou même pour se substituer à lui quand il n’y en a pas ? Tout cela représente une richesse extraordinaire pour notre pays.

Alors, faites confiance aux élus locaux !

Je remercie la commission des lois d’être revenue sur ce seuil de 20 000 habitants, qui fait tant parler, ici et ailleurs : c’est une erreur monumentale. Vous auriez peut-être imaginé – c’était la volonté initiale du Gouvernement – de supprimer les départements et de remplacer le relais avec les conseils régionaux par des communautés de communes. Pensez-vous qu’une communauté de communes de 20 000 habitants ait la force nécessaire pour assurer les solidarités sur un aussi petit territoire ?

Il n’est qu’à voir ce qui se passe dans un petit département comme le mien, celui de la Haute-Saône. Avec 220 000 habitants et un chef-lieu de 17 000 habitants, ce département a bien du mal à assumer la solidarité qui lui incombe. Des communautés de communes de 20 000 habitants y parviendront encore moins. Cela ne sert donc strictement à rien. Laissons donc les élus locaux faire montre de leur intelligence.

Je remercie également la commission d'avoir supprimé la compétence obligatoire « tourisme » conférée à la communauté de communes. Ce faisant, je veux faire passer un message fort : confier la compétence « tourisme » à une communauté de communes, comme le prévoit l’exposé des motifs, c’est tout simplement faire de l’aménagement administratif.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Raison

M. Michel Raison. Or, on le sait, le tourisme se développe dans des territoires de destination qui n’ont strictement rien à voir avec le contour des communautés de communes.

M. Michel Bouvard applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Raison

Qui plus est, une commune dynamique en matière de tourisme au sein d’une communauté de communes pourrait mourir si cette compétence était confiée à la communauté de communes.

Debut de section - Permalien
Marylise Lebranchu, ministre

Il faut faire confiance aux élus !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Raison

Madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, je vous en prie, ne faites pas revenir les députés sur ce qu’a décidé le Sénat en la matière. Ce serait une grave erreur pour le développement de cette activité économique primordiale. Il n’est qu’à regarder les derniers chiffres : le tourisme est en plein déclin dans notre pays !

Je tiens également à insister sur la dotation globale de fonctionnement améliorée lorsque la communauté de communes prendrait de nouvelles compétences, celle dont je viens de parler ou d’autres.

L’Association des maires ruraux de France est tout à fait contre. Ce n’est pas pour cela que j’y suis moi-même hostile, mais je suis d’accord avec elle sur cette position ! Quelle ironie, au moment où l’on fait un véritable hold-up sur les différentes dotations globales de fonctionnement, de vouloir faire croire que l’on va en bonifier une, parce que telle collectivité prendrait une compétence supplémentaire. C’est une plaisanterie !

Par ailleurs, pour qu’une communauté de communes assume parfaitement sa compétence, il faut que l’ensemble des élus soient convaincus de son bien-fondé. Si on les incite financièrement – comme cela s’est produit dans le passé –, ils risquent de ne l’accepter que pour cette raison et ne joueront pas forcément leur rôle.

Madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, j’appelle également votre attention sur la volonté, justifiée en partie, de supprimer ou, en tout cas, réduire de façon drastique les syndicats de communes. Attention : nombreux sont les syndicats de communes qui ont été constitués autour d’une compétence précise et qui rendent à ce titre des services considérables. Là encore, ne croyons pas aveuglément que l’on ferait systématiquement des économies en supprimant les syndicats de communes.

Madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, tels sont les messages que je souhaitais vous adresser ce soir. Je suis convaincu que vous les aurez entendus et que vous prendrez les mesures en conséquence.

Applaudissements sur les travées de l'UMP. - M. Jean-Marc Gabouty applaudit également

Debut de section - PermalienPhoto de Delphine Bataille

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, ce volet de la réforme territoriale lancée par le Gouvernement traduit la volonté d’introduire plus de cohérence et plus de lisibilité dans notre organisation territoriale, il est vrai complexe. Il s’attache à clarifier les responsabilités des différents niveaux de collectivités, notamment en supprimant la clause de compétence générale et en renforçant les attributions de nos futures grandes régions.

En tant qu’élue du plus grand département de France, le Nord, dont le budget s’élève à près de 4 milliards d’euros, je veux témoigner que la collectivité départementale, intermédiaire entre les grandes régions et les intercommunalités, est un échelon indispensable. Elle est le pivot du développement des territoires ruraux et de la lutte contre les inégalités territoriales.

Bien qu’il soit souvent considéré comme un département urbain, le Nord compte également de nombreuses communes rurales et des territoires parmi les plus défavorisés.

Compte tenu de ces particularités, partagées par bien d’autres départements, il faut veiller à ne pas accroître les difficultés existantes et à ne pas aboutir à une fracture irréparable avec, d’un côté, la métropole et ses services et, de l’autre, le reste du territoire, voué à l’oubli.

De nombreux habitants, déjà frappés par le retrait de services publics imposé par la RGPP, se sentent oubliés de la République.

Les départements mettent en œuvre, dans la proximité avec les citoyens, un projet partagé de développement, avec des objectifs de cohésion sociale et territoriale. Ils doivent continuer à jouer leur rôle incontournable, surtout après le changement de dimension des régions, afin de ne pas éloigner les instances de décisions des citoyens et de ne pas renforcer davantage le sentiment d’abandon.

La France n’est pas le seul pays à compter plusieurs niveaux de collectivités et il n’y a pas de raison de se plier à l’orthodoxie européenne en la matière, car il n’existe pas de modèle unique européen.

Cependant, il est important aujourd’hui de faire évoluer notre pays vers une plus grande efficience des politiques publiques locales et vers plus de solidarité entre les territoires. C’est bien en ayant à l’esprit cette recherche d’efficacité et de cohérence que doit être abordée la nouvelle organisation territoriale de notre République.

Je tiens à saluer, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, votre volonté d’entendre nos préoccupations. Les avancées déjà annoncées contribueront sans aucun doute à rationaliser l’action des collectivités, tout en favorisant un travail de coconstruction, lequel permet des approches transversales et la cohérence à l’échelle des territoires.

La question de l’égalité républicaine reste majeure dans la nouvelle organisation territoriale, qui ne peut ignorer le fait urbain et la fragilisation concomitante des espaces périphériques et ruraux.

En effet, au temps de sa splendeur, l’État répartissait depuis Paris des moyens sur tout le territoire et ses engagements passaient, tout au plus, par les préfectures. Certes, ces modalités constituaient un véritable carcan pour les collectivités, mais elles avaient le mérite de traduire une préoccupation égalitaire en direction des territoires.

Loin de moi le souhait de revenir en arrière, je vous rassure, mais on peut se demander si la décentralisation n’a pas créé des déséquilibres entre régions, entre départements et à l’intérieur même des territoires qui les composent.

Aujourd’hui plus que jamais, les citoyens ont besoin de se sentir traités de manière équitable sur l’ensemble du territoire national, quel que soit leur choix de vie ou leur lieu de résidence.

Dans cet esprit, les départements proposent, du fait de leurs politiques de solidarité et de proximité, une répartition de leurs engagements plus équitable en direction des territoires ruraux. En effet, bien souvent, l’espace rural ne bénéficie pas des grandes réalisations conduites à l’échelon régional, lesquelles donnent du prestige aux métropoles, et ne voient pas de retombées concrètes des crédits investis.

Le texte qui nous est soumis doit aussi s’attacher à garantir un État éclairé plutôt que des féodalités locales. Le principe d’égalité ne doit pas être le grand oublié de cette nouvelle étape de la décentralisation. Il faudra donc veiller à ce qu’aucune disposition ne vienne renforcer le sentiment d’iniquité et d’oubli, qui se développe parfois injustement, mais qui n’en reste pas moins bien répandu dans la population rurale de certains territoires et contribue à développer des comportements antirépublicains.

Nous ne voulons plus de territoires perdus de la République. Nous avons besoin, aux côtés d’un État fort, d’une organisation territoriale de coopération et de solidarité qui apporte plus d’efficacité à l’action publique, plus de justice entre les territoires et qui redonne aux acteurs locaux la liberté d’avancer des réponses innovantes, adaptées à leurs spécificités territoriales.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Marie

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission, mes chers collègues, en tant qu’avant-dernier intervenant, permettez-moi de saluer la patience et la sérénité du Gouvernement, car, tout au long de ce débat, nos collègues de la majorité sénatoriale ont dit tout le mal qu’ils pensaient du projet de loi qu’il présente.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Marie

Ils nous ont décrit l’apocalypse territoriale : fin de la proximité, perte désastreuse pour les territoires de la compétence générale, affaiblissement des communes, des départements, mise sous tutelle des collectivités par la région, et j’en passe.

Mais comment, mes chers collègues, parvenez-vous à faire une telle galipette vous qui, de 2007 à 2012, avez voté tous les textes qui ont organisé l’asphyxie financière des départements – transferts insuffisamment compensés, solidarité nationale oubliée, suppression de la taxe professionnelle –, vous qui avez ensuite décidé de créer le conseiller territorial, lequel préfigurait la fusion entre les départements et la région, vous qui avez voté la suppression de la clause de compétence générale, …

Protestations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Marie

M. Didier Marie. … et alors que, aujourd’hui encore, bon nombre de vos responsables, et non des moindres, parlent de supprimer les départements en les fusionnant avec les régions, y compris en ayant recours au référendum ?

Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Marie

Certes, de 2007 à 2012, de nombreux présidents de conseil général de la droite et du centre, siégeant comme moi au bureau de l’Association des départements de France, se lamentaient devant les positions du Président de la République de l’époque et de son Premier ministre. Mais il a bien fallu une majorité pour accompagner ce gouvernement-là, et vous en étiez, je le rappelle !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Très bien ! Notre collègue a bonne mémoire !

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Marie

Aujourd'hui, tout le monde s’accorde sur le fait qu’une réforme est nécessaire, mais, lorsque le Gouvernement prend le taureau par les cornes, plus personne n’est d’accord, car cela bouscule habitudes et positions acquises.

Pourtant, madame la ministre, ce projet de loi est un bon texte. Depuis trente ans, le mouvement de décentralisation a permis de moderniser notre pays, même ceux qui y étaient opposés en conviennent. Lycées, collèges, routes, infrastructures, services publics, équipements culturels et sportifs, vie associative : tout a bénéficié de la décentralisation.

Mais ce mouvement, agrégé à celui de la montée en puissance de l’intercommunalité, a généré progressivement de la complexité, rendant souvent difficile la lecture de l’action des uns et des autres, quand ils n’étaient pas en concurrence, déroutant nos concitoyens et, en définitive, consacrant l’idée d’un « millefeuille » territorial, quand, de feuilles, il n’en compte que quatre !

Certaines collectivités l’ont compris, ont anticipé et ont agi. À cet égard, permettez-moi, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, d’évoquer l’expérience menée dans ma région, la Haute-Normandie.

Nous avons créé le 276, contraction des numéros 27 pour l’Eure et 76 pour la Seine-Maritime. Cela nous a permis, dès 2004, voilà donc déjà dix ans, de préfigurer ce qui nous est proposé aujourd'hui. Nous avons décidé, à cette époque, de coopérer, de coordonner nos actions, de mutualiser des moyens et d’agir de concert en faveur des territoires intercommunaux et communaux. Et je peux vous dire, mes chers collègues, que c’est possible.

Ainsi la région a-t-elle été consacrée seule décisionnaire en matière économique, toutes les aides et toutes les interventions des départements étant déterminées dans le schéma régional de développement économique.

De la même manière, nous avons développé les coopérations, mais aussi les spécialisations, sur toutes les compétences, dans les domaines du tourisme, de l’environnement, de la culture, du sport, de la gestion des ports. Nous avons élaboré, et mis en œuvre, à côté du contrat de plan État-région, un contrat « 276 » doté de 1, 5 milliard de crédits d’investissement, dont une partie significative était destinée à des contrats de territoire avec les agglomérations et les pays.

Je pourrais être plus complet, mais le temps m’est compté. Je tenais simplement à dire que tout cela peut fonctionner.

Votre projet de loi, madame la ministre, conforte notre démarche et l’étend à l’ensemble du pays en l’amplifiant. Je m’en félicite. Il permet de donner du sens à l’action publique, de la rendre enfin lisible par nos concitoyens…

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Fouché

Ce n’est pas ce qu’ils pensent ! Vous verrez le résultat, lors des prochaines élections !

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Marie

… et par nos entreprises, qui, trop souvent, ne s’y retrouvent plus et font la tournée des collectivités pour obtenir informations ou aides.

Votre projet de loi simplifie l’exercice des compétences de chaque collectivité en les rendant plus lisibles.

La principale avancée du texte est sans conteste le fait que la région va enfin atteindre la maturité.

Certes, elle est la collectivité la plus jeune, mais le renforcement de son rôle est primordial. Ce projet de loi consacre sa place stratégique en matière de développement économique et d’emploi, d’aménagement du territoire, de compétitivité et d’attractivité.

Je suis, pour ma part, favorable à ce que la région organise aussi l’ensemble des mobilités, ce qui nécessite le transfert des routes, a minima les plus importantes d’entre elles, et de tout le bloc « transport » des départements.

Dans notre département, nous avons aussi la chance d’avoir une communauté d’agglomération qui, constituée en 2010, deviendra métropole au 1er janvier 2015. C’est un moteur de croissance qui rayonne bien au-delà de ses limites territoriales.

Nous avons, là encore, anticipé et procédé à des expérimentations, puisque la métropole de Rouen-Normandie se verra transférer, dès le 1er janvier prochain, les routes départementales de son territoire et trois musées départementaux afin de constituer un pôle muséal de dimension internationale.

Nous avons par ailleurs « décroisé » un ensemble de financements aux communes, aux partenaires culturels et sportifs et aux associations.

Encore une fois, cela démontre que tout cela est possible.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Marie

En tant qu’ancien président du conseil général de la Seine-Maritime, je me réjouis, madame la ministre, de l’évolution du Gouvernement sur le rôle du département, lequel se voit aujourd’hui confirmé et conforté dans ses missions de solidarité sociales et territoriales.

À cet égard, madame la ministre, j’ai déposé un amendement visant à éviter que les compétences sociales ne soient dissociées les unes des autres lors du transfert à la métropole. Nos agents apportent un service de qualité, portant une approche globale des familles, de la petite enfance au grand âge. Le transfert « par appartement », tel qu’il est prévu à l’article 23, ne me semble pas aller dans le sens d’une simplification et d’une efficacité garanties.

J’ai proposé que ne puissent être transférées que les compétences sociales liées aux compétences économiques des métropoles et à leurs compétences en matière de logement, soit les politiques d’aide à l’insertion sociale et professionnelle des jeunes, les actions d’insertion et le Fonds de solidarité pour le logement. Pour le reste – enfance, dépendance, accompagnement social des familles –, les départements ont fait la preuve de leur efficacité.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Marie

M. Didier Marie. Je crois, madame la ministre, à l’intelligence des territoires, à la négociation, au contrat, et je sais, pour les avoir expérimentés, que cela fonctionne. Vous pourrez compter sur nous pour défendre votre projet de loi !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous avons été nombreux, c’est vrai, à saluer l’évolution de la position du Premier ministre sur le rôle que devait conserver le département au sein des institutions de la République. La réaffirmation du conseil départemental comme collectivité moteur des solidarités est apparue comme une sage décision à beaucoup d’entre nous, si je m’en réfère à ce que j’ai entendu.

La force des départements, chers collègues, ne réside pas uniquement, à mon avis, dans la proximité avec laquelle ils exercent leurs missions. Elle tient également à leurs capacités à innover et à créer de l’activité, parce qu’ils sont les meilleurs connaisseurs de leur territoire.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

À ce stade du débat, tout a été dit, et plutôt que de vous donner, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, pour la vingt-cinquième fois les arguments d’un « départementaliste », permettez-moi d’évoquer un exemple d’innovation de deux départements, la Dordogne et l’Ardèche.

Tous deux sont bien connus pour leurs richesses préhistoriques, qui sont leur principal atout. Les deux départements ont su l’un et l’autre procéder à la reconstitution de ces deux chefs-d'œuvre d’art pariétal que sont la grotte de Chauvet-Pont d’Arc, pour l’un, et celle de Lascaux, pour l’autre. La reconstitution de la grotte de Chauvet-Pont d’Arc ouvrira dans quelques mois. Quant au Centre international d’art pariétal de Lascaux, il ouvrira en juin 2016.

Sans se concerter, ces deux départements ont eu l’idée de valoriser leur territoire et de faire face à l’adversité qui, pour des raisons de conservation de patrimoine, leur interdisait à l’avenir d’exploiter leurs richesses.

Ils ont aussi su entraîner dans leur sillage et, surtout, dans leur volonté leurs régions respectives, l’État et même l’Europe. Demain, ils permettront aux citoyens de France et du monde de voir ces richesses patrimoniales, en doublant leurs capacités touristiques, déjà importantes, ce qui participe à leur développement économique.

Par ailleurs, la Dordogne a créé un atelier de fac-similé pour la reproduction, au millimètre près, de l’art pariétal de nos ancêtres. Je vous invite à le visiter, madame la ministre ; certains de vos collègues sont déjà venus. Elle fait circuler dans le monde un élément de fac-similé appelé « Lascaux 3 », que 800 000 visiteurs ont déjà vu aux États-Unis et au Canada. Il est actuellement à Bruxelles, en attendant Paris.

Ces deux exemples montrent bien, dans un domaine à la fois culturel et touristique, la capacité de création, mais aussi de coordination, des collectivités territoriales. Cela nous renforce dans l’idée de conserver cette proximité des départements, sans la morceler, mais en lui donnant le caractère de modernité que deux siècles d’existence pourraient lui enlever.

La commission a bien vu la nécessité de combiner, suivant les cas, le rôle de gestion du département et celui de coordination des régions au travers du schéma territorial, particulièrement dans le domaine du tourisme, en laissant de la souplesse aux collectivités pour harmoniser leurs actions. Sachons tenir compte de la spécificité et du savoir-faire de chacun dans l’élaboration de ce projet de loi. §

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. le président de la commission des lois.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, permettez-moi de dégager, au terme de la discussion générale, quelques-unes des questions qui ont le plus souvent été formulées par les orateurs qui se sont succédé à la tribune.

Ce matin, dans votre discours liminaire, madame la ministre, vous avez tenu des propos témoignant d’une certaine ouverture, qui ne présentaient que l’inconvénient d’être assez généraux. Avant que nous ne nous séparions pour quelques semaines, il serait utile au Sénat que vous apportiez des réponses précises aux questions qui ont été soulevées tout au long de la journée.

Lorsque le Premier ministre a annoncé, en avril dernier, son projet de réforme territoriale, nombre d’entre nous, vous le savez, ont ressenti une profonde incompréhension.

En effet, il nous paraissait contradictoire de vouloir étendre le périmètre des régions et les doter d’importantes responsabilités en matière de développement économique pour les rendre plus dynamiques, tout en les chargeant de nombreuses compétences de gestion, voire de maintenance d’infrastructures. Dès lors que la question de leurs ressources n’est pas traitée, cela présente le danger de créer des colosses aux pieds d’argile, chaussés de semelles de plomb…

En effet, si l’on transfère aux régions des compétences de gestion qui sont jusqu’à présent exercées, dans la proximité, par les départements, celles-ci risquent de ne pas avoir la souplesse et le dynamisme nécessaires pour faire face aux missions que nous voulons, les uns et les autres, leur confier dans l’intérêt du pays. Notre préoccupation est d’élaborer un dispositif cohérent, avec de grandes régions dynamiques et des institutions chargées des compétences de proximité. Le Gouvernement a cherché ; de nombreuses hypothèses ont été émises par le Premier ministre, par vous-même, madame la ministre, et par d’autres membres du Gouvernement au cours du printemps, de l’été et de l’automne, mais nous n’avons pas trouvé mieux que le département pour assumer ces compétences.

Le 28 octobre dernier, le Premier ministre nous a laissé quelques espoirs dans trois domaines au moins.

D’abord, il a renoncé officiellement à la suppression du département, ce qui, de notre point de vue, est raisonnable au regard de l’intérêt général.

Ensuite, il s’est montré expressément très ouvert – je l’ai relevé en intervenant à la tribune – quant à l’hypothèse de confier aux régions des responsabilités accrues dans le domaine de la politique de l’emploi, ce qui nous semble aujourd'hui indispensable.

Enfin, il nous a expressément assurés de sa disponibilité pour travailler avec nous sur la question des compétences.

Ces espoirs ont malheureusement été suivis de trois déceptions.

La première déception concerne le texte relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral.

Nous espérions que l'Assemblée nationale tiendrait un tant soit peu compte du travail que nous avons réalisé. Jusqu’à présent, malheureusement, tel n’a pas été le cas, d’où notre première déception. Certes, nous avons encore une petite chance : demain, dans un dernier sursaut de lucidité, les députés reprendront peut-être quelques-uns des apports du Sénat, notamment notre rédaction de l’article 1er, qui visait à rendre plus explicites les dispositions de l’article 72 de la Constitution, relatives à la subsidiarité. Plus grande encore fut notre déception de voir le projet de création de la nouvelle collectivité territoriale d’Alsace balayé d’un revers de manche, alors que ce projet tout à fait précis et consistant correspondait à une volonté très fermement exprimée par les élus alsaciens.

Notre deuxième déception fut causée par le fait que le Gouvernement ait soudain décidé, à notre stupéfaction, sans même prévenir le président du Sénat, d’engager la procédure accélérée sur le présent texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Dès lors que l'Assemblée nationale n’aurait pas le temps nécessaire pour procéder à un examen approfondi de la réforme, nous craignons fort que cela ne la conduise à adopter des dispositions qui n’auraient pas été suffisamment mûries, ce qui rendrait notre tâche plus difficile encore…

Notre troisième et dernière déception tient non pas à votre discours liminaire, madame la ministre, mais à vos actes.

En effet, vous avez déposé ce matin des amendements tendant à réduire à néant une grande partie du travail de la commission des lois du Sénat. Or ce travail a été élaboré par deux co-rapporteurs appartenant l’un à l’opposition, l’autre à la majorité. Nous avons donc créé les conditions nécessaires à la recherche du consensus le plus large possible. Eu égard à l’approbation par de nombreux sénateurs de l’opposition du texte de la commission, nous espérions que, à tout le moins, le Gouvernement, qui a manifesté son ouverture au dialogue, tiendrait compte du travail réalisé.

Debut de section - Permalien
Marylise Lebranchu, ministre

Absolument !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Le dépôt de ces amendements a donc choqué plus d’un sénateur, madame la ministre ! Je tenais à le souligner, parce qu’il est loyal, dans un débat, de se dire clairement les choses.

Debut de section - Permalien
Marylise Lebranchu, ministre

Absolument !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

J’en viens maintenant aux trois questions qui ont été formulées tout au long du débat par de nombreux orateurs, de tous les groupes.

Première question, acceptez-vous, oui ou non, de vraies mesures de décentralisation en faveur des régions ?

S’agira-t-il de régions culs-de-jatte ou marcheront-elles sur leurs deux jambes ? Si les régions sont compétentes en matière d’économie et de formation professionnelle, elles doivent progressivement se voir confier aussi l’enseignement professionnel. Surtout, il faut, dès maintenant, leur donner des responsabilités effectives en matière de politique de l’emploi. À vrai dire, l’État ne saurait se prévaloir d’un tel bilan, en matière d’emploi, qu’il puisse balayer d’un revers de main la proposition de confier les rênes aux présidents de région. Ah, si le chômage avait considérablement diminué au cours des dernières années, la question ne se poserait peut-être pas dans les mêmes termes !… Mais pourquoi ne pas essayer de faire confiance aux libertés locales, en vue de mener tout ensemble, au niveau régional, une politique énergique de création d’emplois, de reconversion des bassins d’emploi en difficulté, et une politique de développement économique ?

La deuxième question est toute simple : acceptez-vous, oui ou non, de soutenir le maintien, dans le texte qui sera finalement adopté, de l’attribution aux départements des compétences en matière de routes, de collèges, de transports scolaires et de ports ?

Si vous ne l’acceptez pas, les régions vont devenir obèses ; elles seront plus portées à l’immobilisme – les compétences de gestion sont trop lourdes lorsqu’elles ne sont pas exercées au plus près des réalités du terrain – qu’au dynamisme.

Enfin, troisième question : acceptez-vous, oui ou non, de renoncer au seuil de 20 000 habitants pour les intercommunalités et à l’élaboration de nouveaux schémas de coopération intercommunale avant le 31 décembre 2015 ?

Le chiffre de population, quel que soit le seuil retenu, ne nous semble plus être le bon critère, même s’il a pu être utile dans une première étape, aujourd’hui achevée.

S’il reste, ici ou là, des intercommunalités ne répondant pas aux prescriptions de la loi de décembre 2010, on peut achever le travail de mise aux normes de l’intercommunalité. C’est d’ailleurs ce qui était prévu dans la loi, sans que nous ayons à intervenir davantage.

En revanche, s’il s’agit de construire une nouvelle carte des intercommunalités, il ne faut pas le faire en déstabilisant des communautés de communes qui, créées entre janvier et avril 2014, sont encore fragiles et doivent se consolider.

Par ailleurs, il convient de trouver des critères qui correspondent davantage aux réalités de la vie, notamment dans les régions rurales, que ces critères quantitatifs aveugles, fondés sur le seul nombre d’habitants.

Telles sont, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, les questions que je souhaitais mettre en exergue au terme de ce très riche après-midi de débats. §

Debut de section - PermalienPhoto de André Vallini

Madame la présidente, monsieur le président de la commission des lois, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais d’abord saluer à mon tour l’important travail accompli par les deux co-rapporteurs, Jean-Jacques Hyest et René Vandierendonck, auquel j’adresse mes vœux de prompt rétablissement, en espérant qu’il reviendra très vite parmi nous.

Je salue également le travail des rapporteurs pour avis, Valérie Létard, René-Paul Savary, Catherine Morin-Desailly, Rémy Pointereau et Charles Guené, ainsi que celui d’Hervé Maurey, président de la commission du développement durable, et de Jean-Marie Bockel, président de la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation. Leurs rapports ont apporté un éclairage très intéressant sur notre réforme.

Je remercie l’ensemble des orateurs qui se sont exprimés au cours de l’après-midi et de la soirée pour leurs interventions très riches. À cette heure avancée, il n’est plus temps, me semble-t-il, de répondre à chacun en particulier.

Debut de section - Permalien
André Vallini, secrétaire d'État

Les débats qui se tiendront au mois de janvier nous permettront d’aborder en profondeur toutes les questions qui ont été soulevées dans cette discussion générale.

Je commencerai par dire un mot du calendrier. Comme M. le président de la commission des lois l’a lui-même rappelé au début de l’après-midi, le projet de loi relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral et le projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République ont été présentés en conseil des ministres le même jour, le 18 juin dernier. Ils sont donc sur la table, si je puis dire, depuis plusieurs mois.

Ces deux projets de loi sont le fruit d’une réflexion globale du Gouvernement et présentent une cohérence d’ensemble. Le Sénat et l’Assemblée nationale ont disposé du temps nécessaire pour se préparer à leur examen. Au demeurant, la discussion du second texte, touchant aux compétences, succède à l’examen du premier, puisque le Sénat a débattu hier en nouvelle lecture de la carte des régions.

Le président Larcher a rappelé que le décalage de l’examen du projet de loi NOTRe, auquel le Gouvernement a souscrit, avait été demandé par le Sénat lui-même à la suite des dernières élections sénatoriales.

Debut de section - Permalien
André Vallini, secrétaire d'État

Dès lors, l’engagement de la procédure accélérée était nécessaire pour respecter le calendrier électoral, mais il n’empêchera en aucune façon une deuxième lecture du présent texte.

Debut de section - Permalien
André Vallini, secrétaire d'État

De nombreux orateurs ont regretté que ce projet de loi ne soit pas un texte de décentralisation. En réalité, il l’est à sa manière, dans la mesure où il permettra l’approfondissement de la décentralisation, sa clarification et l’amélioration de son efficacité.

Depuis trente ans, la décentralisation est une réussite ; tout le monde l’a reconnu au cours de cette discussion générale, y compris ceux qui, à l’époque, avaient combattu les lois de décentralisation. La décentralisation a permis de moderniser le pays et de satisfaire aux besoins toujours croissants de nos concitoyens en matière de services publics.

Il reste qu’il faut aujourd’hui simplifier le système administratif local, comme tous les orateurs en sont convenus. Au fil des gouvernements et des majorités successifs, nous avons ajouté des organismes et compliqué les procédures, ce qui a abouti à un enchevêtrement des compétences entre les régions, les départements, les intercommunalités et les communes.

Notre réforme répond à trois exigences : une exigence démocratique, la clarté, une exigence économique, la compétitivité, et une exigence de service public, la proximité.

Afin de clarifier les compétences des différents échelons, nous allons supprimer la clause de compétence générale, qui a permis jusqu’à présent aux régions, aux départements et aux communes d’agir dans les mêmes domaines de manière redondante, voire concurrente. Désormais, à chaque niveau de collectivités territoriales correspondront des compétences précisément définies par la loi.

Ces compétences s’ordonneront en blocs homogènes : aux régions le développement économique, aux départements la solidarité et au bloc communal les services publics de proximité. À côté de ces compétences exclusives, il demeurera des compétences partagées, conformément au souhait de beaucoup : le tourisme, la culture et le sport.

Un outil essentiel permettra la coordination des interventions des collectivités territoriales : la conférence territoriale de l’action publique, la CTAP, créée par la loi de modernisation de l’action publique et d’affirmation des métropoles que Marylise Lebranchu a défendue devant votre assemblée il y a quelques mois. Cette instance constituée dans chaque région permettra d’organiser au mieux l’exercice des compétences par les différents niveaux de collectivités territoriales.

En ce qui concerne l’intercommunalité, qui est, avec la commune, l’échelon de la proximité et de la vie quotidienne, la question du seuil se pose, comme l’a souligné M. le président de la commission des lois à la suite de nombreux orateurs. Le débat, lancé par les auditions que la commission des lois a organisées, ne fait que commencer. Il se tient aussi à l’intérieur de chacun des groupes politiques, comme l’a montré la discussion générale.

Nous ne sommes pas seuls à penser que le chiffre de 20 000 habitants correspond la plupart du temps à des bassins de vie, mais ce n’est pas vrai partout : alors que, dans certains territoires, ce seuil paraîtra très faible et sera largement dépassé – il l’est d’ailleurs déjà par un grand nombre d’intercommunalités –, il sera inatteignable dans d’autres, notamment ruraux ou de montagne. Des dérogations seront donc nécessaires : le Gouvernement sera très attentif aux propositions du Sénat visant à en fixer les critères.

De nombreux orateurs ont posé la question de l’avenir des départements face à des régions fortes sur le plan économique et à des intercommunalités qui vont monter en puissance. Au risque de décevoir MM. Juppé, Copé, Xavier Bertrand ou Mme Pécresse, le Gouvernement affirme très clairement que les conseils départementaux élus en mars prochain seront confortés dans leur rôle de garants de la solidarité, sociale et territoriale. Au demeurant, c’est la première fois que la compétence de solidarité territoriale sera inscrite en toutes lettres dans un texte de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Fouché

Les départements l’exercent depuis longtemps ! Il a fallu se battre pour cela !

Debut de section - Permalien
André Vallini, secrétaire d'État

C’est vrai, monsieur le sénateur, mais désormais cela figurera dans la loi.

De nombreux orateurs ont demandé avec quels moyens financiers les régions pourraient exercer leur compétence renforcée en matière économique. Des transferts de fiscalité seront évidemment nécessaires, à pression fiscale constante, car le Président de la République a indiqué qu’il n’y aurait pas d’impôts nouveaux.

Avant de déterminer les moyens financiers affectés aux collectivités territoriales, notamment aux régions, il faut d’abord savoir quelles compétences le Parlement décidera d’attribuer à celles-ci.

Par ailleurs, vous savez que le Premier ministre a annoncé une réforme de la dotation globale de fonctionnement, qui sera préparée en liaison avec le Sénat et l’Assemblée nationale, ainsi que le Comité des finances locales, tout au long de l’année 2015, en vue d’une mise en œuvre au 1er janvier 2016.

Enfin, en ce qui concerne la politique de l’emploi aussi, le débat ne fait que commencer. Tout le monde convient que les régions doivent être davantage associées à la politique de l’emploi, qui est une priorité du Gouvernement : je suis sûr que nous en trouverons les moyens. L’emploi doit cependant continuer à relever d’une politique nationale, que le Gouvernement entend conduire avec toute l’efficacité requise.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
Marylise Lebranchu

Je voudrais apporter quelques éléments de réponse à MM. Kaltenbach et Dallier, qui ont fait état de leurs inquiétudes à propos de la métropole du Grand Paris.

Lorsque j’ai accepté, avec l’assentiment de Jean-Marc Ayrault, alors Premier ministre, de mettre en place une mission de préfiguration et d’y intégrer totalement le syndicat mixte d’études de Paris Métropole, elle avait pour vocation d’assurer une transition. Seulement, petit à petit, la mission de préfiguration, prise d’un grand enthousiasme, a décidé de récrire la loi…

Debut de section - Permalien
Marylise Lebranchu, ministre

Jean-Claude Gaudin me disait, à propos de la métropole d’Aix-Marseille-Provence, qu’il ne voyait pas pourquoi on reviendrait sur une loi votée, sinon à la marge. Je suis d’accord avec lui.

On a raison d’ouvrir le débat sur le statut des territoires, car la gestion par la métropole des compétences sera complexe en l’absence d’un statut sui generis.

Pour ce qui est d’instaurer une forme de progressivité, je crois qu’un accord est possible ; les représentants de la mission de préfiguration et le Premier ministre s’en sont récemment entretenus.

En revanche, nous divergeons en ce qui concerne les strates de fiscalité. À mes yeux, les conseils territoriaux ne devraient pas pouvoir lever l’impôt, car, s’ils le pouvaient, ils seraient de fait et de droit des EPCI. Or je ne vois pas comment une commune peut appartenir à deux EPCI, ni comment on organise un EPCI d’EPCI. Je rappelle que le Sénat a rejeté, de manière largement transpartisane, l’idée de faire de la métropole un syndicat d’EPCI.

Je pense que nous devons réfléchir à un lissage de la CFE. Sachant que son taux varie aujourd’hui de 5 % à 30 %, ce lissage prendra du temps.

Il faut être clair sur les ressources que l’on assure aux territoires dans un premier temps. Leur garantit-on une recette assise sur la CFE métropolitaine pendant une période de transition de quelques années ? Un tel système nous permettrait peut-être d’éviter ce que, les uns et les autres, nous redoutons : la constitution d’un syndicat d’EPCI, qui, à mon avis, ferait perdre beaucoup de temps à la métropole.

L’hyper-richesse et l’hyper-pauvreté se côtoient et la solidarité n’est pas encore au rendez-vous. Les problèmes de logement et de transport, en particulier, sont lourds. Je suis favorable à la coopération entre les territoires de France.

Les autres grandes métropoles européennes viennent toutes de se rénover. Soyons donc extrêmement attentifs à notre capitale-monde, qui doit pouvoir évoluer aussi vite que possible pour garder son rang, qui est très envié.

En ce qui concerne la métropole d’Aix-Marseille Provence, les mêmes questions se posent s’agissant des territoires et de la progressivité. En revanche, aucune proposition en matière de fiscalité propre n’est réellement aboutie aujourd’hui.

Lors de la réunion qui s’est tenue avec Jean-Claude Gaudin, Michel Vauzelle et de nombreux acteurs du monde économique, une unanimité s’est fait jour, aussi bien parmi les représentants des entrepreneurs que parmi les syndicats de salariés du secteur privé, pour réclamer une mise en place rapide de la métropole.

Monsieur le président de la commission des lois, vous nous demandez de conclure le débat avant que les amendements aient été examinés, mais c’est de bonne guerre !

Il a souvent été dit, ce soir, qu’il fallait faire confiance aux élus. Je crois que c'est effectivement nécessaire.

Pourquoi avons-nous déposé des amendements ? Lorsqu'un gouvernement dépose un projet de loi, c'est qu’il y croit. Le présent projet de loi, que nous avons déposé en juin, a été récrit par la commission des lois.

Debut de section - Permalien
Marylise Lebranchu, ministre

Il est normal que le Gouvernement dépose des amendements pour exposer quelles étaient ses propositions, dire au Parlement ce qu’il voulait. Le débat s’engagera sur ces bases et chacun arrêtera sa position, mais, j’y insiste, la logique voulait que le Gouvernement redise quel était le contenu de son texte initial. Quoi qu’il en soit, cela ne clôt pas le débat. Le Premier ministre lui-même a tenu à dire que le Gouvernement serait à l’écoute du Sénat.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Fouché

Et sur la question du travail en commun entre les départements et la région en matière économique ?

Debut de section - Permalien
Marylise Lebranchu, ministre

L’attribution aux régions des compétences en matière économique et de formation professionnelle n’a pas été remise en cause. Je crois que si le président Philippe Bas n’a pas soulevé cette question, c’est parce qu'elle n’est plus à l'ordre du jour pour la plupart d’entre vous, au-delà des appartenances partisanes.

Debut de section - Permalien
Marylise Lebranchu, ministre

En revanche, pour ce qui concerne la politique de l’emploi, comme l’a dit André Vallini, nous devons examiner les choses de très près. Ainsi que je l’ai dit au président Larcher il y a quelques jours, le mariage de l’ANPE et des ASSEDIC au sein de Pôle emploi pose un vrai problème. Faire droit à la demande que vous formulez aujourd'hui reviendrait à le dissoudre en partie.

Debut de section - Permalien
Marylise Lebranchu, ministre

Pas nécessairement, mais cette question inquiète l’ensemble des partenaires sociaux, non seulement les syndicats de salariés, mais aussi les syndicats patronaux, qui voudraient bien savoir comment seront utilisées les contributions que leurs adhérents versent au titre de la formation professionnelle : la question a été posée par le MEDEF et la CGPME. Nous demanderons au ministre du travail si l’on peut avancer sur ce sujet sans scinder Pôle emploi. Si nous avions déjà la réponse, nous serions vraiment très forts !

Je ne m'engage nullement sur le résultat auquel nous aboutirons, mais nous allons étudier votre amendement avec la plus grande attention, puis nous essaierons, au cours du débat, d’avancer aussi loin que possible dans la direction que souhaite le Sénat, en préservant les structures actuelles. §

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La discussion générale est close.

La suite de la discussion est renvoyée à une séance ultérieure.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui mercredi 17 décembre 2014, à quatorze heures trente et le soir :

1. Nouvelle lecture du projet de loi de finances rectificative, adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture, pour 2014 (195, 2014-2015) ;

Rapport de M. Albéric de Montgolfier, fait au nom de la commission des finances (192, 2014-2015).

2. Nouvelles lectures du projet de loi de finances, adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture, pour 2015 (190, 2014-2015) et du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 (192, 2014-2015) ;

Rapports de M. Albéric de Montgolfier, fait au nom de la commission des finances (nos 194 et 196, 2014-2015) ;

Résultats des travaux de la commission (n° 197, 2014-2015).

3. Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation de la législation au droit de l’Union européenne en matière économique et financière ;

Rapport de M. Richard Yung, rapporteur pour le Sénat (181, 2014-2015) ;

Texte de la commission mixte paritaire (n° 182, 2014-2015).

En outre, à quatorze heures trente :

Désignation des vingt et un membres de la commission d’enquête sur la réalité du détournement du crédit d’impôt recherche de son objet et de ses incidences sur la situation de l’emploi et de la recherche dans notre pays.

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

La séance est levée le mercredi 17 décembre 2014, à une heure.