Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, s’il faut se féliciter de l’intérêt que nous portons collectivement à ce projet de loi, nous devons constater que c’est là un des seuls points sur lequel se rejoignent les différents orateurs.
Depuis de nombreuses années, rapport après rapport, le Sénat estime qu’il y a lieu de repenser l’organisation territoriale de notre République, pour la rendre plus claire, plus efficace, plus proche de nos concitoyens. Il y a eu le rapport Balladur et, plus récemment, le rapport Krattinger-Raffarin qui, une fois encore, a abouti à ce constat, alors assez partagé, au-delà des sensibilités politiques de chacun.
Le Gouvernement nous a présenté un texte que nous attendions tous et nous avons beaucoup débattu ces derniers mois de son contenu. Le texte gouvernemental qui a été soumis à la commission des lois, probablement perfectible et amendable, avait le mérite de mettre sur la table un certain nombre de propositions.
Le groupe socialiste a fait le choix de formuler des propositions concrètes pour améliorer ce texte. Il a déposé des amendements, dont malheureusement un très petit nombre a été repris par la commission des lois – je le regrette, bien entendu.
Je ne prendrai qu’un exemple, qui concerne l’article 14.
Nous avons tous estimé, et différents orateurs sont intervenus sur ce sujet, que le chiffre de 20 000 habitants qui est proposé par le Gouvernement comme seuil de population des intercommunalités pouvait être parfois, mais pas toujours, trop élevé. Les sénateurs socialistes ont proposé d’abaisser ce seuil à 15 000 habitants avec de larges modulations possibles, afin de s’adapter à la réalité des territoires, avec la possibilité laissée aux commissions départementales de la coopération intercommunale de le faire varier, en cas de nécessité. Il me semble qu’il s’agissait là d’une proposition concrète, équilibrée et constructive.
La nouvelle majorité sénatoriale a fait le choix de la facilité et du dogmatisme, d’une certaine manière, en supprimant purement et simplement l’alinéa concerné à l’article 14. Selon moi, c’est une erreur. Une fois encore, nos collègues députés passeront par-dessus nos têtes en faisant prévaloir leur version, et elle seule. Personnellement, je trouve cette situation regrettable.
Elle est d’autant plus regrettable que M. le président du Sénat souhaite, nous a-t-il dit, illustrer la rénovation de notre Haute Assemblée par un investissement accru – et, j’imagine, positif –, dans l’élaboration des lois. Nous n’en prenons pas le chemin !
Sur l’article 14 toujours, je rejoins la volonté exprimée par le Gouvernement de rationaliser la carte de la coopération intercommunale par la réduction du nombre de syndicats primaires qui auront vocation, à l’avenir, à rejoindre les EPCI. Cela se produit déjà en Bretagne, madame la ministre, région qui doit à son antériorité en termes de coopération intercommunale d’avoir été précurseur sur ces sujets, sans que cela pose de problème aujourd’hui.
Dans le même temps, je me félicite également de la position que vous avez exprimée, madame la ministre, lors de votre audition au Sénat, au sujet du maintien des grands syndicats constitués à l’échelle supra-communautaire ou départementale et exerçant un certain nombre de compétences techniques, dans les domaines de l’eau ou de l’énergie en particulier. L’intention du Gouvernement de les conserver est conforme à la prise en compte de la subsidiarité territoriale, synonyme d’efficacité ; or, à cet égard, ces structures donnent aujourd’hui pleinement satisfaction.
Je vois dans les propos que vous avez tenus, madame la ministre, la confirmation de la prise en considération du bloc communal dont ces syndicats sont l’expression et l’émanation. Leur suppression par absorption au profit d’un autre niveau de collectivité – comme cela a pu être évoqué – serait, pour les maires et les présidents d’EPCI, inacceptable et ils le disent, d’autant que les compétences dont il est question continueront localement à relever de leur responsabilité. Il ne peut donc y avoir, sur ces compétences, de mise sous tutelle du bloc communal.
Dans un tel débat, le Sénat, assemblée des collectivités locales, ne devrait pas s’enfermer dans une logique réductrice, partisane et, in fine, improductive sur des sujets de cette importance, car cela reviendrait, aux yeux des observateurs, à remettre en cause son utilité même. Si tel doit être le cas, il appartiendra à la majorité sénatoriale d’en porter la responsabilité !