Oui, l'Arcep est le gardien du long terme : elle fixe le cap en s'appuyant sur des consensus transpartisans. Alors que le CSA traite de sujets sensibles pour la démocratie, l'Arcep se focalise sur les questions économiques et s'abstrait des intérêts particuliers et immédiats, qu'ils soient publics ou privés, d'où sa nécessaire indépendance.
L'Arcep, qui fait partie de l'État, doit être à l'écoute des priorités de la nation, notamment en ce qui concerne le plan France très haut débit. Celui-ci traduit l'équilibre entre l'initiative publique et les opérateurs privés. Les réseaux télécoms sont déployés par des opérateurs dont la liberté d'établissement est garantie. Laissons les opérateurs réaliser leurs choix technologiques et marketing. Parallèlement, l'accessibilité pour tous est indispensable. Le plan France très haut débit distingue les zones d'intervention des opérateurs de celles qui dépendent de la puissance publique. Ce plan est porté par le Gouvernement et non pas par l'Arcep, même si cette dernière a contribué à son élaboration.
Les réseaux d'initiative publique (RIP) sont-ils soumis à la régulation ? M. Leroy m'a demandé si les collectivités devaient se contenter d'un strapontin. Il convient de sortir de cet entre-deux. Pour moi, elles sont des acteurs majeurs des investissements numériques de demain. Les conseils généraux et régionaux consacrent des crédits considérables au très haut débit. Je souhaite que les collectivités soient pleinement associées aux décisions et qu'elles respectent un certain nombre de règles, tout comme les opérateurs privés. Pour l'instant, nous pâtissons d'un « trou dans la raquette », notamment dans les départements d'outre-mer (DOM), quand régulation et délégation entrent en contradiction. Lorsqu'un exécutif local signe un contrat avec un acteur privé et lui verse une subvention en contrepartie d'un service, le régulateur sectoriel a-t-il légitimité à se prononcer sur le tarif ? Nous sommes confrontés à un conflit de légitimité entre la libre administration des collectivités et le développement de l'économie numérique, qui passe par la régulation. Je ne peux qu'encourager le législateur à s'emparer de cette question.
Je vous invite à me donner des cartons jaunes ou rouges si je cède à la tentation de la suffisance technocratique. Il incombe au président d'une autorité indépendante de faire le lien entre les techniciens de l'Arcep et les partenaires institutionnels, les collectivités et les associations. J'aurai à coeur de rappeler aux agents de l'Autorité d'être attentifs aux réalités.
Le malaise actuel en matière de téléphonie mobile tient au hiatus entre la réalité des zones blanches et les cartes théoriques. Commençons par réconcilier les discours et les faits. Reconnaître les problèmes, c'est commencer à les résoudre. Ensuite, nous ferons respecter les engagements pris, surtout pour les réseaux mutualisés en 3G. Il n'est pas acceptable que les opérateurs ne soient pas au rendez-vous.