Intervention de Brigitte Gonthier-Maurin

Réunion du 15 janvier 2015 à 15h00
Nouvelle organisation territoriale de la république — Article 3

Photo de Brigitte Gonthier-MaurinBrigitte Gonthier-Maurin :

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, au nombre des formes de l’intervention économique des collectivités territoriales, qui sont diverses, figurent notamment la prise de participation, l’apport en fonds propres et l’engagement tendant à réduire le coût du crédit pour les entreprises.

À la vérité, l’ensemble de ces procédures, au demeurant parfaitement honorables, font partie, comme nous l’avons déjà souligné, d’un complexe d’interventions publiques au sein duquel les engagements des collectivités territoriales demeurent relativement secondaires.

Quant au rôle joué par les sociétés d’économie mixte et par les autres entreprises publiques locales se destinant au développement économique local, il est lui aussi relativement réduit, puisque moins de 10 % seulement de ces entreprises, représentant une capitalisation totale de 500 millions d’euros environ, assurent une telle mission.

Les engagements financiers sont évidemment plus importants, mais il n’en demeure pas moins que l’investissement direct des collectivités territoriales dans le champ de l’économie marchande est assez limité.

L’autre acteur clef du soutien aux entreprises sur les territoires est la fameuse Banque publique d’investissement, qui a repris le réseau et l’essentiel du portefeuille de clientèle d’OSEO, l’ancienne Banque de développement des PME. Toutefois, Bpifrance n’occupe, aujourd’hui encore, qu’une place secondaire dans le paysage de l’offre de crédit aux entreprises ; elle est, en effet, très largement dépassée par les banques commerciales à vocation universelle.

Toujours est-il que de nombreuses voies de financement public sont accessibles aux entreprises ; quelles que soient les formes de ces interventions publiques, leur efficacité doit faire l’objet d’un minimum de contrôle. Denrée rare et chère, le plus souvent issue de la fiscalité, l’argent public doit, en effet, être utilisé avec circonspection.

Or nous craignons qu’il ne soit employé sans discrimination suffisante et, surtout, qu’il ne serve à occuper les espaces laissés en friche par le financement plus traditionnel par le crédit ou par l’actionnariat. En somme, nous craignons que l’argent des collectivités territoriales ne soit mobilisé pour financer des « canards boiteux » – j’insiste sur les guillemets –, ou des opérations et investissements que les établissements de crédit ne souhaitent pas financer.

Les dispositions de l’article 3 relatives à la participation des collectivités territoriales aux plans de redressement illustrent quelques-unes des illusions qui peuvent naître de l’adoption du projet de loi. Méfions-nous donc de cet article, tout louable qu’il soit en apparence.

Il est évident que le financement de l’économie doit passer par l’économie elle-même. En particulier, il est temps que le secteur bancaire prenne à sa charge le développement des territoires et des activités, y compris en assumant la part de risque qu’il tente aujourd’hui de faire supporter par l’État et par les collectivités territoriales.

Enfin, est-il absolument pertinent que la région centralise l’action économique et les aides publiques aux entreprises ? C’est un principe intangible de la décentralisation que la réponse la plus pertinente est le fruit de la coopération entre les échelons de collectivités territoriales et qu’un minimum de flexibilité doit entourer les tours de table visant à engager les ressources publiques au bénéfice des entreprises.

Les communes, les établissements publics de coopération intercommunale, les départements et les régions ont chacun un rôle égal à jouer dans l’appréhension des terrains et du champ de l’action publique, dans l’appréciation des situations et des besoins et, par voie de conséquence, dans la définition des solutions à tel ou tel problème.

En vérité, c’est sur le terrain de la coopération que se gagnera la bataille de l’emploi, notamment dans les territoires, et non par des décisions prises de manière unilatérale et parfois, il faut bien le dire, loin des réalités. Il nous a paru important de réaffirmer cette conviction.

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