Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la modernisation de l’action publique a été engagée par le Gouvernement, dans le droit fil de l’objectif incontestable, et incontesté, du « choc de simplification ».
En matière de justice, la simplification des procédures ressortit à un impératif constitutionnel bien connu d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi. Il s’agit de faire en sorte qu’aucun justiciable ne puisse se dire, à l’instar du héros kafkaïen : « Avoir un pareil procès, c’est déjà l’avoir perdu. » Si les efforts consentis dans ce domaine depuis 2012 sont importants pour nos concitoyens, le groupe du RDSE a rappelé à plusieurs reprises, à l’occasion de discussions portant sur des textes similaires, que la simplification ne doit pas ignorer la complexité inhérente et, donc, irrémédiable du droit qui est un reflet de celle de nos sociétés.
La question se pose notamment pour la réforme du droit des obligations, qui constitue le nœud du désaccord entre le Sénat et l’Assemblée nationale. Le Gouvernement souhaite que celle-ci soit mise en œuvre par le biais d’une ordonnance. Il est vrai que cette réforme occupe les esprits depuis le projet Catala et que le calendrier parlementaire ne semble pas permettre la discussion d’un texte qui serait excessivement technique et long.
Pourtant, c’est au Parlement de se saisir de ce sujet, et nous vous invitons, mes chers collègues, à mettre en œuvre tous les outils de la procédure législative à votre disposition pour que ces difficultés soient levées.
Les deux assemblées sont toutefois arrivées à un accord sur de nombreuses dispositions du présent projet de loi. Nous saluons la sagesse de M. le rapporteur et de la commission des lois qui sont parvenus à corriger les travers, peut-être inévitables, de ce texte et d’autres de même nature qui touchent des pans entiers du droit.
Parmi les avancées que compte ce projet de loi, citons l’articulation de la procédure de divorce et de la liquidation du régime matrimonial, l’instauration d’un nouveau mode de preuve simplifié pour justifier de la qualité d’héritier dans les successions d’un montant limité, ou encore le développement de la communication par voie électronique dans les procédures judiciaires, autant de mesures qui simplifieront de manière significative les démarches des justiciables.
L’Assemblée nationale a, de plus, introduit, par voie d’amendement, des mesures opportunes pour ce qui concerne les amendes routières. Le délai de paiement d’une amende forfaitaire minorée en matière d’infraction routière a été étendu de trois à quinze jours lorsque le contrevenant est présent lors de la verbalisation, ce qui est plus favorable à l’intéressé.
Au terme de l’adoption d’un autre amendement, la transmission par voie électronique des contestations relatives aux avis de contravention routière a été autorisée, mesure que les justiciables ne pourront qu’approuver.
Enfin, parmi nos motifs de satisfaction, relevons l’habilitation accordée au Gouvernement à procéder à la fusion ou à la suppression de commissions consultatives, qui ont fleuri ces dernières années, sans qu’ait été entreprise une rationalisation de leur nombre.
Il est ainsi aujourd’hui devenu évident, comme l’avait également montré la discussion de la loi relative à la simplification de la vie des entreprises, que l’accessibilité du droit passe par la dématérialisation des démarches administratives, la coordination des divers services et la circulation de l’information.
À ces principes qui guident notre travail, j’ajouterai que la modernisation de la justice est aussi une question de moyens, financiers et humains.
Cette question se pose avec acuité dans la collectivité de Saint-Martin que j’ai l’honneur de représenter en ces murs.
Dans un rapport sénatorial d’information de 2011, MM. Cointat et Frimat s’étaient inquiétés de la « réalité de l’accès des citoyens à la justice » ainsi que du « respect par l’État des droits des justiciables » dans les territoires ultramarins de Guadeloupe, de Martinique et de Guyane.
Ainsi, le ressort de la cour d’appel de Guadeloupe s’étend à Saint-Martin et Saint-Barthélemy, ce qui pose d’importantes difficultés, d’un point de vue matériel notamment : je pense en particulier au transfert des dossiers, aux frais postaux démultipliés, à la rotation des gendarmes avec les détenus. Nous ne disposons pas, par ailleurs, d’établissement pénitentiaire, ce qui entraîne d’innombrables problèmes et une rupture d’égalité entre les citoyens : comme nos détenus sont incarcérés en Guadeloupe, ils se trouvent en situation de rupture familiale.
J’aurai l’occasion d’approfondir ces points que nous venons d’aborder avec Mme la garde des sceaux très prochainement, afin de rechercher des solutions.
De plus, les questions relatives à la création d’une chambre détachée du tribunal de grande instance de Basse-Terre, à la création d’une unité éducative renforcée, à la mise à disposition des locaux par la collectivité pour une meilleure qualité de service rendu aux justiciables – elle semble anormalement compliquée –, et au détachement des services d’un greffe seront au centre de nos discussions.
Cela étant, l’ensemble des membres du RDSE approuvent le texte proposé. §