L’article L. 123-5 du code de l’action sociale et des familles, auquel le texte de l’alinéa 56 fait référence, porte sur le transfert des compétences des centres communaux d’action sociale à des centres intercommunaux d’action sociale.
Quelle est la pertinence du transfert de cette compétence aux établissements publics territoriaux ?
Déjà, aujourd’hui, peu d’établissements publics de coopération intercommunale exercent cette compétence, qui a tendance à éloigner ces services sociaux de ceux qui en ont le plus besoin, mais, demain, avec des établissements publics territoriaux qui couvriront un territoire de 300 000 habitants au minimum, cet éloignement sera évidemment encore plus marqué.
Cela va à l’inverse de ce qui est nécessaire pour accompagner au mieux les personnes en difficulté. Nous sommes là dans un domaine où la proximité, la connaissance mutuelle, la continuité du suivi d’une même personne par un même agent sont extrêmement importantes. Au lieu de cela, on va les fondre dans une masse encore plus grande d’usagers, les engloutir dans l’anonymat, dépersonnaliser le travail social et risquer, qu’on le veuille ou non, de réduire ces personnes à de simples dossiers à traiter.
L’argument qui tendrait à justifier ce transfert par le fait que quelques EPCI exercent cette compétence ne tient pas, car une autre partie de l’amendement du Gouvernement prévoit la reprise automatique des compétences des EPCI préexistants par l’établissement public territorial qui sera créé sur leur territoire. La continuité de ces services n’est donc en aucun cas menacée.
Alors, pourquoi une telle proposition ? On peut craindre qu’il ne s’agisse d’une sorte de cheval de Troie pour rendre possible à la fois le dépouillement des communes de leurs compétences et le démantèlement, puis la disparition des départements, avec toutes les conséquences négatives que cela entraînerait pour les populations, les départements jouant déjà à l’heure actuelle un rôle extrêmement important en matière d’action sociale.
En effet, mettre d’autres structures en situation de récupérer les compétences sociales transférées est une condition indispensable pour permettre la disparition des départements, dont l’action sociale est le cœur de métier. C’est notamment le cas des départements de la petite couronne parisienne, dont la disparition est souhaitée par certains, notamment le Premier ministre ; il a encore réaffirmé que ce projet devait être envisagé, même si, pour l’instant, il a un peu repoussé l’échéance.
Démanteler ce qui fonctionne, comme la coopération entre communes et départements s’agissant de l’action sociale – dans mon département, par exemple, j’ai signé de nombreuses conventions avec des maires de différentes villes pour renforcer la coopération, la mutualisation, l’efficacité conjointe de nos services –, pour le transférer à des structures aujourd’hui moins adaptées, voilà qui ne rendrait aucun service à la population.