Car les faits récents – en plus de ce projet de loi – nous inquiètent sincèrement.
L’avenir du droit social doit-il se limiter à une disparition pure et simple des mesures les plus protectrices des salariés ? Ou bien doit-il au contraire évoluer pour proposer une protection correspondant aux évolutions, notamment technologiques, de notre société, et donc faire participer l’ensemble des citoyens aux progrès généraux.
Une chose est sûre, la directive européenne que vous venez, monsieur le ministre, de ratifier et portant la durée légale du temps de travail à 60 heures et à 65 heures ne sera pas de nature à protéger les salariés.
Votre conception de l’avenir, c’est le retour en arrière. Je ne puis que vous inviter à relire avec attention le Contrat social de Jean-Jacques Rousseau : il vous éclairera sur ce que doit être une loi et sur la portée de celle-ci.
Comme Mme David a eu l’occasion de le dire lors de son intervention sur l’article 17, nous sommes opposés à cet article sur la forme et sur le fond.
S’agissant de la forme, les partenaires sociaux étaient arrivés à un certain équilibre, prévoyant que les dérogations exceptionnelles aux 35 heures devaient être soumises à un accord majoritaire. Or le Gouvernement n’a accordé que peu de valeur à cette position commune, préférant faire fi de ce qui a été négocié pour imposer sa propre position.
Et quelle est cette position ? La déréglementation généralisée au service d’une économie de marché qui cherche à s’imposer contre les salariés. Ainsi, vous élargissez le champ d’application des conventions de forfait en l’étendant à tous les salariés, tout comme vous le banalisez en faisant passer le nombre maximal de jours travaillés de 218 jours à 288 jours par an.
N’importe quel salarié pourrait être soumis à des extensions de forfaits hebdomadaires ou mensuels, en heures et pour l’ensemble de sa mission, et ce alors même que ces nouveaux salariés à qui vous reconnaissez une spécificité nouvelle se voient méconnaître un droit pourtant légitime, c’est-à-dire une rémunération à la hauteur de cette autonomie.
En effet, nous le savons tous, la rémunération des cadres tient notamment compte des responsabilités qui pèsent sur eux. Mais pour les salariés qui se verraient reconnaître une même autonomie, aucune mesure spécifique n’est prévue.
De deux choses l’une : ou bien il n’y aura jamais d’extension des conventions de forfait aux salariés, ce qui nous semble peu probable ; ou bien – et cela est plus crédible – vous espérez une généralisation, ou tout au moins une augmentation très sensible de ces forfaits à tous les salariés. Pour ce faire, vous autorisez une mutation sans précédent du salariat, mutation silencieuse, qui passera inéluctablement par la convention individuelle.
C’est pourquoi nous sommes absolument opposés à cet article 17.