Intervention de Fabienne Keller

Réunion du 28 janvier 2015 à 14h30
Débat sur le thème : « quels emplois pour demain ? »

Photo de Fabienne KellerFabienne Keller :

Qu’on en juge : le remboursement de charges, à condition de faire la comptabilité des charges payées sur l’année précédente, est versé à la plupart des entreprises l’année suivante, ou déduit de leur impôt sur les sociétés, mais, pour les très grandes entreprises, trois ans après.

Il n’y a donc pas de lisibilité, pas d’effet d’incitation fort, mais plutôt un effet d’aubaine et, au passage, la création d’un passif pour l’État – l’évaluation précise ne nous en est pas donnée par le ministre du budget – de plusieurs milliards d’euros.

Je prends un deuxième exemple : le compte personnel de formation. Le CPF est une excellente idée pour tenir compte du fait que les carrières sont désormais fractionnées et pour accompagner le salarié tout au long de sa vie professionnelle. Mais nous avions déjà son petit frère, le droit individuel à la formation, le DIF. Pourquoi changer le nom, pourquoi changer l’administration du dispositif ? Des adaptations, certes moins attrayantes en termes de communication qu’un nouveau nom, auraient permis aux entreprises de mieux prendre en compte une innovation à la marge, en évitant les nouvelles charges administratives et technocratiques liées à la complexité de tout nouveau dispositif.

Monsieur le ministre, chers collègues, la baisse du chômage à laquelle nous aspirons tous ne peut être que le résultat de milliers de décisions microéconomiques de chefs d’entreprise entreprenants et audacieux, d’équipes de salariés motivés, mobilisés dans leur savoir-faire. Ce n’est pas le projet de loi « Macron », peu lisible et insuffisamment audacieux, qui posera le cadre macroéconomique de nature à privilégier au contraire simplicité et confiance. Il ne nous donnera pas le contrat de travail unique que notre collègue Didier Mandelli a évoqué, cette simplification du droit du travail tant attendue. Il ne nous offrira pas davantage la clarification et la stabilité de l’environnement économique que réclament les entreprises.

Monsieur le ministre, tout l’enjeu est de replacer l’entreprise au centre de notre société. C’est l’entreprise qui peut instaurer cette dynamique créatrice de richesse et d’emplois. Je vous propose donc, comme deuxième levier, la connaissance et le respect de l’entreprise dans l’ensemble de la société.

Permettez-moi d’évoquer, brièvement, monsieur le ministre, un troisième levier d’action : l’humain.

Ne sommes-nous pas arrivés au bout des politiques du chômage administré qui classent nos concitoyens en catégories ? Aux aspirations à retrouver un emploi, donc une utilité sociale, donc un rôle, sans parler des contacts humains au sein d’une collectivité de travail, on répond par des critères d’âges, de compétences formelles, de durée de périodes de chômage…

Ce faisant, on crée, monsieur le ministre, de la désespérance chez tous ceux qui sont dans la catégorie « chômeurs de longue durée », ou dans la catégorie des personnes cheminant de CDD en CDD avec des périodes d’interruption, ou encore dans la catégorie des jeunes avec peu de qualification ou dont l’adresse, ou le nom, sont liés à un quartier fragile.

« Il faut changer le logiciel de la lutte contre le chômage », comme l’a titré ce matin un grand quotidien, retrouver dans chaque chômeur une personne qui a des aspirations, un potentiel, des ressources, et que l’entreprise, ou peut-être l’acteur public, qui l’emploie et la dynamique collective du travail en équipe permettront de valoriser.

En conclusion, monsieur le ministre, je poserai deux questions précises qui résumeront mon intervention : quelles actions concrètes entendez-vous mener pour développer l’apprentissage ? Quels signaux clairs et forts adresserez-vous à ceux qui sont les créateurs des nouveaux emplois, les entreprises ?

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