Intervention de Catherine Troendle

Réunion du 29 janvier 2015 à 9h00
Durée du mandat du président de la république — Suite de la discussion et rejet d'une proposition de loi constitutionnelle

Photo de Catherine TroendleCatherine Troendle :

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, comme l’a fait la commission des lois au cours de l’examen de la présente proposition de loi, je souhaite remercier ses auteurs, M. Jacques Mézard et plusieurs membres du groupe du RDSE, de permettre au Sénat d’ouvrir le débat sur la présidentialisation et la personnalisation du pouvoir politique sous la Ve République.

Ce texte prévoit en effet que le Président de la République est élu, comme c’était le cas par le passé, pour sept ans au suffrage universel direct et que nul ne peut exercer deux mandats consécutifs.

D’un rôle de représentation et d’influence sous la IVe République, la fonction présidentielle a vu ses pouvoirs considérablement renforcés, conformément à la pensée constitutionnelle du général de Gaulle, énoncée dès 1946 dans le discours de Bayeux.

En effet, la Constitution de 1958, révisée en 1962, marque une rupture dans l’histoire des institutions françaises. « Chef de l’État », le Président de la République retrouve le droit de grâce ; il est « garant de l’indépendance nationale ».

Sans revenir sur chacune des grandes dates qui ont pu marquer l’évolution de la fonction présidentielle depuis 1958, je tiens à rappeler que le passage au quinquennat, adopté en 2000, a été envisagé dans la poursuite de l’objectif engagé par la Constitution de 1958, à savoir le renforcement du rôle du Président, en s’inscrivant dans un contexte politique et médiatique accéléré : le chef de l’État devient chef de la majorité parlementaire, en effaçant en grande partie la fonction de Premier ministre, sauf en période de cohabitation.

C’est pourquoi le rapporteur, M. Hugues Portelli, en a conclu que, compte tenu du système politique français, cette proposition de loi, si elle était adoptée, aurait pour effet d’affaiblir la fonction présidentielle en la déconnectant du rythme désormais accéléré du temps politique.

L’adoption de ce texte créerait les effets négatifs suivants : réapparition de la cohabitation et suppression de toute responsabilité politique en fin de mandat présidentiel.

Précisons tout de même que ce dernier point, à savoir le choix de recourir à un mandat non renouvelable, n’a jamais été justifié dans l’exposé des motifs de la présente proposition de loi constitutionnelle.

Le groupe UMP est favorable au maintien du quinquennat dans son contour actuel, et ce pour plusieurs raisons.

Tout d’abord, à l’occasion de l’examen du texte devenu loi constitutionnelle du 2 octobre 2000, plusieurs orateurs ont démontré que le passage au quinquennat devait permettre de rééquilibrer les relations entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif.

À cette occasion, le sénateur Jacques Larché, alors rapporteur de la commission des lois du Sénat, avait précisé que les institutions de la Ve République n’avaient pas été conçues pour un Président de la République élu au suffrage universel direct, tant et si bien que le passage à ce mode de suffrage, sans modification de ses pouvoirs et responsabilités constitutionnelles, avait créé une très forte asymétrie entre le Président de la République et le Parlement, mais également entre le Président et le Premier ministre. Il précisait ainsi : « Les liens entre le Parlement et le Président sont asymétriques : le Président peut dissoudre, mais la motion de censure s’exerce à l’égard du Gouvernement ; le Président ne peut venir s’exprimer en personne devant les assemblées et celles-ci ne peuvent le mettre en cause que devant la Haute Cour de justice. » Il ajoutait : « En dehors de l’élection, le Président n’est donc soumis à un contrôle que de sa propre initiative. »

Le passage au quinquennat visait donc à rationaliser les relations entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif.

Ensuite, il est à noter qu’un septennat conduit à un très fort risque de cohabitation, notamment dans les deux dernières années, compte tenu du décalage de deux ans entre la durée du mandat présidentiel et celle du mandat législatif. Un rééquilibrage s’imposait.

C’est dans ce contexte que la garde des sceaux de l’époque, Mme Élisabeth Guigou, a affirmé : « La cohabitation, si elle reparaît, ne le fera que de manière brève et exceptionnelle. Sa disparition, j’y insiste, n’est pas l’objet de la réforme. Sa raréfaction en sera un effet secondaire mais bienvenu ».

Le quinquennat est selon moi une adaptation nécessaire à l’accélération de l’histoire que nous vivons depuis quelques décennies, avec la multiplication des médias, l’avènement de nouveaux moyens de communication, la mondialisation, et j’en passe. Nos institutions, plus que jamais, doivent être en cohérence avec la société, ses progrès et ses attentes.

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