Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, sur les travées de cette assemblée, nous avons sans doute tous envie d’aller dans ces paradis…
Huit années se sont écoulées depuis que, par la loi organique du 21 février 2007, Saint-Barthélemy a acquis un statut de collectivité d’outre-mer au sens de l’article 74 de la Constitution.
Cette évolution statutaire avait été préparée en douceur, depuis de nombreuses années, puisque la commune de Saint-Barthélemy exerçait auparavant, par le biais d’accords signés avec le conseil général et le conseil régional de la Guadeloupe, des compétences pérennisées par la suite. Le temps qui s’est écoulé a permis à cette toute jeune entité de se familiariser avec sa nouvelle organisation administrative et les prérogatives qui l’accompagnent.
Certaines difficultés se sont donc fait jour dans la gestion locale de cette île de Saint-Barthélemy. Le texte qui nous est aujourd’hui proposé par notre collègue Michel Magras a été longuement mûri et avait été esquissé lors de la visite du ministre des outre-mer en juin 2013 à Saint-Martin.
Un premier sujet traité par cette proposition de loi organique est celui de la préservation de l’environnement. Depuis les années 1960, le tourisme mondial a joué un rôle majeur dans l’intégration des petites îles tropicales au système-monde. Alors que l’île de Saint-Barthélemy vit essentiellement d’un tourisme haut de gamme en raison de ses paysages paradisiaques – dont nous rêvons tous – et de sa biodiversité, il est important de continuer sur la voie déjà tracée d’un développement touristique maîtrisé et respectueux. N’oublions pas que c’est précisément le choix d’un tourisme intégré mais très rémunérateur, à l’échelle de cette petite île escarpée, qui a permis d’éviter les dérives que l’on observe trop souvent dans d’autres espaces micro-insulaires.
Dans le droit fil de cette logique de développement, le texte prévoit de faciliter l’exercice du droit de préemption par la collectivité, ainsi qu’une régulation du parc automobile, ce qui constitue un véritable enjeu économique, social et environnemental pour un espace îlotier de vingt-quatre kilomètres carrés.
L’élargissement du pouvoir de sanction administrative pour l’ensemble des compétences exercées par la collectivité, à l’article 3, viendra au soutien de ce développement régulé.
Outre ce volet environnemental, le texte s’intéresse également au fonctionnement institutionnel de l’assemblée territoriale et lui apporte diverses améliorations qui me paraissent pertinentes : la possibilité pour le président du conseil territorial d’ester en justice, la consolidation de la pratique de transmission des projets de délibération du conseil exécutif, ou la précision des règles de convocation du conseil territorial en cas d’urgence... Autant de mesures de bon sens, affûtées par la pratique empirique des huit années écoulées.
Cela nous amène toutefois aux réserves que nous souhaitons exprimer. En dépit de notre adhésion bien connue à l’expression des libertés locales, nous mettons en garde les collectivités qui auraient la volonté d’exercer des compétences régaliennes pourtant considérées comme interdites de transfert pour l’avenir.
Je pense notamment à celles qui sont citées au quatrième alinéa de l’article 73 de la Constitution : la nationalité, les droits civiques, les garanties des libertés publiques, l’état et la capacité des personnes, l’organisation de la justice, le droit pénal, la politique étrangère, la défense, la sécurité et l’ordre publics, la monnaie...
La République française est un État décentralisé, mais unitaire. Le « régime de l’Atlantique » ou le régime du « tout est applicable sauf... », en vigueur à Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon, préserve, me semble-t-il, le principe de libre administration. Mais si celui-ci a une valeur constitutionnelle, il ne saurait aboutir à ce que l’application d’une loi organisant l’exercice d’une liberté publique dépende de décisions des collectivités territoriales.
Pour toutes ces raisons, dans cette logique qui est la nôtre, nous, les membres du groupe RDSE, approuvons l’équilibre auquel est parvenue la commission et nous voterons à l’unanimité ce texte.