Séance en hémicycle du 29 janvier 2015 à 15h00

Résumé de la séance

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Sommaire

La séance

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La séance, suspendue à douze heures vingt, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Gérard Larcher.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La séance est reprise.

Mes chers collègues, à titre exceptionnel, avant d’aborder les questions d’actualité au Gouvernement, et alors que notre séance est retransmise par France 3 et Public Sénat, je vais donner la parole à certains d’entre vous, qui souhaitent formuler un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. Bruno Retailleau, pour un rappel au règlement.

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

Mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, en déclarant ce matin qu’il était favorable à la suppression de notre assemblée, « en tant que Sénat tel qu’on le connaît aujourd'hui », le président de l’Assemblée nationale, Claude Bartolone, a commis une faute.

Ses propos sont d’une extrême gravité.

Tout d’abord, ils laissent entendre que le travail du Sénat ne vaut rien. Faut-il rappeler au président de l’Assemblée nationale que quelque 73 % des amendements élaborés et votés dans cet hémicycle sont repris par les députés ? Faut-il lui rappeler que nous remettons sur l’ouvrage nombre des textes en provenance de l’Assemblée nationale, afin de les rendre plus précis sur le plan juridique ?

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

Faut-il lui rappeler que de nombreux élus de droite et de gauche ont souligné la qualité du travail réalisé par le Sénat sur le dernier texte de la réforme territoriale ? Visiblement, M. Bartolone a beaucoup de mal à supporter que nos travaux soient de qualité !

Toutefois, ses propos sont également graves dans la mesure où il se contredit lui-même. En avril dernier, à l’occasion d’un colloque sur le bicamérisme, et alors que le Sénat était de gauche, le président de l’Assemblée nationale s’était déclaré tout à fait satisfait de la situation, notre Haute Assemblée ayant connu l’alternance.

Si je comprends bien son raisonnement, dès lors qu’il est de gauche, le Sénat n’est plus une anomalie démocratique. Mais qu’il revienne à droite, et il faut le supprimer ! Décidément, M. Bartolone a une conception toute personnelle de la démocratie.

Marques d’approbation sur les travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

Enfin, de tels propos sont graves, car, en attaquant le Sénat dans son existence même, et cela de façon tout à fait spectaculaire, violente et frontale, M. Bartolone rompt l’unité nationale, pourtant souhaitée par le Président de la République.

Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP, de l'UDI-UC et du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

Le Sénat ne sera jamais docile, vis-à-vis d’aucune majorité, car c’est dans ses gènes ! Enraciné dans nos territoires, il demeurera exigeant dans ses raisonnements intellectuels et dans son activité législative.

Tel est le Sénat que nous aimons. Tel est le Sénat que nous voulons. Tel est le Sénat qu’il faut à la République française !

Bravo ! et applaudissements prolongés sur les mêmes travées.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Jacques Mézard, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, comme tant d’autres ici, j’ai été particulièrement choqué par les propos de Claude Bartolone.

Toutes les idées, toutes les expressions sont recevables en démocratie, mais, dans le cas présent, c’est le président de l’Assemblée nationale qui s’est exprimé. Une telle intervention ne peut être neutre, et ce d’autant plus qu’il ne s’agit pas d’une première. C’est même répétitif ! Depuis des mois et des mois, je ne cesse de dénoncer ici une volonté présente au sein de l’exécutif – peut-être n’est-elle pas l’expression d’une majorité, mais elle existe bel et bien – de supprimer la Haute Assemblée.

Soyons clairs, car il est des moments de vérité. Si tel est bien le cas, mesdames, messieurs les ministres, dites-le, et nous apprécierons ! D’autres ont essayé de supprimer le Sénat, à d’autres époques…

Marques d’approbation sur les travées du RDSE, de l’UDI-UC et de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Je m’exprime aujourd'hui en qualité de président d’un groupe qui regroupe certes un petit nombre de sénateurs, mais dont la vie se confond avec celle de la Haute Assemblée. Il l’a longtemps présidée et il a su résister dans les périodes où ce fut nécessaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Le Sénat, c’est l’expression de la liberté, une liberté à laquelle nous sommes tous attachés et – je le précise à l’intention de mes collègues socialistes – une liberté que nous avons souvent l’occasion d’exprimer par-delà nos sensibilités diverses. Nous l’avons fait, ensemble, sous la présidence de Nicolas Sarkozy, ou encore à l’occasion de l’examen de certains textes financiers, comme le budget de l’État, que j’ai voté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

M. Jacques Mézard. Je ne sais pas, cher collègue, car nous risquons de nous opposer sur un élément fondamental. Pour notre part, nous sommes profondément attachés au bicamérisme !

Vifs applaudissements sur les travées du RDSE, de l'UDI-UC et de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Il est dramatique que, quelques heures après la diffusion d’une émission qui n’honore pas le service public, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

… le président de l’Assemblée nationale s’exprime de la sorte, alors même que la période est au rassemblement consensuel autour des valeurs fondamentales de la République. Et je ne puis imaginer qu’il s’agisse d’un simple écart de langage devant des journalistes, tant M. Bartolone a l’habitude de côtoyer ces derniers !

Ces propos traduisent une volonté, et, comme d’autres l’ont fait dans cette enceinte, en des périodes encore plus difficiles, nous allons combattre cette volonté avec force et conviction. On ne peut constamment remettre en cause les institutions ; ce n’est pas bien !

En outre, mes chers collègues, il nous faut être cohérents dans nos expressions. Je l’avais déjà signalé à l’occasion de la réforme territoriale, mais je le rappelle ici. Vous avez été nombreux à faire campagne au mois de septembre dernier ; je n’en connais pas beaucoup qui ont parcouru nos territoires en appelant à la suppression du Sénat ! §

Lorsque Jean-Pierre Bel a été élu à la présidence du Sénat – j’avais voté pour lui –, vous n’avez pas hésité, chers collègues du groupe socialiste, à magnifier l’image de l’institution.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Permettez-moi, aujourd'hui, de vous lire un extrait du discours d’investiture du président Bel : « Nous avons tous entendu l’appel des grands électeurs pour confirmer le Sénat dans son rôle de représentant et de défenseur des libertés publiques, des libertés individuelles, des libertés locales ». Nous souscrivons totalement à ces propos !

Quant au président Claude Bartolone, il déclarait ici même, en avril 2014 : « Le bicamérisme est l’alliance de la puissance quasi sacrée du suffrage universel direct et de la richesse de nos territoires ; il est la vie et l’histoire des individus ancrées dans la diversité de notre géographie. Ainsi, le bicamérisme est la traduction institutionnelle de ce qui caractérise notre pays : l’unité dans la diversité. »

Dans la lignée de ces magnifiques propos, mes chers collègues, exprimons un message fort : certes, nous avons besoin de nous moderniser, mais il en va de même de toutes les assemblées. Certains feraient donc mieux de balayer devant leur porte avant de donner des leçons aux autres !

Vifs applaudissements sur les travées du RDSE, de l'UDI-UC et de l'UMP. – MM. Thierry Foucaud et Dominique Watrin applaudissent également.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Vincent Capo-Canellas, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Capo-Canellas

Après Bruno Retailleau et Jacques Mézard, je tiens à exprimer l’étonnement et la stupéfaction des membres du groupe UDI-UC du Sénat face aux propos tenus, ce matin, par le président de l’Assemblée nationale.

Je souhaite réaffirmer notre conception d’un Sénat défenseur des libertés – comme il l’a toujours été dans la tradition démocratique française –, travaillant, avec passion, au service des territoires et capable d’apporter une valeur ajoutée dans l’écriture de la loi.

Nous croyons au bicamérisme. Nous croyons à une Haute Assemblée qui sait dépasser le temps court de l’actualité politique pour éclairer l’avenir, qui sait aussi bâtir des consensus. C’est notre rôle ! D'ailleurs, notre institution a toujours démontré sa capacité à dépasser les clivages, pour mener dans un esprit de réforme des projets utiles à l’avenir du pays.

Nous sommes donc étonnés et peinons à comprendre que le président d’une assemblée se permette ainsi de critiquer l’autre assemblée, faisant fi de toute tradition de dialogue républicain et parlementaire.

Nous souhaitons également pouvoir continuer d’appliquer au Sénat cet esprit de réforme qu’il a toujours porté. Dans ce cadre, monsieur le président, nous avons une entière confiance dans le travail que vous avez engagé lors de votre premier mandat et que vous poursuivez en ce moment même, au travers de différents groupes de travail, en vue de la modernisation de notre institution.

Je le dis en toute confiance : au moment où, chacun le sait, une émission de télévision a dénigré notre maison, d’une façon tout à fait caricaturale, volontairement tendancieuse…

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Capo-Canellas

… et qui ne reposait sur aucune comparaison internationale, nous avons un devoir de modernisation. Cette dernière est engagée, et nous la mènerons en concertation avec nos agents, dont je veux saluer le professionnalisme.

Les membres du groupe UDI-UC et tous les sénateurs se rassembleront à vos côtés, monsieur le président du Sénat, pour défendre notre institution, le bicamérisme et la démocratie !

Vifs applaudissements sur les travées de l'UDI-UC, de l'UMP et du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme Éliane Assassi, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Les propos tenus ce matin par Claude Bartolone m’ont paru pour le moins maladroits, et même regrettables.

Il me semble que l’on ne peut pas jeter ainsi en pâture un sujet aussi important que le devenir de nos institutions, donc de notre démocratie, sur un plateau de télévision.

Je crois également savoir que Claude Bartolone a mis en place un groupe de réflexion sur la modernisation de nos institutions. Il faut donc laisser le temps au temps. Ce groupe de réflexion doit pouvoir travailler avant que des annonces comme celle de ce matin soient faites.

Tout aussi regrettable est le fait que de tels propos peuvent, vous le savez, mes chers collègues, contribuer à entretenir la défiance populaire à l’égard de la chose publique et du personnel politique, alimentant de possibles dérives populistes.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC, du RDSE, de l'UDI-UC et de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Je me dois de rappeler ce que j’ai déclaré au moment du colloque sur le bicamérisme : les élus de mon groupe sont favorables à l’existence de deux chambres, mais dans le cadre d’une VIe République rénovée.

Nous demandons depuis longtemps que la question soit discutée. Il est temps que ce débat ait lieu, mais il doit se tenir dans un climat de grande responsabilité, dans la plus parfaite sérénité et avec autant de transparence que possible. Nous le devons, me semble-t-il, à l’ensemble de nos concitoyennes et de nos concitoyens !

Applaudissements sur les travées du groupe CRC, du RDSE, de l'UDI-UC et de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, en ce lieu où Victor Schœlcher a siégé, après avoir aboli l’esclavage, en ce lieu où Victor Hugo s’est engagé en faveur du progrès, des libertés et de la République, nous souhaitons nous exprimer pour défendre le Sénat.

Il ne s’agit pas pour nous de protéger, dans une démarche corporatiste, une institution ; notre choix est motivé par notre profond attachement au travail que, tous, nous réalisons dans cet hémicycle.

Le grand tort de l’émission diffusée hier soir est de ne pas avoir parlé du travail législatif et du travail de contrôle que nous réalisons ici

Vifs applaudissements.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Mes chers collègues, pourquoi sommes-nous profondément favorables au bicamérisme ? Parce que s’il n’y a qu’une seule assemblée, il n’y a plus de navette, il n’y a plus de débat, il n’y a plus ce long travail d’élaboration de la loi. Or toute ligne, tout mot dans la loi s’applique au peuple français tout entier. Et notre dignité, c’est de passer le temps qu’il faut, jour et nuit, chacun avec nos convictions, pour que la loi soit la meilleure possible.

Si nous défendons le Sénat, c’est non pas pour protéger une institution, mais pour défendre la loi, l’esprit de la loi, l’élaboration de la loi par les représentants du peuple, indissociables de la République.

Applaudissements.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Jean-Vincent Placé, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Vincent Placé

Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, trois semaines à peine après les événements dramatiques qui ont frappé notre pays, quinze jours à peine après la mobilisation exemplaire de nos concitoyens pour rappeler l’importance de l’unité et du rassemblement, dans l’attachement aux valeurs de la République, le moins que l’on puisse dire, c’est que tout ce qui peut faire apparaître des failles, des interstices, des débuts de division dans cette unité est inapproprié.

En ce sens, l’intervention du président de l’Assemblée nationale était tout à la fois inadaptée et inopportune, car elle s’inscrivait dans un temps politique qui n’était pas convenable.

Cela dit, nous ne pouvons être seulement sur la défensive dès lors qu’il est question du bicamérisme. Nous, parlementaires écologistes du Sénat et de l’Assemblée nationale, avons toujours été pour le bicamérisme, un système qui permet de modérer l’action d’une chambre unique et d’éviter de réagir dans l’immédiateté. Le maintien du bicamérisme est aujourd’hui d’autant plus important que la quasi-concomitance de l’élection présidentielle et des élections législatives offre une majorité absolue au parti du président, qui n’a parfois obtenu que 27 % ou 28 % des voix au premier tour.

M. André Gattolin applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Vincent Placé

La navette est essentielle en ce qu’elle nous permet de prendre le temps d’écrire les lois. Sur des sujets aussi graves que le terrorisme, la sécurité du pays, la nécessité de renforcer les valeurs de la République – à l’école ou dans le cadre de notre politique de la ville –, on ne peut se contenter de réagir à un événement, aussi dramatique soit-il, et de rédiger une loi à l’Assemblée nationale en seulement deux jours. C’est cela que nous devons dire et répéter. Il est évident que le bicamérisme est profondément ancré dans les institutions de notre pays !

Je tiens aussi à dire, avec la franchise et la sincérité que nous nous devons, que l’émission d’hier était catastrophique pour l’image du Sénat. Et notre seule réponse, chers collègues de l’UMP, ne peut être de dénoncer, comme je l’entends, ces affreux journalistes gauchistes de la chaîne publique…

Nous devons nous renforcer ; nous ne devons pas être sur la défensive. Répondons au président Bartolone que nous sommes utiles, que nous travaillons, que quelque 73 % des amendements adoptés dans la loi – cela a été rappelé – sont élaborés au Sénat.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Nous n’avons pas de comptes à lui rendre !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Vincent Placé

Nous devons aussi être exemplaires. Nous devons être transparents, tant sur les comptes de la maison Sénat et des groupes politiques que sur l’indemnité représentative de frais de mandat, l’IRFM, et sur tout ce qui constitue la vie des sénateurs. Nous ne sommes plus dans la situation de 1958.

Mes chers collègues, oui à l’unité et au rassemblement, oui au Sénat, oui au bicamérisme, oui à la rénovation et à la modernité ! Faisons avancer la rénovation du Sénat engagée par notre président Gérard Larcher, dont je tiens d'ailleurs à saluer l’action. Telle est la bonne réponse à apporter au président Bartolone !

Applaudissements sur les travées du groupe écologiste, de l'UDI-UC et de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Mes chers collègues, je vous donne acte de l’ensemble de vos rappels au règlement.

Je veux simplement vous dire, que vous ayez ou non voté pour moi, que j’ai été élu président du Sénat pour assumer la responsabilité de cette institution.

Le bicamérisme, c’est plus de démocratie, plus de liberté, plus de représentation dans la diversité des territoires. Cette responsabilité, je l’assumerai totalement, pleinement, sans faiblesse – vous pouvez me faire confiance.

On me dit parfois rond, mais je suis aussi un homme de décision et d’engagement. Je n’ai pas besoin de nos clivages, j’ai besoin que nous soyons rassemblés autour d’un projet : celui de la République, même si l’on pense à la VIe de ce nom. Pour ma part, je crois fondamentalement à la Ve République, qui a d'ailleurs démontré ces dernières semaines qu’elle était bien utile au Président de la République quand il s'agit de traverser des moments difficiles.

Nos deux groupes de travail fonctionnent. Il nous faudra faire preuve de sens des responsabilités et d’une forme de courage pour adapter le mode de fonctionnement de nos assemblées, et pas simplement du Sénat. Mes chers collègues, vous ne serez pas déçus, me semble-t-il, par les propositions que nos trois rapporteurs vous feront le moment venu. Et je le répète, il faudra du courage.

Le bicamérisme, ce sont deux assemblées qui fonctionnent, qui dialoguent ; les commissions mixtes paritaires ne doivent pas être caricaturées.

Je crois le Sénat fondamentalement utile à la République. En ces temps de crise et de désarroi, on ne peut jouer ainsi avec les institutions de la République. L’unité nationale et le sursaut sont nécessaires, et ils impliquent aussi la diversité.

J’ai informé le Président de la République que je poursuivrai la mission sur l’engagement républicain et le sentiment d’appartenance nationale qu’il avait souhaité que je conduise. Je lui remettrai directement mes réflexions à la fin du mois de mars prochain.

Je pense qu’il est de ma responsabilité de contribuer, avec vous, à la réflexion collective. Nous devons sentir que nous appartenons à la même République – quel que soit son numéro –, pour, ensemble, défendre les valeurs fondamentales de notre pays, la modernité puisant dans les traditions la force du devenir.

Mmes et MM. les sénateurs de l’UMP et de l’UDI-UC se lèvent et applaudissent longuement. – Mmes et MM. les sénateurs du RDSE, du groupe écologiste, du groupe socialiste et du groupe CRC applaudissent également.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

L’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.

Je rappelle que la séance est retransmise en direct sur France 3 et Public Sénat.

Je rappelle également que l'auteur de la question dispose de deux minutes trente, de même que la ou le ministre pour sa réponse.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. François Aubey, pour le groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de François Aubey

Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de la défense, chargé des anciens combattants et de la mémoire.

Le 27 janvier 1945 est une date à jamais gravée dans la mémoire de l’Humanité.

Il y a soixante-dix ans, les troupes soviétiques découvraient le camp d’extermination d’Auschwitz-Birkenau, à l’ouest de Cracovie, en Pologne, où plus d’un million d’hommes, de femmes et d’enfants avaient été tués. Elles libéraient plus de 7 000 détenus survivants et découvraient surtout l’horreur de ce que l’on allait appeler la Shoah.

Ce n’est que plus tard que l’opinion publique mondiale devait prendre conscience de l’ampleur de « la solution finale » organisée dans les camps du IIIe Reich, à savoir l’extermination méthodique, programmée, scientifique des Juifs.

La Shoah est le plus grand crime jamais commis. Ce crime, perpétré en terre d’Europe, fut unique par son ampleur : six millions de victimes, parmi lesquelles un million et demi d’enfants, soit les trois quarts des Juifs d’Europe, plus du tiers de la population juive dans le monde.

La République française, une et indivisible, n’oubliera jamais, comme le Président de la République en a pris l’engagement, mardi dernier, au Mémorial de la Shoah.

Ce devoir de mémoire est un combat qui ne saurait être cantonné aux seuls jours de commémoration. La transmission aux nouvelles générations de ce que fut la Shoah est aujourd’hui de notre responsabilité. Lutter contre l’oubli et l’ignorance, faire en sorte que les Français de confession juive se sentent pleinement chez eux dans notre pays doit demeurer une priorité.

Monsieur le secrétaire d'État, vous le savez, les inquiétudes sont vives. Que ce soit à Toulouse en mars 2012, en décembre dernier à Créteil ou il y a encore trois semaines, lors de l’attaque du supermarché casher de la porte de Vincennes, et plus globalement au quotidien, dans nos rues, dans les cours de nos écoles et sur les réseaux sociaux, personne ne peut nier aujourd’hui que le fléau de l’antisémitisme est bien là, utilisant toujours les mêmes ressorts, les mêmes thèses complotistes ou négationnistes, la même haine de l’autre.

Monsieur le secrétaire d’État, il y va de notre responsabilité collective ; nous devons être intraitables non seulement sur la question de la mémoire, de la sécurité des juifs de France, mais aussi en matière de sanctions, lesquelles doivent être fortes et adaptées. À cet égard, pouvez-vous nous confirmer que les sanctions à l’encontre des actes racistes et antisémites vont être renforcées, comme l’a annoncé le chef de l’État ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des anciens combattants et de la mémoire.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Todeschini

M. Jean-Marc Todeschini, secrétaire d'État auprès du ministre de la défense, chargé des anciens combattants et de la mémoire. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur Aubey, je voudrais tout d’abord vous dire que je suis fier d’intervenir devant la Haute Assemblée. La présence nombreuse des membres du Gouvernement montre l’attachement et le respect que nous portons à votre institution.

Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du RDSE, de l'UDI-UC et de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Todeschini

Comme vous l’avez rappelé, monsieur le sénateur, le Président de la République a annoncé la mise en place d’un plan global de lutte contre le racisme et l’antisémitisme.

Ce plan appelle notamment le renforcement des sanctions à l’encontre des porteurs de haine. Le Premier ministre est intervenu en ce sens à plusieurs reprises devant les deux chambres du Parlement. L’ensemble du Gouvernement est mobilisé sur cette question, et tout particulièrement le ministre de l’intérieur, la ministre de la justice, le ministre de la défense et la ministre de l’éducation nationale.

Aujourd’hui, en France, personne ne doit avoir peur parce qu’il est juif, personne ne doit avoir peur parce qu’il est musulman, personne ne doit avoir peur parce qu’il est catholique, personne ne doit avoir peur parce qu’il croit ou parce qu’il ne croit pas.

Debut de section - Permalien
Jean-Marc Todeschini, secrétaire d'État

La Laïcité est le ciment de la nation, le fondement de notre République. L’État se doit de la garantir, et tout d’abord en mobilisant les forces nécessaires pour assurer la sécurité de tous. Telle fut notre première réponse, immédiate, aux lâches attentats du mois de janvier.

Nous devons maintenant améliorer la visibilité et l’efficacité des sanctions. Le Président de la République l’a souligné mardi dernier, au Mémorial de la Shoah, à l’occasion de la commémoration du soixante-dixième anniversaire de la libération des camps d’Auschwitz. La présence de nombreux déportés a conféré une émotion intense à cette cérémonie.

Toutefois, après l’émotion naît l’incontournable besoin de responsabilité. Après le silence, naît le besoin de parole ; une parole qui doit raconter, témoigner, transmettre.

Je vous remercie d’avoir rappelé la nécessité d’un renforcement des sanctions. L’ensemble du Gouvernement est pleinement engagé sur cette question.

Vous également évoqué le nécessaire devoir de mémoire. À cet égard, je me permets de rappeler quelques-unes des actions engagées par mon ministère : le Président de la République a annoncé, toujours mardi dernier, l’engagement d’une réflexion sur le concours national de la résistance et de la déportation. Cette épreuve doit associer plus de jeunes, venant de tous les horizons. Il faut permettre au grand public d’acquérir une meilleure connaissance de cette période : seuls le savoir, la connaissance et la transmission inviteront à la clairvoyance sur les sujets que vous avez évoqués.

Tous ceux qui mettent en cause les mémoires collectives, toutes les mémoires, doivent savoir qu’ils trouveront sur leur chemin la République et ses valeurs, dont nous défendons les trois piliers : liberté, égalité, fraternité !

Vifs applaudissements.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme Élisabeth Doineau, pour le groupe UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Elisabeth Doineau

Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget.

Le 15 janvier dernier, la Banque nationale suisse a décidé d’abandonner la parité fixe qui liait le franc suisse à l’euro. Après s’être apprécié de plus de 20 %, le franc suisse cote désormais à parité avec notre monnaie.

Une différence de 20 %, monsieur le secrétaire d’État, c’est colossal ! Malheureusement, elle a des conséquences désastreuses pour de nombreuses collectivités. Une fois de plus, la douloureuse question des créances toxiques de nos territoires est posée.

En effet, pendant les années deux mille, de nombreuses collectivités ont pensé profiter de l’euphorie liée à la bulle financière. Sous l’influence de banquiers peu scrupuleux, plus de 1 500 collectivités et établissements publics se sont endettés en souscrivant des emprunts dont les taux d’intérêt, pourtant variables, étaient fréquemment libellés en franc suisse, une monnaie alors jugée très stable.

La suite, vous ne la connaissez que trop bien : la crise financière a conduit à une envolée des taux d’intérêt, devenus purement et simplement usuriers.

De nombreuses collectivités, des communes, des départements, mais aussi des établissements publics et des hôpitaux font face à une situation financière alarmante, qui remet parfois en cause jusqu’à leur capacité à assurer la continuité du service public.

Le stock d’emprunts contractés reste immense et son volume explose sous l’effet de l’appréciation du franc suisse. Le fonds de soutien que vous avez créé est sous-dimensionné ; il ne permet pas de faire face aux échéances de remboursements.

Or vous avez gelé les voies d’action contentieuses contre ces contrats dans la loi de sécurisation des contrats de prêts structurés. Nous voilà donc face à une créance dont le coût réel peut exploser une nouvelle fois, par la simple décision prise par une autorité étrangère.

Cette situation n’est pas acceptable. Nos concitoyens sont prisonniers de créances qui ont parfois été contractées il y a plus de dix ans, parfois par des équipes renouvelées à deux reprises entre-temps.

Au-delà du risque financier, un véritable problème démocratique est désormais posé par ces emprunts. Les élus locaux sont impuissants à y répondre. Aussi, monsieur le secrétaire d’État, je vous appelle à l’aide ; je souhaiterais connaître vos réponses destinées à pallier les effets du désordre monétaire suisse sur nos finances locales.

Applaudissements sur les travées de l’UDI-UC et de l’UMP. – M. Jean-Vincent Placé applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le secrétaire d’État chargé du budget.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert

Madame la sénatrice, le Gouvernement a constaté comme vous que la brutale appréciation du franc suisse, que personne n’avait anticipée, provoque l’inquiétude, pour ne pas dire plus, au sein des collectivités territoriales.

Vous l’avez rappelé, des collectivités territoriales ont opté, à un certain moment, pour un type de prêts structurés à risques. D’autres ont parfois été victimes de la politique commerciale agressive – c’est le moins que l’on puisse dire – de Dexia.

Le précédent gouvernement en avait tiré les conséquences, en logeant les emprunts toxiques dans une structure dédiée, la Société de financement local, ou SFIL, dotée, il faut le savoir, de la garantie de l’État, que le Parlement a accepté de donner il y a quelques années. Une défaillance de la SFIL serait donc immanquablement prise en charge par le budget national, c’est-à-dire par l’ensemble des contribuables français.

La situation est complexe, et les responsabilités, à l’évidence, sont partagées. Vous l’avez rappelé, le Gouvernement a mis en place, avec l’appui des deux assemblées, un fonds de soutien aux collectivités, dont le barème devra, naturellement, être revu pour prendre en compte la nouvelle donne.

C’est parce que cette nouvelle donne, dont vous faites mention, madame la sénatrice, doit être appréciée dans la durée – les mouvements d’une monnaie peuvent connaître des soubresauts avant de se stabiliser –, que le Gouvernement, notamment Michel Sapin, les services de Bercy et les représentants de la SFIL ont commencé à travailler. Nous sommes actuellement en train de quantifier, si je puis dire, cette nouvelle donne, dont le coût ne sera pas nul. Il pourrait en effet atteindre plusieurs centaines de millions d’euros, sans dépasser – du moins, je l’espère – un milliard d’euros.

En fonction du résultat de ces travaux, nous recevrons, dans les jours qui viennent, les représentants des collectivités territoriales, de l’association créée pour faire face aux emprunts toxiques, de l’Association des maires de France, de l’Assemblée des départements de France et de l’Association des régions de France. Nous recevrons également, avec Marisol Touraine, des représentants du secteur hospitalier.

Nous allons examiner comment les règles pourront être mises en adéquation avec la nouvelle donne, laquelle, je le répète, n’a pas échappé au Gouvernement, surtout au moment où nombre d’élus locaux travaillent à l’examen du budget de leur collectivité.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Jacques Grosperrin, pour le groupe UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Grosperrin

Ma question s’adresse à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.

Madame la garde des sceaux, notre pays tout entier s’est retrouvé dans un élan sincère et unanime pour dénoncer la barbarie qui a frappé notre sol, pour défendre la démocratie, la liberté, la République et ses valeurs. Mais que faisons-nous maintenant ?

« L’unité nationale ne doit pas devenir un petit calcul politicien visant à étouffer l’opposition », a rappelé le président de notre groupe au Sénat, Bruno Retailleau. C’est notre devoir de parler sans concessions.

Au gré des déclarations, notamment celles du Premier ministre, nous constatons que l’examen de conscience que nous espérions tarde à venir. Le déni est toujours là, alors que l’horreur et l’urgence de la situation commandaient la rupture.

Le Premier ministre a dénoncé un apartheid social ; il a même persisté et signé. Nous savons que cette déclaration va renforcer le sentiment de victimisation d’une population convaincue de souffrir sous un joug quasiment colonial. Comment, dès lors, espérer faire retomber les tensions ?

Lorsque Manuel Valls dit à la jeunesse qu’elle doit s’habituer à vivre durablement avec la menace terroriste, que penser ? Il s'agit d’impuissance pour certains, de calcul pour d’autres…

Lorsque vous-même, madame la garde des sceaux, vous opposez d’emblée au retour de la peine d’indignité nationale, alors que le Premier ministre a justement proposé aux deux présidents des commissions des lois des assemblées de réfléchir sur le sujet et de formuler des propositions, il y a un malaise.

Le défi de la lutte antiterroriste appelle de réels changements dans le fonctionnement de la justice. Pour mes collègues et moi-même, c’est moins la loi elle-même qui pose problème que son exécution.

Nous considérons que vous avez amorcé, madame la garde des sceaux, un véritable désarmement pénal, très préjudiciable au pays. Si deux lois, inspirées pour partie par la précédente majorité après l’affaire Merah, ont renforcé récemment notre droit, la réforme pénale de 2014 est symbolique d’une moindre rigueur dans l’exécution des peines.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Grosperrin

M. Jacques Grosperrin.Exit ce qui a été appelé bien abusivement le « tout carcéral » : vidons les prisons, allégeons le régime de sanctions pénales des récidivistes et facilitons les libérations !

Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Grosperrin

Le plan quinquennal de constructions de prisons, prévu en 2011, a été purement et simplement supprimé, alors qu’il faudrait 30 000 places supplémentaires. La suppression des peines plancher, la contrainte pénale – un aménagement de peine plus qu’une peine, étendu d’ailleurs aux délits passibles de dix ans de prison –, le sursis avec mise à l’épreuve – une aubaine pour les djihadistes –

Protestations sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Grosperrin

M. Jacques Grosperrin. … sont autant de réponses gravement inadaptées en cette période très troublée.

Mêmes mouvements, sur les mêmes travées.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Grosperrin

Nous travaillons en ce moment, au sein du groupe UMP, à des propositions allant dans différentes directions, y compris les plus difficiles ; des propositions sur la nationalité, par exemple.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Grosperrin

Nous les ferons connaître le moment venu.

Pour l’heure, pouvez-vous nous dire, madame la garde des sceaux, si, de votre côté, vous souhaitez enfin faire évoluer votre politique pénale, dans ce contexte de lutte contre le terrorisme ? Et si c’est le cas, comment ferez-vous ?

Applaudissements sur les travées de l’UMP. – Protestations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Retirez vos propos, monsieur Grosperrin ! Ils sont honteux !

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira

Monsieur le sénateur, en écoutant votre question, notamment sa conclusion, je me suis rendu compte que vous n’aviez probablement pas eu le temps de prendre connaissance des dispositions contenues dans la réforme pénale, c’est-à-dire dans la loi relative à l’individualisation des peines et renforçant l’efficacité des sanctions pénales.

Ce texte de loi a été conçu de façon extrêmement rigoureuse ; il a donné lieu notamment à une conférence de consensus, qui a rassemblé des personnes de toute sensibilité politique, y compris de la vôtre, monsieur le sénateur. Nous avons en effet tenu à rassembler des expériences et des réflexions extrêmement diverses.

Cette évaluation extrêmement rigoureuse des politiques pénales précédentes nous a conduits à définir le contenu de ce texte, qui a été, je le souligne, abondamment travaillé en ces lieux.

Il est évident que l’efficacité des sanctions pénales est liée à l’individualisation de la peine. Nous avons donc introduit des dispositions visant à rendre aux magistrats leur liberté d’appréciation, afin qu’ils définissent très précisément la sanction la plus efficace.

Une autre disposition importante consiste à éviter que les personnes incarcérées ne sortent sans aucun encadrement, sans aucun suivi, sans aucune contrainte, ce qui était le cas avec la politique pénale précédente.

En effet, je pourrais facilement vous rétorquer, monsieur le sénateur, que la politique pénale précédente – nous l’avons évaluée – tendait à multiplier les récidives ; celles-ci ont été multipliées par trois entre 2001 et 2011, selon une appréciation dont nous ne sommes pas à l’origine.

Marques d’approbation sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

La surpopulation carcérale, la sortie de prison avec le système de surveillance de fin de peine, un automatisme sans aucun suivi, sans aucun contrôle et sans aucun encadrement, ont donné des résultats désastreux.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Nous avons donc voulu changer tout cela. Nous avons fait le choix d’une politique pénale responsable ; nous l’assumons.

J’en viens plus spécifiquement à la lutte contre le terrorisme. J’ai fait part à la commission d’enquête sur l’organisation et les moyens de la lutte contre les réseaux djihadistes en France et en Europe – une commission véritablement visionnaire, car elle a été installée il y a plusieurs mois –, des dispositions que nous avons adoptées dans le domaine pénitentiaire, dans le domaine de la protection judiciaire de la jeunesse, dans le domaine judiciaire et en faveur du renforcement de la section antiterroriste de Paris. Je suis d’ailleurs à la disposition du Sénat pour de plus amples informations.

La politique est là, monsieur le sénateur ; il faut seulement éviter les confusions. Or la culture de la Haute Assemblée, c’est précisément le travail en commun, ce sont les rapports rédigés par un membre de l’opposition et par un membre de la majorité, ce sont des structures mêlant des expériences diverses. La commission que je viens d’évoquer rassemble ainsi des sénateurs de sensibilité politique différente et appartenant à plusieurs commissions législatives.

Nous, monsieur le sénateur, nous avons fait le choix de la responsabilité. Nous n’avons jamais pensé vous rendre responsables des crimes de Mohamed Merah en 2012, pourtant perpétrés sous la législature précédente et sous l’empire des lois que vous aviez votées.

Marques d’approbation sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Même en pleine campagne électorale, l’actuel Président de la République, alors candidat, a été absolument exemplaire dans son attitude, afin de ne pas reporter sur les institutions et les responsables politiques des crimes commis par des individus.

Bravo ! et applaudissements

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Yvon Collin, pour le groupe du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Yvon Collin

Ma question s’adresse à M. le ministre des finances et des comptes publics.

Dimanche dernier, la victoire aux élections législatives du parti de gauche Syriza a fait ressurgir le spectre du défaut de paiement des emprunts grecs, replaçant au cœur de l’actualité les modèles de pondération des actifs bancaires mis en œuvre au cours de ces dernières années par l’Union européenne.

Quelle que soit notre appréciation sur cette nouvelle donne politique, le cas grec délivre un message et invite à une inflexion de la politique monétaire de la zone euro.

D’ailleurs, nous y sommes, puisque, quelques jours avant les élections en Grèce, la Banque centrale européenne, la BCE, a décidé d’entamer un programme d’assouplissement quantitatif. En effet, elle a résolu de racheter massivement des titres de dettes publiques et privées, à raison de 60 milliards d’euros par mois jusqu’à la fin de 2016, soit au total 1 140 milliards d’euros.

Comme vous le savez, mes chers collègues, il s’agit d’éloigner le risque déflationniste, la BCE visant une cible d’inflation à 2 % – M. le ministre le confirmera peut-être –, un taux susceptible de ramener plus de croissance au sein de la zone euro. Les dirigeants européens attendaient depuis longtemps cette décision, à tel point que, grillant la politesse à la BCE, François Hollande l’a annoncée trois jours avant qu’elle ne le fasse !

Pour autant, le quantitative easing est-il la potion magique pour relancer l’économie en Europe ? Nous connaissons sa principale vertu : augmenter la quantité de monnaie mise en circulation, autrement dit faire tourner la planche à billets, et entraîner ainsi la dépréciation de l’euro pour soutenir les exportations européennes.

Or, si l’on peut espérer un coup de pouce, d’ailleurs déjà anticipé par les marchés, on sait que son impact ne sera significatif que si les réformes structurelles se poursuivent, donc si les investisseurs sont suffisamment rassurés par les politiques économiques que nous mettons en œuvre.

C’est pourquoi, monsieur le ministre, je souhaiterais connaître la position du Gouvernement sur la décision de la BCE et la façon dont la France compte l’accompagner.

Applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur certaines travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le ministre des finances et des comptes publics.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Savin

Monsieur le sénateur, si vous avez fait allusion à la situation grecque, que j’aurai l’occasion d’aborder à l'occasion d’une prochaine question, vous m’interrogez principalement sur la politique menée par la BCE.

Je vous le dis très clairement, le Gouvernement français souhaitait depuis longtemps une évolution de la politique monétaire de la BCE ; il en faisait même la demande depuis plus de neuf mois. Cette évolution a eu lieu, elle a même été renforcée la semaine dernière, et c’est une bonne chose.

En effet, l’euro s’était tellement apprécié par rapport aux principales monnaies du monde – le dollar, bien sûr, mais on peut aussi penser à d’autres monnaies – qu’il était largement surévalué. C’était un obstacle immédiat, en particulier pour nos grandes industries exportatrices ; je songe naturellement à l’exemple de l’industrie aéronautique, mais chacun d’entre nous peut en citer un autre de même nature.

Ensuite, les taux d’intérêt ont considérablement baissé. Ayez en tête, mesdames, messieurs les sénateurs, que le taux d’intérêt à dix ans d’un bon sur la dette française est tombé hier soir à 0, 5 %. Un demi pour cent à dix ans ! C’est dire combien les investisseurs font aujourd'hui confiance à la France ! Bien entendu, cette confiance doit se mériter dans la durée.

Toutefois, il faut aussi que l’ensemble de notre économie – je pense en particulier aux entreprises – puisse profiter de ces taux bas.

C'est la raison pour laquelle je me réjouis de la troisième décision prise par la Banque centrale européenne la semaine dernière. Grâce à elle, par des mécanismes que je ne vais pas décrire ici, il y aura plus d’argent dans l’économie française et européenne. Or, plus d’argent, c’est plus de possibilités de croissance – j’insiste sur ce mot, car nous avons besoin de croissance pour apporter des réponses à la question si prégnante de l’emploi.

Néanmoins, ne nous y trompons pas, la politique monétaire ne peut pas tout. Il faut également, et vous l’avez souligné, monsieur le sénateur, faire se déplacer d’autres curseurs.

Tout d’abord, et nous avons cette discussion avec l’Union européenne, il faut évidemment diminuer nos déficits budgétaires, mais à un rythme qui soit compatible avec le soutien à la croissance.

Ensuite, nous avons engagé les réformes de structure. Certaines sont en cours de discussion au Parlement ; à cet égard, le Gouvernement s’associe à l’hommage que vous venez de rendre au bicamérisme.

M. Robert del Picchia applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Savin

Une politique monétaire positive, une politique budgétaire adaptée et de véritables réformes de structure : voilà la clef du retour à la croissance en Europe et en France !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Monsieur le ministre, je vous remercie de cet hommage au bicamérisme !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. André Gattolin, pour le groupe écologiste.

Debut de section - PermalienPhoto de André Gattolin

Ma question s'adresse à M. le ministre des finances et des comptes publics.

L’Histoire semble parfois resservir les mêmes plats. Voilà trois ans, presque jour pour jour, j’interpellais ici même le gouvernement de l’époque sur la situation en Grèce, à l’heure où la Troïka obtenait l’approbation de son deuxième plan d’aide et de rigueur.

Sans surprise, trois ans après, l’économie grecque reste percluse et le peuple se débat toujours dans d’inadmissibles souffrances.

Le contexte social, économique et politique a pourtant beaucoup évolué depuis lors, en Grèce comme au niveau européen.

Au printemps 2012, les pays de l’Union étaient tous accaparés par l’objectif de réduction de la dette et de la dépense publiques. Aujourd’hui, nous nous interrogeons enfin sur les effets d’une croissance en berne, d’un chômage toujours plus élevé et d’une quasi-déflation totalement contreproductive pour nos économies.

En 2012, pour éviter un défaut de paiement qui aurait entraîné l’effondrement de la zone euro, nous avons imposé à la Grèce les éternelles recettes du Fonds monétaire international, le FMI : baisse des salaires, des retraites et des emplois publics, déremboursements en matière de santé…

Toutefois, nous sommes-nous préoccupés des véritables problèmes structurels rencontrés par la Grèce et sur lesquels l’Europe a pudiquement fermé les yeux depuis l’adhésion de ce pays en 1981 ? Je veux bien sûr parler des incroyables privilèges dont bénéficie une petite oligarchie qui regroupe armateurs, Église orthodoxe et grands possesseurs de comptes à l’étranger. Non ! Nous avons surtout pressuré ceux qui étaient les plus faciles à pressurer. Il ne faut donc pas s’étonner du résultat sorti des urnes la semaine passée.

Pourtant, dans les jours qui précédaient la victoire devenue inéluctable de Syriza, nous avons enfin entendu certains se dire prêts à rediscuter le plan d’austérité de la Grèce en échange de mesures comme la nécessaire réforme du cadastre ou la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales…

Monsieur le ministre, à nos yeux, dans le contexte actuel, il revient aujourd’hui à notre pays de prendre l’initiative pour redonner un véritable sens politique aux propositions qui seront formulées par l’Union.

C’est pourquoi nous aimerions savoir quelles propositions concrètes la France entend formuler pour relever un défi qui est non pas seulement économique et financier, mais aussi profondément politique, car il met en jeu les valeurs démocratiques supposées fonder le projet européen !

Applaudissements sur les travées du groupe écologiste. – M. Éric Bocquet applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le ministre des finances et des comptes publics.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Savin

Monsieur le sénateur, vous m’interrogez sur la situation en Grèce à la suite du résultat des dernières élections.

Nous respectons la démocratie, en France comme en Grèce. Le peuple s’est librement et clairement exprimé. Il y a une nouvelle majorité, un nouveau gouvernement et de nouveaux responsables – dans tous les sens du terme – en Grèce. C’est avec eux que les gouvernements des États membres et l’Union européenne doivent dialoguer et rechercher des solutions aux difficultés que rencontre aujourd'hui ce pays.

Tout d'abord, le problème de la croissance se pose de manière plus accentuée en Grèce que dans le reste de l’Europe. Un pays dont le PIB a chuté de 25 % par rapport aux années 2009-2010 – je vous laisse imaginer ce que cela représente en termes de rémunérations, de versements des pensions, etc. – est un pays profondément dans la souffrance. Nous devons respecter ce que les Grecs ont exprimé.

Ensuite, les difficultés budgétaires auxquelles le pays est confronté ne pourront pas être abolies du seul fait du résultat des élections. La Grèce a rétabli son équilibre budgétaire primaire. Elle est capable de payer l’ensemble de ses dépenses de fonctionnement et de ses investissements. Il ne faudra pas que cet équilibre se dégrade, faute de quoi il sera extrêmement difficile de trouver des prêteurs.

Enfin, il faut traiter la question de la dette. Aucun pays ne peut vivre durablement avec une dette représentant 175 % du PIB. Le sujet n’est pas nouveau. Il était sur la table avant l’élection ; il l’est encore aujourd'hui. Nous aurions dû évoquer la soutenabilité de la dette grecque, quel que fût le gouvernement issu de ces élections. Nous allons le faire.

Le Président de la République et moi-même souhaitons que la France facilite le dialogue et la recherche d’une solution avec la Grèce – tel est notre état d’esprit –, tout en discutant avec les autorités du pays des réformes nécessaires. Je pense en particulier à la lutte contre la fraude et l’optimisation fiscales ; c’est l’un des points sur lesquels la Grèce devra se réformer !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste. – M. Jacques Mézard applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Bocquet

Ma question s'adresse à M. le ministre des finances et des comptes publics.

Les élections en Grèce de dimanche dernier ont donné une majorité large à la coalition dirigée par M. Alexis Tsipras. Le peuple grec a ainsi clairement exprimé son rejet des politiques d’austérité imposées par la Troïka, constituée de l’Union européenne, de la Banque centrale européenne et du Fonds monétaire international.

Les résultats de ces politiques d’austérité sont édifiants. Il y a 27 % de chômage, dont 55 % chez les plus jeunes, et la dette publique est passée de 120 % à 175 % du PIB. La Grèce est en état de véritable chaos économique et social. Cette situation a également été vécue comme une atteinte à la dignité du peuple grec.

Les partisans de Syriza étaient plus nombreux dimanche soir qu’ils ne l’étaient la veille...

Sourires sur les travées du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Bocquet

Comme l’indiquait hier un hebdomadaire satirique du mercredi, le 9 mai 2012, M. Alexis Tsipras avait adressé une lettre au Président de la République française nouvellement élu : « Nous souhaitons partager avec vous votre joie, car nous espérons que le résultat électoral obtenu par votre parti en France et celui réussi par la gauche en Grèce nous entraîneront vers une Europe sociale, exempte des mesures d’austérité rigoureuses et des exigences strictes du pacte financier ». Monsieur le ministre, nous pensons qu’il est temps désormais de répondre à cette lettre.

Le message fort adressé par le peuple grec dimanche dernier est une remise en cause fondamentale des principes du dernier traité européen. Le nouveau gouvernement grec s’est déjà attelé à la tâche immense qui l’attend, en décidant, notamment, l’arrêt du processus de privatisations des grandes infrastructures, comme les ports et certains aéroports régionaux. Au même moment, notre ministre de l’économie prévoit exactement l’inverse à l’Assemblée nationale.

Face aux pressions des marchés financiers et des agences de notation, qui s’expriment déjà, la Grèce aura besoin du soutien et de la solidarité concrète des peuples et des gouvernements européens.

Monsieur le ministre, quelles initiatives le gouvernement français envisage-t-il de prendre au plan national et au plan européen avec nos partenaires de l’Union pour soutenir le gouvernement de M. Tsipras dans son projet de reconstruction de l’économie et de la société grecques ? §

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le ministre des finances et des comptes publics.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Savin

M. Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics. Monsieur le sénateur, il n’entre pas dans mes compétences de surveiller les échanges postaux…

Sourires sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Savin

En revanche, il était dans mes compétences d’entrer en contact avec le nouveau ministre des finances grec, mon homologue, qui a d’ailleurs eu la courtoisie de m’informer de sa venue prochaine à Paris. Nous nous rencontrerons dès lundi prochain pour aborder les différents sujets que vous avez abordés. Nous aurons une séance de travail approfondie pour connaître les propositions du gouvernement grec.

Au demeurant, j’entends beaucoup de personnes s’exprimer en France au nom du gouvernement grec – je ne vous vise pas personnellement, monsieur le sénateur –, alors que celui-ci n’a pas encore eu le temps d’indiquer de manière ordonnée et responsable, au sens d’un gouvernement responsable, quelles étaient ses options.

Le premier respect que nous devons à ce gouvernement, c’est de lui laisser le temps de s’installer et de faire part de ses positions, y compris dans le dialogue avec l’Union européenne.

J’ai déjà précisé quel était notre état d’esprit. La France veut faciliter le dialogue entre la Grèce, d’une part, et l’ensemble des États membres de l’Union européenne, d’autre part. C’est indispensable. Le chaos en Grèce serait terrible pour ce pays et une mauvaise chose pour l’Europe !

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Voilà un moment que le chaos règne en Grèce !

Debut de section - Permalien
Michel Sapin, ministre

J’ai entendu le nouveau chef du gouvernement grec indiquer qu’il ne souhaitait pas, et il a bien raison, la sortie de son pays de la zone euro.

Debut de section - Permalien
Michel Sapin, ministre

Il a également souligné qu’il ne souhaitait pas remettre en cause les traités européens.

Debut de section - Permalien
Michel Sapin, ministre

Là encore, il a raison : pour appartenir à la zone euro, il faut en respecter les règles.

Pour autant, il y a évidemment des plages de discussion et des possibilités d’action, notamment pour mettre en œuvre des programmes de réformes.

Le nouveau gouvernement veut réformer l’administration fiscale. Il a raison : l’un des reproches que nous adressons au gouvernement précédent est justement de ne pas l’avoir fait avec suffisamment de volonté. Il veut lutter contre la fraude fiscale. Nous aussi. Nous le faisons en France, et nous voulons que ce soit aussi le cas en Europe. En Grèce, il y a du chemin à faire pour que chacun paie les impôts qu’il doit. Et s’il y a des rentrées fiscales supplémentaires, elles pourront servir à d’autres dépenses, mais dans le respect de l’équilibre budgétaire.

Je conclurai sur la dette grecque, qui n’est pas une dette à l’égard des marchés financiers. La Grèce n’a plus de dettes vis-à-vis du secteur privé ; elle en a vis-à-vis des États et des institutions publiques. Par exemple, sa dette à l’égard de la France, donc du contribuable, s’élève à 42 milliards d’euros ; ce n’est pas rien !

Mme Laurence Cohen ironise.

Debut de section - Permalien
Michel Sapin, ministre

Discuter de la dette pour en alléger le fardeau ? Oui ! Annuler la dette ? Non ! Car ce serait transférer le poids de cette dernière du contribuable grec vers le contribuable français. Le ministre des finances grec a dit qu’il n’en voulait pas. Et je n’en veux pas non plus !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – M. Roger Karoutchi applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Alain Néri, pour le groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Ma question s'adresse à M. le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

De nombreux jeunes de tout niveau scolaire souhaitent bénéficier d’une formation professionnelle en alternance, pour préparer un certificat d’aptitude professionnelle, un master, voire un brevet de technicien supérieur. Chacun reconnaît aujourd’hui l’intérêt et la qualité de cette formation.

Très nombreux sont les organismes et les écoles qui proposent des formations théoriques, souvent d’ailleurs onéreuses, à charge pour les jeunes de trouver une entreprise d’accueil acceptant d’assurer la formation pratique.

Très déterminés et très motivés, les jeunes se lancent à la recherche de leur maître de stage. Mais ils déchantent bien vite, car ils vont de refus en refus. Leur déception, ainsi que celle de leurs parents, voire de leurs grands-parents, est grande.

Après avoir espéré suivre une formation professionnelle qui déboucherait sur un métier et un travail, ils sont désabusés et vont s’inscrire à Pôle Emploi. D’ailleurs, cela peut expliquer pour partie l’augmentation du nombre de jeunes chômeurs en octobre et en novembre derniers.

Monsieur le ministre, on ne peut pas accepter une telle situation : l’insertion professionnelle et l’insertion sociale vont souvent de pair.

Aussi, il me paraît urgent de répondre aux souhaits de ces jeunes, qui veulent préparer leur vie professionnelle par une formation en alternance. Il faut leur redonner espoir ! Il faut que les entreprises fassent un effort pour répondre favorablement à leur volonté et à leur désir.

La formation professionnelle des jeunes en alternance est un problème de solidarité d’importance nationale, tout comme l’était l’emploi des handicapés lorsque l’obligation de recruter une part de personnes concernées dans l’entreprise a été instituée.

Monsieur le ministre, ne pourrait-on pas envisager pour ces jeunes une mesure de même nature ? À mon avis, ce serait une réforme citoyenne, d’ailleurs attendue avec impatience ! §

Debut de section - PermalienPhoto de François Rebsamen

Monsieur le sénateur, je vous remercie de m’avoir interrogé sur ce sujet qui est éminemment consensuel. Votre question me permet d’apporter un éclairage sur l’apprentissage.

Les différents acteurs concernés, toutes sensibilités politiques confondues, s’accordent pour considérer l’apprentissage comme une voie d’excellence que nous devons conforter. En effet, elle permet aux entreprises de trouver les compétences nécessaires, tout en facilitant par la suite l’insertion des jeunes. Ainsi, 70 % de ceux qui sortent de l’apprentissage trouvent un travail.

Le 19 septembre dernier, un plan d’action a été arrêté autour du Président de la République en faveur de la relance de l’apprentissage. Ce document a été élaboré avec l’ensemble des acteurs concernés et il a fait l’unanimité tant des régions que des partenaires sociaux.

Je le rappelle, des mesures financières concrètes ont été décidées, puis adoptées dans le projet de loi de finances pour 2015, pour un montant de 200 millions d’euros. Les entreprises pourront ainsi affecter plus de taxe d’apprentissage aux centres de formation d’apprentis, ou CFA. En outre, il est prévu d’accorder à toutes les entreprises de moins de 250 salariés une aide d’un montant de 100 000 euros pour le recrutement d’un apprenti supplémentaire, qui s’ajoute à la prime à l’apprentissage dans les très petites entreprises.

Lors de cette réunion, les entreprises ont insisté sur les freins à l’embauche, en évoquant notamment l’autorisation préalable d’embauche, qui doit être demandée à l’inspection du travail pour les travaux dits « dangereux ».

Or, dès le mois de mai 2015, cette demande d’autorisation sera supprimée et remplacée par une déclaration. Bien entendu, il s’agit non pas de mettre en danger les jeunes, mais de faciliter leur entrée dans l’alternance et de supprimer les freins que les entreprises peuvent anticiper.

Une bourse de l’apprentissage sera aussi constituée, afin que ces jeunes, qui écrivent, vous le savez tous pertinemment, à toutes les entreprises sans avoir de réponse, puissent connaître exactement les postes et les stages qui sont disponibles dans les entreprises de leur région.

M. Alain Néri acquiesce.

Debut de section - PermalienPhoto de François Rebsamen

Monsieur le sénateur, l’apprentissage est une grande et belle cause. Je compte donc sur vous pour populariser ces mesures et adresser un rappel aux entreprises : aimer l’apprentissage, c’est bien, embaucher les apprentis, c’est mieux !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe écologiste et du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Pierre Frogier, pour le groupe UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Frogier

Ma question s'adresse à Mme la ministre des outre-mer. Elle concerne la crise politique que traverse la Nouvelle-Calédonie en ce début d’année.

Pour le dire clairement, il s’agit, en fait, d’une nouvelle péripétie liée à l’usage abusif et détourné de l’article 121 du statut organique de 1999, qui permet malheureusement à une formation minoritaire au sein du Gouvernement d’en provoquer la chute, en faisant démissionner l’ensemble de ses propres membres.

Une telle utilisation de la loi avait déjà été dénoncée par le Conseil d’État, au mois d’avril 2011. La juridiction avait estimé que le fait d’empêcher le fonctionnement normal des institutions était un détournement ayant le caractère d’une manœuvre électorale.

Qu’en est-il exactement ? En Nouvelle-Calédonie, comme dans tout régime d’assemblée, seule une majorité des membres peut censurer l’exécutif. Seulement, faute de majorité, l’article 121 a été une nouvelle fois détourné de son objet par un groupe minoritaire, avec l’objectif affiché de s’emparer de la seule présidence du gouvernement.

Telle est la cause de cette situation inédite et absurde : la Nouvelle-Calédonie est aujourd'hui dotée de deux gouvernements composés de manière identique. Le premier est élu, mais il est incapable de désigner en son sein un président ; il est donc inopérant. Le second est démissionnaire, et il est chargé d’expédier les affaires courantes.

Ceux qui sont à l’origine du blocage se tournent vers vous pour que vous régliez la situation, madame la ministre. C’est un comble ! Vous avez répondu que l’État prendrait ses responsabilités. Mais lesquelles ?

Envisagez-vous la dissolution de nos assemblées pour procéder à de nouvelles élections, alors que le congrès de la Nouvelle-Calédonie fonctionne normalement et vient d’adopter à l’unanimité plusieurs textes avant la fin de la session ? Ou avez-vous l’intention, comme on l’entend, de proposer une nouvelle modification de la loi organique, afin d’ouvrir la possibilité d’une élection du président du gouvernement à la majorité relative ?

Ce serait évidemment une nouvelle atteinte à l’esprit et à la lettre de l’accord de Nouméa. Plus encore, ce serait la remise en cause de ce modèle de gouvernement d’unité calédonienne, qui oblige les partisans du maintien de la Nouvelle-Calédonie dans la France et les indépendantistes à la recherche permanente du consensus. Dans ce cas, que resterait-il de cet accord ?

Madame la ministre, vous avez affirmé devant une autre assemblée que l’État prendrait ses responsabilités. Lesquelles prendrez-vous donc ?

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.

Debut de section - Permalien
George Pau-Langevin, ministre des outre-mer

Monsieur le sénateur, vous avez tout à fait raison de souligner à quel point la situation en Nouvelle-Calédonie est aujourd’hui préoccupante.

À l’évidence, nous sommes à un moment où nous avons besoin de travailler pour préparer la sortie de l’accord de Nouméa. Il faut donc que toutes les parties et que tous les élus puissent travailler ensemble et avancer pour résoudre les problèmes actuels.

Toutefois, si nous pouvons souhaiter que les élus exercent leurs responsabilités, se rencontrent et trouvent une solution pour élire, comme c’est indispensable, un président et un vice-président de cette assemblée, il est inimaginable que nous nous substituions aux élus, d’autant plus que nous sommes dans une démarche tendant à permettre à la Nouvelle-Calédonie d’avoir un régime d’autonomie maximale.

Nous ne voulons absolument pas stigmatiser les élus. Nous leur demandons simplement d’être responsables et fidèles à leurs engagements pour la Nouvelle-Calédonie.

Vous avez envisagé un certain nombre de solutions, mais nous n’en sommes pas là aujourd’hui. Le Haut-commissaire essaie surtout de recevoir les uns et les autres et de rapprocher les points de vue, afin qu’une solution raisonnable puisse être trouvée.

En revanche, une intervention qui serait de nature à rétablir une sorte de tutelle sur la Nouvelle-Calédonie, à un moment où tout le monde souhaite plutôt aller dans le sens inverse, n’est pas envisageable.

Nous pouvons donc simplement affirmer aujourd’hui que nous sommes prêts à passer le temps nécessaire pour trouver une solution, qui soit de consensus. Nous espérons y parvenir, d’autant que nous avons de nombreux problèmes à régler avant la consultation de 2018. En tout cas, nous essayons de nouveau de privilégier le consensus, et nous prendrons le temps qu’il faudra pour parvenir à une solution.

Cette année a démarré sous des auspices dramatiques, suivis par une volonté d’union nationale. Essayons donc de maintenir l’esprit du 11 janvier en Nouvelle-Calédonie !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Paul

Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget.

Le sujet ayant déjà été évoqué en termes quasiment similaires par ma collègue Élisabeth Doineau, je centrerai mon propos sur un élément qui n’a pas été souligné jusqu’à présent.

La décision de la Banque nationale suisse du 15 janvier dernier d’abandonner le taux plancher de conversion du franc suisse a frappé de plein fouet les communes ayant souscrit des emprunts dits « toxiques », indexés sur la parité entre l’euro et cette monnaie.

L’envolée du franc suisse, conséquence de cette décision, s’est accompagnée d’une augmentation aussi forte qu’imprévue des taux d’intérêts de ces emprunts, dont les communes avaient déjà les plus grandes difficultés à se défaire.

Un millier de collectivités et des dizaines d’hôpitaux seraient concernés. Si je prends le cas de ma commune, Douarnenez, le taux d’un emprunt de cinq millions et demi d’euros souscrit en 2007 est ainsi passé de 5, 71 % à 9, 90 %, générant une augmentation de l’annuité de frais financiers de 100 000 euros.

Ce taux pourrait rapidement monter à 15 %, portant l’augmentation de ces frais financiers à 240 000 euros, et encore je ne m’estime pas le plus mal loti, de nombreuses communes voyant les taux des emprunts qu’elles ont souscrits dépasser largement les 20 %, voire les 25 %.

Cette explosion des frais financiers constitue une sorte de double peine pour ces communes déjà sinistrées par ces emprunts toxiques et pose la question de l’utilité du fonds de soutien dans son fonctionnement et dans son montant actuel. Il est à craindre que celui-ci ne soit plus à la hauteur du problème désormais posé à ces communes, le montant de l’indemnité de sortie des emprunts toxiques devenant excessif.

Aussi, monsieur le ministre, pouvez-vous nous indiquer les initiatives que le Gouvernement entend prendre dans les plus brefs délais pour aider ces collectivités et ces établissements hospitaliers à faire face à une situation exceptionnelle, qui met gravement en péril l’équilibre de leurs finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Paul

Pour terminer, puisque le sujet n’a pas encore été abordé, je voudrais, en tant que Français et élu, mais aussi en tant qu’ancien réserviste, rendre un hommage à nos militaires de l’armée de l’air décédés ou gravement blessés en mission lors du crash aérien du 26 janvier dernier à Los Llanos, près d’Albacete, en Espagne.

Mes pensées, comme celles de chacun d’entre vous, mes chers collègues – j’en suis certain –, vont vers leurs familles endeuillées et meurtries, ainsi que vers l’ensemble des personnels de nos armées. Celles-ci sont aujourd’hui dans la peine, alors qu’elles accomplissent une tâche et un devoir exemplaire souvent dans des conditions difficiles, voire très difficiles, au quotidien.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et du RDSE, ainsi que sur certaines travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Monsieur le ministre de la défense, le Sénat meurtri s’associe à la pensée de notre collègue Philippe Paul – je le remercie d'ailleurs d’avoir évoqué ce drame – pour ces militaires et leurs familles.

La parole est à M. le secrétaire d'État chargé du budget.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert

Monsieur Philippe Paul, je vous remercie à mon tour de cet hommage, auquel s’associe l’élu meurthe-et-mosellan que je suis, ainsi que M. Daniel Reiner, me semble-t-il. L’ensemble du Gouvernement aura l’occasion de rendre un hommage solennel la semaine prochaine aux Invalides à nos militaires décédés.

Je vous remercie également de me donner l’occasion de préciser la réponse que j’ai adressée tout à l’heure à votre collègue, en vous rappelant qu’il faut d’abord apprécier l’ampleur du phénomène, celui-ci évoluant presque de jour en jour.

Il appartiendra à nos spécialistes, en lien avec les élus, de savoir s’il est préférable, en cette période de tensions, où tout est plus délicat, de tenter de défaire les contrats, d’accompagner la négociation et le remboursement des IRA, les indemnités de remboursements anticipées, ou encore d’aider les collectivités concernées tenir une année de plus, pour passer ce cap difficile.

C’est tout l’enjeu du travail que nous menons et que nous mènerons, j’y insiste, en concertation avec les élus et les responsables concernés, tout en informant votre commission des finances ; j’ai eu l’occasion de le faire une première fois, pas plus tard qu’hier matin si ma mémoire est bonne, mais à la lumière de l’évolution de ce dossier j’aurai l’occasion d’y revenir.

Une chose est certaine, il me semble que nous devons réorienter notre appui en nous fondant sur quelques indicateurs que nous n’avions peut-être pas suffisamment pris en compte, ou en tout cas que nous pouvions laisser de côté, compte tenu du milliard et demi d’euros disponible. Nous devons sans doute concentrer un peu plus nos aides sur les collectivités pour lesquelles la situation devient proprement insoutenable.

Monsieur le sénateur, vous avez évoqué des taux qui se situent autour de 10 %. Pardonnez-moi de vous le dire, mais certaines collectivités pâtissent de taux d’environ 25 % !

Toutefois, la situation évolue de jour en jour. Nous examinerons donc, en fonction des montants disponibles, comment répartir et concentrer au mieux nos aides vers les collectivités ou les établissements, notamment hospitaliers, qui relèvent d’un autre fonds, pour les aider à passer ce cap. Nous verrons ainsi dans quelles conditions et à quel moment traiter au mieux ce dossier très complexe, dans lequel les responsabilités sont diverses, comme je l’ai déjà souligné à plusieurs reprises.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme Karine Claireaux, pour le groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Karine Claireaux

Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, lors de son discours au Forum économique mondial à Davos, le 23 janvier dernier, le Président de la République française est revenu sur les terribles événements de janvier et a rappelé la « solidarité exceptionnelle » qui les a suivis.

Cette admirable solidarité doit se retrouver dans les actions mises en œuvre dans le cadre de la lutte antiterroriste, au niveau non seulement national, mais international, notamment européen. « La réponse doit être globale, internationale et partagée. La France ne pourra pas tout faire, […] ne pourra pas agir seule », a-t-il souligné.

On sait que la propagande, la radicalisation et le recrutement des terroristes sont facilités par l’accessibilité, la mondialisation et la rapidité d’Internet, particulièrement par les réseaux sociaux. Face à cette menace mondiale, il est nécessaire que les différents pays s’allient, se soutiennent et s’entraident.

Le programme de Stockholm, mis en place par l’Union européenne pour la période 2010-2014, mettait l’accent, notamment, sur des actions de prévention et de protection, parmi lesquelles la lutte contre le recrutement et l’armement des terroristes, ainsi qu’une surveillance accrue dans les transports.

Au vu des attentats perpétrés ces dernières années en Europe, on est en droit de se demander si ces actions sont bien adaptées et si leur mise en place est suffisamment rapide. Je pense, en particulier, au Passenger Name Record, le PNR, dont le Parlement européen bloque la mise en place depuis 2011, malgré les demandes insistantes des États.

Par ailleurs, aucune structure européenne n’existe actuellement pour coordonner les actions spécifiques liées à la lutte antiterroriste.

Monsieur le ministre, considérez-vous que les actions du programme de Stockholm étaient suffisantes ? La période couverte étant arrivée à son terme, quel bilan peut-on tirer de l’application de ces actions ?

Comme cela a été annoncé, le sommet européen du 12 février prochain sera consacré à ce sujet. L’Europe a-t-elle la volonté de s’engager plus intensément, d’accentuer la lutte antiterroriste sur son territoire, notamment le volet opérationnel de cette dernière ?

Pourrait-on envisager, par exemple, la création au sein de l’Union européenne d’une cellule dédiée à la lutte antiterroriste, afin de définir le périmètre d’actions, mettre en œuvre ces dernières sur le terrain et coordonner, au niveau européen, les différentes actions nationales, ainsi que l’échange de renseignements en amont entre les États membres ?

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
Jean-Yves Le Drian

Madame la sénatrice, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser l’absence du ministre de l’intérieur, Bernard Cazeneuve, qui assiste actuellement, à Riga, à une réunion des ministres de l’intérieur de l’Union européenne. Il m’a chargé de vous répondre sur vos préoccupations, en particulier sur le calendrier européen que vous avez évoqué.

Comme vous le savez, un Conseil européen se tiendra le 12 février prochain, consacré particulièrement à la lutte contre le terrorisme. À cette occasion, le Président de la République aura à cœur de faire avancer quatre orientations que j’évoquerai devant vous.

Premièrement, il s'agit de la détection, du contrôle ou de l’entrave du déplacement des combattants étrangers terroristes ou des réseaux. Cela implique une modification des règles du code Schengen, en particulier pour rendre possible la consultation systématique du système d’information Schengen lors du franchissement des frontières extérieures par les personnes jouissant du droit à la libre circulation. C’est un point significatif, qui sera mis sur la table lors de la discussion.

Deuxièmement, vous avez évoqué l’idée d’un PNR européen, un système d’échange de données des dossiers passagers, pour un meilleur repérage des mouvements djihadistes. Vous avez rappelé que le Parlement européen avait jusqu’à présent bloqué la procédure en la matière. Il importe désormais que chacun fasse l’effort de comprendre l’urgence qu’il y a à adopter cet outil. À cet égard, Bernard Cazeneuve se rendra la semaine prochaine à Bruxelles pour rencontrer les députés européens.

Troisièmement, un partenariat avec les grands opérateurs de l’Internet sera également à l’ordre du jour du Conseil du 12 février prochain. Il est indispensable pour mettre en place le signalement rapide de contenus incitant à la haine et à la terreur. Bernard Cazeneuve envisage de se rendre aux États-Unis pour rencontrer les acteurs concernés. Il estime aussi que l’Union européenne est un lieu particulièrement approprié pour lutter contre le phénomène de la radicalisation à partir d’Internet.

Quatrièmement, et enfin, il faut renforcer la lutte contre le trafic d’armes à feu en Europe, par l’échange d’informations et les opérations conjointes des polices européennes.

Voilà quatre sujets lourds, qui permettront de faire avancer la lutte contre le terrorisme. S’y ajoute une question qui est à la fois de la compétence de Bernard Cazeneuve et de la mienne, à savoir la bonne coordination en matière de renseignement. Toutefois, de ce côté-là, les choses vont plutôt bien.

Vous le savez, madame la sénatrice, toutes les démocraties sont concernées par la menace terroriste. Elles doivent y répondre ensemble. Comme je l’ai souligné il y a un instant, c’est précisément ce à quoi s’emploient le Président de la République et le Gouvernement.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées de l'UDI-UC et de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Nous en avons fini avec les questions d’actualité au Gouvernement.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux quelques instants.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à seize heures vingt, est reprise à seize heures trente-cinq, sous la présidence de Mme Françoise Cartron.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Deromedi

Madame la présidente, lors du scrutin n° 88 sur la proposition de loi constitutionnelle visant à rétablir à sept ans la durée du mandat du Président de la République et à le rendre non renouvelable, M. Rémy Pointereau a été déclaré comme votant contre, alors qu’il souhaitait voter pour.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

Acte vous est donné de cette mise au point, ma chère collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

L’ordre du jour appelle la discussion, à la demande du groupe UMP, de la proposition de loi organique portant diverses dispositions relatives à la collectivité de Saint-Barthélemy, présentée par M. Michel Magras et plusieurs de ses collègues (proposition n° 473 [2013-2014], texte de la commission n° 234, rapport n° 233).

Dans la discussion générale, la parole est à M. Michel Magras, auteur de la proposition de loi organique.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Magras

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, les dispositions de la présente proposition de loi organique avaient été préparées dans la perspective d’un projet de loi de « toilettage » des statuts des collectivités d’outre-mer. Elles sont issues d’une délibération du conseil territorial de la collectivité de Saint-Barthélemy.

Ainsi, sept ans après le passage de commune à collectivité d’outre-mer dotée de l’autonomie régie par l’article 74 de la Constitution en 2007, la pratique a mis en lumière les ajustements du statut et les élargissements nécessaires pour améliorer le fonctionnement de la collectivité et une meilleure adaptation à la réalité locale.

Ces dispositions procèdent donc d’une expérience éprouvée tout en s’inscrivant dans le principe même de l’article 74 de la Constitution, autrement dit un statut tenant compte des intérêts propres de la collectivité au sein de la République.

C’est dans cette optique qu’un élargissement des compétences de la collectivité s’avère nécessaire. Celui-ci s’articule autour de deux axes : d’un côté, le transfert de compétence, de l’autre, la participation à l’exercice des compétences conservées par l’État à Saint-Barthélemy.

Je souhaite à cet égard souligner que jamais l’État n’a été aussi présent à Saint-Barthélemy que depuis que l’île est devenue une collectivité. Aussi, en élargissant sa participation aux compétences, il s’agit ni plus ni moins que d’approfondir la coopération avec l’État, comme l’autorise le caractère de collectivité autonome. En dotant une collectivité de l’autonomie, l’État lui permet bien de participer à l’exercice de ses compétences lorsque cela favorise les intérêts propres de la collectivité.

Ces intérêts doivent s’entendre du point de vue du contexte économique, social et régional de chaque collectivité qui déroge au droit commun lorsque celle-ci peut de ce fait mieux s’adapter aux enjeux qu’ils posent. C’est le cas à Saint-Barthélemy.

Comme vous le savez, l’économie de l’île est monosectorielle et repose essentiellement sur le tourisme, directement ou indirectement. Elle est donc fragile.

Cette économie a par ailleurs pour autre particularité d’être tournée vers la zone dollar parce que s’y trouve l’essentiel de sa clientèle. Dès lors, cela implique que Saint-Barthélemy est placée en concurrence avec les pays de cette zone qui connaissent depuis ces dernières années un développement de leur secteur touristique particulièrement dynamique.

De ce point de vue, notre statut doit nous permettre d’offrir aux entreprises les conditions de leur compétitivité en s’adaptant aux évolutions.

Saint-Barthélemy doit aussi relever le défi de la gestion de l’espace et de la préservation de son environnement naturel. Sur un territoire de vingt-quatre kilomètres carrés, l’équilibre est une recherche constante. C’est l’une des raisons pour lesquelles, à Saint-Barthélemy, nous parlons non pas de développement économique mais de maîtrise du développement.

La préservation de la cohésion sociale se trouve au cœur de cette politique, notamment en matière de logement.

C’est l’objet de l’article 1er du présent texte relatif aux conditions d’exercice du droit de préemption de la collectivité.

En effet, compte tenu de son étroitesse, l’île connaît une pression foncière constante couplée à l’envolée des prix du foncier ces dernières années.

Le droit de préemption est donc un outil de régulation que nous souhaitons ajuster afin d’en faire un outil supplémentaire de la politique de préservation des espaces naturels. Je vous exposerai plus en détail ce dispositif lors de la discussion des articles, je tiens toutefois à préciser qu’il ne s’inscrit pas dans une hiérarchisation des finalités, comme cela a pu être objecté. Permettre à la collectivité d’exercer son droit de préemption même en cas de transfert entre résidents vise à éviter un mitage de l’île et à permettre la définition de zones naturelles cohérentes.

Cela montre bien que chaque disposition doit être vue comme adaptée à un contexte local particulier. Une fois rapporté au contexte local, on comprend mieux pourquoi ce qui paraît vu de l’extérieur devoir être mis en œuvre peut se révéler contre-productif.

Tel est le sens de l’article 2, dont la commission propose la suppression.

Si, sur la forme, je dois admettre que cette suppression se justifie, du fait d’une rédaction parfois insuffisante, sur le fond, la situation de Saint-Barthélemy justifie le rétablissement de ces dispositions, ce que je vous proposerai.

Cet article 2 initial entre dans le champ de l’exercice de la participation de la collectivité à l’exercice des compétences de l’État. Il s’agit-là, j’y insiste, d’une possibilité induite par la qualité de collectivité dotée de l’autonomie. Autrement dit, ce qui ne peut se concevoir pour un département d’outre-mer est rendu possible pour une collectivité dotée de l’autonomie.

Le texte proposé au a de cet article porte sur la procédure de participation à l’exercice des compétences de l’État. Dans ce cadre, la collectivité est en effet entièrement sous son contrôle, qui se matérialise par un décret d’approbation totale ou partielle, ou de refus d’approbation, soit pour des motifs de légalité, soit pour des motifs d’opportunité.

Aujourd’hui, cette faculté de participation s’applique en matière pénale et en matière de police et de sécurité maritime. Elle se déroule en trois étapes. D’abord, la collectivité adopte un acte par une délibération qu’elle transmet au ministre chargé de l’outre-mer. Ensuite, celui-ci est chargé, avec le ministre de la justice, de proposer au Premier ministre un décret tendant soit à l’approbation totale ou partielle, soit au refus d’approbation. Enfin, une fois le décret publié, l’acte est soumis au Parlement pour ratification. Ce n’est qu’alors que les dispositions adoptées par le conseil territorial peuvent entrer en vigueur dans le corpus normatif de la collectivité.

Il s’agit donc en réalité d’un double contrôle.

Ce paragraphe a tendait initialement à un réaménagement de la procédure en raison de délais systématiquement anormalement longs pour la publication du décret : en moyenne, plus de deux ans s’écoulent entre la transmission de la délibération et l’entrée en vigueur.

En plus de cet aspect, il s’agit également de clarifier la possibilité pour le Parlement d’adopter directement des dispositions à caractère pénal au titre de la souveraineté du législateur, conformément à l’esprit de la loi statutaire.

Enfin, le dernier point, en lien avec le précédent, visait à permettre à la collectivité de participer aux compétences de l’État en matière de recherche et de constatation des infractions, dans le prolongement de la faculté de fixer les sanctions. Il faut en effet souligner que, faute d’équivalent local des fonctionnaires et des agents habilités en droit national à rechercher et à constater les infractions dans les matières transférées à la collectivité, l’application effective des sanctions pénales une fois entrées en vigueur peut rester lettre morte. Nous y avons été confrontés en matière d’environnement, par exemple.

J’en arrive maintenant à l’élargissement des domaines de compétences de l’État auxquels la collectivité a souhaité être habilitée à participer.

Le premier figure au paragraphe b de l’article 2. Le domaine de l’entrée et du séjour des étrangers touche, nous le savons, à des libertés publiques fondamentales. Toutefois, comme je vous le disais, il convient de le rapporter aux besoins des collectivités, en lien avec leurs intérêts. En l’occurrence, avec une économie fondée sur l’entrée des visiteurs, la collectivité doit pouvoir indiquer à l’État quelles sont les dispositions de nature à faciliter l’arrivée des visiteurs, dans son intérêt économique.

Nous devons également veiller, pour des motifs de cohésion sociale, à ce que les règles de séjour ne soient pas détournées, conduisant à la rupture de la cohésion sociale, dans l’intérêt de la population locale comme des populations d’immigration. Cela tient en premier lieu notamment aux possibilités de logement sur l’île.

Or il s’avère que, faute d’une coopération étroite avec l’État dans ce domaine, le contournement de la règle est récurrent. L’inadaptation des règles aboutit de même dans certains cas à l’impossibilité pour la collectivité d’exercer pleinement sa compétence en matière d’accès au travail des étrangers.

Elle souhaite donc une coopération plus étroite dans ce domaine, par le biais de la participation, dès lors que la portée de ses avis se révèle relativement faible dans le cadre de la consultation sur les projets de loi relatifs à l’entrée et au séjour des étrangers. Nous sommes en effet régulièrement consultés en urgence, et rendons parfois nos avis après la transmission du projet de loi au Conseil d’État. Enfin, il va sans dire que, dans ce domaine, les difficultés ne peuvent se régler à l’échelon administratif de la préfecture déléguée.

Madame la ministre, mes chers collègues, les collectivités autonomes d’outre-mer, à travers leur statut, leurs compétences, soulèvent parfois la question de l’unité de la République et de ses principes, et de la frontière entre l’unité et l’uniformité.

Un autre domaine pour lequel la collectivité sollicite l’élargissement de la participation aux compétences de l’État est celui de la protection sociale, y compris la fiscalité sociale.

Au moment de la définition de son statut en 2003, la question du transfert de la compétence sociale avait été posée. À ce moment-là, nous n’avions pas souhaité l’exercer, par prudence et avant d’être certains que la mise en place d’un système de protection sociale propre à Saint-Barthélemy correspondait à la volonté de la population. Par prudence, parce que nous avions estimé devoir nous assurer d’être en mesure de garantir qu’une organisation propre ne conduirait pas à une précarisation de la protection sociale.

C’est en réalité le Conseil économique, social, culturel et environnemental qui a rouvert ce débat, preuve qu’il s’agit d’une demande émanant non pas des élus de la collectivité mais bien des représentants des composantes de la société.

Ainsi, par délibération, la collectivité adopte le principe de la nécessité d’une organisation de la prise en charge de la protection sociale, faisant suite à une expression de la volonté de la population.

De plus, le rapport de l’Observatoire régional de la santé de Guadeloupe, l’ORSAG, sur la protection sanitaire et sociale à Saint-Barthélemy présenté en 2012 a constitué à la fois un point de départ et une base pour ce débat.

Dans ce rapport, il est constaté que « Saint-Barthélemy présente un contexte local compliquant la gestion du système de santé sur ce territoire », qui s’explique par « une culture d’auto administration » découlant du détachement historique de l’administration. De ce fait, « certains Saint-Barths sont donc réticents à s’adresser aux administrations » ; « par ailleurs, il n’y a pas de présence permanente de la sécurité sociale à Saint-Barthélemy ». Ce sont des faits.

Il faut dire que si le rattachement à la Guadeloupe a paru naturel en 2003, historiquement, l’administration n’a pas, si l’on peut dire, une « culture de Saint-Barthélemy », encore moins depuis que cette collectivité est détachée de la Guadeloupe. Cela se traduit dans la qualité du service rendu.

Madame la ministre, mes chers collègues, la demande de Saint-Barthélemy s’inscrit dans la problématique de l’accès au service public et de la qualité de ce dernier, en l’occurrence celui – ô combien fondamental – de la protection sociale.

Plus généralement, je rappelle que Saint-Barthélemy et Saint-Martin sont les deux seules collectivités d’outre-mer qui ne disposent pas d’une organisation propre de leur système de protection sociale. Avant la mise en place de ces deux collectivités, cette situation était considérée non comme une atteinte fondamentale à la solidarité nationale, mais comme une adaptation du principe de solidarité à leurs caractéristiques. De surcroît, à la différence de Saint-Martin, Saint-Barthélemy est devenue en 2012 un pays et territoire d’outre-mer du point de vue du droit européen. Ce double régime juridique justifie donc une adaptation.

De plus, l’intention de la collectivité est connue puisqu’elle fait l’objet d’une proposition de loi. Ainsi, déjà dans ce texte, elle apporte la garantie de la préservation d’un niveau de protection sociale conforme au modèle national.

La collectivité garantit également toute forme de dérive qui pourrait conduire à l’affaiblissement du niveau de protection dès lors qu’elle se place d’elle-même sous la tutelle de l’État.

Pas plus qu’en 2003, la collectivité de Saint-Barthélemy ne souhaite aujourd’hui exercer pleinement cette compétence.

La tutelle est d’ailleurs renforcée avec le dispositif que je vous proposerai. En plaçant l’adaptation du système de protection sociale dans le cadre de la participation aux compétences de l’État, ce système devra être issu d’une concertation étroite avec l’État qui, comme le Parlement, disposerait d’un pouvoir de veto, en légalité et en opportunité.

Au rang des grands principes, je vous invite, mes chers collègues, à ne pas considérer cette demande d’adaptation comme une volonté de nous soustraire à la participation à la solidarité nationale.

L’extension de la participation de la collectivité aux compétences de l’État en matière de protection sociale est assortie à l’élargissement au champ de la fiscalité sociale, c’est-à-dire les prélèvements obligatoires.

En effet, à Saint-Barthélemy comme ailleurs dans la République, se pose la problématique de la compétitivité des entreprises par les coûts, d’autant que cette collectivité présente la particularité d’avoir une économie reposant sur les services et d’être, pour cette raison, quasi exclusivement une économie de main-d’œuvre. Nos entreprises ne peuvent donc jouer sur le coût des produits ; elles peuvent seulement faire varier leurs charges, dans une optique de compétitivité des coûts. À cet égard, elles ne bénéficient pas du CICE, qui devrait atteindre 9 % dans les départements d’outre-mer.

Or, s’agissant des coûts dans le secteur touristique, les îles qui sont en concurrence directe avec Saint-Barthélemy sont naturellement avantagées par une main-d’œuvre moins chère et par l’avantage monétaire que représente un euro plus fort que le dollar.

La compétence dans le domaine de la fiscalité sociale devra simplement permettre d’ajuster les taux afin d’aboutir au même effet que le CICE. Il n’y a donc pas lieu de craindre pour Saint-Barthélemy ce qui est mis en place en métropole.

En outre, le rapport de l’ORSAG, que j’ai cité voilà quelques instants, relevait un reste à recouvrer sur les cotisations de 27 %, qui s’expliquerait par une gestion distante et par l’impossibilité pour l’administration de connaître les entreprises ayant quitté l’île lorsqu’elles ne se sont pas signalées. C’est, là encore, un point qui pourrait être amélioré par une gestion de proximité, dès lors que les entreprises de l’île sont assujetties à la contribution forfaitaire annuelle des entreprises, la CFAE.

Je dois aussi à l’honnêteté de souligner, mes chers collègues, que le dispositif que je vous proposerai peut même être considéré comme en recul s’agissant des « marges de manœuvre » de la collectivité par rapport à la proposition de loi que j’ai déposée.

Sur la forme, enfin, j’admets, de même que pour l’article 2, que la rédaction proposée justifiait la suppression de l’article 5. Je vous en soumettrai les dispositions sous une autre forme.

Par ailleurs, pour ce qui est des transferts de compétence, la collectivité se heurte au développement du nombre de véhicules de location sur l’île, situation parfois motivée par l’opportunité de la défiscalisation et sans lien réel avec un véritable besoin commercial.

Dans tous les cas, il convient de doter Saint-Barthélemy des moyens d’une régulation, assortissant par exemple l’exercice de cette activité à de strictes conditions de stockage. Ce projet s’inscrit dans l’optique de la gestion de l’espace, que j’ai déjà évoquée.

Parallèlement, la loi statutaire permet à Saint-Barthélemy de procéder à l’immatriculation des navires. Des lettres d’immatriculation ont d’ores et déjà été attribuées, mais la mise en œuvre effective, dans le souci de simplification des démarches qui était un objectif de la loi statutaire, se heurte à l’impossibilité de pouvoir délivrer les cartes et titres de navigation. Il vous sera donc proposé de compléter cette compétence en ce sens.

Nous examinerons, en outre, des articles relatifs au fonctionnement des institutions de la collectivité.

L’article 7 prévoit de confier au président de la collectivité une habilitation à ester en justice en son nom pour la durée du mandat. Il étend aussi les possibilités de délégation aux membres du conseil territorial. Le rapporteur a souhaité préciser la priorité accordée aux membres du conseil exécutif, ce qui est conforme à l’esprit de collégialité qui règne dans cet organe.

L’article 9 vise, quant à lui, à clarifier les règles de majorité du conseil exécutif.

Et, pour finir sur les mesures d’allégement, l’article 10 prévoit la suppression du rapport spécial sur la situation de la collectivité et des organismes qui en dépendent. Cette mesure se justifie par la taille de la collectivité, qui permet à ses membres de connaître en temps réel l’état d’exécution des décisions et la situation de la collectivité et des organismes dépendants.

L’article 11, qui est relatif à l’information des conseillers, clarifie les règles de transmission.

L’article 12, qui concerne le Conseil économique, social, culturel et environnemental, vise à clarifier les délais de transmission de ses avis, en vue d’une plus étroite association de cette institution aux décisions de la collectivité.

Madame la ministre, mes chers collègues, mon intervention a plus particulièrement porté sur les dispositions de la proposition de loi organique qui méritaient, me semble-t-il, un éclairage proportionnel aux enjeux qu’elle représente.

Ce texte se veut cohérent, transparent sur les intentions, et dans l’intérêt de Saint-Barthélemy ; il va dans le sens d’une coopération renforcée avec l’État.

Je souhaite sincèrement que l’examen des articles soit l’occasion d’un véritable échange sur ces points. Il va sans dire que j’espère parvenir à convaincre ceux de mes collègues que je sais réticents du bien-fondé de ma démarche.

Debut de section - PermalienPhoto de Mathieu Darnaud

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, avec la proposition de loi organique que notre collègue Michel Magras a déposée pour réformer le statut de Saint-Barthélemy, nous examinons un texte qui présente deux grandes vertus.

Tout d’abord, voilà sept ans et demi que Saint-Barthélemy, devenue en application de l’article 74 de notre Constitution une collectivité d’outre-mer, possède un statut qui résulte des lois du 21 février 2007 portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l’outre-mer.

La collectivité s’est penchée sur la question et a tiré le bilan de cette situation. Elle a ainsi réfléchi aux aménagements qu’il lui semblait important d’adopter afin de rendre plus efficace sa gouvernance et, par la voix de son dynamique sénateur, proposé des dispositions pertinentes au service de l’intérêt des habitants de l’île.

Ensuite, je tenais à souligner le deuxième aspect très positif de ce texte, qui, au-delà de Saint-Barthélemy, ne manquera pas d’interpeller les représentants des collectivités locales que nous sommes – vous me permettrez, madame la ministre des outre-mer, de vous considérer aussi comme telle.

Je veux parler de cette méthode qui part de la base, c’est-à-dire du diagnostic des élus, définissant un mode de gouvernance bâti sur les réalités du terrain, dans le cadre des nouvelles libertés accordées par la République, et appuyant sa légitimité sur le soutien massif des citoyens concernés. Il s’agit là d’une démarche liant consensus et pragmatisme qui mériterait d’être méditée à l’heure où le Parlement examine une réforme des collectivités territoriales dont de nombreux aspects sont pour le moins marqués par la rigidité et l’uniformité. Le « sur-mesure » institutionnel dont nos collègues ultramarins sont désormais familiers et que la Constitution consacre depuis 2003 peut nous inspirer.

Comme je l’indiquais, notre collègue a donc traduit au sein de ce texte les propositions que le conseil territorial a émises dans son avis du 20 décembre 2013. À la suite de la saisine du président du Sénat, le conseil exécutif de la collectivité a, par un avis rendu le 24 décembre dernier, réaffirmé son soutien à cette proposition de loi organique.

Commune intégrée au département de la Guadeloupe en 1946, Saint-Barthélemy forme alors avec l’île de Saint-Martin un arrondissement de ce département d’outre-mer.

La collectivité de Saint-Barthélemy a saisi l’occasion offerte par les innovations introduites par la révision constitutionnelle de 2003 pour solliciter son autonomie, arguant notamment de son éloignement de la Guadeloupe, distante de près de 230 kilomètres.

La création d’une nouvelle collectivité d’outre-mer a été approuvée par 95, 51 % des suffrages exprimés lors de la consultation locale du 7 décembre 2013. La voie était ouverte à la création, par le législateur organique, de cette collectivité dans les conditions et limites fixées à l’article 74 de la Constitution.

En 2007, la collectivité de Saint-Barthélemy s’est donc substituée à la commune de Saint-Barthélemy, au département et à la région de Guadeloupe. Elle exerce leurs compétences, ainsi que celles spécifiquement attribuées par le législateur organique, notamment un pouvoir normatif autonome dans de nombreux domaines tels que l’environnement, l’urbanisme, la fiscalité, l’énergie et le tourisme.

En revanche, les lois et règlements édictés par l’État s’y appliquent de plein droit, à l’exception des règles en matière de droit d’asile et d’entrée et séjour des étrangers.

La réforme statutaire de 2007 a donc permis l’autonomisation de Saint-Barthélemy et, parallèlement, l’unification des institutions locales au sein d’une seule collectivité. En contrepartie, le fonctionnement des institutions repose sur des équilibres spécifiques à cette collectivité, afin notamment de contrebalancer le pouvoir de l’autorité exécutive par une association plus large qu’en métropole des élus locaux.

La collectivité dispose d’un conseil territorial qui est l’assemblée délibérante composée de 19 membres. Le conseil territorial élit en son sein un président qui est responsable devant lui.

Cependant, le président du conseil territorial partage l’autorité exécutive avec un conseil exécutif composé de sept membres : le président, quatre vice-présidents et deux membres. Ce conseil est l’organe exécutif et son fonctionnement est collégial.

S’y ajoute un conseil économique, social et culturel qui assiste « à titre consultatif » le conseil territorial.

Notre collègue nous a présenté à l’instant sa proposition de loi organique qui prévoit deux types de modifications statutaires : celles qui sont relatives au fonctionnement des institutions, avec l’idée de le faciliter, et celles qui sont en lien avec les compétences respectives de la collectivité et de l’État.

S’agissant des règles de fonctionnement des institutions locales, les dispositions proposées résultent d’un premier bilan de la pratique institutionnelle née du statut. Certaines ne sont que la transposition du droit commun des collectivités territoriales. Je pense à la représentation en justice de la collectivité à l’article 7 ; aux possibilités de délégation de fonctions à des membres de l’assemblée délibérante, au même article ; à la suppression d’un rapport spécial du président au conseil territorial, redondant avec les différents débats budgétaires, à l’article 10 ; ou encore aux règles de quorum, de délégation de vote et de majorité au sein du conseil exécutif, à l’article 9.

Votre commission des lois les a adoptées sous réserve de plusieurs modifications que j’ai proposées dans le seul but de préserver les caractéristiques particulières des institutions locales.

Dans la même logique, la commission a précisé et clarifié les articles 11 et 12 qui visent à rendre plus fluides les relations entre le conseil territorial et le Conseil économique, social et culturel, le CESC.

En revanche, la commission a supprimé l’article 8 qui ôtait la possibilité pour le conseil exécutif de confier à l’un de ses membres le soin d’animer et de contrôler un secteur de l’administration. Elle a estimé que cette disposition était la traduction institutionnelle de la collégialité exécutive que le législateur organique avait voulue en 2007. Sur ce point, elle a renouvelé son attachement à un organe exécutif collégial, comme elle l’avait fait en 2009, à propos de la collectivité voisine de Saint-Martin.

J’en viens à la seconde catégorie des articles du texte : ceux qui concernent les compétences de la collectivité. En ce domaine, les dispositions inscrites dans la proposition de loi organique ont appelé davantage de réserves de la part de la commission, qui a fait le choix d’en supprimer deux.

À l’article 2, il était proposé de faire participer davantage la collectivité de Saint-Barthélemy à l’exercice des compétences de l’État, ce que permet effectivement l’article 74 de la Constitution. Étaient ainsi concernés le droit pénal, la procédure pénale et le droit des étrangers.

En matière pénale, notre collègue proposait que les sanctions édictées par la collectivité puissent être approuvées tacitement au terme d’un délai de quatre mois, à l’expiration duquel elles seraient devenues applicables. Actuellement, le Gouvernement, censé approuver ou rejeter par décret les projets d’actes qui lui sont soumis par la collectivité, ne se prononce jamais dans les délais fixés par la loi organique. Votre commission a déjà eu l’occasion de regretter cette inertie gouvernementale, au mépris des obligations que lui fixe la loi organique. Notre collègue Thani Mohamed Soilihi a largement développé cette question dans son avis budgétaire et notre collègue Catherine Tasca a permis qu’une solution ponctuelle aboutisse en 2013, s’agissant du droit pénal de l’environnement.

Si le problème est réel, la solution proposée soulevait de sérieuses questions de constitutionnalité, car elle aboutissait, pour l’État, à un dessaisissement de facto de sa compétence pénale. Nous aurions ainsi touché à ce que notre ancien collègue René Garrec avait qualifié, lors de la révision constitutionnelle de 2003, de « sanctuaire régalien », dont le transfert à une collectivité est interdit par l’article 74 de la Constitution. Votre commission, consciente du problème, a supprimé cet article. Je constate que l’auteur de la proposition de loi organique ne sollicite pas le rétablissement du dispositif en l’état.

S’agissant du droit des étrangers et de la procédure pénale, l’examen des amendements nous permettra de revenir sur la position de la commission.

L’article 4 prévoit, quant à lui, d’étendre la compétence de la collectivité à la réglementation économique des véhicules terrestres à moteur. Au regard de la situation particulière de l’île en la matière – je rappelle qu’on y dénombre près de 11 000 véhicules pour quelque 9 200 habitants –, votre commission a approuvé le transfert de cette compétence, au demeurant limitée dans son objet. Dans l’exercice de son pouvoir normatif, la collectivité devra évidemment respecter les principes constitutionnels, à commencer par la liberté d’entreprendre.

Le texte aborde également la question des pouvoirs de la collectivité en matière de droit de préemption, à l’article 1er, et du pouvoir de sanctions administratives, en son article 3, deux articles qui ont été adoptés par la commission après le vote d’amendements de clarification.

Enfin, l’article 5 traitait d’un sujet qui tient à cœur à l’auteur de la proposition de loi organique : la création d’une caisse de prévoyance sociale propre à Saint-Barthélemy, qui prendrait en charge l’ensemble des risques. La commission a fait le choix de retirer ce dispositif du texte, car les dispositions proposées ne relevaient pas du niveau de la loi organique. Par un amendement qu’il présentera tout à l’heure, notre collègue ouvrira ce débat.

Mes chers collègues, vous l’aurez compris, la commission des lois a souhaité réaffirmer les positions qu’elle a constamment défendues, notamment en veillant à la sécurité juridique du texte et à sa conformité à la Constitution. Je tiens encore une fois à saluer, en son nom, notre collègue Michel Magras, pour l’intérêt de son initiative, dont je souligne à nouveau la démarche salutaire et exemplaire, au bénéfice de la population insulaire en particulier et pour les représentants des collectivités territoriales en général.

J’espère, madame la ministre, que le Gouvernement appuiera, à l’Assemblée nationale, cette initiative sénatoriale, …

Debut de section - PermalienPhoto de Mathieu Darnaud

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. … afin qu’elle puisse utilement prospérer.

Applaudissements

Debut de section - Permalien
George Pau-Langevin

Madame la présidente, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, sept ans après le vote de la loi organique n° 2007–223 du 21 février 2007 portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l’outre-mer, qui a érigé la commune de Saint-Barthélemy en collectivité d’outre-mer dotée de l’autonomie, nous examinons aujourd’hui la proposition de loi organique déposée par M. Michel Magras, président de la délégation sénatoriale à l’outre-mer.

Je veux moi aussi me réjouir que la révision de la loi organique de 2007 soit le fruit d’une initiative parlementaire, mûrie par l’expérience du terrain. En effet, il me semble utile que l’on puisse mener la réflexion et émettre des propositions à partir de ce que l’on observe sur le terrain de la collectivité, afin que les règles applicables soient en meilleure adéquation avec les réalités locales. De fait, c’est à l’usage que l’on voit si les règles doivent évoluer.

Si Saint-Barthélemy n’est absolument pas confrontée aux problèmes que rencontrent les autres collectivités ou les autres territoires ultramarins – on peut dire que c’est une enclave où il fait bon vivre –, on peut quand même essayer d’améliorer son fonctionnement et de répondre, de manière positive, aux attentes des élus et de la population.

À cet égard, j’accueille avec beaucoup d’intérêt les clarifications que la proposition de loi organique apporte sur le fonctionnement de la collectivité, ses compétences, l’information de son conseil territorial, la saisine du Conseil économique, social, culturel et environnemental ou encore pour ce qui concerne la composition de la commission consultative d’évaluation des charges. Toutes ces mesures vont dans le sens de l’actualisation nécessaire du statut de la collectivité de Saint-Barthélemy.

Le travail effectué par le rapporteur M. Mathieu Darnaud, lors de l’examen du texte par la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale du Sénat, …

Debut de section - Permalien
George Pau-Langevin, ministre

Le travail de M. le rapporteur a permis de compléter très utilement la réflexion, par des modifications qui tendent à améliorer la qualité et la clarté du texte. En particulier, à l’article 1er, les prérogatives du conseil territorial en matière de droit de préemption ont été renforcées. La commission des lois a également ajouté la nécessité d’une délibération motivée de la collectivité pour pouvoir exercer ce droit. Cela dit, on ne peut pas non plus élargir de manière inconsidérée le droit de préemption.

Enfin, s’agissant de l’article 2, je partage l’avis exprimé par la commission en faveur d’une préservation des compétences de l’État en matière pénale, d’une part, parce que tout ce qui touche aux libertés individuelles doit rester dans le champ exclusif de la compétence régalienne et, d’autre part, parce que la compétence en matière de droit pénal ne peut être transférée – elle ne l’est d’ailleurs dans aucune autre collectivité. Ce principe est clairement mentionné dans la Constitution.

Toutefois, je suis consciente qu’un certain nombre de difficultés existent. Il est souhaitable que nous puissions y apporter des solutions. Je comprends aussi très bien que Saint-Barthélemy veuille être mieux associée à la définition de la situation des étrangers qui entrent ou résident sur son sol. Nous réfléchissons à la publication d’une circulaire spécifique qui établirait les bases nécessaires à la préparation des décisions pouvant être soumises à consultation, dans le but de faciliter l’examen des actes transmis. Cette clarification sera utile à la fois pour votre collectivité, monsieur Magras, mais également pour l’État.

Par ailleurs, la commission des lois a consacré le pouvoir de fixation de sanctions administratives de la collectivité, ce qui aura pour effet de compléter utilement les pouvoirs dont la collectivité dispose actuellement.

Pour ce qui concerne les règles de cotisations sociales et de prélèvements destinés au financement de la dette sociale, modifiées par l’article 6, je souhaite vous indiquer que je ne suis pas opposée au fait que ces cotisations et ces prélèvements puissent être différents à Saint-Barthélemy de ce qu’ils sont ailleurs. J’ai noté que les travaux de la commission avaient conduit à valider la rédaction initiale de cet article.

Sur le fonctionnement des institutions, il me paraît aussi naturel, puisque c’est déjà le cas pour les collectivités territoriales de l’Hexagone, que le président du conseil territorial soit habilité, pour toute la durée de son mandat et par une délibération du conseil, à intenter des actions et à les défendre devant les juridictions administratives et pénales, au nom de la collectivité. Cependant, il me semble nécessaire qu’il puisse rendre compte au conseil territorial, dans de brefs délais, de l’usage qu’il fait de cette habilitation, comme cela est prévu dans le texte.

Monsieur Magras, si je reconnais que tous les sujets ne pourront pas être traités à l’occasion de l’examen de cette proposition de loi – notamment, tout ce qui a trait aux demandes d’habilitation en matière de caisse de sécurité sociale locale –, je peux vous assurer que le Gouvernement a conscience de l’ampleur des difficultés et que je reste disposée à travailler avec vous et avec l’ensemble des acteurs de la collectivité, à toutes les étapes de la navette parlementaire, afin d’améliorer le texte.

Je dois dire aussi que, si certaines des propositions que vous avez pu faire, notamment en matière d’environnement, afin de lutter contre l’importation inconsidérée de voitures, posent des difficultés, je partage vos préoccupations. En effet, compte tenu de l’impératif de sauvegarde de l’environnement, compte tenu du défi que constitue le traitement des déchets dans les petites îles, surtout lorsqu’elles sont touristiques, nous devons aujourd'hui trouver avec vous comment limiter le poids des importations de voitures dans une île comme Saint-Barthélemy.

Les débats que nous aurons aujourd'hui permettront assurément d’enrichir vos propositions. Je pense que la navette parlementaire permettra de produire une valeur ajoutée allant dans le sens des réformes que vous appelez de vos vœux.

À cet égard, je peux vous confirmer que, dans la mesure où il a la possibilité de peser quelque peu sur l’ordre du jour extrêmement chargé du Parlement, le Gouvernement insistera sur l’intérêt d’une discussion dans un délai raisonnable de la proposition de loi organique par l’Assemblée nationale, d'autant que son examen peut lui-même tenir dans un délai raisonnable.

En tout état de cause, je suis convaincue que nous allons, par ce texte, améliorer le fonctionnement de la collectivité de Saint-Barthélemy. Par conséquent, il me semble que nous faisons un travail tout à fait utile ! §

Debut de section - PermalienPhoto de Elisabeth Doineau

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, le 7 décembre 2003, les électeurs de Saint-Barthélemy se sont exprimés très majoritairement en faveur de la transformation statutaire de leur île. Afin de respecter les engagements pris lors de cette consultation, une loi organique érigeant la commune de Saint-Barthélemy en collectivité d’outre-mer a été adoptée le 21 février 2007. Cette consécration nationale a été parachevée par une consécration européenne, le territoire ayant été élevé au rang de « pays et territoire d’outre-mer » en 2012.

La proposition de loi organique qui nous est présentée aujourd’hui est le fruit d’une réflexion conduite par la collectivité de Saint-Barthélemy sur son statut, près de huit ans après l’entrée en vigueur de celui-ci.

Le ministère des outre-mer, souhaitant une réforme d’ensemble, avait sollicité plusieurs collectivités ultramarines pour dresser un bilan des différents statuts. Faute de réponse, à l’exception de celle de Saint-Barthélemy, le projet de loi organique n’a pas été déposé.

C’est dans ce contexte que notre collègue Michel Magras a repris les propositions émises par le conseil territorial dans son avis du 13 décembre 2013.

La proposition de loi organique tire les conséquences pratiques du nouveau statut de Saint-Barthélemy en permettant un certain nombre d’ajustements et d’améliorations nécessaires à la bonne administration et au bon fonctionnement de la collectivité. Elle résulte d’un premier bilan de la pratique institutionnelle sous le nouveau statut.

Il ne s’agit en aucun cas de remettre en cause l’appartenance de cette collectivité d’outre-mer à la République, il s’agit de procéder à un certain nombre d’assouplissements institutionnels et juridiques qui offriront des marges de manœuvre et d’adaptation aux spécificités de l’île.

La proposition de loi organique vise à rendre plus efficace le dispositif régissant les compétences et le fonctionnement de l’île ; c’est un objectif auquel nous souscrivons. En plus d’opérer des modifications statutaires destinées à faciliter le fonctionnement des institutions, elle comporte des dispositions relatives aux compétences respectives de la collectivité d’outre-mer et de l’État.

Au demeurant, certaines mesures figurant dans la proposition de loi organique ne sont que la transposition du droit commun des collectivités territoriales : je pense en particulier aux dispositions de l’article 9, qui précisent les règles de quorum, de délégation de vote et de majorité au sein du conseil exécutif, et à la suppression, prévue à l’article 10, d’un rapport spécial du président au conseil territorial.

De même, afin de faciliter le fonctionnement des institutions, la proposition de loi organique prévoit une consultation plus rapide du conseil économique, social et culturel ; cette simplification des règles de consultation permettra d’améliorer sensiblement le processus décisionnel.

En ce qui concerne les compétences respectives de la collectivité d’outre-mer et de l’État, la proposition de loi organique renforce la collectivité de Saint-Barthélemy, notamment en autorisant le transfert de compétence en matière de réglementation économique des véhicules terrestres à moteur et en consacrant un pouvoir de sanction administrative pour l’exercice par la collectivité d’outre-mer de ses compétences.

Nous saluons le travail accompli par la commission des lois, en particulier celui de notre rapporteur, Mathieu Darnaud, qui a fait prévaloir une position équilibrée consistant à doter la collectivité d’outre-mer des compétences nécessaires pour faciliter son fonctionnement tout en respectant les impératifs institutionnels.

Sur le plan procédural, nous soutenons les conclusions de notre rapporteur au sujet de la suppression de l’article 5, tendant à instaurer un régime de sécurité sociale propre à la collectivité de Saint-Barthélemy et géré par une caisse de prévoyance sociale. En effet, cette question ne relève pas de la loi organique ; elle devra donc être traitée dans le cadre d’un autre véhicule législatif.

Par ailleurs, cette proposition de loi organique doit nous conduire, autant, sinon plus, que les autres textes en cours de navette relatifs aux collectivités territoriales, à nous interroger collectivement sur le rôle de l’État, notamment en ce qui concerne l’exercice effectif des compétences régaliennes.

Nous considérons que les politiques publiques doivent être menées au plus près des citoyens, et les compétences exercées à l’échelon pertinent, dans un souci de pragmatisme et d’efficacité. Les spécificités de l’outre-mer justifient des adaptations du cadre législatif, dans le respect des équilibres institutionnels et de l’unité de la République française. Le texte issu des travaux de la commission concilie ces objectifs : il nous paraît équilibré et nous le soutenons.

Mes chers collègues, Saint-Barthélemy est une île sous le vent ; nous devons poursuivre notre travail législatif sous les alizés !

Applaudissements au banc des commissions.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Delebarre

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, l’initiative de Michel Magras de présenter cette proposition de loi organique n’est pas étonnante. En vérité, compte tenu des spécificités qui le caractérisent et des aspirations diverses qui animent ses populations, l’outre-mer français est aujourd’hui naturellement conduit à s’interroger en permanence sur l’évolution des règles statutaires qui régissent son fonctionnement.

Cette situation résulte de la réforme constitutionnelle du 28 mars 2003, lancée par le Président de la République Jacques Chirac, qui avait déclaré : « L’heure des statuts uniformes est passée. Il n’y a plus aujourd’hui de formule unique qui réponde efficacement aux attentes variées des différentes collectivités d’outre-mer. Chacune d’entre elles doit être libre de définir, au sein de la République, le régime le plus conforme à ses aspirations et à ses besoins, sans se voir opposer un cadre rigide et identique. »

Sans surprise, l’île de Saint-Barthélemy, située à 230 kilomètres au nord de la Guadeloupe et d’une superficie de 25 kilomètres carrés, a profité de cette évolution constitutionnelle.

Dès 1999, dans un rapport intitulé « Saint-Martin, Saint-Barthélemy : quel avenir pour les îles du nord de la Guadeloupe ? » et adressé à Jean-Jack Queyranne, alors secrétaire d’État à l’outre-mer, François Seners, que l’on connaît bien dans notre institution, analysait ainsi la situation particulière de ce territoire : « Alors que la Guadeloupe et la Martinique restent encore, pour l’essentiel, orientées vers une relation privilégiée avec la métropole, les îles du nord se sont ouvertes depuis fort longtemps sur leur environnement caraïbe et américain ».

Je rappelle que, lors des consultations populaires organisées dans l’ensemble des Antilles françaises en décembre 2003 en vue de permettre aux électeurs de choisir entre le statu quo et l’évolution statutaire au sein de la République, Saint-Barthélemy s’est prononcée à 95, 51 % en faveur de son entrée dans la nouvelle catégorie des collectivités d’outre-mer dotées de l’autonomie.

Cette évolution statutaire, consacrée par la loi organique du 21 février 2007 portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l’outre-mer, a entraîné de nombreux transferts de compétences. Ainsi, la collectivité de Saint-Barthélemy assume désormais à la fois les compétences de la région, celles du département et celles des communes. En outre, elle s’est vu attribuer des compétences spécifiques dans un nombre déterminé de matières.

Sept ans après le vote de la loi organique statutaire et le début de l’exercice par la collectivité de Saint-Barthélemy de ses nouveaux pouvoirs, le 17 avril 2014, Michel Magras et dix autres de nos collègues et anciens collègues ont déposé la présente proposition de loi, estimant que « des ajustements du statut se révèlent nécessaires dans un souci d’une meilleure adaptation à la réalité locale ». Cette démarche constructive est d’autant plus respectable qu’elle traduit la réflexion menée par la collectivité de Saint-Barthélemy à la suite de l’annonce par le précédent ministre des outre-mer, Victorin Lurel, d’une évolution institutionnelle de plusieurs collectivités d’outre-mer, dont Saint-Barthélemy.

De fait, la proposition de loi organique reprend, pour l’essentiel, une délibération adoptée par le conseil territorial le 20 décembre 2013, qui rassemble des dispositions éparses de toilettage traitant à la fois des compétences de la collectivité d’outre-mer et du fonctionnement de ses institutions. Cette délibération du conseil territorial illustre une pratique commune aux collectivités ultramarines, consistant à s’inspirer des divers statuts existants pour ne retenir que les dispositifs les plus adaptés, pour ne pas dire les plus favorables, à leur réalité locale.

On ne peut cependant fonder son jugement sur ce seul aspect de la présente proposition de loi organique. En effet, M. Michel Magras a également présenté une proposition de loi portant diverses dispositions relatives à Saint-Barthélemy, qui vise à créer une caisse de prévoyance locale ; elle a été renvoyée à la commission des affaires sociales, qui n’a pas encore désigné de rapporteur.

Comme le disait justement et avec humour Marcel Pagnol, « si l’on jugeait les choses sur les apparences, personne n’aurait jamais voulu manger un oursin » ! §En l’occurrence, je constate que la proposition de loi organique de notre collègue comporte quelques piquants législatifs, que M. le rapporteur a fort opportunément retirés en proposant la suppression de plusieurs articles ; l’examen du texte en séance publique s’en trouve bien entendu facilité.

L’un des objectifs de la proposition de loi organique et de la proposition de loi présentées par M. Magras est de créer une caisse de prévoyance sociale spécifique à Saint-Barthélemy.

Lors de sa réunion de la semaine dernière, la commission des lois a supprimé, sur proposition de son rapporteur, les dispositions de l’article 5 de la proposition de loi organique instituant des règles en faveur d’un régime de sécurité sociale spécifique à Saint-Barthélemy. Elle a en effet constaté, sans se prononcer sur le fond de la mesure proposée, que celle-ci, en l’état, ne relevait pas du niveau de la loi organique.

Le groupe socialiste se félicite de cette décision de la commission. En effet, cet article soumettait les règles en matière de sécurité sociale et de retraite au principe de spécialité législative, en prévoyant qu’elles ne seraient étendues à Saint-Barthélemy que sur mention expresse ; de surcroît, il renvoyait à une caisse sociale de prévoyance la gestion des risques maladie, maternité, invalidité, décès, accidents du travail, etc.

Or il me semble que l’annonce de la création d’une caisse spécifique de sécurité sociale suscite au niveau local certaines interrogations, voire quelques inquiétudes. Elle préfigure le transfert à la collectivité d’outre-mer de la compétence sociale, c’est-à-dire le droit pour cette collectivité de définir seule les règles applicables sur son territoire en la matière. La majorité des membres du conseil territorial, dont vous faites partie, monsieur Magras, qui avait initialement adopté une délibération demandant un tel transfert, n’est plus, semble-t-il, favorable à cette mesure.

Par ailleurs, l’article 5 anticipait sur l’adoption de la proposition de loi que j’ai évoquée il y a quelques instants, qui porte le numéro 474 rectifié (2013-2014) et qui n’a pas encore été inscrite à l’ordre du jour des travaux du Sénat.

Comme l’admet Michel Magras dans une lettre ouverte publiée le 5 juin 2014 dans Le Journal de Saint-Barth, la mesure présentée a pour objet d’ouvrir le débat sans chercher une traduction immédiate. Si on m’avait dit que je lirais un jour Le Journal de Saint-Barth ! Il est vrai que c’est uniquement, mon cher collègue, pour avoir le plaisir de vous lire…

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Delebarre

En tout cas, mon cher collègue, vous allez être rassuré : vous avez en effet ouvert le débat, mais vous n’obtiendrez pas forcément satisfaction aujourd’hui.

M. Magras a pourtant déposé plusieurs amendements au texte de la commission visant à réintroduire dans la proposition de loi organique les dispositions supprimées par la commission. Celle-ci a émis au sujet de ces amendements un avis défavorable.

Le groupe socialiste souhaite que le Sénat confirme cette position cohérente. Il proposera même de pousser plus loin la logique de la commission en supprimant l’article 6, qui procède du même esprit que l’article 5. Je crois que plusieurs autres groupes soutiendront cette démarche.

Néanmoins, il convient de ne pas sous-estimer la réalité quotidienne vécue par nos compatriotes de Saint-Barthélemy dans leur relation avec les organismes chargés de la gestion des affaires sociales. Dans ce domaine, en effet, l’île dépend toujours de structures localisées en Guadeloupe, et il est vrai que le traitement des dossiers subit parfois quelques lenteurs en raison de l’éloignement des deux territoires.

C’est un point sur lequel je souhaite attirer l’attention du Gouvernement, ainsi que celle de notre assemblée, car on nous a rapporté qu’il était mal vécu par la population locale et demeurait une source de mécontentement et d’incompréhension. Madame la ministre, soyez tranquille : tant que la moindre inquiétude subsistera dans ce domaine, vous aurez des propositions de loi de Michel Magras… Alors, réglez les problèmes et nous en aurons terminé avec une partie de la démarche de notre collègue !

Dans la même logique, M. Magras a déposé des amendements visant à rétablir tout ou partie de l’article 2 de sa proposition de loi organique, que la commission a supprimé.

Nous nous félicitons de la position prise par la commission, car les modalités prévues dans la proposition de loi organique pour permettre à la collectivité de Saint-Barthélemy de participer à l’exercice des compétences de l’État en matière pénale, de procédure pénale et d’entrée et de séjour des étrangers ne pouvaient être adoptées en l’état sans méconnaître certains principes fondamentaux.

Nous reprendrons la discussion sur ce dernier point dans la discussion des articles, lorsque nous examinerons l’amendement n° 9 de Michel Magras sur lequel, à l’initiative de son rapporteur, la commission des lois a émis un avis favorable, sous réserve de plusieurs corrections. Le groupe socialiste souhaite d’ores et déjà attirer l’attention du Gouvernement sur la nécessité de respecter les délais fixés par le législateur organique, car l’inertie des pouvoirs publics dans un certain nombre de cas revient à méconnaître le pouvoir d’initiative de la collectivité et à remettre en cause l’une des prérogatives de celle-ci.

Par ailleurs, je tiens à dénoncer les négligences dont font preuve la collectivité de Saint-Barthélemy et les services déconcentrés de l’État dans l’accomplissement de leurs obligations légales et réglementaires en ce qui concerne la production des rapports sur la situation de l’île et de la collectivité d’outre-mer. À Saint-Barthélemy, à l’évidence, on n’aime pas les rapports ! Aussi, madame la ministre, on se dispense de les faire chaque fois que cela est possible.

Dans ces conditions, il ne me semble pas pertinent de supprimer les dispositions existantes prévoyant la production de rapports annuels, sous prétexte que cette formalité n’est pas accomplie depuis plusieurs années. Puisqu’on n’aime pas les rapports, on ne les fait pas ; après quoi on soutient que, puisque les rapports n’existent pas, c’est qu’ils ne sont pas utiles… Je dois vous dire, monsieur Magras, que cette logique me paraît assez épouvantable !

Je le répète : ces manquements sont le fait de la collectivité de Saint-Barthélemy, mais aussi des services de l’État.

Quant à l’article 1er de la proposition de loi organique, il supprime la condition de résidence prévue dans le code général des collectivités territoriales pour permettre à la collectivité d’exercer son droit de préemption aux fins de sauvegarder ou de mettre en valeur des espaces naturels.

Lors de l’examen par le Sénat du projet de loi organique dont est issue la loi organique du 21 février 2007 portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l’outre-mer, qui a érigé la commune de Saint-Barthélemy en collectivité d’outre-mer dotée de l’autonomie, Bruno Magras, alors maire de Saint-Barthélemy, avait expliqué au rapporteur, Christian Cointat, que l’attribution d’une telle compétence à la future collectivité constituait une condition essentielle du maintien de la qualité de vie sur l’île et, par conséquent, de son attractivité touristique. Le rapporteur avait soutenu d’autant plus fortement cette disposition qu’elle était assortie d’un régime de dérogation assurant la protection de la population de l’île en matière de patrimoine foncier.

Michel Magras et les autres signataires de la proposition de loi organique font valoir, dans leur exposé des motifs, que, à plusieurs reprises, les critères établis par le code général des collectivités territoriales « ont fait obstacle à la préemption, en particulier les conditions de résidence ». Ils soulignent que, « dans certains cas, l’échec de la préemption peut remettre en cause un projet de sauvegarde d’espaces naturels. » En conséquence, ils proposent de modifier la loi organique pour supprimer la condition de résidence lorsque le but de la préemption est la sauvegarde ou la mise en valeur d’espaces naturels « qui constitue un pilier de la politique environnementale locale ».

En revanche, lorsque la préemption est motivée par la préservation de la cohésion sociale ou la garantie de l’exercice effectif du droit au logement pour les habitants de l’île, les auteurs de la proposition de loi maintiennent la condition de résidence.

Le groupe socialiste avait déposé sur cet article un amendement permettant d’assouplir l’exercice du droit de préemption par la collectivité sur l’ensemble des propriétés foncières en vue de la préservation de la cohésion sociale de Saint-Barthélemy. Nous souhaitions ainsi étendre la portée de l’article 1er, qui ne prévoit la facilitation de l’exercice du droit de préemption que pour la sauvegarde ou la mise en valeur d’espaces naturels.

Las ! c’était sans compter sur la vigilance constante et rigoureuse de la commission des finances, qui a déclaré notre amendement irrecevable au regard de l’article 40 de la Constitution. La justification donnée par la commission des finances est la suivante : « en ce qu’il étend un droit de préemption au profit de la collectivité de Saint-Barthélemy, le présent amendement doit être vu comme aggravant une charge publique ; les créations ou extensions de droits de préemption s’apparentent, d’un point de vue juridique, à une autorisation d’acheter un bien à laquelle est donc associé un “droit de dépenser”. » Certes, cette analyse juridique est imparable. Mais n’aurait-elle pas dû conduire la commission des finances à adopter le même raisonnement pour l’ensemble de l’article 1er de la proposition de loi ?

En tout état de cause, ainsi que le déclarait notre collègue Jacques Gillot à cette même tribune lors de l’examen de la loi organique qui a fait de Saint-Barthélemy une collectivité régie par l’article 74 de la Constitution, la République franchit un pas de plus vers la réconciliation de son unité et de sa diversité. Saint-Barthélemy a fait le choix d’un développement économique tourné vers le tourisme haut de gamme, choix qui lui a permis d’atteindre aujourd’hui le niveau de cohésion économique et sociale qu’elle connaît. Dès lors, la préservation de cet équilibre constitue indéniablement un enjeu vital pour l’avenir de l’île, et c’était là tout le sens de l’amendement déposé par le groupe socialiste, malheureusement déclaré irrecevable.

Nous avons déposé un amendement de suppression de l’article 4 relatif au transfert à la collectivité de la compétence en matière de réglementation économique de véhicules terrestres à moteur en raison du champ de compétence très étendu de la mesure de contrôle et du fait que, nous semble-t-il, la collectivité détient déjà des compétences normatives pour agir. Je constate que Michel Magras en convient lui-même, puisque son amendement n° 5 tend à limiter la portée de l’article 4 ; il a adopté une position de repli sur le type de véhicules.

Les ajustements équilibrés apportés aux dispositions relatives au fonctionnement des institutions de la collectivité n’appellent pas d’observations particulières. À cet égard, je voudrais saluer le travail de notre rapporteur, qui a amélioré la rédaction et la présentation du texte en le débarrassant des dispositions excessives qu’il pouvait comporter.

En tout état de cause, le groupe socialiste se félicite à l’instant de l’avis défavorable émis par la commission sur la création d’une caisse de prévoyance et de sécurité sociale, et sur la participation de la collectivité à certaines compétences qui nous semblent relever de l’État.

Nous n’en avons pas terminé et les allers-retours avec l’Assemblée nationale permettront peut-être d’améliorer encore ce texte, lequel, entre autres vertus, a déjà donné à l’intervenant que je suis l’envie de se rendre à Saint-Barthélemy, que je ne connais pas. Je voudrais voir si la réalité y est conforme à ce que l’on m'a dit ! §

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Mme Éliane Assassi. Vous n’êtes pas le seul à vouloir y aller !

Nouveaux sourires.

M. Thierry Foucaud remplace Mme Françoise Cartron au fauteuil de la présidence.

Debut de section - PermalienPhoto de Yvon Collin

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, sur les travées de cette assemblée, nous avons sans doute tous envie d’aller dans ces paradis…

Huit années se sont écoulées depuis que, par la loi organique du 21 février 2007, Saint-Barthélemy a acquis un statut de collectivité d’outre-mer au sens de l’article 74 de la Constitution.

Cette évolution statutaire avait été préparée en douceur, depuis de nombreuses années, puisque la commune de Saint-Barthélemy exerçait auparavant, par le biais d’accords signés avec le conseil général et le conseil régional de la Guadeloupe, des compétences pérennisées par la suite. Le temps qui s’est écoulé a permis à cette toute jeune entité de se familiariser avec sa nouvelle organisation administrative et les prérogatives qui l’accompagnent.

Certaines difficultés se sont donc fait jour dans la gestion locale de cette île de Saint-Barthélemy. Le texte qui nous est aujourd’hui proposé par notre collègue Michel Magras a été longuement mûri et avait été esquissé lors de la visite du ministre des outre-mer en juin 2013 à Saint-Martin.

Un premier sujet traité par cette proposition de loi organique est celui de la préservation de l’environnement. Depuis les années 1960, le tourisme mondial a joué un rôle majeur dans l’intégration des petites îles tropicales au système-monde. Alors que l’île de Saint-Barthélemy vit essentiellement d’un tourisme haut de gamme en raison de ses paysages paradisiaques – dont nous rêvons tous – et de sa biodiversité, il est important de continuer sur la voie déjà tracée d’un développement touristique maîtrisé et respectueux. N’oublions pas que c’est précisément le choix d’un tourisme intégré mais très rémunérateur, à l’échelle de cette petite île escarpée, qui a permis d’éviter les dérives que l’on observe trop souvent dans d’autres espaces micro-insulaires.

Dans le droit fil de cette logique de développement, le texte prévoit de faciliter l’exercice du droit de préemption par la collectivité, ainsi qu’une régulation du parc automobile, ce qui constitue un véritable enjeu économique, social et environnemental pour un espace îlotier de vingt-quatre kilomètres carrés.

L’élargissement du pouvoir de sanction administrative pour l’ensemble des compétences exercées par la collectivité, à l’article 3, viendra au soutien de ce développement régulé.

Outre ce volet environnemental, le texte s’intéresse également au fonctionnement institutionnel de l’assemblée territoriale et lui apporte diverses améliorations qui me paraissent pertinentes : la possibilité pour le président du conseil territorial d’ester en justice, la consolidation de la pratique de transmission des projets de délibération du conseil exécutif, ou la précision des règles de convocation du conseil territorial en cas d’urgence... Autant de mesures de bon sens, affûtées par la pratique empirique des huit années écoulées.

Cela nous amène toutefois aux réserves que nous souhaitons exprimer. En dépit de notre adhésion bien connue à l’expression des libertés locales, nous mettons en garde les collectivités qui auraient la volonté d’exercer des compétences régaliennes pourtant considérées comme interdites de transfert pour l’avenir.

Je pense notamment à celles qui sont citées au quatrième alinéa de l’article 73 de la Constitution : la nationalité, les droits civiques, les garanties des libertés publiques, l’état et la capacité des personnes, l’organisation de la justice, le droit pénal, la politique étrangère, la défense, la sécurité et l’ordre publics, la monnaie...

La République française est un État décentralisé, mais unitaire. Le « régime de l’Atlantique » ou le régime du « tout est applicable sauf... », en vigueur à Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon, préserve, me semble-t-il, le principe de libre administration. Mais si celui-ci a une valeur constitutionnelle, il ne saurait aboutir à ce que l’application d’une loi organisant l’exercice d’une liberté publique dépende de décisions des collectivités territoriales.

Pour toutes ces raisons, dans cette logique qui est la nôtre, nous, les membres du groupe RDSE, approuvons l’équilibre auquel est parvenue la commission et nous voterons à l’unanimité ce texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Aline Archimbaud

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le président de la délégation sénatoriale à l’outre-mer, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, il est primordial pour l’équilibre démocratique du pays que nous, parlementaires, ne nous contentions pas d’interpeller le Gouvernement, de voter la loi ou de l’amender. Nous devons également initier, lorsque nous l’estimons nécessaire, certaines réformes au travers de propositions de loi.

C’est le cas avec ce texte, et je tenais ainsi à saluer le travail de mon collègue Michel Magras, président de la délégation sénatoriale à l’outre-mer, qui a tenu, sept ans après le vote du nouveau statut de Saint-Barthélemy, à proposer des ajustements apparus, à l’usage, pertinents à ceux qui connaissent cette collectivité.

Pour appuyer cette démarche d’observation puis de proposition, je soutiendrai donc plusieurs dispositions de ce texte, notamment l’article 1er qui permettra l’exercice du droit de préemption par la collectivité sur l’ensemble des propriétés foncières pour la sauvegarde ou la mise en valeur d’espaces naturels – y compris, semble-t-il, celles qui sont détenues par des personnes résidant à Saint-Barthélemy.

Mes chers collègues, vous comprendrez bien que cette mesure, en tant qu'écologiste, me paraît très utile pour protéger la nature et la biodiversité, qui sont particulièrement fragiles dans un système insulaire. Cette biodiversité est l’un des atouts majeurs des territoires d’outre-mer et elle doit absolument être préservée.

Pour les mêmes raisons, je soutiendrai d’ailleurs l’amendement n° 2, déposé par l’auteur du texte, qui vise à inscrire dans la loi l’extension du rôle du conseil économique, social et culturel au domaine de l’environnement.

Pour autant, je ne soutiendrai pas toutes les dispositions de ce texte. Ne pouvant, faute de temps, les évoquer, je m'attarderai sur l’article 5, supprimé en commission, mais repris en partie à travers l’amendement n° 6 de notre collègue M. Magras. Deux questions semblent ici en jeu. D’une part, l’éloignement des habitants de Saint-Barthélemy d'une caisse de sécurité sociale, et, en conséquence, la piètre qualité du service rendu aux administrés : longs délais, dossiers perdus, éloignement physique de cette administration… En tant qu’auteur d’un rapport remis en 2013 au Premier ministre sur l’accès aux soins et aux droits sociaux, je ne peux qu’être sensible à cet argument. Madame la ministre, des solutions doivent être trouvées, car cette réalité, sur laquelle notre collègue insiste, n’est pas satisfaisante, et l’on ne peut plus attendre de nouveaux débats !

Autant il est intéressant de pouvoir mettre en œuvre localement le droit national pour être plus proche des citoyens, surtout pour appliquer la loi – une solution, dont j’entends qu’elle est débattue, consisterait peut-être à créer sur place un service d’accueil des populations de sorte que les dossiers ne traînent pas pendant des mois, il y a urgence ! –, autant il semble plus délicat de justifier cette demande d’évolution par le fait de vouloir mieux correspondre au contexte économique de l’île, en d’autres termes de diminuer les charges sociales. Sur ce point, il y a évidemment débat.

D’autre part, et c’est la seconde question qui est en jeu, cette disposition, je l’ai bien compris, viserait à permettre à la collectivité de Saint-Barthélemy de mettre en place un système différent de celui qui prévaut sur le reste du territoire national. Elle permettrait donc à l’État de déroger au taux de cotisation, et ce point nous pose bien sûr problème.

C’est d’ailleurs dans cet état d’esprit que l’article 6 du texte prévoit de supprimer la référence à l’analogie avec la Guadeloupe en matière de cotisations sociales et pour les autres prélèvements destinés au financement de la protection sociale et à l’amortissement de la dette sociale. Au-delà de la question du bien-fondé économique de cette mesure, se pose la question fondamentale de la solidarité nationale et de son articulation avec un territoire spécifique.

La solidarité nationale est le fondement de la sécurité sociale, notamment de sa branche maladie. À quel titre un territoire, Saint-Barthélemy, pourrait-il choisir de moins cotiser que d’autres ? Je sais que cette question délicate sera débattue tout à l'heure. Mais si tous les territoires tenaient le même raisonnement, où irions-nous ?

La question se pose d’ailleurs aussi à titre individuel de savoir quels sont les droits acquis par les uns et par les autres. Ceux qui viennent travailler à Saint-Barthélemy pendant quelques années avant de retourner en métropole ou ailleurs, obtiendront-ils les mêmes avantages en termes de retraite ou de chômage, alors qu’ils auront moins cotisé ? Je pense que nous en débattrons...

Le temps qui m’était imparti étant presque écoulé, je conclus. Nous, les écologistes, soutiendrons un certain nombre d'articles. Nous réservons cependant notre vote final sur ce texte en fonction des amendements qui seront ou non adoptés. Il est certain que, en l’état, l’adoption de l’amendement n° 6 nous poserait problème.

M. André Gattolin applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le président de la délégation sénatoriale à l’outre-mer, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la proposition de loi organique de Michel Magras semble empreinte de bon sens dans sa volonté de procéder à des ajustements au statut de l’île de Saint-Barthélemy, collectivité d’outre-mer dotée de l’autonomie.

Cette volonté est d’autant plus méritoire que Saint-Barthélemy est la seule collectivité d’outre-mer ayant répondu à la demande de votre prédécesseur, madame la ministre, qui souhaitait dresser un bilan de l’application des différents statuts ultramarins créés par la loi organique de février 2007, afin de réformer ce texte.

Notre collègue Michel Magras a donc essentiellement repris, sous la forme de cette proposition de loi organique, les différentes propositions faites par le conseil territorial de l’île.

À nos yeux, cette démarche est réaliste, et il est tout à fait compréhensible que, après quelque huit ans d’usage, le statut de cette collectivité nécessite quelques adaptations.

Notre rapporteur, Mathieu Darnaud, a excellemment montré que, sur le fond, cette proposition de loi organique ne remettait en cause ni l’équilibre des institutions de Saint-Barthélemy ni son statut de collectivité d’outre-mer. C’est là l’essentiel.

Ainsi, globalement, en ce qui concerne la simplification du fonctionnement des institutions de l’île, les dispositions proposées sont positives.

C’est la raison pour laquelle notre commission n’a modifié le texte que sur quelques points, pour l’améliorer ou le préciser.

En revanche, le diable se cachant parfois dans les détails, les choses ont été plus délicates pour ce qui a trait à l’élargissement de certaines des compétences et prérogatives de la collectivité.

Deux points ont plus spécialement retenu mon attention.

En premier lieu, au prétexte, certes fondé constitutionnellement, d’une participation plus importante de la collectivité aux compétences de l’État dans certains domaines, le texte de notre collègue Michel Magras ouvrait la voie à une dépossession de l’État de certaines de ses compétences régaliennes.

J’ai notamment été particulièrement sensible, et vigilante, aux dangers que pourrait comporter la possibilité de fixer des règles en matière d’entrée et de séjour des étrangers.

Il faut en effet avoir présent à l’esprit le contexte de la région, caractérisé par ce qu’il est pudiquement convenu d’appeler une « pression migratoire » en provenance d’Haïti et de la Dominique. Cette pression s’exerce d’abord sur le département de la Guadeloupe et sur la collectivité territoriale voisine de Saint-Martin.

Je crains qu’en voulant prémunir Saint-Barthélemy des difficultés que provoque ce phénomène, notre collègue n’ait la tentation de fixer des règles spécifiques à cette collectivité. Au nom de l’unité de la République, sujet très en vogue ces temps-ci, il ne serait pas acceptable d’aborder cette question d’une manière différente de celle retenue pour l’ensemble du territoire national.

Ainsi notre commission a-t-elle supprimé à juste raison l’article 2, qui comportait également des dispositions concernant le droit pénal et la procédure pénale, le transfert dans ces domaines étant par ailleurs interdit par l’article 74 de notre Constitution.

En second lieu, certaines difficultés, qui ne sont pas seulement d’ordre juridique, ont trait à des dispositions visant à instituer des règles en faveur d’un régime de sécurité sociale, qui serait, là aussi, spécifique à Saint-Barthélemy.

L’application de ces nouvelles règles aurait débouché sur la création d’une caisse locale de prévoyance sociale couvrant l’ensemble des risques : maladie, maternité, invalidité, décès, accidents du travail et maladies professionnelles, vieillesse et perte d’emploi. Bref, en territoire français, une petite sécurité sociale propre à une communauté de 9 000 personnes !

Certes, en supprimant également l’article 5, notre commission ne s’est pas prononcée sur le fond. Elle a simplement constaté qu’une telle modification ne relevait pas d’une loi organique. Je partage cette argumentation.

Toutefois, je pense qu’il ne s’agit pas uniquement de cela ni de la seule volonté de restaurer une forme de proximité dans la gestion du régime de sécurité sociale.

Pour ma part, je refuse de voir une portion du territoire français s’affranchir de la législation nationale métropolitaine, …

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

… afin de ne pas être solidaire du déficit des caisses de sécurité sociale du département de la Guadeloupe.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

De grâce, il y a déjà dans les îles de Saint-Martin et Saint-Barthélemy suffisamment de franchises fiscales et douanières, reposant sur un système de plus en plus libéral sur les plans économique et social, pour ne pas en ajouter au plan institutionnel et éloigner ces territoires encore un peu plus de la République !

Je me réjouis donc que notre commission ait eu la sagesse et la clairvoyance de supprimer ces deux articles. Je pense qu’en procédant de la sorte nous mettons un frein aux tentations, qui ne manquent pas non plus d’apparaître dans certaines de ces nouvelles collectivités, d’empiéter sur les responsabilités régaliennes. §

Je souhaite que la discussion qui va suivre confirme la suppression de ces deux articles, ce qui permettra au groupe communiste, républicain et citoyen de voter cette proposition de loi organique relative à la collectivité de Saint-Barthélemy, dans le texte issu des travaux de notre commission. §

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion des articles du texte de la commission.

CHAPITRE Ier

Compétences de la collectivité de Saint-Barthélemy

L’article L.O. 6214–7 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

2°Le troisième alinéa est ainsi rédigé :

« Lorsque l’exercice du droit de préemption a pour but de préserver la cohésion sociale de Saint-Barthélemy ou de garantir l’exercice effectif du droit au logement de ses habitants, le deuxième alinéa n’est pas applicable aux transferts réalisés au profit des : » ;

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Magras

Initialement, l’article 1er ne vise à étendre le droit de préemption de la collectivité qu’en cas de transfert entre résidents, lorsqu’il s’agit de sauvegarder ou mettre en valeur des espaces naturels.

Le choix de ne lever la restriction que dans ce cas procède de l’idée que les dispositions de la loi statutaire encadrant la préemption permettent en l’état de garantir l’exercice effectif du droit au logement et de préserver la cohésion sociale.

En effet, à l’origine, cet article visait à favoriser la conservation du patrimoine foncier en prévenant l’« évasion foncière » par la vente au profit de non-résidents.

Comme chacun peut aisément le concevoir, sur un territoire de vingt-cinq kilomètres carrés, le foncier est un enjeu majeur et suppose une gestion rigoureuse.

À Saint-Barthélemy, cette gestion repose sur un équilibre constant entre l’impératif social de garantir un logement et celui de préserver des espaces naturels.

La collectivité mène une politique d’une rigueur particulière de définition des zones naturelles terrestres non constructibles et, dans cette optique, elle conçoit le droit de préemption comme un outil supplémentaire.

De plus, pour être sincère, nous n’avions pas souhaité étendre le droit de préemption aux autres domaines, afin de préserver de la tentation d’une utilisation à des fins détournées. La loi s’applique à une réalité, celle d’une petite île, et l’on ne peut garantir que ce droit ne devienne, par exemple, une arme de blocage de projets entre particuliers. Je pense que vous comprenez ce que je veux dire.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Magras

Je note enfin que la commission a précisé l’obligation de motivation des délibérations relatives au droit de préemption, en introduisant dans la loi une prescription qui avait déjà été faite par le Conseil d’État dans un avis, et à laquelle je ne peux que souscrire.

En vous apportant ces quelques précisions, je souhaitais vous donner l’assurance que la collectivité ne hiérarchise pas les finalités du droit de préemption en plaçant la préservation des espaces naturels au-dessus des objectifs à caractère social. Elle a seulement considéré que ces derniers étaient suffisamment garantis.

L'article 1 er est adopté.

(Supprimé)

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Magras

L’article 2 prévoyait initialement trois dispositions.

La première, le a, visait à introduire une procédure d’approbation tacite des sanctions pénales à caractère réglementaire. Ce mécanisme devait permettre de trouver une solution aux délais anormalement longs – une durée moyenne de deux à trois ans est constatée – pour l’adoption des sanctions pénales.

Toutefois, il faut reconnaître que le champ des aménagements possibles est étroit. À la faveur de l’analyse de la commission des lois, j’admets que la procédure d’approbation tacite pourrait être interprétée par le Conseil constitutionnel comme le dessaisissement par l’État d’une compétence régalienne. En conséquence, je considère que la suppression du a de l’article 2 initial est parfaitement justifiée.

Tel ne me semble pas le cas, en revanche, s’agissant du b de ce même article.

En premier lieu, j’insiste sur le fait que l’article 2 s’inscrit dans le cadre strict de la participation de la collectivité aux compétences de l’État, lequel, de ce fait, conserve toujours la possibilité de s’opposer aux propositions que la collectivité pourrait être amenée à lui adresser par délibérations.

En second lieu, comme le souligne le rapport de la commission, la collectivité est bien consultée sur la réglementation de l’entrée et du séjour des étrangers, mais ce n’est pas faire injure à l’État de rappeler que, dans le cadre d’une consultation, les observations de la collectivité n’ont pas la même portée que dans le cadre d’une participation à l’exercice de compétences de l’État, prévue, je le rappelle, par la loi organique.

Certes, l’entrée et le séjour des étrangers est une matière très vaste et touchant aux libertés publiques. Toutefois, avec ce dispositif, l’objectif de la collectivité est de garantir une meilleure adaptation des règles adoptées en matière d’entrée et de séjour à la situation de Saint-Barthélemy, en participant à l’édiction des normes. Dans la mesure où l’économie repose entièrement sur le tourisme, elle dépend aussi des conditions d’entrée des visiteurs, qu’il convient de définir au plus près des besoins.

J’espère que les éléments complémentaires que je vous apporterai lorsque nous aborderons les amendements que j’ai déposés visant à insérer des articles additionnels après l’article 4 me permettront de vous convaincre.

En outre, l’article 2 comportait, dans son c, une disposition relative à la recherche et à la constatation des infractions aux règles fixées par la collectivité dans les domaines de compétences qui lui ont été transférés.

Une telle possibilité se situe en effet dans le prolongement et en cohérence avec celle, pour la collectivité, de fixer les sanctions, sous le contrôle de l’État, en cas d’infraction aux règles qu’elle fixe. En effet, lorsqu’il n’existe pas localement d’équivalent aux agents et fonctionnaires de l’État habilités à rechercher et constater les infractions relevant du droit national, ou de police spéciale, il conviendrait que la collectivité puisse au moins indiquer ceux de ses agents et fonctionnaires chargés de cette mission, ce qui garantirait que les règles fixées sont effectivement respectées.

La commission a relevé l’insuffisance de la rédaction initiale, corrigée par un amendement que je vous présenterai.

Vous l’aurez compris, les dispositions de cet article 2 feront l’objet d’amendements qui seront présentés dans la suite de la discussion.

L’article L.O. 6251–4 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

a) Après le premier alinéa, est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Sans préjudice des sanctions pénales prévues à l’article L.O. 6251–3, la violation des règles que le conseil territorial fixe dans les matières mentionnées à l’article L.O. 6214-3 peut être assortie par celui-ci de sanctions administratives. » ;

b)

Au second alinéa, après le mot : « retard », sont insérés les mots : « et des sanctions administratives ». –

Adopté.

(Non modifié)

Après le 9° de l’article L.O. 6214–3 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un 10° ainsi rédigé :

« 10° Importation, exportation, vente et location de véhicules terrestres à moteur. »

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Magras

Cet article 4 ouvre la discussion, d’une part, sur les transferts de nouvelles compétences et, d’autre part, sur la participation à l’exercice des compétences de l’État.

Je vous propose le transfert de deux compétences.

L’une relève du domaine du commerce. Il s’agit de réguler l’engorgement engendré par le développement du nombre de voitures de location sur l’île. L’autre vise à rendre la collectivité compétente pour délivrer les cartes et titres de navigation pour certaines catégories de navires.

En ce qui concerne la participation à l’exercice des compétences de l’État, qui fera l’objet d’une demande d’extension, il convient de rappeler que, lorsque la collectivité se situe dans ce cadre, elle est entièrement sous le contrôle de l’État.

Elle est même sous double contrôle : celui de l’État, qui peut s’opposer à la proposition de la collectivité, y compris en opportunité, et celui du Parlement, sans la ratification duquel les dispositions de l’acte ne peuvent entrer en vigueur. Ce processus, qui vaut aujourd’hui pour les sanctions pénales, serait étendu aux autres domaines, bien sûr si les amendements proposés en ce sens étaient adoptés.

Cette participation se distingue donc d’un transfert de compétence, en plaçant la collectivité sous tutelle de l’État. C’est un aspect fondamental, car cela signifie que, dans ces conditions, la collectivité ne peut mettre en œuvre aucun projet qui ne recueillerait tant l’approbation de l’État que celle du Parlement.

La collectivité demande que la participation soit étendue au domaine de la protection et de la fiscalité sociales. Mes chers collègues, je mesure à quel point il s’agit d’un domaine lourd de symbolique. J’ai aussi conscience de l’image véhiculée par d’autres collectivités d’outre-mer en cette matière.

Toutefois, je tiens à rappeler que cette disposition a été introduite après délibération de la collectivité de Saint-Barthélemy, qui exprime la volonté de se placer sous la tutelle de l’État, tout en souhaitant disposer d’une organisation du système de protection sociale qui lui soit propre. C’est d’ailleurs le cas pour l’ensemble des collectivités d’outre-mer régies par l’article 74 de la Constitution. Nous ne demandons donc pas un régime spécifique, puisque les autres collectivités, à l’exception de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin, bénéficient déjà d’une telle possibilité.

Il ne s’agit par conséquent en aucun cas d’un transfert de compétence, qui laisse la collectivité libre de fixer les règles sous réserve de leur légalité. Le risque évoqué tout à l’heure n’existe donc pas.

Je dois aussi souligner que l’intention de Saint-Barthélemy de participer aux compétences de l’État en matière de protection sociale est connue, puisqu’elle a fait l’objet d’une proposition de loi, dont vous faisiez état tout à l’heure, madame la ministre, et que j’avais moi-même déposée sur le bureau du Sénat. La collectivité ne souhaite pas décider unilatéralement des règles.

On sait donc d’ores et déjà qu’elle n’entend pas se soustraire à la solidarité nationale. Elle propose à cet effet la création d’une taxe de solidarité, ce qui fait que Saint-Barthélemy serait ainsi la seule collectivité d’outre-mer à participer à la solidarité nationale avec une telle taxe.

Enfin, un amendement concernera la procédure elle-même, afin de pallier, je l’ai dit tout à l’heure, les difficultés rencontrées pour l’entrée en vigueur des dispositions adoptées, en raison de décrets pris dans des délais anormalement longs. Ce sera aussi l’occasion de clarifier la possibilité pour le Parlement d’adopter « directement » des dispositions ayant fait l’objet d’une divergence d’interprétation.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

L'amendement n° 11, présenté par M. Delebarre et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Michel Delebarre.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Delebarre

Cet amendement, que je présente au nom du groupe socialiste, vise à supprimer l’article 4. Or M. Magras a déposé un amendement n° 5 rectifié, en quelque sorte un amendement de repli, qui vise à permettre à la collectivité de réglementer et de réguler seulement l’activité de location de véhicules terrestres à moteur.

Je suis prêt à voter l’amendement de M. Magras, mais encore faut-il que l’amendement n° 11 ne soit pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Mathieu Darnaud

Monsieur Delebarre, votre amendement vise à supprimer l’article 4.

Comme vous l’avez signalé, notre collègue Michel Magras a déposé un amendement n° 5 rectifié visant à restreindre le champ d’application de l’article 4 à la seule location de véhicules terrestres à moteur, amendement en faveur duquel la commission s’est unanimement prononcée.

Comme je l’ai rappelé tout à l’heure, sur l’île de Saint-Barthélemy circulent un nombre important de véhicules – plus de 11 000 –, alors qu’elle ne compte que 9 200 habitants.

L’amendement de M. Magras semble répondre à votre préoccupation, mon cher collègue.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Delebarre

Mais il ne viendra pas en débat si l’amendement n° 11 est adopté.

Debut de section - Permalien
George Pau-Langevin, ministre

Je comprends le souci de limiter le nombre de véhicules en circulation compte tenu de la petite taille de Saint-Barthélemy, et ce afin de préserver les paysages ou de s’épargner de trop grandes difficultés pour se débarrasser des épaves de voitures.

Pour autant, la volonté de réglementer simplement le nombre de véhicules de location ne me semble pas totalement cohérente avec le souhait de voir se développer le tourisme.

Face à ces préoccupations contradictoires, le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Monsieur Magras, plutôt que de mettre aux voix dès à présent l’amendement n° 11 de M. Delebarre, dont l’adoption aurait pour effet de rendre sans objet le vôtre, je propose que vous présentiez celui-ci maintenant.

Il s’agit de l'amendement n° 5 rectifié, présenté par MM. Magras, Milon, Bignon, Karoutchi, Bizet, del Picchia et D. Robert, Mme Deromedi et MM. Laufoaulu, Fontaine, Grand, Nougein, Mandelli et Pierre, qui est ainsi libellé :

Alinéa 2

Rédiger ainsi cet alinéa :

« 10° Location de véhicules terrestres à moteur. »

Vous avez la parole pour le défendre, monsieur Magras.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Magras

Il est d’abord exact de considérer que la collectivité dispose des moyens lui permettant de réglementer le nombre des véhicules autorisés à circuler. En effet, celle-ci est compétente en matière de circulation routière et de transport routier. Mais le problème qui se pose, et qu’il s’agit de régler, va au-delà de la simple circulation des véhicules.

Comme je l’ai rappelé, ainsi que le rapporteur, Saint-Barthélemy fait vingt-quatre kilomètres carrés, ce qui suppose une gestion d’un espace qui n’est pas extensible alors que la population augmente et que l’activité économique s’y développe.

Dans ces conditions, au-delà de la circulation, se pose la problématique du stockage, du stationnement. Par exemple, afin d’éviter une prolifération du stationnement sauvage, qui d’ailleurs peut être dangereux quand on connaît la topographie de l’île, le code de l’urbanisme rend obligatoire un emplacement de stationnement pour toute construction d’une habitation.

Aujourd’hui, l’île compte plus de 11 000 véhicules pour une population de 9 200 habitants. L’activité de location de voitures doit être regardée du point de vue de l’espace qu’elle occupe.

Réguler l’activité par le biais de la compétence circulation serait inopérant, car il est notamment impossible de limiter le nombre de voitures autorisées à la location pour contenir le nombre de véhicules en circulation sur l’île.

Cela reviendrait à imposer aux professionnels de la location de plafonner leur activité commerciale. Chacun en mesure les implications. Le droit du commerce n’est pas de notre compétence.

En revanche, en ayant compétence pour réguler la profession, la collectivité pourrait en limiter le développement, notamment en fixant les conditions pour l’ouverture d’un commerce de location de voitures.

Elle pourrait par exemple conditionner l’autorisation d’ouvrir un tel commerce à l’obligation de disposer d’un nombre de places de stationnement égal au nombre de véhicules en location.

Les possibilités de stationnement étant par nature restreintes sur l’île, cela permettrait de réguler naturellement le développement de l’activité.

Sans doute cela vous surprendra-t-il, sur une petite île, l’enjeu n’est pas de créer du développement, mais de le maîtriser, car l’encourager peut conduire rapidement à l’asphyxie. C’est dans ce sens que la collectivité souhaite pouvoir réguler l’activité commerciale.

J’ai bien compris que, dans sa rédaction initiale, l’article 4 portait sur des sujets – par exemple le commerce international – sur lesquels nous n’avions pas mené une réflexion suffisamment approfondie.

C’est la raison pour laquelle j’ai déposé cet amendement de repli. À défaut de pouvoir limiter la vente, l’importation et l’exportation de véhicules, nous souhaiterions au moins avoir le droit d’agir sur les sociétés de location de voitures.

Cette activité, qui compte sans doute parmi les plus prospères sur l’île, est également celle sur laquelle s’exerce la pression la plus forte en matière de défiscalisation. Il faut que vous le sachiez, mes chers collègues !

Debut de section - PermalienPhoto de Mathieu Darnaud

Comme je l’ai dit voilà quelques instants, la commission a émis un avis favorable sur cet amendement n° 5 rectifié, et elle sollicite le retrait de l’amendement n° 11.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

L'amendement n° 11 est retiré.

Quel est l’avis du Gouvernement sur l'amendement n° 5 rectifié ?

Debut de section - Permalien
George Pau-Langevin, ministre

Sagesse.

L'amendement est adopté.

L'article 4 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

L'amendement n° 1 rectifié bis, présenté par MM. Magras, Milon, Bignon, Pierre, Bizet, del Picchia et D. Robert, Mme Deromedi et MM. Laufoaulu, Fontaine, Grand, Mandelli, Karoutchi et Nougein, est ainsi libellé :

Après l’article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au 3° du I de l’article L.O. 6214–3 du code général des collectivités territoriales, après les mots : « immatriculation des navires ; », sont insérés les mots : « carte et titre de navigation des navires de plaisance à usage personnel non soumis à francisation ou de moins de vingt-quatre mètres ; ».

La parole est à M. Michel Magras.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Magras

L’immatriculation des navires est inscrite au titre des compétences qui ont été transférées à la collectivité par sa loi statutaire.

À ce titre, Saint-Barthélemy dispose de ses propres lettres affectées à l’immatriculation des navires.

Or, en l’absence de compétence pour délivrer la carte de circulation des navires, l’immatriculation est une compétence « incomplète » au regard de l’objectif de simplification des formalités pour les plaisanciers. Alors qu’elles devaient être simplifiées, en l’état, les formalités ont en réalité été alourdies.

Concrètement, pour un navire de plus de sept mètres, un plaisancier voulant s’immatriculer à Saint-Barthélemy a trois interlocuteurs administratifs : les douanes pour la francisation, la collectivité pour l’immatriculation et la direction de la mer de Guadeloupe pour le titre de navigation.

Dans le cas d’un navire de moins de sept mètres, il devrait s’adresser aux deux derniers, la francisation n’étant pas obligatoire pour les bateaux de moins de sept mètres, eu égard aux eaux sur lesquelles ces bateaux peuvent naviguer.

Comme dans d’autres domaines, viendront s’ajouter des délais de traitement allant jusqu’à six mois, voire plus.

C’est pourquoi, en l’absence de service déconcentré sur le territoire de Saint-Barthélemy, la volonté est de créer un quartier des affaires maritimes – nous avons déjà délibéré sur ce point – afin que seule la francisation, qui est une compétence régalienne, ait à être effectuée auprès de la direction des douanes.

L’article L.O. 6251-3 du code général des collectivités territoriales lui permettant de fixer des règles en matière de sécurité maritime sous le contrôle de l’État, la collectivité a adopté un acte constituant la première étape de la création de son registre d’immatriculation des navires.

Mais, puisqu’elle n’est pas compétente pour délivrer les cartes de circulation, l’acte est bloqué au stade de l’approbation par décret, l’administration considérant que la carte de navigation est un titre de sécurité qui échappe à la compétence sécurité de la collectivité.

À travers cet amendement, nous proposons donc de simplifier la procédure en étendant la compétence de la collectivité à la sécurité et à la délivrance de la carte de circulation pour les navires non soumis à francisation ou pour ceux de moins de vingt-quatre mètres.

Debut de section - PermalienPhoto de Mathieu Darnaud

Cet amendement vise à préciser la compétence de la collectivité de Saint-Barthélemy en matière de navires, car elle entre en concurrence avec celle de l’État.

Le sujet est relativement précis puisqu’il porte sur la « sécurité et carte de circulation des navires de plaisance à usage personnel de moins de vingt-quatre mètres non soumis à francisation ».

Faute d’informations permettant de trancher cette question, la commission s’en remet à l’avis du Gouvernement.

Debut de section - Permalien
George Pau-Langevin, ministre

Nous comprenons très bien les raisons qui ont motivé le dépôt de cet amendement. Une fois de plus, monsieur Magras, vous soulignez les délais excessifs pour répondre aux demandes. C’est un problème que nous étudierons de près avec la direction générale des outre-mer, afin que l’on puisse remédier à cette situation qui n’est pas satisfaisante.

Néanmoins, cet amendement soulève une difficulté. L’État est compétent en matière de francisation des navires, de délivrance des titres de navigation et de sécurité maritime. Or l’acte de francisation et le titre de navigation se matérialisent par un seul document. Par conséquent, si l’on peut transférer la compétence s’agissant de la délivrance du titre de navigation – à condition d’en prévoir les modalités –, il n’est pas possible de faire de même avec l’acte de francisation. Afin de pouvoir vous donner satisfaction, il faudrait envisager l’hypothèse que soient délivrés des titres de navigation à des navires non francisés, ce qui nous semble juridiquement impossible.

En outre, il s’agit d’une compétence régalienne de l’État.

Malheureusement, le Gouvernement ne peut vous suivre et il émet donc un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Michel Delebarre, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Delebarre

L’avantage avec M. Magras, c’est que nous visitons des contrées que nous ne connaissons pas.

En lisant sa proposition de transférer à la collectivité la compétence pour délivrer des cartes et titres de navigation pour des navires de vingt-quatre mètres, je dois avouer sincèrement que j’en suis resté ébahi !

Je ne suis pas très favorable à ce que cette compétence soit décentralisée. Vingt-quatre mètres, ce n’est pas rien pour un navire ! Et vu la clientèle qu’adore, à juste titre pour des raisons économiques, M. Magras, sa prochaine demande portera sur les navires de cent douze mètres ! Ainsi, il aura compétence sur les gros yachts.

D’après les conversations que j’ai eues avec lui, j’ai cru comprendre que notre collègue se satisferait de fixer ce seuil à sept mètres, cela lui permettant de régler ses problèmes. Aussi, madame la ministre, si M. Magras acceptait de modifier sa proposition dans un sens plus raisonnable, le Gouvernement ne pourrait-il pas revoir sa position ?

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Michel Magras, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Magras

D’abord, pourquoi ces seuils de sept mètres et de vingt-quatre mètres ? Ces longueurs constituent des paliers fixés par la loi nationale. En deçà d’une longueur de sept mètres, un bateau n’a pas à être francisé parce qu’il ne peut naviguer que dans les eaux intérieures, sur lesquelles la loi donne déjà une compétence à la collectivité en matière de sécurité.

Par ailleurs, la francisation d’un navire – autrement dit, lui donner la nationalité française – est un acte régalien que l’État ne peut pas transférer ; ce sont les douanes qui en sont chargées et nous ne demandons pas le transfert de cette compétence.

Depuis 2011, j’ai participé à plusieurs réunions avec les services des douanes au cours desquelles a été évoqué le projet de dématérialiser cette procédure de francisation. Cela signifie que les services des douanes, même situés à Paris ou à Saint-Malo, pourraient, une fois les documents reçus, instruire les dossiers et, si les critères sont respectés, décider de délivrer l’acte de francisation.

La délivrance d’une carte de circulation et de navigation implique l’obéissance à un certain nombre de critères de sécurité, tant pour le bateau lui-même que pour le matériel embarqué au titre de la sécurité. La liste est contrôlée par les inspecteurs, qui vérifient que l’ensemble du matériel exigé est à bord et que toutes les règles sont respectées.

Cela étant dit, nous ne souhaitons pas assurer à la place de l’État la sécurité en mer, puisque ce dernier dispose à cet effet de services compétents, avec des moyens autrement plus importants que ceux qui pourraient être mis en place par une petite collectivité.

Par conséquent, aujourd’hui, le contrôle est effectué en collaboration entre nos services et ceux de la direction de la mer. À la limite, si l’on me donnait par convention le droit de travailler avec ces services pour la procédure de contrôle et de délivrance de la carte de navigation, ce serait déjà pour moi une satisfaction.

J’en viens à la proposition de M. Delebarre de nous accorder les bateaux de moins de sept mètres : cela permettrait au propriétaire d’un petit navire d’obtenir très rapidement l’immatriculation de son bateau par la collectivité, sans qu’il attende six mois avant que la direction de la mer lui renvoie un droit de naviguer, après vérification, à bord, des bouées de sauvetage et du respect des normes de construction européennes.

Aujourd’hui, tous les bateaux, même quand ils sont fabriqués aux États-Unis – les Américains savent conquérir le marché européen –, sont aux normes européennes. De surcroît, un certain nombre d’agences, dans la Caraïbe, viennent les certifier, même si cela coûte cher. Je pourrais même vous donner le prix, car c’est une activité commerciale.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Magras

Un simple contrôle destiné à vérifier la conformité du bateau aux normes est facturé 1 700 euros, …

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Magras

… par des inspecteurs qualifiés, assermentés et agréés pour exercer cette profession à titre privé.

Si vous réduisiez le dispositif aux petits bateaux de sept mètres, je considérerais que ma demande est à moitié satisfaite. Je suis donc prêt à modifier mon amendement en ce sens, si vous allez dans cette direction.

Debut de section - Permalien
George Pau-Langevin, ministre

Il y a l’objectif visé par l’amendement, mais un certain nombre de vérifications doivent être effectuées.

Monsieur le sénateur, ma position ne peut pas varier aujourd’hui, je peux néanmoins d’ores et déjà vous assurer que nous allons examiner de nouveau la question durant la navette avec les services compétents, afin de trouver une solution susceptible de vous donner satisfaction, au moins partiellement.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Michel Magras, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Magras

J’entends bien les propos de Mme la ministre. Toutefois, s’agissant d’une proposition de loi organique, je ne sais pas si cette disposition devrait être réintroduite à l’Assemblée nationale au cours de la navette et si, la procédure accélérée n’ayant pas été engagée, le texte fera l’objet d’une deuxième lecture et, éventuellement, d’une commission mixte paritaire. N’étant pas suffisamment spécialiste en la matière, je ne peux vous dire précisément comment l’examen de ce texte va se dérouler.

Je crains que l’Assemblée nationale n’introduise une disposition que le Sénat n’aurait pas envisagée. Pour ma part, je serais tenté de proposer à mes collègues d’adopter mon amendement modifié afin qu’il concerne les seuls bateaux de moins de sept mètres, quitte à ce que cette disposition soit supprimée à l’Assemblée nationale si elle n’est pas conforme à la réglementation.

Quoi qu’il en soit, madame la ministre, je suis prêt à poursuivre la discussion avec les services de la direction de la mer et de la direction nationale des douanes, en souhaitant que vos services continuent à piloter et arbitrer, comme ils l’ont fait depuis 2011.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Magras

Oui, monsieur le président, je le rectifie, afin qu’il vise à insérer les mots « carte et titre de navigation des navires de plaisance à usage personnel non soumis à francisation ; »

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Je suis donc saisi d’un amendement n° 1 rectifié ter, présenté par MM. Magras, Milon, Bignon, Pierre, Bizet, del Picchia et D. Robert, Mme Deromedi et MM. Laufoaulu, Fontaine, Grand, Mandelli, Karoutchi et Nougein, et ainsi libellé :

Après l’article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au 3° du I de l’article L.O. 6214–3 du code général des collectivités territoriales, après les mots : « immatriculation des navires ; », sont insérés les mots : « carte et titre de navigation des navires de plaisance à usage personnel non soumis à francisation ; ».

Quel est l’avis de la commission sur cet amendement ?

Debut de section - PermalienPhoto de Mathieu Darnaud

La commission s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.

Debut de section - Permalien
George Pau-Langevin, ministre

Même à sept mètres, je m’en tiens à la même position. Nous retravaillerons sur le sujet ultérieurement.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi organique, après l’article 4.

Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 4 rectifié, présenté par MM. Magras, Milon, Bignon, Karoutchi, Bizet, del Picchia et D. Robert, Mme Deromedi et MM. Laufoaulu, Fontaine, Grand, Nougein, Mandelli et Pierre, est ainsi libellé :

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° L’article L.O. 6214–5 est ainsi rédigé :

« Art. L.O. 6214–5. – Dans les conditions prévues à l’article L.O. 6251–3, la collectivité peut participer, sous le contrôle de l’État, à l’exercice des compétences qui relèvent de l’État en matière de :

« 1° Droit pénal en vue de la répression des infractions aux règles qu’elle fixe dans les matières mentionnées à l’article L.O. 6214–3 ;

« 2° Police et de sécurité maritime ;

« 3° Recherche et constatation des infractions aux règles qu’elle fixe dans les matières mentionnées à l’article L.O. 6214–3 ;

« 4° Entrée et séjour des étrangers, à l’exception du droit d’asile, de l’éloignement, des étrangers et de la circulation des citoyens de l’Union européenne. » ;

2° Le premier alinéa du I de l’article L.O. 6251–3 est remplacé par quatre alinéas ainsi rédigés :

« Le conseil territorial est habilité, dans le respect des garanties accordées sur l'ensemble du territoire national pour l'exercice des libertés publiques, à adopter des actes dans le domaine :

« 1° Du droit pénal. Ces actes doivent respecter la classification des contraventions et délits. Les peines qu’ils instituent ne peuvent excéder le maximum prévu pour les infractions de même nature par les lois et règlements en vigueur ;

« 2° De la recherche et de la constatation des infractions aux règles que la collectivité fixe dans les matières mentionnées à l’article L.O. 6214–3. Les règles prévues pour les fonctionnaires et agents de la collectivité et des établissements publics sont fixées dans les mêmes limites et conditions que celles prévues par la loi pour les agents de l’État n’ayant pas la qualité d’officier ou d’agent de police judiciaire ;

« 3° De l’entrée et du séjour des étrangers, à l'exception de l'exercice du droit d'asile, de l'éloignement des étrangers et de la circulation des citoyens de l'Union européenne. »

La parole est à M. Michel Magras.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Magras

Cet amendement vise à reprendre les b et c de l’article 2 en prévoyant une réécriture des articles L.O. 6214–5 et L.O. 6251–3 du code général des collectivités territoriales.

La première partie de l’amendement fixe la liste des domaines dans lesquels la collectivité est habilitée par la loi à participer à l’exercice des compétences de l’État, qui sont étendus à la recherche et à la constatation des infractions ainsi qu’à l’entrée et au séjour des étrangers.

La seconde partie, quant à elle, fixe les conditions et les limites dans lesquelles la collectivité participe à l’exercice de ces compétences.

S’agissant de la recherche et de la constatation des infractions, cette nouvelle rédaction comble donc les insuffisances du dispositif initialement examiné par la commission des lois. Ce dernier prévoyait en effet la possibilité, pour les actes, de contenir des dispositions relatives à la recherche et à la constatation des infractions en omettant d’habiliter la collectivité à les fixer.

La participation à ce domaine de compétence est une forme sinon de continuité, du moins de cohérence avec la possibilité de fixer elle-même des sanctions pénales. Elle vise aussi à garantir l’effectivité des règles fixées par la collectivité.

Pour ce qui est de l’entrée et du séjour des étrangers, la procédure est de même respectée.

Sur le fond, l’opportunité de l’extension se justifie par le caractère touristique de l’île, qui peut motiver des mesures destinées à favoriser l’entrée de ressortissants de pays constituant une importante clientèle pour les professionnels du tourisme de l’île.

Elle est aussi justifiée par la compétence de la collectivité en matière d’accès au travail des étrangers, qui pourrait proposer à l’État des dispositions de coordination afin de rendre effective la compétence en matière d’accès au travail des étrangers et mieux prévenir son contournement.

Chacun sait l’enjeu que constitue l’immigration sur une île, pour des raisons non seulement de sécurité mais aussi de garantie de la cohésion sociale.

Certes, la collectivité est consultée, comme le relève à juste titre M. le rapporteur, sur la réglementation du contrôle de l’entrée et du séjour des étrangers et la délivrance des titres. Toutefois, M. le rapporteur n’ignore pas que la portée d’un avis sur un projet de loi n’est pas la même que celle d’une participation aux compétences de l’État, je l’ai dit voilà quelques instants.

Pour être concret, dans l’avis rendu sur le projet de loi relatif au droit des étrangers, le conseil exécutif a souhaité que les titres de séjour délivrés par la préfecture déléguée soient territorialisés, d’une part, Saint-Martin et, d’autre part, Saint-Barthélemy.

Cet avis n’a pas été pris en compte et n’a pas davantage été suivi d’un dialogue avec l’État afin qu’il prenne en compte cette demande d’adaptation sous une autre forme.

Enfin, l’adoption de cet amendement conduirait à opérer à Saint-Barthélemy la même répartition des compétences qu’en Polynésie française en ce qui concerne l’entrée et le séjour et l’accès au travail des étrangers. Cet amendement s’inspire en effet de l’article 31 de la loi organique portant statut de la Polynésie française.

Par ailleurs, la seconde partie de l’amendement vise à soumettre l’entrée en vigueur des actes pris dans le cadre de la participation aux compétences de l’État à la procédure de contrôle par décret – tendant soit à l’approbation totale ou partielle, soit au refus d’approbation –, puis de ratification par la loi. Telle est la garantie que nous souhaitons apporter.

Dans tous les cas, l’État n’est en aucun cas dessaisi de sa compétence.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

L'amendement n° 6 rectifié ter, présenté par MM. Magras, Milon, Bignon, Bizet, del Picchia et D. Robert, Mme Deromedi et MM. Laufoaulu, Fontaine, Grand, Nougein et Pierre, est ainsi libellé :

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° L’article L.O. 6214–5 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Dans les conditions prévues au premier alinéa, la collectivité peut participer à l’exercice des compétences qui relèvent de l’État en matière de protection sociale, allocations familiales, retraites et assurance chômage, y compris en matière de cotisations sociales et autres prélèvements destinés au financement de la protection sociale. » ;

2° L’article L.O. 6251–3 est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

« III. – Dans les conditions prévues au I, le conseil territorial est habilité à adopter des actes en matière de protection sociale, allocations familiales, retraites et assurance chômage, y compris en matière de cotisations sociales et autres prélèvements destinés au financement de la protection sociale. Ces actes ne peuvent avoir pour effet de réduire les garanties accordées dans ces domaines sur le territoire national. »

La parole est à M. Michel Magras.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Magras

Cet amendement prévoit une réécriture de l’article 5 initial de la proposition de loi, supprimé par la commission.

Son objet est bien de permettre la création d’une caisse de prévoyance sociale locale, mais en l’inscrivant dans le cadre de la participation de la collectivité à l’exercice des compétences de l’État.

En effet, je le précise, la collectivité ne souhaite pas exercer la compétence intégralement, mais simplement disposer, comme les autres collectivités d’outre-mer, d’une organisation de son régime de protection sociale adaptée, comme l’autorise l’article 74 de la Constitution.

Bien que la commission des lois ne se soit pas prononcée sur le fond, il n’en demeure pas moins que cette disposition soulève une question de principe.

La volonté de créer une caisse procède d’abord de la nécessité de rapprocher un service public fondamental en faisant prévaloir la logique de rapprochement sur l’approche comptable de la mutualisation.

À Saint-Barthélemy, si un assuré souhaite rencontrer le représentant de la caisse de sécurité sociale, il lui faut attendre que celui-ci se déplace pour effectuer sa permanence hebdomadaire, qui, au moment où je vous parle, n’a pas été assurée depuis six mois. La seule présence physique est aujourd’hui assurée par un agent mis à disposition par la collectivité, qui ne peut que collecter des documents sans pouvoir accéder aux réseaux afin de les traiter.

Saint-Barthélemy est donc confrontée aux mêmes problématiques d’éloignement du service public que les zones rurales métropolitaines, à cela près que le service public de la protection sociale et des allocations familiales est géré par une administration située à 250 kilomètres par la mer.

Les auteurs de cet amendement entendent donc apporter une réponse à la question concrète de l’accès au service public.

Par ailleurs, la gestion distante explique sans doute également le taux de reste à recouvrer soulevé par l’Observatoire régional de la santé de Guadeloupe, l’ORSAG, qui souligne dans son rapport un taux de reste à recouvrer qui atteint 27 % au titre de l’exercice 2011. Selon lui, ce taux s’explique par le fait que de nombreuses entreprises quittent l’île sans signaler leur départ à la Caisse générale de sécurité sociale de Guadeloupe, qui continue d’appeler les cotisations. C’est, là encore, un point qui pourrait être amélioré avec une gestion de proximité. La collectivité dispose en effet de la possibilité de contrôler, par le biais de la contribution forfaitaire annuelle des entreprises. L’intérêt fiscal consiste, pour nous, à connaître les entreprises déclarées sur le territoire. Or certaines d’entre elles, notamment celles qui sont soumises au registre du commerce et des sociétés, le RCS, nous sont encore inconnues.

En outre, du point de vue juridique cette fois, la collectivité souhaite se placer sous la tutelle de l’État en n’exerçant pas elle-même la compétence. Ce serait donc une participation laissant à l’État et au Parlement la possibilité de s’opposer à des orientations de la collectivité qui leur sembleraient inopportunes ou contraires au droit.

Au titre des conditions de cette participation, le dispositif prévoit à cet égard que la collectivité ne pourrait proposer une modification ou adaptation des règles en ce domaine qui conduiraient à des garanties moindres que celles qui sont accordées sur le territoire national.

La participation se justifie d’autant plus que c’est la collectivité, et non plus l’État, qui garantirait les éventuels déficits de la caisse – en cas de déficit, c’est donc la collectivité qui paierait. Si l’architecture d’ores et déjà définie s’inspire de celle de Saint-Pierre-et-Miquelon, c’est un point sur lequel elle s’en écarte.

Quant à la participation en matière de fiscalité sociale, il faut y voir le moyen d’aboutir à un niveau de charges équivalant à l’application du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le CICE, à Saint-Barthélemy. Les cotisations y sont alignées sur le droit national, mais, alors que le CICE engendrera une baisse de charges de 9 % à 12 % partout ailleurs dans les DOM, il n’est pas prévu à ce jour de mécanisme d’abaissement des charges pour les collectivités d’outre-mer – le CICE vise donc à remplacer une baisse des charges outre-mer, mais il emporte les mêmes effets.

Or les entreprises de Saint-Barthélemy sont soumises au double défi de la concurrence des îles dont les coûts de main-d’œuvre plus faibles qu’à Saint-Barthélemy sont de surcroît atténués par leur appartenance à la zone dollar.

Ce projet répond donc à un impératif social et économique et apporte, je le crois, toutes les garanties de préservation du niveau de protection sociale de la population de Saint-Barthélemy. Nous garantissons à la population tous les droits tels qu’ils existent au niveau national.

Mme Françoise Cartron remplace M. Thierry Foucaud au fauteuil de la présidence.

Debut de section - PermalienPhoto de Mathieu Darnaud

L’amendement n° 4 rectifié vise à rétablir, sous une autre forme, une partie de l’article 2, qui a été supprimé par la commission des lois pour deux raisons.

Tout d’abord, le Gouvernement a été habilité par l’article 3 de la loi du 15 novembre 2013 à adapter et étendre à Saint-Barthélemy les règles concernant la recherche et la constatation des infractions pénales par les agents locaux. Cette habilitation court jusqu’au 15 mai 2015. À cet égard, la commission souhaiterait que le Gouvernement indique à notre assemblée l’état d’avancement de la rédaction de cette ordonnance.

Ensuite, la commission a estimé, même si elle a conscience des particularités de l’île, que la mesure proposée au sujet de l’entrée et du séjour des étrangers extérieurs à l’Union européenne ne favoriserait pas la clarté de la répartition des compétences. Une solution administrative, émanant des services de l’État, serait plus pertinente.

Voilà pourquoi la commission a émis un avis défavorable.

L’amendement n° 6 rectifié ter tend à permettre à la collectivité de Saint-Barthélemy de participer à la compétence de l’État en matière de protection sociale, sans que cette compétence lui soit pour autant transférée. Le but est de préparer la mise en œuvre d’un régime de sécurité sociale jugé plus adapté à la situation économique de l’île.

Les dispositions de cet amendement diffèrent de celles de l’article 5, supprimé par la commission, et soulèvent plusieurs questions quant au fonctionnement d’un régime spécial de sécurité sociale. Sans doute le Gouvernement pourra-t-il détailler ces enjeux financiers et sociaux.

À cet égard, il est possible de comparer la situation de Saint-Barthélemy avec celle des autres collectivités d’outre-mer ou de la Nouvelle-Calédonie. Je précise toutefois que certaines de ces collectivités disposent d’un régime de sécurité sociale propre, dans la mesure où elles exercent la compétence en matière de sécurité sociale. Or, je le répète, ce n’est pas le cas de Saint-Barthélemy. D’ailleurs, cet amendement ne tend pas à revenir sur cette situation.

Mme Assassi l’a souligné il y a quelques instants, ces diverses propositions, appuyées sur le bon sens, font écho à des situations concrètes, à des problèmes vécus. C’est donc au terme de débats au cours desquels les aspects pratiques que vous avez mentionnés, monsieur Magras, ont été pris en compte que la commission a émis un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
George Pau-Langevin, ministre

Monsieur Magras, vous vous efforcez de trouver un moyen terme pour pallier les inconvénients liés à l’éloignement, tout en sachant que la collectivité de Saint-Barthélemy ne veut pas assumer seule cette compétence. La solution que vous proposez reste donc un peu boiteuse. Mieux vaut continuer à travailler sur cette question.

Une chose est sûre : toutes les remarques que vous formulez au sujet des dysfonctionnements résultant de l’éloignement doivent être transmises dans les plus brefs délais à Mme Touraine et à la préfecture. Cette situation ne peut pas durer !

Les dispositions que vous proposez s’inspirent des systèmes en vigueur en Polynésie ou dans d’autres territoires ultramarins, alors même que, dans ces cas, la compétence a généralement été transférée. Je comprends l’idée qui sous-tend vos propositions, mais ces dernières ne me semblent pas encore mûres.

Pour répondre à votre question, monsieur le rapporteur, j’indique à la Haute Assemblée que l’ordonnance est en cours de rédaction.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

La parole est à M. Michel Delebarre, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Delebarre

J’ai cru comprendre que, à travers ces amendements, M. Magras souhaitait avant tout ouvrir le débat et favoriser, à l’avenir, la recherche d’une solution.

À cet égard, je suis du même avis que M. le rapporteur : M. Magras a reçu les garanties qu’il souhaitait quant à la forme des travaux à venir et à la manière dont ils se dérouleront. Sur le fond, il est difficile de lui donner satisfaction avant que les conséquences et les modalités de mise en œuvre des dispositions qu’il propose ne soient examinées en détail.

Voilà pourquoi, compte tenu des déclarations de M. le rapporteur et de Mme la ministre, un retrait de ces amendements me semblerait préférable…

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

La parole est à Mme Karine Claireaux, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Karine Claireaux

Mes chers collègues, je comprends les différents arguments invoqués. Toutefois, je soutiens Michel Magras, dans la mesure où il soulève une problématique essentielle. Tout ce qui a trait au social se révèle bien souvent ingérable outre-mer.

En la matière, un rattachement administratif à une autre collectivité ne me semble pas supportable. Cette méthode est à tout le moins insatisfaisante : une gestion administrative à distance est déplorable, toutes les petites collectivités qui dépendent d’une collectivité voisine vous le diront.

Je le souligne, à l’instar de M. le rapporteur et de Mme la ministre, il faut très vite trouver une solution pour avancer sur ce dossier. Tout ce qui concerne les habitants de Saint-Barthélemy doit être traité à Saint-Barthélemy !

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

La parole est à M. Jérôme Bignon, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Bignon

Je suis entièrement d’accord avec l’argumentation développée par Mme Claireaux et, à mon tour, je souhaite soutenir M. Magras.

Si un service doit être proche des gens, c’est bien la sécurité sociale ! Nous, sénateurs, n’avons que cinquante mètres à parcourir en sortant de cet hémicycle pour trouver notre organisme de sécurité sociale. Nous ne pouvons pas nous plaindre d’un manque de proximité... Lorsqu’il faut faire 250 kilomètres et que, de surcroît, cette distance est formée par la mer, la situation est tout autre !

Qu’ils résident à Saint-Barthélemy ou dans la Somme, nos compatriotes ne cessent d’exiger plus de proximité. Relisons attentivement les travaux préparatoires à la loi constitutionnelle de 2003 et ceux qu’a suscités sa mise en œuvre en 2007, pour les collectivités ultramarines, au rang desquelles Saint-Barthélemy : il s’agissait précisément de donner à ces collectivités la capacité de gérer elles-mêmes l’essentiel des questions touchant à leur vie quotidienne. Il va de soi que ces mesures ne remettent pas en cause les compétences régaliennes de l’État.

Madame la ministre, j’entends bien vos propos et je ne mets nullement en doute votre bonne foi, mais on a déjà du mal à assurer des services de proximité en métropole, qu’il s’agisse du permis de conduire ou des certificats d’urbanisme – autant de démarches qui font la vie quotidienne de nos concitoyens ! Dans mon département, certains maires doivent faire jusqu’à soixante-dix kilomètres pour rencontrer les fonctionnaires de la DDTM, la direction départementale des territoires et de la mer, afin d’obtenir un permis de construire. Comment les administrés peuvent-ils croire au principe de proximité ?

Je vous connais de longue date, je peux témoigner de votre bonne volonté et je sais que vous êtes animée du désir de bien faire. Néanmoins, vous le savez bien, les problèmes de sécurité sociale qui ont conduit M. Magras à déposer son amendement ne seront pas résolus facilement. Le contexte actuel est connu de tous. Il n’y a pas de raison qu’on le juge bon dans un certain nombre de domaines et mauvais dans d’autres. Ces problèmes très concrets ne peuvent être résolus en un instant.

M. le président du Sénat l’a souligné clairement, et ce constat a été rappelé sur toutes les travées de cet hémicycle, le dialogue entre l’Assemblée nationale et le Sénat est destiné à faire avancer les choses. C’est un mode d’élaboration de solutions intelligentes. Si, au cours de la navette parlementaire, une solution est mise au point sur ce sujet, l’Assemblée nationale aura toujours le temps de supprimer ces dispositions.

Enfin, vous nous dites que l’ordonnance est en cours de rédaction. Or la période d’habilitation est sur le point de s’achever – sauf erreur de ma part, son terme est fixé au mois de mai prochain. Sur quelles dispositions portent les travaux en cours et à quel stade la rédaction en est-elle ? Est-on en train de réécrire l’article 1er, l’article 2 ? Où en sont les réunions interministérielles sur ce sujet ? Il nous faut des détails ! Ne risque-t-on pas de perdre le bénéfice de cette ordonnance ?

Je le répète, je ne mets nullement en cause votre bonne foi. Je sais simplement qu’il peut y avoir un grand écart entre ce que l’on veut et ce que l’on fait. Voilà pourquoi je suis tenté de suggérer au Sénat d’exercer une amicale pression sur le Gouvernement en adoptant les amendements de M. Magras. Si ladite ordonnance est achevée avant la fin de la navette, cette disposition deviendra sans objet, voilà tout !

Ce débat peut sembler superflu. Toutefois, compte tenu du flou dans lequel nous nous trouvons, il me semble préférable de procéder ainsi. Nous ne rédigerons pas de sitôt une nouvelle loi organique portant sur le statut de Saint-Barthélemy : profitons-en !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Magras

Madame la ministre, chers collègues, vous me placez dans une situation extrêmement délicate…

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Delebarre

Vous vous y êtes mis vous-même, cher collègue !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Magras

En effet, je ne comprends pas très bien pourquoi ces deux amendements ont été appelés en discussion commune. L’amendement n° 4 rectifié tend à rétablir des dispositions qui figuraient à l’origine à l’article 2. Quant à l’amendement n° 6 rectifié ter, il tend à rétablir des dispositions qui figuraient à l’origine à l’article 5.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Magras

M. le rapporteur, Mme la ministre, M. Delebarre et Mme Assassi m’ont opposé que les dispositions que je propose via l’amendement n° 6 rectifié ter n’étaient pas de nature organique. C’est là un argument de poids. Je peux concevoir qu’il vaille mieux renvoyer ces dispositions à un futur projet de loi simple. Toutefois, il est clair que nous allons devoir trouver une solution, pour que les habitants de Saint-Barthélemy bénéficient des mêmes droits que tous leurs concitoyens, conformément à la loi et à la Constitution. À nos yeux, tel n’est pas encore le cas. Nous ne sommes pas traités comme les autres, que ce soit en tant que citoyens français ou en tant que collectivité autonome.

À l’inverse, avec l’amendement n° 4 rectifié, dont j’ai supprimé la première partie pour que l’État ne soit pas dessaisi de ses compétences, je suggère simplement de laisser le Parlement délibérer lorsque l’État ne s’est pas prononcé dans un délai suffisant.

Il est question d’ordonnances ; de tels textes ne peuvent porter que sur des mesures déjà adoptées. La collectivité de Saint-Barthélemy a été créée il y a un peu plus de sept ans. Pour certains de ses champs de compétence, comme le logement, l’habitation, elle n’a pas encore écrit ses propres normes. En conséquence, les règles nationales sont toujours en application. Aussi, de nouveaux cas de sanction pour non-respect se présenteront à l’avenir. Va-t-on continuer à procéder par voie d’ordonnances ?

Voilà pourquoi – je vous l’avoue –, je suis embarrassé. Je peux concevoir de retirer l’amendement n° 6 rectifié ter, mais je comprends moins bien que l’on me demande de retirer l’amendement n° 4 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Monsieur Magras, j’en conviens tout à fait, vous soulevez une question d’une très grande complexité. Aussi la préoccupation que vous exprimez est-elle, à mon sens, très légitime.

À ce stade, et sans fermer la moindre porte, je relève plusieurs types de difficultés.

Les dispositions de l’amendement n° 6 rectifié ter posent un problème d’ordre juridique. Il s’agit de l’articulation des compétences respectives de la collectivité de Saint-Barthélemy et de l’État. Au fond, les actes prévus au 2° de votre amendement ne pouvant entrer en vigueur autrement qu’en vertu d’une décision de l’État, je crains fort que ces dispositions ne se résument à des coups d’épée dans l’eau. En mon for intérieur, je me demande si l’on ne pourrait pas construire un système réellement efficace, en ménageant un petit temps de réflexion. Or la construction d’un système efficace exige la résolution d’un certain nombre de questions. C’est peut-être pourquoi vous n’avez pu atteindre ce résultat immédiatement. Au reste, ces questions relèvent plus de la commission des affaires sociales que de la commission des lois.

Debut de section - Permalien
George Pau-Langevin, ministre

C’est vrai !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Saint-Barthélemy est proche de Saint-Martin et de la Guadeloupe et, comme vous l’avez rappelé, une partie des ayants droit résidant à Saint-Barthélemy vit en fait en dehors de l’île. Le champ d’application d’une caisse de sécurité sociale, s’agissant des ressortissants qui y seraient affiliés et des ayants droit, est donc assez difficile à déterminer. La situation est très différente à Saint-Pierre-et-Miquelon, qui est plus éloignée d’autres collectivités françaises. Telle est la première question.

Se pose également la question du champ d’action de la caisse de sécurité sociale.

La sécurité sociale traite les prestations d’assurance maladie, les indemnisations en cas d’accident du travail, les pensions de retraite de base et les prestations familiales. L’assurance chômage appartient à un autre régime, un régime paritaire : le contenu est déterminé par une convention nationale, signée par les partenaires sociaux, qui doit recevoir, avant son entrée en vigueur, un agrément de l’État. Il est par conséquent assez difficile de concevoir une caisse de sécurité sociale qui prenne en charge à la fois la sécurité sociale et l’indemnisation du chômage. Je dis que c’est difficile, mais pas impossible de bâtir un système aussi original. Pour ma part, je suis, en général, partisan de la différenciation si elle est nécessaire du fait des particularités d’un territoire.

Je l’ai indiqué au début de mon intervention, je ne ferme nullement la porte à des évolutions, mais celle que vous proposez soulève, convenez-en, des questions très délicates. De mon point de vue, celles-ci ne peuvent être résolues seulement par des actes élaborés par le territoire, qui seraient ensuite validés par l’État selon la procédure que vous instituez. Je préférerais qu’on élabore ce système d’un commun accord, sans forcément passer par ce travail au niveau local. Cela suppose naturellement que le Gouvernement nous confirme, par la voix de Mme la ministre, sa disponibilité pour travailler avec vous et les élus du territoire à l’élaboration d’un dispositif qui tienne vraiment la route, pour employer une expression familière.

J’ai le sentiment que l’amendement tel qu’il est rédigé fait droit à une préoccupation, mais n’apporte pas de réponse opérationnelle. Même s’il était adopté, il ne résoudrait en rien le problème que vous soulevez. C'est la raison pour laquelle la commission des lois a émis un avis défavorable. Il s’agit cependant d’un avis techniquement défavorable, si je puis dire, car la commission n’est pas, par principe, opposée à l’évolution que vous souhaitez.

Si, je le répète, Mme la ministre veut bien nous confirmer la disponibilité et, mieux encore, le souhait du Gouvernement d’avancer sur cette question en travaillant en commun avec vous et les élus du territoire à la mise en place d’un dispositif et si son intervention vous convainc, peut-être pourriez-vous, mon cher collègue, retirer votre amendement ?

Debut de section - Permalien
George Pau-Langevin, ministre

Monsieur Magras, vous cherchez une solution à un problème qui, je le comprends, vous préoccupe, celui de la création d’une caisse locale, afin que les habitants de Saint-Barthélemy puissent accéder, dans des conditions normales, aux services fournis par la sécurité sociale. Vous vous demandez par ailleurs si cette disposition a sa place dans une loi organique.

Outre le fait que nous allons continuer à travailler sur cette question, je vous propose de modifier votre amendement pour demander un rapport, dans un délai qui reste à fixer, sur la possibilité de modifier l’exercice des compétences de la collectivité de Saint-Barthélemy en matière de protection sociale et d’allocations familiales. Cela permettrait de ne pas faire disparaître votre proposition du texte – vous vous demandiez ce qu’il en adviendrait durant la navette – et de matérialiser le travail commun que nous devons faire en la matière.

Telle est la solution que je vous propose.

Debut de section - PermalienPhoto de Mathieu Darnaud

Je veux simplement préciser à notre collègue que ce texte ne fait pas l’objet d’une procédure accélérée. Il y aura donc deux lectures dans chaque assemblée.

Par ailleurs, si les deux amendements sont en discussion commune, c’est parce qu’ils portent sur les mêmes articles du code général des collectivités territoriales. Toutefois, ils ne sont pas liés et peuvent être retirés individuellement.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Magras

Je me pose de nombreuses questions.

Sauf erreur de ma part, monsieur le rapporteur, on ne peut introduire en deuxième lecture des dispositions qui n’aient été débattues en première lecture... En tout cas, j’ai bien compris que les deux amendements ne sont pas liés et que l’on peut adopter l’un et pas l’autre.

En toute sincérité – j’ai toujours été très franc dans mon propos –, après avoir entendu les interventions de mes collègues Michel Delebarre et Éliane Assassi, ainsi que la sage position du président de la commission des lois, je tiens à dire que je ne saurais profiter de la majorité à laquelle j’appartiens pour faire adopter un texte qui serait, par la suite, rejeté par l'Assemblée nationale. Aussi, pour obtenir l’unanimité sur cette proposition de loi organique au sein de la Haute Assemblée, ce qui pourrait influer sur la position de l'Assemblée nationale et du Gouvernement, je suis prêt à retirer mes amendements.

Au demeurant, permettez-moi de vous dire, madame la ministre, que le Conseil économique, social et culturel de Saint-Barthélemy s’est déjà saisi de cette question. Une mission a été confiée à un ancien haut fonctionnaire, qui a déjà rendu son rapport sur la faisabilité de ce projet, le nombre de postes, le coût, le fonctionnement, y compris dans les secteurs évoqués par le président Bas. Nous ne nous sommes donc pas lancés à la légère. Nous ne proposons pas un processus dont nous ne sommes pas certains qu’il puisse aller jusqu’à son terme.

Quoi qu’il en soit, si mes collègues de la majorité gouvernementale et de la majorité sénatoriale m’accordent leur soutien, je retirerai ces amendements, qui nous auront permis d’avoir un beau débat. Je me félicite des échanges que nous avons eus, et je suis heureux de constater que mes collègues ont été progressivement sensibilisés aux réalités qui sont les nôtres.

Je vous le promets, il n’y a aucune intention cachée dans ces amendements. Je souhaite simplement régler les problèmes auxquels est confrontée la population de Saint-Barthélemy. J’espère que notre proposition ne restera pas lettre morte.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

Les amendements n° 4 rectifié et 6 rectifié ter sont retirés.

Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L'amendement n° 8 rectifié, présenté par MM. Magras, Milon, Bignon, Karoutchi, Bizet, del Picchia et D. Robert, Mme Deromedi et MM. Laufoaulu, Fontaine, Grand, Nougein, Mandelli et Pierre, est ainsi libellé :

Après l’article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le cinquième alinéa du I de l’article L.O. 6251-3 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Nonobstant les dispositions prévues au quatrième alinéa du présent I, en l’absence de transmission du projet de décret dans le délai prévu au deuxième alinéa du présent I, le projet ou la proposition d’acte entre en vigueur après ratification par la loi, y compris lorsque l’acte intervient dans le domaine du règlement. »

La parole est à M. Michel Magras.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Magras

Si vous me le permettez, madame la présidente, je présenterai en même temps l’amendement n° 9 rectifié, car ces deux amendements ont le même objet et ne se distinguent que sur un point.

Ces amendements visent à réduire les délais d’adoption du décret d’approbation prévu au I de l’article L.0. 6251-3 du code général des collectivités territoriales pour les sanctions pénales. En effet, les délais constatés sont tous supérieurs à un an. Les injonctions au Gouvernement étant plus symboliques qu’efficientes, il est apparu qu’une solution pouvait être trouvée en clarifiant le pouvoir d’adoption des actes établis par la collectivité directement par le Parlement, qui exercerait de ce fait le contrôle de l’État.

Ces deux amendements prévoient que le Parlement peut ratifier les délibérations lorsque le Gouvernement ne respecte pas le délai imparti de deux mois – je reconnais, madame la ministre, que vous devez consulter d’autres ministères – pour matérialiser son contrôle. J’ai déjà recouru à cette méthode pour le code des contributions et le code de l’urbanisme, car les dispositions visées prévoyaient peu de sanctions. En revanche, il n’est pas possible de faire de même pour le code de l’environnement. Pour modifier ce pavé important, comprenant de nombreuses sanctions, il faut consulter plusieurs ministères. Nos propositions n’ayant jamais abouti, il a fallu procéder par ordonnance : la partie législative a été validée, mais la partie réglementaire ne l’a toujours pas été.

L’expérience montre que la lecture de ce pouvoir varie selon les gouvernements. C’est pourquoi il convient d’apporter ces précisions.

L’amendement n° 8 rectifié, qui va plus loin que l’amendement n° 9 rectifié, s’inspire du statut de la Polynésie française : le Parlement serait autorisé à valider les dispositions à caractère réglementaire.

L’amendement n° 9 rectifié ne mentionne pas les actes réglementaires, car, nous le savons tous, mes chers collègues, le règlement relève de l’exécutif et non pas du Parlement.

J’ai bien conscience qu’il s’agit là d’une innovation, mais la marge de créativité qui m’est laissée est plus que faible…

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

L'amendement n° 9 rectifié, présenté par MM. Magras, Milon, Bignon, Karoutchi, Bizet, del Picchia et D. Robert, Mme Deromedi et MM. Laufoaulu, Fontaine, Grand, Nougein, Mandelli et Pierre, est ainsi libellé :

Après l’article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le cinquième alinéa du I de l’article L.O. 6251-3 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Nonobstant les dispositions prévues au quatrième alinéa du présent I, en l’absence de transmission du projet de décret dans le délai prévu mentionné au deuxième alinéa du présent I, le projet ou la proposition d’acte entre en vigueur après ratification par la loi. »

Cet amendement a déjà été défendu.

Le sous-amendement n° 14 rectifié, présenté par M. Darnaud, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Amendement n° 9 rectifié, alinéa 4

Rédiger ainsi cet alinéa :

« En l’absence de publication d’un décret d’approbation ou de refus d’approbation dans un délai de trois mois à compter de la transmission prévue au deuxième alinéa, la loi peut approuver totalement ou partiellement une proposition ou un projet d’acte intervenant dans le domaine de la loi. »

La parole est à M. le rapporteur, pour présenter le sous-amendement n° 14 rectifié et pour donner l’avis de la commission sur les amendements n° 8 rectifié et 9 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Mathieu Darnaud

Tout le monde reconnaît qu’il y a là un véritable sujet.

Les amendements n° 8 rectifié et 9 rectifié modifient la procédure d’approbation des actes proposés par la collectivité de Saint-Barthélemy lorsqu’elle participe à une compétence de l’État. Contrairement à l’article 2, que notre commission a supprimé, ces amendements ne reprennent pas l’idée d’une approbation tacite.

Actuellement, le projet d’acte est soumis au Gouvernement, qui l’approuve – totalement ou partiellement – ou le rejette. En cas d’approbation, le décret doit être ratifié par le Parlement s’il intervient dans le domaine législatif.

Avec cette construction « à double étage », le Parlement ne peut se prononcer si le Gouvernement ne publie pas le décret ou s’il le publie avec des mois de retard, ce qui a été jusqu’à présent la règle, au mépris des délais fixés par la loi organique, ainsi que l’a évoqué notre collègue Michel Magras. Cette situation est d’autant plus paradoxale que les mesures à approuver incombent au législateur et que le Parlement pourrait les adopter de sa propre initiative selon la procédure législative ordinaire.

Aux termes de ces amendements, le Parlement peut statuer sur le projet d’acte à l’expiration du délai imparti au Gouvernement pour préparer un projet de décret.

L’amendement n° 9 rectifié est conforme à l’article 74 de la Constitution et à la position de notre commission : le contrôle de l’État demeure effectif, car l’approbation reste expresse. En outre, pour les matières où le législateur est compétent en vertu de la Constitution, notamment de l’article 34, l’inertie gouvernementale n’empêcherait plus le Parlement de se prononcer.

Le sous-amendement n° 14 rectifié prévoit un délai de trois mois au cours duquel le Parlement pourrait directement approuver ou non les propositions ou projets d’acte relevant de sa compétence à compter de la transmission de la proposition ou du projet d’acte au Gouvernement. En effet, l’amendement n° 9 rectifié se réfère à l’absence de transmission d’un projet de décret au Premier ministre. Or cette circonstance relève du travail interne du Gouvernement et ne fait pas l’objet d’une publicité permettant de déterminer avec certitude l’expiration du délai. En outre, il est précisé que l’approbation directe du législateur peut être totale ou partielle, comme c’est actuellement prévu pour le décret.

En conséquence, la commission a émis un avis favorable sur l’amendement n° 9 rectifié, sous réserve de l’adoption du sous-amendement n° 14 rectifié, et un avis défavorable sur l’amendement n° 8 rectifié.

Debut de section - Permalien
George Pau-Langevin, ministre

Le sous-amendement n° 14 rectifié tel qu’il est proposé par la commission est de nature à donner satisfaction à tout le monde. Aussi le Gouvernement est-il prêt à l’accepter.

Le sous-amendement est adopté.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l'article 4.

(Supprimé)

À la fin du 3° du I de l’article L.O. 6214-4 du code général des collectivités territoriales, les mots : «, par analogie avec les règles applicables en Guadeloupe » sont supprimés.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

L'amendement n° 12, présenté par M. Delebarre et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Michel Delebarre.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Delebarre

L’article 5 ayant été supprimé, je propose que l’article 6 subisse le même sort. Je pense en effet que ces deux articles sont liés.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Delebarre

Cela ne nous empêchera pas de poursuivre le débat sur la caisse que souhaite mettre en place M. Magras.

Debut de section - PermalienPhoto de Mathieu Darnaud

La suppression de l’article 5 par la commission n’implique pas forcément celle de l’article 6. En effet, l’article 5 visait à instituer un régime de sécurité sociale propre à Saint-Barthélemy, tandis que l’article 6 met fin à l’obligation prévue par la loi organique d’imposer le même niveau de prélèvements sociaux à Saint-Barthélemy qu’en Guadeloupe.

La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, son avis sera défavorable.

Debut de section - Permalien
George Pau-Langevin, ministre

Compte tenu de ce qui a été décidé précédemment concernant la sécurité sociale, il me semblerait cohérent de retirer cet amendement. À défaut, le Gouvernement y sera défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Delebarre

M. Michel Delebarre. Pardonnez-moi, madame la présidente, mais je suis un peu perdu. L’atterrissage est difficile ! Il faut dire que la piste est très courte à Saint-Barthélemy…

Rires.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

Mme la présidente. Et manifestement les vents sont contraires !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

La parole est à M. Michel Magras, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Magras

Je suis d’accord avec M. Delebarre : cet article, qui visait à ne plus faire référence à la Guadeloupe, avait son intérêt si l’article 5 avait été adopté.

Il faut savoir dans quelles conditions cette portion de phrase a été inscrite dans la loi. Nous étions une commune de la Guadeloupe ; lorsque nous nous en sommes détachés pour acquérir un statut particulier, le législateur a souhaité continuer à faire bénéficier Saint-Barthélemy des avantages dont jouissaient les départements d’outre-mer, en particulier celui auquel nous étions précédemment rattachés. Disons-le clairement, cela se traduisait par des abattements.

Dès lors que nous disposons de notre propre système de fonctionnement, nous ne demandons plus d’abattements à personne. J’ai bien entendu les avis de la commission et du Gouvernement, mais, dans un souci de cohérence, je considère que M. Delebarre a raison de proposer la suppression de l’article 6, afin que le texte reste dans l’état où il se trouvait auparavant. Selon mon analyse, mais je peux me tromper, l’article 6 va de pair avec l’article 5. Si le Parlement ne s’est pas accordé sur un changement de règle, ne la changeons ni d’un côté ni de l’autre.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Delebarre

Mon amendement avait pour objet d’empêcher M. Magras de réaliser ce qu’il avait l’intention de faire. Comme il en est d’accord, je le retire.

L'article 6 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

CHAPITRE II

Fonctionnement des institutions de la collectivité

Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° Le second alinéa de l’article L.O. 6252-10 est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« Il peut, par délégation du conseil territorial, être chargé pour la durée de son mandat d’intenter au nom de la collectivité les actions en justice ou de défendre la collectivité dans les actions intentées contre elle, dans les cas définis par le conseil territorial. Il rend compte à la plus proche réunion du conseil territorial de l’exercice de cette compétence.

« Il peut faire tous actes conservatoires ou interruptifs de déchéance. » ;

2° Après la deuxième phrase du premier alinéa de l’article L.O. 6252-3 du code général des collectivités territoriales, est insérée une phrase ainsi rédigée :

« En l’absence ou en cas d’empêchement des vice-présidents, il peut déléguer, dans les mêmes conditions, une partie de ses fonctions à des conseillers territoriaux dès lors que les membres du conseil exécutif sont titulaires d’une délégation. » –

Adopté.

(Supprimé)

L’article L.O. 6253-9 du code général des collectivités territoriales est ainsi rédigé :

« Art. L.O. 6253-9. – Le conseil exécutif ne peut délibérer si la majorité absolue des membres le composant n’est présente.

« Toutefois, si au jour fixé par la convocation, le conseil exécutif ne se réunit pas en nombre suffisant pour délibérer, la réunion se tient de plein droit trois jours plus tard et les délibérations sont alors valables quel que soit le nombre des présents.

« Un membre du conseil exécutif empêché d’assister à une réunion peut donner délégation de vote, pour cette réunion, à un autre membre du conseil exécutif. Un membre du conseil ne peut recevoir qu’une seule délégation.

« Les décisions du conseil exécutif sont prises à la majorité des membres le composant. En cas de partage égal des voix, celle du président est prépondérante.

« Les décisions du conseil exécutif sont signées par le président. »

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

L'amendement n° 3 rectifié, présenté par MM. Magras, Milon, Bignon, Karoutchi, Bizet, del Picchia et D. Robert, Mme Deromedi et MM. Laufoaulu, Fontaine, Grand, Nougein, Mandelli et Pierre, est ainsi libellé :

Alinéa 6

Compléter cet alinéa par les mots :

et contresignées par les membres du conseil exécutif chargés de leur exécution

La parole est à M. Michel Magras.

Debut de section - PermalienPhoto de Mathieu Darnaud

Cet amendement est cohérent avec le texte adopté par la commission. L’avis est donc favorable.

Debut de section - Permalien
George Pau-Langevin, ministre

Favorable.

L'amendement est adopté.

L'article 9 est adopté.

(Non modifié)

L’article L.O. 6221-24 du code général des collectivités territoriales est abrogé.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

L'amendement n° 13, présenté par M. Delebarre et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Michel Delebarre.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Delebarre

Comme je l’ai fait remarquer à plusieurs reprises dans mon intervention, il existe une relation étrange entre M. Magras et les rapports.

On ne fait pas les rapports, parce qu’on a laissé passer le temps, parce qu’on ne dispose pas du personnel... D’ailleurs, cela vaut aussi bien pour la collectivité que pour les représentants de l’État. Au bout d’un moment – ici, sept ans –, constatant que les rapports n’ont pas été faits, on décide qu’il faut supprimer les dispositions qui les imposent. Voilà la logique à laquelle je veux m’opposer !

Les collectivités territoriales continentales, monsieur Magras, ont, elles aussi, un tas de rapports à préparer. Grâce à vous, j’ai compris comment il fallait faire pour ne plus les faire ! Pourtant, il faut bien que l’on conserve des comptes rendus et des rapports. C’est peut-être fatiguant, casse-pieds, mais on ne peut pas décider comme ça qu’ils ne sont plus nécessaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Mathieu Darnaud

Je vais me livrer à un plaidoyer pour la collectivité de Saint-Barthélemy, qui va atténuer les propos de notre collègue Michel Delebarre.

Lorsque votre prédécesseur, madame la ministre, a interpellé les collectivités pour qu’elles réfléchissent à l’évolution de leur statut, une seule a répondu : Saint-Barthélemy. Voilà la preuve que cette collectivité produit des rapports !

Après des échanges au sein de la commission, il nous est apparu que, après huit années de pratique institutionnelle, cet exercice n’a pas prouvé son utilité, d’autant qu’existent de nombreuses autres occasions de débattre de la situation de la collectivité : débat d’orientation budgétaire et examen du budget primitif, examen du compte administratif ou encore questions orales.

La commission est donc défavorable à cet amendement.

Debut de section - Permalien
George Pau-Langevin, ministre

Il nous semble que, même si la rédaction de ce genre de rapports peut apparaître comme un pensum, ceux-ci sont utiles pour la démocratie. On peut préparer des rapports plus courts, plus simples, mais le Gouvernement souhaite que ce rapport demeure, car il s’agit d’une obligation qui s’impose à toute collectivité.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

La parole est à M. Michel Magras, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Magras

Je ne pense pas me tromper en affirmant ici, au Sénat, qu’il n’existe pas une collectivité de France du même niveau que la mienne qui fournisse autant de rapports sur la situation, les choix politiques et le fonctionnement de la collectivité. Si l’on me prouve le contraire, je rectifierai mon propos en séance publique !

À partir de clichés, on prétend que Saint-Barthélemy refuse de rédiger des rapports. J’ai pourtant indiqué précédemment à Mme la ministre que nous étions en avance dans le domaine social. Dans tous les domaines, des rapports existent : rapports de l’Observatoire régional de la santé de Guadeloupe, du Conseil économique, social et culturel, de la collectivité… Quelqu’un a d’ailleurs fait référence au rapport de M. Seners. Faites-moi confiance, depuis ce rapport, des dizaines d’autres ont été présentés, qui vont dans le même sens quant aux réalités de Saint-Barthélemy.

Concernant le fonctionnement de la collectivité, le conseil exécutif se réunit chaque semaine, les actes de ses séances sont publiés et affichés partout, la presse en rend compte, les citoyens sont en mesure de tout vérifier. Nous disposons d’un recueil des actes administratifs, nous tenons des débats d’orientation budgétaire, nous votons notre budget, nous débattons des comptes administratifs. Il existe donc de nombreuses possibilités, sur un territoire de vingt kilomètres carrés – vingt-cinq en comptant les îlets – rassemblant 9 000 habitants, offertes aux citoyens pour contrôler l’exécution des délibérations. Cela se fait continuellement, et je n’ai jamais entendu un citoyen contester l’exécution d’une délibération de la collectivité de Saint-Barthélemy.

Reste que cette collectivité exerce une multitude de fonctions. Si elle devait produire un rapport distribué à tous, qui sera stocké dans une armoire et que personne ne lira, puisque tout le monde en connaît le contenu, cela créerait des frais supplémentaires. Il faudrait affecter du personnel à cette tâche et faire appel à des systèmes de reprographie. À Saint-Barthélemy, on n’imprime pas sur place, ou avec un coût important. Cela nous placerait donc dans une situation délicate.

Nous ne souhaitons pas déroger à la transparence. Nous rendons déjà compte ! Voilà pourquoi je ne soutiendrai pas cet amendement et j’invite mes collègues à défendre l’article qui vise à supprimer ce rapport.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 10 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

CHAPITRE III

Information du Conseil territorial

(Division et intitulé supprimés)

L’article L.O. 6221-22 du code général des collectivités territoriales est ainsi rédigé :

« Art. L.O. 6221-22. – Douze jours francs au moins avant la réunion du conseil territorial, le président adresse aux conseillers territoriaux et aux membres du conseil économique, social et culturel les projets de délibération tels qu’arrêtés par le conseil exécutif ainsi qu’un rapport, sous quelque forme que ce soit, sur chacune des affaires qui doivent leur être soumises.

« Sans préjudice des dispositions de l’article L.O. 6221-20, en cas d’urgence, le délai prévu au premier alinéa peut être abrégé par le président sans pouvoir être inférieur à un jour franc.

« Le président rend compte dès l’ouverture de la séance du conseil territorial, qui se prononce sur l’urgence et peut décider le renvoi de la discussion, pour tout ou partie, à l’ordre du jour d’une séance ultérieure. »

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

L'amendement n° 7 rectifié bis, présenté par MM. Magras, Milon, Bignon, Karoutchi, Bizet, del Picchia et D. Robert, Mme Deromedi et MM. Laufoaulu, Fontaine, Grand, Nougein, Mandelli et Pierre, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 2

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« S'il y a lieu, le président adresse également aux conseillers territoriaux l'avis rendu par le conseil économique, social, culturel et environnemental.

La parole est à M. Michel Magras.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Magras

Cet amendement se justifie par son texte même.

Debut de section - Permalien
George Pau-Langevin, ministre

Le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.

L'amendement est adopté.

L'article 11 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

CHAPITRE IV

Conseil économique, social, culturel et environnemental

(Division et intitulé supprimés)

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

L'amendement n° 2 rectifié bis, présenté par MM. Magras, Milon, Bignon, Karoutchi, Bizet, del Picchia et D. Robert, Mme Deromedi et MM. Laufoaulu, Fontaine, Grand, Nougein, Mandelli et Pierre, est ainsi libellé :

Avant l’article 12

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° À la fin de l'intitulé du chapitre III du titre II du livre II de la sixième partie, les mots : « et culturel » sont remplacés par les mots : «, culturel et environnemental » ;

2° À la fin de l'article L.O. 6220-1, les mots : « et culturel » sont remplacés par les mots : «, culturel et environnemental » ;

3° À la fin du premier alinéa, aux première et seconde phrases du deuxième alinéa, au troisième alinéa, à la fin de la première phrase du quatrième alinéa, à la première phrase de l'avant-dernier alinéa et à la fin du dernier alinéa de l'article L.O. 6223-1, les mots : « et culturel » sont remplacés par les mots : «, culturel et environnemental » ;

4° À la première phrase des premier et deuxième alinéas, au troisième alinéa, à la première phrase des trois derniers alinéas de l'article L.O. 6223-2, les mots : « et culturel » sont remplacés par les mots : «, culturel et environnemental » ;

5° Aux premier et second alinéas du I, au premier alinéa, à la fin du 1° et au 2° du II, au premier alinéa du IV et au V de l'article L.O. 6223-3, les mots : « et culturel » sont remplacés par les mots : «, culturel et environnemental ».

La parole est à M. Michel Magras.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Magras

Cet amendement vise à inscrire dans la loi l’extension du rôle du Conseil économique, social et culturel au domaine de l’environnement. Nous adaptons ainsi les dispositions prises au niveau national, même si la compétence nous a été transférée.

Debut de section - PermalienPhoto de Mathieu Darnaud

Cette nouvelle dénomination est tout à fait logique : avis favorable.

Debut de section - Permalien
George Pau-Langevin, ministre

Favorable.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, avant l'article 12.

Le III de l’article L.O. 6223-3 du code général des collectivités territoriales est ainsi rédigé :

« III. – Il dispose pour donner son avis d’un délai :

« 1° Dans les cas prévus aux I et 2° du II, d’un mois, ramené à quinze jours en cas d’urgence déclarée par le président du conseil territorial ;

« 2° Dans le cas prévu au 1° du II, de douze jours francs, ramené à un jour franc en cas d’urgence déclarée par le président du conseil territorial.

« À l’expiration de ce délai, l’avis est réputé rendu ». –

Adopté.

CHAPITRE V

Composition de la commission consultative d’évaluation des charges

(Non modifié)

À la première phrase du deuxième alinéa de l’article L.O. 6271-6 du code général des collectivités territoriales, après les mots : « et composée », sont insérés les mots : « à parité » et les mots : «, de la région et du département de la Guadeloupe » sont supprimés. –

Adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

Avant de mettre aux voix l'ensemble de la proposition de loi organique, je donne la parole à M. Michel Magras, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Magras

Je tiens à remercier M. le rapporteur, dont je salue la qualité du travail, M. le président de la commission des lois, Mme la ministre et tous mes collègues sénateurs. Je pense que le débat aura été particulièrement instructif pour celles et ceux qui ne connaissent pas Saint-Barthélemy.

Même si je regrette de ne pas toujours avoir été suivi, je suis heureux qu’un certain nombre de dispositions aient pu être adoptées et d’avoir entendu, tous bords confondus, que les problèmes que j’ai évoqués au nom de la collectivité sont réels et qu’il va bien falloir les régler.

Saint-Barthélemy est une collectivité bien ancrée dans la République française et sa population souhaiterait, dans bien des domaines, être traitée de la même façon que les autres citoyens français.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix, dans le texte de la commission modifié, l'ensemble de la proposition de loi organique portant diverses dispositions relatives à la collectivité de Saint-Barthélémy.

En application de l'article 59 du règlement, le scrutin public ordinaire est de droit.

Il va y être procédé dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

Il est procédé au dépouillement du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 89 :

Nombre de votants343Nombre de suffrages exprimés232Pour l’adoption232Le Sénat a adopté.

Applaudissements sur diverses travées.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Deromedi

Madame la présidente, lors du scrutin n° 88 sur la proposition de loi constitutionnelle visant à rétablir à sept ans la durée du mandat du Président de la République et à le rendre non renouvelable, M. Daniel Laurent a été déclaré votant contre, alors qu’il souhaitait voter pour.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

Acte vous est donné de cette mise au point, ma chère collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l'analyse politique du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

Le Conseil constitutionnel a informé le Sénat qu’il a été saisi le jeudi 29 janvier 2015, en application de l’article 61, alinéa 2, de la Constitution, par plus de soixante sénateurs, de la loi relative à la modernisation et à la simplification du droit et des procédures dans les domaines de la justice et des affaires intérieures.

Le texte de la saisine du Conseil constitutionnel est disponible au bureau de la distribution.

Acte est donné de cette communication.

Mes chers collègues, l'ordre du jour de cet après-midi étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à dix-neuf heures vingt-cinq, est reprise à vingt-et-une heures trente-cinq, sous la présidence de M. Thierry Foucaud.