Madame la sénatrice, je vous prie de bien vouloir excuser Bernard Cazeneuve de son absence ; vous l’interrogez sur une question bien connue, sur laquelle je voudrais vous apporter les éléments de réponse qu’il m'a chargé de vous donner.
Tout d'abord, je souhaite rappeler le droit en vigueur.
Circuler ou mettre en circulation un véhicule muni d’une plaque avec un numéro d’immatriculation attribué à un autre véhicule dans des circonstances qui ont ou auraient pu entraîner des poursuites pénales contre un tiers est puni de sept ans de prison et de 30 000 euros d’amende.
S’ajoute à cela un retrait de six points sur le permis de conduire et, à titre de peine complémentaire, la possibilité de le suspendre ou de l’annuler pour une durée de trois ans maximum.
L’auteur des faits risque également la confiscation de son véhicule.
Ces dispositions s’appliquent aux « doublettes parfaites », qui consistent à usurper une plaque d’un véhicule en tous points identique, comme aux « doublettes imparfaites », pour lesquelles l’usurpation du numéro d’immatriculation porte sur un modèle de véhicule différent.
Les usurpations de numéros d’immatriculation de véhicules constituent un phénomène qui a fait l’objet de différentes mesures visant notamment à mieux accompagner les victimes dans leurs démarches.
L’ensemble de la procédure ainsi que les coordonnées des services devant être contactés par les victimes de « doublettes » sont présentés sur le site service public.fr.
Une aide à la rédaction du formulaire de contestation est par ailleurs disponible depuis plusieurs mois sur le site de l’Agence nationale de traitement automatisé des infractions, et un dispositif de pré-plainte en ligne permet à présent de fournir de premiers éléments aux services de police ou aux unités de gendarmerie territorialement compétents.
Le contrôle des « doublettes imparfaites » réalisé par l’ANTAI depuis novembre 2013 est totalement automatisé et n’a pas nécessité le recrutement de nouveaux agents. Il a permis de diminuer fortement le nombre d’avis de contravention envoyés à des titulaires de certificat d’immatriculation n’ayant commis aucune infraction.
Par ailleurs, les directions générales de la police et de la gendarmerie ont transmis des directives à leurs services et unités afin que les plaintes liées aux « doublettes parfaites », non détectables par l’ANTAI, soient systématiquement enregistrées et renseignées au sein du fichier des véhicules et des objets signalés.
En 2013, 22 164 plaintes ont été déposées auprès des forces de l’ordre, et l’on a compté 17 840 réimmatriculations de véhicules.
Si l’on ne peut se satisfaire de ces chiffres, je note néanmoins qu’en 2014, sur les dix premiers mois de l’année, le nombre de faits signalés pour usurpation de numéro d’immatriculation connaît, après plusieurs années d’augmentation, un premier recul, de près de 10 %.
Mais l’ambition du Gouvernement ne s’arrête pas à cela. Ainsi, une sécurisation accrue pourrait passer par un contrôle des conditions de délivrance des plaques ou par l’apposition de marques sur les plaques ou les véhicules.
Les contraintes de l’ensemble des acteurs doivent toutefois être pleinement prises en compte, notamment en termes de coût et de charge administrative, d’autant que les solutions mises en œuvre à l’étranger, notamment le marquage des plaques par les services de l’État, ne peuvent pas nécessairement être transposées telles quelles en France dans la mesure où, dans leur majorité, les demandes d’immatriculation sont aujourd’hui traitées en dehors des préfectures.
Ces différentes pistes devront faire l’objet d’une concertation avec les professionnels du secteur.
Comme vous l’indiquiez lors d’une précédente question orale, l’une des motivations des auteurs de ces actes réside dans la volonté de se soustraire aux contrôles automatisés. Sur ce sujet particulier, si, depuis 2009, le contrôle par l’arrière du véhicule a permis d’étendre ce dispositif aux deux-roues motorisés, il a également pu constituer un frein à l’identification des auteurs de doublettes.
D’ores et déjà, dans le cadre de la modernisation du parc des radars, deux modèles de radar « double face » sont en cours d’expérimentation.
Installés dans une ou deux cabines, ces équipements détectent et photographient de face et de l’arrière les véhicules circulant au-dessus de la vitesse limite autorisée. Un premier modèle est testé depuis le 12 décembre dans le Rhône, sur la départementale 301. Trois autres appareils seront déployés au début de l’année 2015. En fournissant une photo du conducteur et des plaques montées sur le véhicule, cette technologie facilitera les investigations des forces de l’ordre et participera à la lutte contre les usurpations de numéro d’immatriculation, et plus particulièrement contre les « doublettes parfaites ».
Vous l’aurez compris, monsieur le président, les doublettes évoquées ici n’ont rien à voir avec la pétanque !